Régularité des dépenses de la politique de cohésion de l'UE: la Commission publie chaque année un niveau d'erreur estimatif minimal qui n'est pas définitif
À propos du rapportLa politique de cohésion est l'un des plus gros postes de dépenses du budget de l'UE. C'est également un domaine d'action où nous estimons que le risque de dépenses irrégulières est élevé. Pour que la Commission soit en mesure de vérifier la conformité des dépenses relevant de ce domaine d'action avec les dispositions légales et d'en rendre compte, elle doit notamment pouvoir s'appuyer sur un niveau d'erreur estimatif pertinent et fiable. Nos constatations nous amènent à conclure que les indicateurs de performance clés y afférents publiés dans les rapports annuels d'activités des directions générales compétentes et dans le rapport annuel de la Commission sur la gestion et la performance correspondent à un niveau d'erreur minimal, non définitif. Cela tient à la couverture limitée des programmes opérationnels et des opérations assurée par la Commission dans ses audits de conformité, ainsi qu'à des lacunes inhérentes à ses contrôles documentaires et à des problèmes liés à ses travaux d'audit.
Rapport spécial de la Cour des comptes européenne présenté en vertu de l'article 287, paragraphe 4, deuxième alinéa, du TFUE.
Synthèse
I La politique de cohésion est l'un des plus gros postes de dépenses du budget de l'UE. C'est également un domaine d'action où nous estimons que le risque de dépenses irrégulières est élevé. Pour que la Commission soit en mesure de vérifier la conformité des dépenses relevant de ce domaine d'action avec les dispositions légales et d'en rendre compte, elle doit notamment pouvoir s'appuyer