Rapport spécial
16 2021

Politique agricole commune et climat
La moitié des dépenses de l'UE liées au climat relèvent de la PAC, mais les émissions d'origine agricole ne diminuent pas

À propos du rapport Au cours de la période 2014‑2020, la Commission a alloué plus d'un quart du budget de la politique agricole commune à l'atténuation du changement climatique et à l'adaptation à celui-ci.

Nous avons examiné si la PAC avait servi à soutenir des pratiques d'atténuation du changement climatique pouvant réduire les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole. Nous avons constaté que les 100 milliards d'euros de financements de la PAC consacrés à l'action pour le climat avaient eu une faible incidence sur ces émissions, dont le volume n'a pas beaucoup évolué depuis 2010. La PAC finance essentiellement des mesures à faible potentiel d'atténuation du changement climatique. Elle ne vise pas à limiter ou à réduire l'élevage (responsable de 50 % des émissions d'origine agricole) et soutient les agriculteurs qui cultivent des tourbières asséchées (cause de 20 % de ces émissions).

Nous recommandons à la Commission d'agir pour que la PAC réduise les émissions dues à l'agriculture, de prendre des mesures pour diminuer les émissions provenant de la culture de sols organiques drainés et de rendre régulièrement compte de la contribution de la PAC à l'atténuation du changement climatique.

Rapport spécial de la Cour des comptes européenne présenté en vertu de l'article 287, paragraphe 4, deuxième alinéa, du TFUE.

Cette publication est disponible, au format ci-après, dans 23 langues de l'UE:
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Synthèse

I

Depuis 2013, l'action pour le climat fait partie des principaux objectifs de la politique agricole commune (PAC). La Commission a alloué plus de 100 milliards d'euros (soit plus d'un quart de l'ensemble du budget de la PAC) à l'atténuation du changement climatique et à l'adaptation à celui-ci pendant la période de programmation 2014‑2020.

II

L'UE joue un rôle essentiel dans l'atténuation de l'incidence du secteur agricole sur le changement climatique dans la mesure où elle fixe des normes environnementales et cofinance la plupart des dépenses agricoles des États membres. Nous avons décidé d'auditer la PAC parce qu'une grande partie de son budget est consacrée à l'atténuation du changement climatique et à l'adaptation à celui-ci et parce que le climat et la politique agricole sont étroitement liés. Nous estimons que nos constatations seront utiles dans le contexte de l'objectif de neutralité climatique de l'Union à l'horizon 2050.

III

Nous avons examiné si la PAC avait servi à soutenir des pratiques d'atténuation du changement climatique susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole durant la période de programmation 2014‑2020. Nous avons également cherché à déterminer si la PAC de cette période avait davantage incité à recourir à des pratiques d'atténuation efficaces que celle de la période 2007‑2013. Nous avons articulé nos constatations autour des principales sources de ces émissions, à savoir l'élevage, la fertilisation des sols et l'utilisation des terres.

IV

Dans l'ensemble, nous avons constaté que les 100 milliards d'euros de financements de la PAC consacrés à l'action pour le climat lors de la période de programmation 2014‑2020 ont eu une faible incidence sur les émissions agricoles, dont le volume n'a pas beaucoup évolué depuis 2010. La plupart des mesures d'atténuation soutenues par la PAC ont un faible potentiel d'atténuation du changement climatique. Rares sont les mesures à fort potentiel d'atténuation du changement climatique financées par la PAC.

V

Les émissions provenant de l'élevage, qui sont principalement dues aux bovins et qui représentent environ la moitié des émissions d'origine agricole, sont restées stables depuis 2010. La PAC ne prévoit toutefois pas de limitation du cheptel, ni d'incitation à le réduire. Certaines de ses mesures de marché promeuvent la consommation de produits d'origine animale, qui n'a pas baissé depuis 2014.

VI

Les émissions dues aux engrais chimiques et aux effluents, qui représentent près d'un tiers des émissions agricoles, ont augmenté entre 2010 et 2018. La PAC soutient des pratiques susceptibles de réduire l'utilisation d'engrais, telles que l'agriculture biologique et la culture de légumineuses à grains. Nous avons cependant constaté que l'incidence de ces pratiques sur les émissions de gaz à effet de serre n'était pas établie. En revanche, des pratiques qui s'avèrent plus efficaces sont moins financées.

VII

La PAC soutient les agriculteurs qui cultivent des tourbières asséchées, lesquelles émettent 20 % des gaz à effet de serre d'origine agricole dans l'EU‑27. Bien qu'un soutien soit disponible au titre au développement rural pour les restaurer, il est rarement utilisé. En outre, selon les règles de la PAC, certaines activités menées sur les terres remises en eau sont inéligibles aux paiements directs. Le soutien de la PAC en faveur du boisement, de l'agroforesterie et de la conversion de terres arables en prairies permanentes n'a pas été renforcé en 2014‑2020 par rapport à la période 2007‑2013.

VIII

Malgré la révision à la hausse des ambitions climatiques, les règles de la conditionnalité et les mesures de développement rural ont peu évolué par rapport à celles de la période précédente. Par conséquent, ces régimes n'ont pas incité les agriculteurs à adopter des mesures d'atténuation du changement climatique qui soient efficaces. Le régime de verdissement était censé renforcer la performance environnementale de la PAC, mais son incidence sur le climat a été marginale.

IX

Nous recommandons à la Commission:

  1. d'agir pour que la PAC réduise les émissions dues à l'agriculture;
  2. de prendre des mesures pour réduire les émissions provenant de la culture de sols organiques drainés;
  3. de rendre régulièrement compte de la contribution de la PAC à l'atténuation du changement climatique.

Introduction

Émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole

01

Les émissions de gaz à effet de serre liées à la production alimentaire représentent 26 % des émissions mondiales1. La figure 1 montre qu'elles proviennent pour l'essentiel de l'agriculture. Dans sa stratégie «De la ferme à la table», la Commission, se fondant sur des lignes directrices du GIEC couvrant uniquement les activités agricoles, a indiqué (en omettant de prendre en compte l'impact des denrées alimentaires d'origine animale importées) que «l'agriculture est responsable de 10,3 % des émissions de GES de l'Union et [que] près de 70 % de ceux-ci sont imputables au secteur de l'élevage».

Figure 1

Émissions mondiales de gaz à effet de serre liées à la production alimentaire

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de Poore, J. et Nemecek, T.,Reducing food's environmental impacts through producers and consumers, 2018.

02

Pour déclarer les gaz à effet de serre émis sur leur territoire, les États membres se fondent sur les données d'activité liées aux sources d'émissions (par exemple les types d'animaux et leur nombre), assorties des facteurs d'émission correspondants. La figure 2 montre trois grands gaz à effet de serre émis par l'agriculture, leurs principales sources dans l'UE ainsi que la part de ces sources dans les émissions agricoles totales, qui représentent 13 % de l'ensemble des émissions de gaz à effet de serre de l'EU‑27 (compte tenu également de 2,7 % d'émissions supplémentaires résultant de l'utilisation des terres et des absorptions dues aux terres cultivées et aux prairies). Les autres émissions, qui n'apparaissent pas dans la figure 2, résultent de la consommation de carburant par les engins agricoles et du chauffage des bâtiments, qui représentent environ 2 % de l'ensemble des émissions de l'EU‑27.

Figure 2

Principales sources d'émissions de gaz à effet de serre (en équivalents CO2)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre de l'EU‑27 pour 2018 (visionneuse de données sur les gaz à effet de serre, Agence européenne pour l'environnement (AEE)).

03

L'agriculture, et en particulier l'élevage du bétail, entraîne nécessairement l'émission de gaz à effet de serre. Certaines pratiques d'utilisation des terres offrent des possibilités de réduire les émissions ou d'absorber le dioxyde de carbone (CO2) de l'atmosphère pour l'emmagasiner dans le sol et dans la biomasse (c'est-à-dire dans les plantes et les arbres). Parmi ces pratiques figurent la restauration des tourbières asséchées et le boisement.

04

La figure 3 montre comment les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole ont évolué de 1990 à 2018. Elles ont reculé de 25 % entre 1990 et 2010, principalement en raison d'une baisse dans l'utilisation des engrais et d'une diminution du nombre d'animaux, qui ont été le plus marquées entre 1990 et 1994. Les émissions n'ont plus baissé depuis 2010.

Figure 3

Émissions nettes de gaz à effet de serre d'origine agricole dans l'EU‑27 depuis 1990

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre de l'EU‑27 pour les années 1990 à 2018 (visionneuse de données de l'AEE sur les gaz à effet de serre).

Politique de l'UE en matière de changement climatique

05

La réponse de l'UE au changement climatique repose sur deux stratégies, à savoir l'atténuation et l'adaptation. L'atténuation consiste à réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par les activités humaines ou à absorber les gaz à effet de serre présents dans l'atmosphère. L'adaptation fait référence à la démarche d'ajustement au climat actuel ou à venir, ainsi qu'à ses conséquences. Le présent rapport est essentiellement consacré à l'atténuation.

06

En 1997, l'UE a signé le protocole de Kyoto. Elle s'est alors engagée à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 20 % à l'horizon 2020 par rapport au niveau de référence de 1990. En 2015, l'UE est devenue partie à l'accord de Paris, ce qui a poussé à la hausse ses ambitions en matière de réduction des émissions. Le cadre stratégique actuel de l'UE vise à réduire ses émissions de gaz à effet de serre de 40 % à l'horizon 2030. La Commission a proposé de relever cet objectif à 55 % et d'atteindre la neutralité carbone pour 20502.

07

Jusqu'en 2020, le cadre de l'UE relatif à l'atténuation du changement climatique comprenait deux axes principaux, à savoir le système d'échange de quotas d'émission et la législation sur la répartition de l'effort, qui couvraient ensemble 95 % des émissions de gaz à effet de serre de l'UE en 2018 (voir figure 4).

Figure 4

Cadre de l'UE relatif à l'atténuation du changement climatique en 2018

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du rapport n° 13/2020 de l'AEE intitulé Trends and projections in Europe 2020.

08

En ce qui concerne la législation sur la répartition de l'effort, l'UE s'est fixé des objectifs de réduction des émissions de 10 % pour 20203 et de 30 % pour 20304 (par rapport à 2005). La figure 5 montre les objectifs fixés pour 2020 pour chacun des 27 États membres, objectifs qui tiennent compte du revenu par habitant. Chaque État membre décide de la manière d'atteindre son objectif national, et de la contribution éventuelle de son secteur agricole à cet effort.

Figure 5

Objectifs nationaux pour 2020 au titre de la législation sur la répartition de l'effort, par rapport aux niveaux d'émissions de 2005

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de l'annexe II de la décision n° 406/2009/CE, dont la référence figure dans la note de bas de page n° 3.

09

Selon les estimations concernant les gaz à effet de serre émis en 2019 dans les secteurs relevant de la répartition de l'effort, 14 des 27 États membres ont enregistré cette année-là un niveau d'émissions inférieur à leur objectif national pour 20205. Nous avons comparé, pour chaque État membre, l'écart par rapport à l'objectif de réduction des émissions pour la première période (2013‑2020) à celui prévu pour la deuxième période (2021‑2030). Pour 2021, nous avons utilisé les chiffres correspondant à la dernière estimation disponible pour 2019. Comme le montre la figure 6, les objectifs fixés pour 2030 seront beaucoup plus difficiles à atteindre pour l'UE.

Figure 6

Écarts à combler pour atteindre les objectifs fixés pour 2020 et pour 2030 au titre de la législation sur la répartition de l'effort

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de l'annexe du rapport d'étape sur l'action climatique de l'UE présenté par la Commission en novembre 2020 (tableau 6), de la décision d'exécution (UE) 2020/2126 de la Commission du 16 décembre 2020 et du règlement (UE) 2018/842 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018.

10

En 2011, la Commission a choisi d'intégrer la dimension climatique dans le budget de l'Union («intégration des questions climatiques»). Il a donc fallu intégrer les mesures d'atténuation et d'adaptation (l'«action pour le climat») dans les politiques de l'UE et suivre les fonds dédiés à ces mesures pour faire en sorte qu'au moins 20 % du budget de l'UE de la période 2014‑2020 soient consacrés à l'action pour le climat6.

Le rôle de la PAC 2014-2020 dans l'action pour le climat

11

Actuellement, la politique agricole commune (PAC) de l'UE poursuit trois grands objectifs: une production alimentaire viable, une gestion durable des ressources naturelles et un développement territorial équilibré. Sa gestion fait intervenir aussi bien la Commission que les États membres. Dans les États membres, les organismes payeurs sont chargés de gérer les demandes d'aide, de contrôler les demandeurs, d'effectuer les paiements et d'assurer le suivi de l'utilisation des fonds. Quant à la Commission, elle définit une grande partie du cadre relatif aux dépenses, elle assure le contrôle et le suivi des travaux des organismes payeurs et elle est responsable de l'utilisation des fonds de l'UE. L'aide au titre de la PAC est répartie en trois volets:

  • les paiements directs, qui visent à fournir aux agriculteurs une aide au revenu;
  • les mesures de marché, qui visent à faire face aux situations de marché difficiles telles qu'une chute abrupte des prix;
  • les mesures de développement rural définies dans des programmes nationaux et régionaux, qui visent à répondre aux besoins et problèmes spécifiques des zones rurales.
12

Depuis 2014, l'action pour le climat7 fait partie des neuf objectifs spécifiques à l'aune desquels la Commission évalue la performance de la politique agricole commune. La Commission a estimé que l'intégration des questions climatiques lui permettrait d'allouer 103,2 milliards d'euros (45,5 milliards au titre des paiements directs et 57,7 milliards à celui des mesures de développement rural) à l'atténuation du changement climatique et à l'adaptation à ce phénomène dans le domaine de l'agriculture durant la période 2014‑2020 (figure 7). Ce montant représente 26 % du budget de la PAC et près de 50 % des dépenses totales consacrées par l'UE à l'action pour le climat8. Dans les informations qu'elle communique sur les dépenses en faveur du climat, la Commission ne fait pas de distinction entre atténuation et adaptation.

Figure 7

Principales mesures de la PAC employées dans le cadre de l'action pour le climat, selon la Commission (2014‑2020)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du suivi de l'action pour le climat assuré par la Commission.

13

Bon nombre de mesures dont la contribution à l'action pour le climat fait l'objet d'un suivi de la part de la Commission visent principalement à favoriser la biodiversité, à améliorer la qualité de l'eau et de l'air ou à répondre à des besoins économiques et sociaux.

14

Dans notre rapport spécial n° 31/2016, nous avons souligné que la Commission avait surestimé la part du budget de la PAC consacrée à l'action pour le climat, et qu'un chiffre de 18 % correspondrait à une estimation plus prudente que les 26 % avancés par la Commission. La différence était principalement due à une surestimation de l'incidence de la conditionnalité sur l'atténuation du changement climatique, et au fait que certains coefficients affectés n'étaient pas conformes au principe de prudence. La Commission a reconnu que la pertinence de certaines mesures pour le climat pouvait être surestimée ou sous-estimée avec la méthodologie actuelle, mais elle considérait comme adéquate son approche de suivi pour évaluer la part des dépenses agricoles et de développement rural consacrées à l'action pour le climat.

15

L'objectif à long terme de la Commission pour la PAC 2014‑2020 est de réduire les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole9. La Commission n'a pas chiffré l'objectif de réduction à atteindre.

Stratégie de la Commission pour intensifier les efforts d'atténuation du changement climatique

16

Le 1er juin 2018, la Commission a présenté des propositions législatives relatives à la PAC 2021‑2027. Elle a déclaré que la nouvelle PAC placerait «la barre encore plus haut» en matière de protection de l'environnement et du climat10. Elle a proposé un nouveau modèle fondé sur la performance, qui accroît la part de responsabilité des États membres dans la conception des mesures de la PAC et leur obligation de rendre compte à cet égard. Les États membres devront décrire ces mesures dans leurs «plans stratégiques relevant de la PAC», qui devront être approuvés par la Commission.

17

En décembre 2019, la Commission a présenté le pacte vert pour l'Europe, qui sert de feuille de route pour «faire de l'Europe le premier continent neutre sur le plan climatique à l'horizon 2050». Pour la période 2021‑2027, la Commission a proposé de consacrer 25 % du budget de l'Union à l'action pour le climat, mais le Conseil a porté cet objectif à 30 %11. La figure 8 montre les stratégies et les propositions législatives publiées par la Commission en 2020 qui se rapportent aux actions visant à parvenir à la neutralité climatique à l'horizon 2050.

18

En décembre 2020, la Commission a émis des recommandations à l'intention des États membres en vue de l'élaboration de leurs propositions de plans stratégiques relevant de la PAC12. Elle leur a par exemple suggéré d'appliquer des programmes écologiques pour remettre en eau les tourbières drainées ainsi que pour promouvoir l'agriculture de précision et l'agriculture de conservation (sans ou avec peu de labour). Dans notre rapport spécial n° 18/2019 sur les émissions de gaz à effet de serre de l'UE, nous avons recommandé à la Commission de s'assurer que les plans stratégiques pour l'agriculture et l'utilisation des terres contribuaient à la réalisation des objectifs de réduction à l'horizon 2050, et de vérifier si les États membres établissaient des politiques et des mesures appropriées pour ces secteurs.

Figure 8

Stratégies, propositions et accords de l'UE concernant le changement climatique et l'agriculture, publiés en 2020

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des communications de la Commission.

Étendue et approche de l'audit

19

Nous avons décidé de réaliser l'audit objet du présent rapport parce que la Commission a consacré près de 26 % du budget de la PAC (103 milliards d'euros) à l'action pour le climat au cours de la période de programmation 2014‑2020. Par ailleurs, le climat était l'un des thèmes majeurs abordés lors des discussions politiques sur l'avenir de la PAC, et des mesures de lutte contre le changement climatique doivent être prises pour atteindre l'objectif de développement durable des Nations unies n° 13. Nous estimons que nos constatations seront utiles dans le contexte de l'objectif de neutralité climatique de l'Union à l'horizon 2050.

20

Nous avons examiné si la PAC 2014‑2020 avait servi à soutenir des pratiques d'atténuation du changement climatique susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre. Nous avons également cherché à déterminer si la PAC de cette période avait davantage incité à recourir à des pratiques d'atténuation efficaces que celle de la période 2007‑2013. Nous avons centré nos travaux sur les principales sources d'émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole que sont l'élevage et le stockage des effluents d'élevage, l'utilisation d'engrais chimiques et d'effluents, la culture des sols organiques et la conversion des prairies et des terres cultivées.

21

Notre audit n'a pas porté sur les projets d'atténuation du changement climatique financés au titre d'Horizon 2020 et de LIFE. Nous avons également exclu du champ de notre audit les émissions liées aux carburants utilisés en agriculture.

22

Nous avons recueilli nos éléments probants grâce:

  • à un examen de données concernant les émissions de gaz à effet de serre de l'EU‑27, l'élevage, les variétés cultivées, l'utilisation d'engrais et les programmes de développement durable, ainsi qu'à un examen de données issues des rapports de la Commission sur les paiements directs;
  • à des entretiens avec des représentants des agriculteurs et d'ONG à vocation environnementale et climatique, ainsi que d'autorités nationales irlandaises, françaises et finlandaises sélectionnées sur la base de la part des émissions d'origine agricole dans leur pays, des activités agricoles qui y sont menées et des approches adoptées en matière d'atténuation du changement climatique et de stockage du carbone;
  • à une revue d'études scientifiques évaluant l'efficacité des pratiques et technologies d'atténuation;
  • à des examens documentaires concernant les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole des 27 États membres et les mesures prises dans le cadre de la PAC pour réduire ces émissions ou pour séquestrer le carbone durant la période 2014‑2020;
  • à des échanges avec des experts en agriculture et en changement climatique, le but étant d'enrichir nos connaissances et d'obtenir l'avis de ces experts sur nos premières conclusions.

Observations

23

Nous avons réparti nos observations en quatre sections. Les trois premières sections sont consacrées à l'évaluation de l'incidence de la PAC 2014‑2020 sur les principales sources d'émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole que sont l'élevage, l'utilisation d'engrais chimiques et d'effluents d'élevage et l'exploitation des sols. La dernière section traite de la conception de la PAC 2014‑2020 et de son potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole.

La PAC n'a pas permis de réduire les émissions de l'élevage

24

Nous avons examiné si les émissions de gaz à effet de serre dues à la digestion des animaux d'élevage et au stockage des effluents d'élevage avaient globalement baissé au cours de la période couverte par la PAC 2014‑2020. Nous avons évalué l'étendue du soutien de la PAC en faveur des pratiques qui permettent d'atténuer efficacement ces émissions. Nous avons également cherché à savoir si certains régimes d'aide de la PAC avaient conduit à des augmentations des émissions de gaz à effet de serre.

25

Les émissions de gaz à effet de serre de l'EU‑27 dues à l'élevage n'ont pas baissé entre 2010 et 2018. La digestion des animaux représente 78 % des émissions de l'élevage, tandis que le stockage des effluents génère les 22 % restants. Les émissions des bovins laitiers et à viande représentent 77 % des émissions de l'élevage (voir figure 9).

Figure 9

Sources des émissions de l'élevage en 2018

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre de l'EU‑27.

La réduction de la production animale ne figure pas parmi les mesures de la PAC

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Dans la plupart des États membres, les émissions de l'élevage n'ont pas évolué. Seules la Grèce, la Croatie et la Lituanie ont enregistré des réductions importantes de ces émissions entre 2010 et 2018 (voir figure 10). Ces réductions étaient, pour l'essentiel, dues à de fortes baisses (environ 30 %) du nombre de vaches laitières plutôt que le résultat de politiques d'atténuation ciblées relevant de la PAC. Dans ces trois pays, le manque de compétitivité a joué un rôle clé dans le recul des émissions. L'Irlande, la Hongrie et la Pologne ont quant à elles vu leurs émissions augmenter substantiellement.

Figure 10

Tendances des émissions de l'élevage de 2010 à 2018

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre des États membres.

27

Réduire la production animale entraînerait une baisse des émissions dues à la digestion des animaux d'élevage et au stockage des effluents, mais aussi des engrais utilisés pour produire des aliments pour animaux. Toute réduction de la production animale globale dans l'UE entraînerait une baisse des gaz à effet de serre émis sur le territoire. Son incidence nette dépendrait des changements en matière de consommation de produits d'origine animale. Si cette réduction se traduisait par davantage d'importations, cela donnerait lieu à une certaine «fuite de carbone»13. La PAC ne prévoit toutefois pas de limitation du cheptel, ni d'incitation à le réduire. Ses mesures de marché tendent à promouvoir la consommation de produits d'origine animale, qui n'a pas baissé depuis 2014 (voir figure 11).

Figure 11

La consommation annuelle par habitant de produits d'origine animale ne baisse pas

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du document de la Commission de 2020 intitulé Prospects for Agricultural Markets in the EU 2020‑2030.

28

Les tendances présentées ci-dessus sont fondées sur l'approvisionnement des consommateurs et incluent donc les aliments gaspillés. Comme nous l'avons indiqué dans notre rapport spécial n° 34/2016, il est communément admis qu'un tiers environ des aliments destinés à la consommation humaine est perdu ou gaspillé à l'échelle mondiale. Dans ce même rapport, nous avons conclu que la PAC avait un rôle à jouer dans la lutte contre le gaspillage alimentaire et recommandé d'intégrer cette question dans le réexamen de la politique agricole commune.

29

Dans sa stratégie «De la ferme à la table», la Commission a annoncé qu'elle réviserait le programme de promotion de l'UE en faveur des produits agricoles afin de favoriser la production et la consommation durables. Le 22 décembre 2020, elle a publié un document de travail de ses services14 dans lequel elle évalue la politique de promotion. Elle poursuit la révision de la politique, dans l'intention de proposer des modifications de la législation en 2022. Dans la stratégie «De la ferme à la table», elle étudie comment l'Union pourrait utiliser son programme de promotion, à l'avenir, pour soutenir les méthodes de production animale les plus durables et les plus efficaces au regard des émissions de carbone, ainsi que pour promouvoir le passage à un régime alimentaire plus végétal.

30

Dans le cadre de notre revue d'études, nous n'avons relevé aucune pratique efficace et approuvée qui permette de réduire sensiblement les émissions de l'élevage dues à la digestion des animaux sans réduire la production (certains additifs destinés à l'alimentation animale pourraient s'avérer efficaces, mais ils n'ont pas été agréés). Bon nombre de pratiques en matière de sélection, d'alimentation et de santé animale ainsi que de gestion de la fertilité n'offrent que la possibilité d'une atténuation lente et marginale. Certaines d'entre elles favorisent l'expansion de la production et sont donc susceptibles d'accroître les émissions nettes (encadré 1).

Encadré 1

L'effet de rebond et les émissions de l'élevage

Les innovations dans les pratiques de gestion et la technologie peuvent accroître l'efficacité de la production agricole sur le plan des émissions de gaz à effet de serre. Les progrès réalisés dans la sélection des bovins laitiers ont par exemple permis de faire baisser les émissions par litre de lait produit, grâce à un meilleur rendement laitier par animal. Toutefois, ces gains d'efficacité ne se traduisent pas directement par une baisse des émissions globales. En effet, les avancées technologiques dans le secteur de l'élevage ont également poussé à la baisse le coût de production du litre de lait, ce qui a entraîné une expansion de la production. À cause de cet effet, appelé «effet de rebond», les réductions des émissions de gaz à effet de serre sont plus modestes qu'elles ne l'auraient été sans expansion de la production. Les émissions supplémentaires liées à l'expansion de la production pouvant même dépasser les réductions obtenues grâce à l'amélioration de l'efficacité, l'innovation entraîne une augmentation des émissions globales15.

31

Nous avons relevé quatre pratiques efficaces pour réduire les émissions dues au stockage des effluents d'élevage (acidification et refroidissement des effluents, recouvrement imperméable des effluents stockés et production de biogaz à partir des effluents). Plusieurs États membres ont octroyé une aide de la PAC en faveur de ces pratiques à un petit nombre d'exploitations (tableau 1).

Tableau 1

États membres ayant octroyé aux agriculteurs un soutien de la PAC en faveur des pratiques d'atténuation visant à réduire les émissions dues au stockage des effluents d'élevage durant la période 2014‑2019

Pratique États membres Exploitations bénéficiant du soutien
Acidification du lisier Danemark 29
Italie 1
Pologne 2
Allemagne, France, Lettonie et Lituanie Données imprécises
Refroidissement des effluents Danemark 30
Estonie 1
Pologne 2
Finlande 1
France, Italie et Autriche Données imprécises
Recouvrement imperméable Belgique 13
Danemark 503
Allemagne 829
Estonie 30
Espagne 344
Italie 308
Luxembourg 0
Hongrie 374
Malte 16
Pologne 275
Slovénie 45
Slovaquie 7
Finlande 30
Suède 5
France, Lettonie, Lituanie, Autriche et Roumanie Données imprécises
Production de biogaz à partir d'effluents Belgique 60
Grèce 6
Espagne 0
France 51
Croatie 0
Italie 20
Hongrie 129
Finlande 22
Suède 20
Lituanie, Pologne et Roumanie Données imprécises

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des informations fournies par les États membres.

Certaines mesures de la PAC se soldent par un maintien voire une augmentation des émissions générées par l'élevage

32

En moyenne, les éleveurs de bovins spécialisés dépendent des paiements directs pour 50 % au moins de leur revenu16. Leur niveau de dépendance est donc plus élevé que celui des producteurs de cultures arables.

33

Tous les États membres à l'exception de l'Allemagne octroient une partie (le plus souvent de 7 % à 15 %) de leurs paiements directs17 sous la forme d'un soutien couplé facultatif (SCF), dont 74 % servent à soutenir l'élevage de bétail (figure 12). Le SCF favorise le maintien des cheptels, dans la mesure où les agriculteurs recevraient moins d'argent s'ils réduisaient leurs effectifs. À l'échelle de l'UE, le SCF représente 10 % des paiements directs (soit 4,2 milliards d'euros par an)18.

Figure 12

Ventilation du soutien couplé facultatif par secteur

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du document de la Commission intitulé Voluntary Coupled Support, 2020, p. 3.

34

Selon une étude de 202019, les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole de l'UE (hors émissions résultant de l'utilisation des terres) baisseraient de 0,5 % si le soutien couplé facultatif en faveur des secteurs bovin, ovin et caprin était réaffecté aux paiements de base sur les terres agricoles. Une autre étude, réalisée en 201720, a montré que sans les paiements directs, les émissions d'origine agricole baisseraient de 2,5 % et que cette baisse découlerait à 84 % de la réduction de la production de viande bovine et de produits laitiers et de la diminution correspondante dans l'utilisation d'engrais sur les pâturages. Dans une étude de 201721, la Commission a par ailleurs estimé que les émissions dues à l'agriculture baisseraient de 4,2 % si les paiements directs prenaient fin, et de 5,8 % si le soutien au développement rural était également aboli. Selon cette étude, environ 7 % de la surface agricole deviendraient alors disponibles pour des mesures d'atténuation reposant sur l'utilisation des terres, telles que le boisement. Ces pourcentages de réduction ne tiennent toutefois pas compte de l'éventuel effet de fuite de carbone (voir point 27), qui, selon les trois études, irait de 48 % à près de 100 % (s'il n'y a pas d'entraves au commerce).

35

Enfin, une étude de 202022 a conclu que les émissions baisseraient de 21 % dans l'UE si la moitié environ du budget des paiements directs était versée aux agriculteurs en échange d'une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Cette baisse serait due pour les deux tiers à des changements dans les modes de production, les viandes bovine, ovine et caprine et la production de fourrage accusant les reculs les plus prononcés. Le dernier tiers proviendrait de l'adoption de pratiques d'atténuation telles que le recours aux technologies dans le secteur laitier, à la méthanisation dans la filière porcine et à la mise en jachère des tourbières. Ces avantages seraient contrebalancés ailleurs dans le monde par une augmentation qui correspondrait à 4 % des niveaux actuels d'émissions d'origine agricole dans l'UE. La réduction nette serait donc de 17 %.

36

Aux émissions susmentionnées s'ajoutent celles dues à la déforestation associée à la production d'aliments pour animaux, en particulier le soja23. Si l'on tient compte des importations, la part des émissions attribuable à la production de produits animaux consommés dans l'UE augmente encore (par rapport aux émissions causées directement par l'agriculture dans l'UE). Importations comprises, les produits animaux représentent, selon les estimations, 82 % de l'empreinte carbone (voir figure 13), mais seulement 25 % des calories du régime alimentaire moyen de la population de l'Union24.

Figure 13

Empreinte carbone des aliments qui composent le régime alimentaire

Source: Sandström, V. et al., The role of trade in the greenhouse gas footprints of EU diets, Elsevier, Global Food Security, volume 19, décembre 2018, p. 55 (figure réalisée à partir des données communiquées par V. Sandström).

Les émissions liées à l'épandage d'engrais et d'effluents d'élevage augmentent

37

Nous avons examiné si les mesures relevant de la PAC 2014‑2020 avaient permis de réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par l'épandage d'engrais chimiques et d'effluents.

38

L'épandage d'engrais chimiques et d'effluents d'élevage et les déjections des animaux en pâturage sont responsables de la majeure partie des émissions de gaz à effet de serre produites par les nutriments du sol. Entre 2010 et 2018, les émissions imputables aux nutriments du sol ont augmenté de 5 %. Cette augmentation s'explique avant tout par un recours accru aux engrais, tandis que les effluents d'élevage, l'autre source majeure d'émissions, sont restés plus stables (voir figure 14).

Figure 14

Épandage d'engrais chimiques et d'effluents d'élevage

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre de l'EU‑27.

39

Entre 2010 et 2018, les émissions imputables aux engrais chimiques et aux effluents d'élevage ont augmenté dans huit États membres (voir figure 15). Les hausses les plus importantes (supérieures à 30 %) ont été enregistrées en Bulgarie, en Tchéquie, en Hongrie, en Roumanie et en Slovaquie. Il n'y a qu'en Grèce et à Chypre que ces émissions ont clairement reculé. Ces tendances nationales résultent presque toutes de changements dans l'utilisation des engrais chimiques. Parmi les États membres qui n'ont pas connu de changement important voire pas de changement du tout figurent ceux dont les émissions de gaz à effet de serre imputables à l'agriculture sont les plus élevées par hectare de surface agricole utile25.

Figure 15

Tendances des émissions générées par les nutriments du sol de 2010 à 2018

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre des États membres.

Les dérogations à la directive sur les nitrates annulent en partie son incidence positive sur les émissions générées par l'épandage d'effluents

40

Les subventions n'ayant pas été liées à une réduction de la production animale (points 26 à 34), les quantités d'effluents d'élevage n'ont pas baissé (figure 14). Le maintien du niveau de la production animale explique aussi pourquoi le recours aux engrais reste élevé, les produits animaux nécessitant davantage d'azote que les aliments d'origine végétale26.

41

Dans le cadre de la PAC, les agriculteurs sont soumis aux règles de la «conditionnalité» (voir point 77). L'exigence réglementaire en matière de gestion (ERMG) 1, concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles, couvre le respect de la directive sur les nitrates27, qui s'applique à tous les agriculteurs, qu'ils bénéficient ou non d'un soutien de la PAC. La directive sur les nitrates impose un recours équilibré aux engrais, limite la quantité d'effluents pouvant être épandus et prévoit des périodes où un tel épandage est interdit. Une étude de 2011 réalisée pour le compte de la Commission28 a révélé qu'en 2008, sans la directive sur les nitrates, les émissions totales de N2O dans l'UE auraient été supérieures de 6,3 %, essentiellement en raison d'une augmentation des pertes totales d'azote par lixiviation vers les eaux souterraines et de surface.

42

En 2020, quatre pays (la Belgique, le Danemark, l'Irlande et les Pays-Bas) bénéficiaient d'une dérogation à la directive sur les nitrates pour ce qui concerne la limitation de l'épandage d'effluents. Ces quatre pays font partie des plus gros émetteurs de gaz à effet de serre par hectare de surface agricole utile29. Les dérogations peuvent prévoir des conditions susceptibles de contrebalancer l'effet négatif de l'épandage d'une quantité d'effluents supérieure à celle normalement autorisée. Selon les estimations de l'étude de 2011, les dérogations s'accompagnent d'une augmentation de jusqu'à 5 % des émissions d'azote gazeux et de jusqu'à 2 % pour le N2O.

43

Nous avons analysé les informations transmises par les autorités irlandaises au sujet des dérogations à la directive sur les nitrates (figure 16). Depuis 2014, en Irlande, la superficie des terres bénéficiant d'une dérogation a augmenté de 34 %, tandis que le nombre d'animaux dans les exploitations bénéficiant d'une dérogation a grimpé de 38 %. Au cours de la même période, les émissions dues aux engrais chimiques ont augmenté de 20 %, celles dues à l'épandage d'effluents sur les sols, de 6 % et les émissions indirectes dues à la lixiviation et au ruissellement, de 12 %.

Figure 16

Évolution de la superficie des terres irlandaises bénéficiant de dérogations à la directive sur les nitrates, ainsi que du nombre d'animaux correspondant

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du rapport intitulé Nitrates Derogation Review 2019: report of the Nitrates Expert Group, juillet 2019, p. 12.

44

Dans le cadre de notre revue d'études, nous n'avons relevé aucune pratique efficace qui permette de réduire les émissions de gaz à effet de serre générées par l'épandage d'effluents, à part la réduction de la quantité épandue. La PAC soutient des pratiques consistant à épandre des effluents sur ou dans les sols (par exemple l'utilisation de tubes traînés ou de sabots traînés). Ces pratiques peuvent être efficaces lorsqu'il s'agit de réduire les émissions d'ammoniac, mais pas celles de gaz à effet de serre, qu'elles peuvent même pousser à la hausse30.

La PAC n'a pas réduit l'utilisation des engrais chimiques

45

La PAC soutient un certain nombre de pratiques agricoles destinées à réduire l'utilisation des engrais. Aux points suivants, nous examinons cinq pratiques agricoles et le soutien de la PAC correspondant pour la période 2014‑2019 (voir tableau 2 et points 46 à 51 pour l'évaluation de chacune de ces pratiques):

  • deux pratiques ayant bénéficié d'un soutien considérable de la PAC mais dont l'efficacité dans l'atténuation du changement climatique est incertaine selon notre revue d'études (l'agriculture biologique et la culture des légumineuses à grains);
  • trois pratiques que nous considérons comme efficaces pour atténuer le changement climatique, mais qui ont bénéficié d'un soutien minimal de la PAC (la culture des légumineuses fourragères, l'application d'azote à taux variable et l'utilisation d'inhibiteurs de nitrification).

Tableau 2

La PAC soutient rarement des pratiques d'atténuation du changement climatique se rapportant à l'utilisation des engrais chimiques

Pratique/technique Incidence de la PAC sur sa diffusion Efficacité dans l'atténuation du changement climatique
Agriculture biologique Modérée Incertaine
Légumineuses à grains (sur terres arables) Modérée Incertaine
Légumineuses fourragères (en prairie) Nulle ou minime Réelle
Application d'azote à taux variable Nulle ou minime Réelle
Inhibiteurs de nitrification Nulle ou minime Réelle

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des informations fournies par les États membres pour 2019.

La PAC a encouragé l'agriculture biologique et la culture de légumineuses à grains, mais l'incidence de ces pratiques sur l'utilisation des engrais est incertaine

46

L'utilisation d'engrais chimiques n'est pas autorisée en agriculture biologique. Cependant, le passage de l'agriculture conventionnelle à l'agriculture biologique n'entraîne pas forcément une réduction des émissions de gaz à effet de serre. Il existe deux grands scénarios de conversion, qui suscitent tous deux des doutes sur la question de savoir si l'expansion de l'agriculture biologique a réduit les émissions de gaz à effet de serre:

  • si un agriculteur conventionnel utilisant peu d'engrais (par exemple dans les zones de pâturages de montagne) passe à l'agriculture biologique, l'incidence sur les émissions sera faible;
  • si un agriculteur conventionnel utilisant plus d'engrais se convertit à l'agriculture biologique, les émissions de son exploitation s'en trouveront considérablement réduites. Toutefois, les rendements plus faibles en agriculture biologique peuvent inciter d'autres exploitations à utiliser davantage d'engrais ou de terres pour produire plus, et donc émettre plus31 (figure 17).

Figure 17

Les pratiques qui réduisent le rendement peuvent entraîner un transfert des émissions de gaz à effet de serre vers d'autres exploitations

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de l'article du World Resources Institute intitulé Regenerative Agriculture: Good for Soil Health, but Limited Potential to Mitigate Climate Change.

47

Le régime de soutien au développement rural de la PAC a contribué à faire passer la part de l'agriculture biologique de 5,9 % des terres agricoles de l'UE en 2012 à 8,5 % en 2019. Nous n'avons toutefois pu trouver aucun élément probant fiable concernant l'incidence de cette augmentation sur l'utilisation des engrais et des effluents ou sur les émissions de gaz à effet de serre.

48

Les légumineuses à grains requièrent moins d'engrais azotés que d'autres cultures parce qu'elles ont la capacité de «fixer» biologiquement l'azote de l'air. À l'exception du Danemark, tous les États membres ont octroyé une aide de la PAC en faveur de la production de légumineuses à grains au titre du verdissement, du soutien couplé facultatif ou du développement rural. Selon Eurostat, la part de la surface consacrée à la culture des légumineuses à grains est passée de 2,8 % de l'ensemble des terres agricoles de l'UE en 2010 à 3,8 % en 2018. La promotion des légumineuses à grains implique le même type d'arbitrages que celle de l'agriculture biologique. Si les légumineuses viennent remplacer des cultures peu gourmandes en engrais, l'impact sur la consommation de fertilisants ne sera pas très important. Et si elles prennent la place de cultures nécessitant plus d'engrais, un transfert des émissions vers d'autres exploitations risque de s'opérer (figure 17). Les données concernant l'incidence de la culture de légumineuses à grains soutenue par la PAC sur la consommation d'engrais ne sont pas disponibles au niveau des exploitations.

La PAC apporte un soutien limité à des pratiques d'atténuation efficaces

49

Les légumineuses fourragères telles que le trèfle et la luzerne peuvent être utilisées dans les prairies et requièrent moins d'engrais grâce à leur capacité à fixer l'azote de l'air. Les légumineuses fourragères fixent de plus grandes quantités d'azote que les légumineuses à grains sans diminuer le rendement des herbages, ce qui permet d'éviter le risque de transfert des émissions vers d'autres exploitations. Sur la base des informations fournies par les États membres, nous estimons que cette pratique concerne au maximum 0,5 % des terres agricoles de l'UE.

50

L'application d'azote à taux variable est une technologie particulière de l'agriculture de précision consistant à adapter l'application d'engrais aux besoins des cultures dans un même champ. Selon le Centre commun de recherche32, cette technologie peut entraîner une réduction de l'utilisation d'engrais de l'ordre de 8 %, sans réduction des rendements33. Il ressort des informations fournies par les États membres que neuf d'entre eux (la Belgique, la Tchéquie, l'Allemagne, l'Espagne, l'Italie, la Lettonie, la Pologne, la Slovaquie et la Suède) ont octroyé des aides de la PAC en faveur de cette pratique durant la période 2015‑2019, qui ont bénéficié à 0,01 % des exploitations agricoles de l'Union.

51

Les inhibiteurs de nitrification sont des composés qui ralentissent la conversion de l'ammonium en nitrates, ce qui réduit les émissions de N2O. Leur utilisation peut constituer une technique d'atténuation efficace induisant une réduction estimée à 40 % environ des émissions directes de N2O sans effets sur les rendements. Ils sont particulièrement efficaces lorsqu'ils sont utilisés en association avec des inhibiteurs d'uréase34. Toutefois, dans le cadre de notre audit, nous avons constaté que l'utilisation d'inhibiteurs de nitrification n'avait pas été soutenue par la PAC.

Les mesures de la PAC n'ont pas donné lieu à une augmentation globale des quantités de carbone stocké dans les sols et les végétaux

52

Nous avons examiné si les mesures de la PAC 2014‑2020 avaient contribué à réduire les émissions résultant de l'utilisation des terres ou à augmenter la séquestration du carbone dans les prairies et les terres cultivées. Nous avons apprécié si la PAC avait soutenu des mesures d'atténuation pouvant contribuer de manière significative à l'atténuation du changement climatique et si elle en avait accru la diffusion.

53

Les émissions dues aux prairies et aux terres cultivées n'ont plus baissé depuis 2010. Si ces émissions sont restées stables ou ont fluctué sans marquer de tendance dans sept États membres, elles ont augmenté dans 12 pays et ont diminué dans huit autres (voir figure 18).

Figure 18

Tendances des émissions résultant de l'utilisation des terres de 2010 à 2018

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre des États membres.

54

Les émissions résultant de l'utilisation des terres dépendent du type de sol. Les sols organiques sont particulièrement riches en matières organiques et sont reconnus comme tels sur la base de critères spécifiques35. Tous les autres types de sols sont considérés comme des sols minéraux. La figure 19 montre que les sols organiques cultivés constituent la principale source des émissions résultant de l'utilisation des terres. Les émissions imputables aux sols organiques sont restées relativement stables, enregistrant en 2018 un niveau de 1 % inférieur à celui de 2010. Les absorptions dues aux prairies et aux terres cultivées occupant des sols minéraux ont baissé de plus de 8 % depuis 2010.

Figure 19

Émissions et absorptions dues aux sols organiques et minéraux

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires des gaz à effet de serre des États membres.

Près de la moitié des États membres ont pour objectif de protéger les tourbières vierges

55

Les tourbières sont un type de zones humides présentant une épaisse couche de sol organique, particulièrement riche en matières organiques. Dans l'EU‑27, elles recouvrent environ 24 millions d'hectares36 et stockent quelque 20 à 25 % de l'ensemble du carbone présent dans les sols (soit en moyenne 63 milliards de tonnes d'équivalent CO2)37. Lorsqu'elles restent vierges, elles font office de puits de carbone. En revanche, si elles sont asséchées, elles deviennent une source d'émissions de gaz à effet de serre. Au niveau de l'EU‑27, plus de 4 millions d'hectares de sols organiques drainés, y compris des tourbières, sont exploités en terres cultivées ou en prairies. Ces sols représentent environ 2 % de la surface totale des prairies et des terres cultivées dans l'Union, mais sont responsables de 20 % des émissions d'origine agricole de l'EU‑27. L'Allemagne, la Pologne et la Roumanie sont les plus gros émetteurs de CO2 provenant des sols organiques drainés de l'UE (voir figure 20).

Figure 20

Émissions de gaz à effet de serre provenant des sols organiques cultivés

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des données du Greifswald Mire Centre (extraites des inventaires 2017 de l'UE et présentées en 2019).

56

La figure 21 donne une estimation plus précise de la quantité annuelle de carbone perdue, à savoir libérée dans l'atmosphère, à partir des sols organiques. Elle montre aussi que les sols minéraux stockent chaque année du carbone supplémentaire, principalement grâce aux prairies, carbone qui est absorbé depuis l'atmosphère. Toutefois, cet effet d'atténuation est plus qu'annulé par les émissions provenant des sols organiques cultivés. Le potentiel offert par la restauration des tourbières est également reconnu dans une étude, qui a conclu que la remise en eaux d'à peine 3 % des terres agricoles de l'UE entraînerait une réduction de jusqu'à 25 % des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole38.

Figure 21

Les sols organiques ne représentaient que 2 % des terres de l'UE en 2018, mais étaient responsables de la plupart des émissions de gaz à effet de serre liées à l'utilisation des terres

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des inventaires 2020 de l'UE dressés au titre de la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques.

57

La PAC 2014‑2020 ne prévoyait pas de mesure à l'échelle de l'UE pour prévenir la conversion de tourbières vierges en terres agricoles. La Commission a proposé une norme de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE) relative à la protection des zones humides et des tourbières dans le cadre de la PAC 2021‑2027.

58

Douze États membres nous ont indiqué avoir encouragé la conservation des tourbières durant la période de programmation 2014‑2020 dans le cadre de la PAC. La superficie des terrains soumis à une interdiction de drainage (environ 600 000 ha) représente 2 % de la superficie totale des tourbières de l'UE. Sept des 12 États membres (l'Estonie, l'Irlande, l'Italie, la Lituanie, la Hongrie, la Pologne et la Slovénie) ont recouru au soutien au développement rural pour protéger ces zones. Les cinq autres (la Belgique, la Tchéquie, le Danemark, l'Allemagne et le Luxembourg) se sont appuyés sur les exigences en matière de conditionnalité ou de verdissement pour protéger les tourbières.

59

Six États membres (la Belgique, le Danemark, l'Allemagne, l'Italie, la Hongrie, et la Suède) nous ont informés avoir activé des mesures au titre du développement rural lors de la période de programmation 2014‑2020 pour soutenir la restauration des tourbières drainées. Cinq de ces six pays ont soutenu cette restauration sur un total de 2 500 hectares, tandis qu'en Allemagne, 113 bénéficiaires ont participé à un programme similaire. La Commission ne dispose pas d'informations sur les surfaces de tourbières restaurées.

60

Au lieu de garantir la protection et la conservation intégrales des tourbières, la PAC actuelle autorise les agriculteurs qui cultivent des sols organiques drainés à percevoir des paiements directs pour ces surfaces, malgré leur incidence négative sur le climat. En outre, si la restauration implique une absence d'activité agricole, les terrains pourraient ne plus être éligibles aux paiements directs, ce qui rendrait cette pratique peu attrayante pour les agriculteurs.

La PAC offre une protection limitée du carbone stocké dans les prairies

61

Selon les informations figurant dans les inventaires des gaz à effet de serre de l'UE pour 2018, les prairies sur sols minéraux ont absorbé 35 millions de tonnes d'équivalent CO2 présentes dans l'atmosphère. Cette contribution est due pour l'essentiel aux terres converties en prairies ces 20 dernières années. En outre, les prairies stockent davantage de carbone dans le sol que les terres cultivées, les racines de l'herbe emmagasinant plus de carbone et le sol étant moins perturbé. Le carbone ainsi accumulé est relâché dans l'atmosphère si les prairies sont converties en terres arables. Ce carbone peut aussi être en partie libéré si les prairies sont labourées périodiquement pour rétablir leur productivité. Empêcher la conversion des prairies en terres cultivées et le labourage périodique peut donc permettre d'éviter des émissions de gaz à effet de serre.

62

Les prairies en pâturage extensif peuvent séquestrer le carbone. La séquestration du carbone dans les pâturages peut donc atténuer à des degrés variables les émissions des animaux qui y paissent. La PAC 2007‑2013 prévoyait des mesures de maintien des prairies permanentes au titre des règles en matière de conditionnalité. Le régime de verdissement, instauré en 2015, prévoit en matière de protection des prairies permanentes deux exigences (figure 25) dont l'objectif principal est la préservation du stock de carbone39.

63

La première exigence impose aux États membres de maintenir un certain ratio entre les prairies permanentes et la surface totale déclarée au titre des paiements directs, déterminé par rapport au ratio de la période de référence. Il ressort d'une étude de 2017 que la surface de prairies permanentes protégée au titre de la PAC était plus grande avant 201540. Par ailleurs, les chiffres de la Commission pour 2019 indiquent que dans 21 pays et régions, le ratio des prairies permanentes a baissé; dans deux cas (le Land allemand de Sachsen-Anhalt et l'Estonie), cette baisse étant supérieure à la marge de 5 % autorisée, les États membres ont dû prendre des mesures correctrices.

64

Les diminutions de la surface de prairies permanentes, dues pour l'essentiel à la conversion en terres arables, génèrent des émissions de gaz à effet de serre. Qui plus est, nous avons signalé en 202041 que le labourage et le réensemencement des prairies permanentes, qui entraînent l'émission de gaz à effet de serre (CO2 et N2O)42, constituaient également une pratique courante (39 % des agriculteurs interrogés).

65

Comme l'exigence du verdissement relative au ratio de prairies permanentes n'interdit ni de réaffecter ces dernières à d'autres usages ni de les labourer et de les réensemencer, son efficacité en matière de la protection du carbone stocké dans les prairies s'en trouve considérablement réduite.

66

La deuxième exigence a introduit le concept de «prairies permanentes sensibles d'un point de vue environnemental» dans le but de protéger les zones écologiquement les plus fragiles du réseau Natura 2000 tant de la réaffectation à d'autres usages que du labour. Les États membres avaient la possibilité de désigner des zones supplémentaires ne faisant pas partie de ce réseau (par exemple des prairies sur sols organiques).

67

Huit États membres ont décidé de désigner l'ensemble de leurs zones Natura 2000 comme étant sensibles d'un point de vue environnemental, tandis que d'autres ont désigné des types de terrains bien précis situés dans les zones Natura 2000 (voir figure 22). Au total, 8,2 millions d'hectares de prairies permanentes ont ainsi été désignés comme sensibles d'un point de vue environnemental43, ce qui représente 52 % des prairies en zones Natura 2000 et 16 % des prairies permanentes de l'UE. Quatre États membres ont décidé de protéger 291 000 hectares de prairies permanentes en dehors des sites Natura 2000 (ce qui correspond à une part supplémentaire de 0,6 % des prairies permanentes de l'UE).

Figure 22

Part des prairies permanentes du réseau Natura 2000 de l'UE désignées comme sensibles d'un point de vue environnemental

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du document de la Commission européenne Direct payments 2015‑2020 Decisions taken by Member States: State of play as from December 2018 (2019).

68

L'exigence du verdissement relative aux prairies permanentes sensibles d'un point de vue environnemental est mieux à même de protéger le carbone stocké dans les prairies que celle relative au ratio de prairies permanentes car elle interdit non seulement de réaffecter les prairies à d'autres usages mais aussi de les labourer.

Pas d'adoption massive des mesures d'atténuation efficaces concernant les terres arables

69

La quantité de carbone stockée dans les terres cultivées et émise ou absorbée à partir de celles-ci dépend du type de culture, des pratiques de gestion, du sol et des variables climatiques. Par exemple, les plantes ligneuses pérennes dans les vergers, les vignes et les systèmes agroforestiers peuvent stocker le carbone dans la biomasse à long terme.

70

Pour les terres arables occupant des sols minéraux, nous avons relevé dans les études scientifiques quatre mesures efficaces qui peuvent contribuer à l'absorption des émissions de gaz à effet de serre: le recours à des cultures dérobées/de couverture, le boisement, l'agroforesterie et la conversion de terres arables en prairies permanentes.

71

Les cultures dérobées ou de couverture sont destinées à réduire la période pendant laquelle le sol reste nu, afin de limiter le risque d'érosion. Elles ont en outre pour effet d'augmenter la quantité de carbone stockée dans le sol, un effet d'autant plus important que la couverture végétale est dense, les racines, profondes et la biomasse des cultures, intégrée dans le sol. Selon les données d'Eurostat, au niveau de l'EU‑27, ce type de cultures recouvrait 5,3 millions d'hectares en 2010 et 7,4 millions d'hectares en 2016 (soit 7,5 % des terres arables de l'UE). Même si cette augmentation de 39 % était due à la PAC 2014‑2020, son incidence maximale sur les émissions de gaz à effet de serre équivaudrait à une réduction des émissions annuelles d'origine agricole de 0,6 % (terres cultivées et prairies comprises.

72

Les versions des règles de la conditionnalité en vigueur en 2007‑2013 et en 2014‑2020 prévoyaient toutes deux une exigence de couverture minimale des sols (norme BCAE 4) imposant de planter des cultures de couverture sur les parcelles présentant un risque d'érosion des sols. Les dispositions générales relatives à la conditionnalité sont établies au niveau de l'UE, mais il appartient aux États membres de définir les normes nationales. C'est pourquoi certains États membres ont imposé des exigences plus strictes que d'autres. En Tchéquie, par exemple, l'exigence a été étendue aux parcelles de terres arables présentant une pente moyenne supérieure à 4 degrés, alors que pour la période 2007‑2013, elle ne s'appliquait qu'aux terrains dont la pente moyenne était supérieure à 7 degrés. La Commission ne dispose pas de données sur le degré d'adoption de la norme BCAE 4 au niveau de l'UE qui permettraient de comparer l'incidence éventuelle de cette mesure avant et après 201544.

73

Parallèlement à la norme BCAE 4, les agriculteurs pouvaient recourir à des cultures dérobées ou de couverture pour respecter l'exigence du régime de verdissement relative aux surfaces d'intérêt écologique (voir figure 25). Vingt État membre ont recouru à cette possibilité. Selon une étude d'évaluation de 201745, les cultures dérobées étaient la deuxième option la plus choisie par les agriculteurs pour respecter leurs obligations relatives aux surfaces d'intérêt écologique. En 2016, ils ont en effet déclaré ce type de cultures sur 2,92 millions d'hectares. Toutefois, dans la plupart des États membres, la majeure partie des cultures dérobées ainsi déclarées avait été plantée par les agriculteurs avant l'introduction du régime de verdissement. Ce dernier a donc eu une incidence négligeable sur la taille des surfaces en cultures dérobées/de couverture et sur l'atténuation du changement climatique, comme le confirment les conclusions de l'étude d'évaluation.

74

Le boisement des terres arables marginales peut constituer une mesure d'atténuation du changement climatique efficace, du fait du stockage du carbone dans le sol et les arbres. L'agroforesterie est moins efficace, en raison de la moindre densité des arbres, des buissons et des haies, mais son avantage est qu'elle permet de continuer à utiliser la terre à des fins de production agricole. Ces deux pratiques d'atténuation sont traditionnellement soutenues avec des fonds relevant du développement rural. La figure 23 montre que leur diffusion est faible par rapport aux objectifs initiaux, qu'il était plus faible en 2014‑2020 qu'en 2007‑2013 et que, par conséquent, ces mesures d'atténuation du changement climatique plutôt efficaces ont eu, selon certaines estimations, une incidence modeste sur les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole.

Figure 23

Boisement et agroforesterie durant les périodes 2007‑2013 et 2014‑2020 (en hectares)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base d'informations tirées de l'étude la Commission de 2019 intitulée Evaluation study of the forestry measures under Rural Development et des rapports annuels 2019 sur la mise en œuvre des programmes de développement rural. Les chiffres relatifs à l'effet d'atténuation sont tirés d'une étude réalisée en 2016 par Ricardo-AEA.

75

Les États membres soutiennent habituellement la conversion de terres arables en prairies permanentes dans le cadre de leurs régimes agroenvironnementaux et climatiques relevant du soutien au développement rural. Nous ne disposons d'aucune donnée sur la superficie totale des terres arables converties en prairies permanentes lors de la période de programmation 2007‑2013. Durant la période 2014‑2019, onze États membres (la Belgique, la Bulgarie, la Tchéquie, l'Allemagne, l'Estonie, l'Espagne, l'Italie, la Lituanie, le Luxembourg, la Hongrie et la Roumanie) ont soutenu de telles pratiques. En 2019, 517 000 hectares de terres arables avaient ainsi été convertis en prairies permanentes. Nous estimons que la conversion de terres arables en prairies permanentes pourrait entraîner l'absorption de 0,8 % des émissions annuelles d'origine agricole, jusqu'à ce que les sols atteignent une nouvelle situation d'équilibre dans laquelle les émissions et absorptions se neutralisent (selon le GIEC, cela prendrait environ 20 ans).

Les changements apportés à la PAC pour 2014-2020 ne traduisaient pas sa nouvelle ambition climatique

76

Nous avons évalué si le cadre de la PAC 2014‑2020 était conçu pour réduire les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole. Nous avons examiné comment les valeurs cibles avaient été définies pour les mesures d'atténuation du changement climatique financées par la PAC, et si les régimes de la PAC 2014‑2020 avaient un potentiel d'atténuation du changement climatique plus élevé que ceux appliqués durant la période 2007‑2013. Nous avons également examiné les données sur lesquelles la Commission s'appuie pour suivre l'incidence de l'action pour le climat, et cherché à déterminer si le principe du pollueur-payeur s'appliquait aux émetteurs de gaz à effet de serre dans le domaine de l'agriculture.

Peu de nouvelles incitations à réduire les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole

77

Même si la lutte contre le changement climatique est un objectif spécifique de la PAC depuis 2014, la Commission n'a pas fixé d'objectif spécifique en matière de réduction des émissions à atteindre à l'aide des 100 milliards d'euros qu'elle déclare avoir affectés à l'action pour le climat lors de la période 2014‑2020. Les États membres n'étaient pas tenus de fixer leurs propres valeurs cibles en matière d'atténuation du changement climatique à atteindre grâce aux fonds de la PAC 2014‑2020, et ils ne l'ont pas fait. Les seules valeurs cibles que les États membres ont communiquées à la Commission étaient celles concernant le développement rural. Elles indiquaient quels montants ils prévoyaient de consacrer à l'action pour le climat et combien d'hectares de surface agricole ou forestière ou de têtes de bétail étaient couverts par ces dépenses.

78

La conditionnalité lie les paiements relevant de la PAC à un ensemble de normes de base qui visent à garantir le maintien des terres dans de bonnes conditions agricoles et environnementales (BCAE), ainsi qu'à certaines obligations appelées «exigences réglementaires en matière de gestion» (ERMG). Les ERMG sont définies dans la législation de l'UE en matière d'environnement, de changement climatique, de santé publique, animale et végétale et de bien-être des animaux.

79

Les organismes payeurs, qui gèrent les paiements au titre de la PAC dans les États membres, soumettent au minimum 1 % des agriculteurs à des contrôles concernant le respect des règles sur la conditionnalité. Si un agriculteur a enfreint certaines de ces règles, les organismes payeurs peuvent, en fonction de l'étendue, de la gravité et de la persistance de l'infraction, réduire de 1 à 5 % le montant de l'aide, sauf si l'infraction est mineure et que l'agriculteur peut remédier à la situation. Les agriculteurs récidivistes s'exposent à une réduction de leurs paiements pouvant atteindre 15 %, voire plus en cas d'infraction intentionnelle.

80

Dans notre rapport spécial n° 26/2016, nous avons observé qu'en cas d'infraction aux règles sur la conditionnalité, l'application des sanctions variait fortement d'un État membre à l'autre. Dans son rapport annuel d'activités46, la direction générale de l'agriculture et du développement rural (DG AGRI) de la Commission européenne indique que 2,5 % de l'ensemble des agriculteurs de l'UE ont été inspectés pour l'année de demande 2018 et qu'un quart des agriculteurs inspectés ont vu leurs aides réduites pour non-respect d'au moins une règle de la conditionnalité.

81

Les règles de la conditionnalité qui sont pertinentes pour l'atténuation du changement climatique n'ont pas beaucoup évolué entre les périodes 2007‑2013 et 2014‑2020. Leur potentiel de réduction des émissions de gaz à effet de serre n'a donc pas augmenté sensiblement en 2014‑2020. La Commission ne dispose pas de données indiquant dans quelle mesure les règles de la conditionnalité ont poussé les agriculteurs à adopter des pratiques d'atténuation. Sans ces données, il est impossible d'estimer l'incidence de ces règles sur les émissions de gaz à effet de serre47.

82

Par ailleurs, dans notre rapport spécial n° 4/2020 sur l'utilisation des nouvelles technologies aux fins du suivi de la PAC, nous avons souligné que les organismes payeurs détectaient régulièrement des cas de non-respect de règles de la conditionnalité bénéfiques pour le climat (figure 24). L'audit objet dudit rapport avait révélé que les organismes payeurs n'avaient pas commencé à utiliser les données Sentinel de Copernicus, qui permettent de suivre l'ensemble des agriculteurs plutôt qu'un échantillon d'entre eux seulement. L'utilisation de ces données pourrait permettre de renforcer le respect de ces règles par les agriculteurs.

Figure 24

Pourcentages d'organismes payeurs ayant relevé des infractions à la conditionnalité, ventilés par taux d'infractions, pour trois règles bénéfiques au climat (moyenne pour la période 2015‑2017)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des statistiques de la Commission concernant les résultats des inspections relatives à la conditionnalité réalisées par les États membres pour la période 2015‑2017.

83

En comparaison avec la période 2007‑2013, le grand changement dans la conception des paiements directs en faveur des agriculteurs pour la période 2014‑2020 a été l'introduction du régime de paiement vert en 2015 (voir figure 25). Le but était de renforcer la performance environnementale de la PAC en soutenant des pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l'environnement48. Néanmoins, le régime de paiement vert en matière de contribution à l'atténuation du changement climatique a vu son potentiel bridé dès le départ, car ses dispositions ne visaient pas à réduire les émissions de l'élevage, qui comptent pour la moitié des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole de l'UE.

Figure 25

L'architecture du verdissement

Source: Cour des comptes européenne.

84

Si la diversification des cultures est potentiellement peu bénéfique pour le climat, les prairies permanentes et les surfaces d'intérêt écologique auraient pu contribuer à l'atténuation du changement climatique en stockant le carbone dans les végétaux et les sols49. Une étude modélisée de 201750 a toutefois montré que ces éléments avaient entraîné peu de changements dans les pratiques agricoles, les exigences relatives aux prairies permanentes et aux surfaces d'intérêt écologique n'ayant concerné respectivement qu'1,5 % et 2,4 % des terres agricoles (voir également notre rapport spécial n° 21/2017).

85

Les agriculteurs étaient déjà en mesure de respecter l'exigence relative aux surfaces d'intérêt écologique grâce à des pratiques et à des éléments existant au sein de leur exploitation avant la mise en place du verdissement. Dès lors, seule une faible proportion d'entre eux ont dû introduire des pratiques d'atténuation auxquelles ils n'avaient pas recours avant 2015. Nous avons également constaté que l'exigence relative aux prairies n'avait qu'une efficacité limitée pour protéger le carbone qui y est stocké (points 61 à 68). Nous estimons donc que le verdissement, dans sa conception actuelle, ne contribuera pas de manière significative à atténuer le changement climatique. Une étude d'évaluation de 2017 réalisée pour la DG AGRI a débouché sur la conclusion que l'incidence des différentes composantes du régime de verdissement sur l'atténuation du changement climatique était soit incertaine, soit positive mais minime51.

86

Durant la période 2014‑2020, 3,2 % des fonds alloués au développement rural visaient en priorité à réduire les émissions de gaz à effet de serre ou à encourager la séquestration du carbone. Les mesures servant principalement d'autres objectifs, tels que la biodiversité, étaient également susceptibles de contribuer à atténuer le changement climatique. Cependant, les programmes de développement rural de la période 2014‑2020 ne proposaient pas beaucoup de nouvelles mesures d'atténuation en sus de celles disponibles lors de la période 2007‑2013, et ces nouvelles mesures ont été peu appliquées dans la pratique (points 58 et 59).

87

Le cadre commun de suivi et d'évaluation de la Commission permet de collecter des données sur l'atténuation du changement climatique pour chaque État membre. Ces données concernent par exemple les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole, la proportion des terres sous contrat visant à atténuer le changement climatique ou la proportion de bétail concerné par les objectifs de réduction des émissions. Ce cadre de suivi ne fournit toutefois pas d'informations concernant les types de pratiques d'atténuation qui sont financées (par exemple l'agriculture de précision), leur diffusion et leur incidence estimée sur les émissions de gaz à effet de serre. Les évaluations ponctuelles commandées par la Commission ont également pâti d'un manque de données fiables et n'ont pas permis d'évaluer l'incidence des mesures de la PAC sur le changement climatique52. Nous ne considérons pas que les indicateurs proposés pour après 2020 amélioreront la situation, comme nous l'avons souligné dans notre avis n° 7/201853 sur les propositions de la Commission concernant la PAC pour la période postérieure à 2020.

88

Les rapports annuels sur la mise en œuvre du développement rural devraient comporter des informations sur l'incidence des mesures d'atténuation du changement climatique financées au titre du développement rural. La Commission a indiqué que 30 des 115 autorités qui gèrent le soutien au développement rural avaient fourni en 2019 des informations sur la contribution nette des mesures financées au titre de ce soutien à la réduction des émissions de gaz à effet de serre54. Les autorités de gestion ayant appliqué diverses approches pour calculer l'incidence des mesures financées sur les émissions de gaz à effet de serre, il n'est pas possible d'additionner les différents chiffres communiqués.

L'UE n'applique pas le principe du pollueur-payeur pour les émissions d'origine agricole

89

En vertu du principe du pollueur-payeur55, les responsables de la pollution doivent supporter les coûts qu'elle engendre. Dans le domaine du climat, ce principe peut être mis en œuvre au moyen d'interdictions ou de limitations des émissions de gaz à effet de serre, ou encore d'une tarification du carbone (par exemple dans le cadre d'une taxe carbone ou d'un système de plafonnement et d'échange). Dans notre rapport spécial n° 12/2021, nous évaluons si ce principe est correctement appliqué dans plusieurs domaines de la politique environnementale, y compris la pollution aquatique due à l'agriculture.

90

Le droit de l'UE prévoit explicitement l'application du principe du pollueur-payeur dans la politique environnementale de l'Union, mais pas dans le cas des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole56. L'agriculture ne tombe pas non plus sous le coup du système d'échange de quotas d'émission de l'UE, et elle n'est pas soumise à une taxe carbone. La décision relative à la répartition de l'effort n'impose aucune limitation directe des gaz à effet de serre émis par l'agriculture dans l'Union. La PAC ne prévoit pas non plus de limitation des émissions.

Conclusions et recommandations

91

La Commission a alloué plus de 100 milliards d'euros sur le budget de la PAC 2014‑2020 à la lutte contre le changement climatique. Les États membres peuvent décider quelles réductions des émissions de gaz à effet de serre doivent être réalisées dans le secteur agricole. Ces émissions ont toutefois peu évolué depuis 2010 (points 01 à 18). Dans le cadre de l'audit objet du présent rapport, nous avons examiné si la PAC 2014‑2020 avait servi à soutenir des pratiques d'atténuation du changement climatique susceptibles de réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant de trois grandes sources: l'élevage, les engrais chimiques et les effluents, et l'utilisation des terres (en culture et en prairie). Nous avons également cherché à déterminer si la PAC de cette période avait davantage incité à recourir à des pratiques d'atténuation efficaces que celle de la période 2007‑2013 (points 19 à 22).

92

Les émissions de l'élevage, qui représentent la moitié des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole, compte tenu également des émissions résultant de l'utilisation des terres et des absorptions dues aux terres cultivées et aux prairies, n'ont pas baissé entre 2010 et 2018. Ces émissions sont directement fonction de la taille des cheptels et sont dues pour les deux tiers aux bovins. Il n'existe pas de mesures ayant une efficacité avérée dans la réduction des émissions dues à la digestion des animaux d'élevage. Nous avons recensé quatre mesures d'atténuation susceptibles d'être efficaces pour les émissions liées à la gestion des effluents, mais la PAC n'a guère encouragé leur diffusion. La PAC ne prévoit toutefois pas de limitation du cheptel, ni d'incitation à le réduire. Certaines de ses mesures de marché promeuvent la consommation de produits d'origine animale, qui n'a pas baissé depuis 2014, ce qui contribue au maintien des émissions de gaz à effet de serre plutôt qu'à leur réduction (points 24 à 36).

93

Les émissions de gaz à effet de serre dues à l'utilisation d'engrais et d'effluents d'élevage, qui représentent un tiers des émissions d'origine agricole de l'UE, ont augmenté entre 2010 et 2018. La PAC a soutenu l'expansion de l'agriculture biologique et de la culture des légumineuses à grains, mais l'incidence de ces pratiques sur les émissions de gaz à effet de serre n'est pas établie. La PAC n'a guère, voire pas du tout, soutenu des pratiques d'atténuation efficaces telles que le recours à des inhibiteurs de nitrification ou l'application d'azote à taux variable (points 37 à 51).

Recommandation n° 1 — Agir pour que la PAC réduise les émissions dues à l'agriculture

La Commission devrait:

  1. inviter les États membres à définir une valeur cible en matière de réduction des émissions de gaz à effet de serre dues à leur secteur agricole;
  2. évaluer les plans stratégiques des États membres relevant de la PAC dans l'optique de limiter le risque que les régimes de la PAC ne contribuent à augmenter ou à maintenir les émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole;
  3. veiller à ce que la PAC offre de véritables incitations à réduire les émissions de gaz à effet de serre provenant de l'élevage et des engrais, de nature à contribuer à la réalisation des objectifs climatiques de l'UE.

Quand? Au plus tard en décembre 2023.

94

La culture de sols organiques drainés concerne moins de 2 % des terres agricoles de l'UE, mais elle est responsable de 20 % des émissions d'origine agricole de l'EU‑27. Les sols organiques drainés qui sont cultivés sont admissibles aux paiements directs alors que les tourbières/zones humides restaurées peuvent ne pas l'être. Certains États membres soutenaient la restauration des tourbières drainées, mais cette pratique a été trop peu suivie pour avoir une incidence sur les émissions provenant des sols organiques, qui sont restées stables depuis 2010. La PAC 2014‑2020 n'a pas renforcé le soutien aux mesures de séquestration du carbone telles que le boisement et la conversion de terres arables en prairies par rapport à la période 2007‑2013. Les surfaces recouvertes de cultures dérobées/de couverture ont augmenté entre 2010 et 2016, mais l'incidence estimée sur l'atténuation du changement climatique est faible (points 52 à 75).

Recommandation n° 2 — Prendre des mesures pour réduire les émissions provenant de la culture de sols organiques drainés

La Commission devrait:

  1. instaurer un système de suivi qui aide à évaluer l'incidence de la PAC de l'après-2020 sur les tourbières et les zones humides;
  2. prendre des mesures pour inciter à remettre en eau/à restaurer les sols organiques drainés, par exemple dans le cadre des paiements directs, de la conditionnalité, des interventions en faveur du développement rural ou d'autres approches favorisant le stockage du carbone dans les sols agricoles.

Quand? Au plus tard en septembre 2024.

95

La Commission a indiqué que 26 % des financements de la PAC bénéficiaient à l'action pour le climat, mais elle n'a pas fixé d'objectif spécifique en matière d'atténuation pour ces fonds. Le système de suivi de la Commission ne fournit pas de données qui permettraient de suivre correctement l'incidence des financements de la PAC en faveur du climat sur les émissions de gaz à effet de serre. Le régime de verdissement était censé renforcer les performances environnementales et climatiques des paiements directs, mais ses effets bénéfiques sur le climat sont marginaux. Les règles de la conditionnalité et les mesures de développement rural n'ayant pas beaucoup changé par rapport à la période 2007‑2013, elles n'ont pas encouragé les agriculteurs à adopter de nouvelles pratiques d'atténuation du changement climatique qui soient efficaces. Le droit de l'UE ne prévoit pas l'application du principe du pollueur-payeur dans le cas des émissions de gaz à effet de serre d'origine agricole (points 76 à 90).

Recommandation n° 3 — Rendre régulièrement compte de la contribution de la PAC à l'atténuation du changement climatique

Conformément à l'ambition accrue de l'UE en matière de climat pour 2030, la Commission devrait:

  1. définir des indicateurs de suivi qui permettent d'évaluer annuellement l'effet des mesures d'atténuation du changement climatique financées par la PAC 2021‑2027 sur les émissions nettes de gaz à effet de serre et rendre régulièrement compte de ces indicateurs;
  2. étudier la possibilité d'appliquer le principe du pollueur-payeur aux émissions produites par les activités agricoles, et récompenser les agriculteurs pour l'absorption à long terme du carbone.

Quand? Au plus tard en décembre 2023.

Le présent rapport a été adopté par la Chambre I, présidée par M. Samo Jereb, Membre de la Cour des comptes, à Luxembourg en sa réunion du 7 juin 2021.

Par la Cour des comptes

Klaus-Heiner Lehne
Président

Sigles, acronymes et formes abrégées

AEE – Agence européenne pour l'environnement

BCAE – Bonnes conditions agricoles et environnementales

CH4 Méthane

CO2 Dioxyde de carbone

DG AGRI – Direction générale de l'agriculture et du développement rural de la Commission européenne

ERMG – Exigence réglementaire en matière de gestion

GIEC – Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat

N2O – Protoxyde d'azote

PAC – Politique agricole commune

SCF – Soutien couplé facultatif

SEQE – Système d'échange de quotas d'émission

Glossaire

Accord de Paris – Accord international signé en 2015 pour limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 °C, en mettant tout en œuvre pour le limiter à 1,5 °C.

Bonnes conditions agricoles et environnementales – État dans lequel les agriculteurs doivent conserver l'ensemble des terres agricoles, en particulier les terres non exploitées à des fins de production au moment de la demande, afin de recevoir certains paiements au titre de la PAC. La gestion de l'eau et des sols est prise en considération dans ces conditions.

Conditionnalité – Mécanisme subordonnant les paiements effectués en faveur des agriculteurs au respect d'exigences en matière d'environnement, de sécurité alimentaire, de santé et de bien-être des animaux, ainsi que de gestion des terres.

Équivalent CO2 (CO2eq) – Unité permettant de mesurer de façon comparable l'incidence des gaz à effet de serre sur le climat. Elle correspond à la quantité émise de dioxyde de carbone qui provoquerait la même incidence.

Exigence réglementaire en matière de gestion – Règle en matière de gestion des terres agricoles, établie par l'UE ou un État membre pour préserver la santé publique, animale et végétale, le bien-être des animaux et l'environnement.

Fuite de carbone – Augmentation des émissions générées dans un pays/une région (par exemple en dehors de l'UE) à la suite de l'adoption d'une mesure d'atténuation visant à limiter ces émissions dans un autre pays/une autre région (par exemple un État membre de l'UE).

Inventaires des gaz à effet de serre – Registre annuel des émissions de gaz à effet de serre, tenu par chaque État membre et, au niveau de l'UE, par l'Agence européenne pour l'environnement.

Mesure agroenvironnementale et climatique – Pratique facultative qui va au delà des exigences habituelles en matière d'environnement et pour laquelle les agriculteurs peuvent prétendre à un paiement imputé sur le budget de l'UE.

Natura 2000 – Réseau constitué de zones de conservation des espèces rares et menacées, et de certains types d'habitats naturels rares protégés en vertu du droit de l'UE.

Paiement direct – Paiement d'une aide agricole, comme une aide à la surface, effectué directement en faveur des agriculteurs.

Politique agricole commune – Politique unique et harmonisée de l'UE en matière d'agriculture prévoyant des subventions et une série d'autres mesures visant à garantir la sécurité alimentaire, à assurer un niveau de vie équitable aux agriculteurs de l'UE, à promouvoir le développement rural et à protéger l'environnement.

Protocole de Kyoto – Accord international lié à la convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques et qui engage les pays industrialisés à réduire les émissions de gaz à effet de serre.

Sols minéraux – Sols constitués principalement de particules minérales inorganiques et de particules de roches.

Sols organiques – Sols constitués essentiellement de matières végétales ou animales décomposées.

Soutien au développement rural – Volet de la politique agricole commune comportant des objectifs économiques, environnementaux et sociaux, et dont le financement provient de sources européennes, nationales et régionales.

Soutien couplé facultatif – Régime facultatif pouvant être utilisé par les États membres pour effectuer des paiements agricoles directs de l'UE, fondés sur les volumes de production, en faveur des agriculteurs qui optent pour cette méthode de déclaration.

Verdissement – Adoption de pratiques agricoles bénéfiques pour le climat et l'environnement. Terme couramment utilisé aussi pour désigner le régime d'aide de l'UE correspondant.

Équipe d'audit

Les rapports spéciaux de la Cour présentent les résultats de ses audits relatifs aux politiques et programmes de l'UE ou à des questions de gestion concernant des domaines budgétaires spécifiques. La Cour sélectionne et conçoit ces activités d'audit de manière à maximiser leur impact en tenant compte des risques pour la performance ou la conformité, du niveau des recettes ou des dépenses concernées, des évolutions escomptées ainsi que de l'importance politique et de l'intérêt du public.

L'audit de la performance objet du présent rapport a été réalisé par la Chambre I (Utilisation durable des ressources naturelles), présidée par M. Samo Jereb, Membre de la Cour. L'audit a été effectué sous la responsabilité de M. Viorel Ștefan, Membre de la Cour, assisté de: Mme Roxana Banica, cheffe de cabinet, et M. Olivier Prigent, attaché de cabinet; M. Colm Friel, manager principal; M. Jindřich Doležal, chef de mission; Mmes Antonella Stasia et Asimina Petri ainsi que MM. Jonas Kathage, Pekka Ulander et Viktor Popov, auditeurs. L'assistance graphique a été fournie par Mme Marika Meisenzahl et l'assistance linguistique, par M. Richard Moore.

Notes

1 Poore, J. et Nemecek, T., Reducing food's environmental impacts through producers and consumers, 2018.

2 Conseil européen, Conclusions des 8 et 9 mars 2007 et Conclusions des 10 et 11 décembre 2020; Commission européenne, Proposition de règlement établissant le cadre requis pour parvenir à la neutralité climatique et modifiant la loi européenne sur le climat.

3 Décision n° 406/2009/CE du Parlement européen et du Conseil du 23 avril 2009 relative à l'effort à fournir par les États membres pour réduire leurs émissions de gaz à effet de serre afin de respecter les engagements de la Communauté en matière de réduction de ces émissions jusqu'en 2020.

4 Règlement (UE) 2018/842 du Parlement européen et du Conseil du 30 mai 2018 relatif aux réductions annuelles contraignantes des émissions de gaz à effet de serre par les États membres de 2021 à 2030 contribuant à l'action pour le climat afin de respecter les engagements pris dans le cadre de l'accord de Paris et modifiant le règlement (UE) n° 525/2013.

5 Cour des comptes européenne, sur la base du tableau 6 de l'annexe du Rapport d'étape sur l'action climatique de l'UE en 2020, novembre 2020.

6 COM(2011) 500 final – «Un budget pour la stratégie Europe 2020», partie II, p. 14.

7 Règlement (UE) n° 1306/2013 du Parlement européen et du Conseil, article 110.

8 État prévisionnel de la Commission européenne pour l'exercice 2020, p. 117.

9 État prévisionnel de la Commission européenne pour l'exercice 2020, p. 4/57.

10 Commission européenne, Budget de l'UE: la PAC après 2020, p. 3.

11 Conseil européen, Conclusions de la réunion des 17, 18, 19, 20 et 21 juillet 2020.

12 Commission européenne, Recommandations aux États membres, 2020.

13 Poore, J. et Nemecek, T., Reducing food's environmental impacts through producers and consumers, 2018; Springmann, M. et al., Analysis and valuation of the health and climate change co-benefits of dietary change, 2016; Westhoek, H. et al., Food choices, health and environment: Effects of cutting Europe's meat and dairy intake, 2014.

14 Evaluation of the impact of the EU agricultural promotion policy in internal and third countries markets, document de travail des services de la Commission SWD(2020) 401 final.

15 Matthews, A., How to move from our current land use structure to one that is compatible with our climate targets, Farming Independent, 2018.

16 Direction générale de l'agriculture et du développement rural de la Commission européenne (DG AGRI), Direct payments, 2018, p. 11.

17 Commission européenne, La PAC expliquée. Les paiements directs en faveur des agriculteurs 2015‑2020, p. 9.

18 Commission européenne, Voluntary Coupled Support, 2020, p. 2.

19 Jansson, T. et al., Coupled Agricultural Subsidies in the EU Undermine Climate Efforts, 2020, p. 14.

20 Brady, M. et al., Impacts of Direct Payments, 2017, p. 70, 88 et 89.

21 Commission européenne, Scenar 2030, 2017, p. 115 et 144.

22 Himics, M. et al., Setting Climate Action as the Priority for the Common Agricultural Policy: A Simulation Experiment, 2020, p. 58 à 60.

23 Sandström, V. et al., The role of trade in the greenhouse gas footprints of EU diets, 2018, p. 51.

24 FAOSTAT, Bilans alimentaires, 2020.

25 Commission européenne, Annexe 2 de la communication «Recommandations aux États membres en ce qui concerne leur plan stratégique relevant de la politique agricole commune», 2020.

26 Sutton, M. A. et al., Too much of a good thing, 2011, p. 161; Westhoek, H. et al., Food choices, health and environment: Effects of cutting Europe's meat and dairy intake, 2014, p. 202.

27 Directive 91/676/CEE du Conseil du 12 décembre 1991 concernant la protection des eaux contre la pollution par les nitrates à partir de sources agricoles.

28 Alterra, Wageningen UR, The impact of the Nitrates Directive on gaseous N emissions, 2010, p. 7 et 68.

29 Commission européenne, Annexe 2 de la communication «Recommandations aux États membres en ce qui concerne leur plan stratégique relevant de la politique agricole commune», 2020.

30 Emmerling, C. et al., Meta-Analysis of Strategies to Reduce NH3 Emissions from Slurries in European Agriculture and Consequences for Greenhouse Gas Emissions, 2020, p. 8 et 9.

31 Kirchmann, H., Why organic farming is not the way forward, 2019, p. 24 et 25; Smith, L. G. et al., The greenhouse gas impacts of converting food production in England and Wales to organic methods, 2019, p. 5.

32 Commission européenne, The contribution of precision agriculture technologies to farm productivity and the mitigation of greenhouse gas emissions in the EU, 2019, p. 9, 10 et 23.

33 Balafoutis, A. et al., Precision Agriculture Technologies Positively Contributing to GHG Emissions Mitigation, Farm Productivity and Economics, 2017.

34 Kee Lam, S. et al., Using nitrification inhibitors to mitigate agricultural N2O emission: a double‐edged sword?, 2016, p. 486 à 488.

35 Une définition des sols organiques est donnée dans le volume 4, chapitre 3, annexe 3A.5 des lignes directrices 2006 du GIEC pour les inventaires nationaux de gaz à effet de serre (les «lignes directrices 2006 du GIEC»).

36 Montanarella, L. et al., The distribution of peatland in Europe, 2006. Les auteurs ont estimé cette superficie en s'appuyant sur la base de données européenne des sols.

37 Gobin, A. et al., Soil organic matter management across the EU – best practices, constraints and trade-offs, rapport final établi pour le compte de la DG Environnement de la Commission européenne, septembre 2011.

38 Peatlands in the EU, mars 2020.

39 Considérant 42 du règlement (UE) n° 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) n° 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil.

40 Alliance Environnement et Institut von Thünen, Evaluation study of the payment for agricultural practices beneficial for the climate and the environment, 2017, p. 140.

41 Rapport spécial n° 13/2020 de la Cour des comptes européenne.

42 Soussana, J.-F. et al., Carbon cycling and sequestration opportunities intemperate grasslands, 2004; Turbé, A. et al., Soil biodiversity: functions, threats and tools for policy makers. Bio Intelligence Service, IRD, et NIOO, rapport établi pour le compte de la Commission européenne (DG Environnement), 2010.

43 Commission européenne, Direct payments 2015‑2020 Decisions taken by Member States: State of play as from December 2018, 2019, p. 42.

44 Alliance Environnement, Evaluation study of the impact of the CAP on climate change and greenhouse gas emissions, 2018, p. 80 et 226.

45 Alliance Environnement et Institut von Thünen, Evaluation study of the payment for agricultural practices beneficial for the climate and the environment, 2017, p. 72.

46 Commission européenne, DG AGRI, rapport annuel d'activité relatif à l'exercice 2019, annexes, p. 192.

47 Alliance Environnement, Evaluation study of the impact of the CAP on climate change and greenhouse gas emissions, 2018, p. 80 et 226.

48 Considérant 37 du règlement (UE) n° 1307/2013 du Parlement européen et du Conseil du 17 décembre 2013 établissant les règles relatives aux paiements directs en faveur des agriculteurs au titre des régimes de soutien relevant de la politique agricole commune et abrogeant le règlement (CE) n° 637/2008 du Conseil et le règlement (CE) n° 73/2009 du Conseil.

49 Alliance Environnement, Evaluation study of the impact of the CAP on climate change and greenhouse gas emissions, 2018, p. 49 et 50.

50 Louhichi, K. et al., Economic impacts of CAP greening: application of an EU-wide individual farm model for CAP analysis (IFM-CAP), 2017, tableau 6.

51 Alliance Environnement et Institut von Thünen, Evaluation study of the payment for agricultural practices beneficial for the climate and the environment, 2017, p. 150 à 154.

52 Alliance Environnement, Evaluation study of the impact of the CAP on climate change and greenhouse gas emissions, 2018, p. 225 à 234.

53 Cour des comptes européenne, avis n° 7/2018 sur les propositions de la Commission concernant les règlements relatifs à la politique agricole commune pour la période postérieure à 2020, point 72.

54 DG AGRI, Summary Report: Synthesis of the evaluation components of the enhanced AIRs 2019, chapitre 7, p. 1 et 75.

55 Agence européenne pour l'environnement, Polluter-pays principle, 2004.

56 Traité sur le fonctionnement de l'Union européenne, article 191.

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PDF ISBN 978-92-847-6186-9 ISSN 1977-5695 doi:10.2865/423 QJ-AB-21-012-FR-N
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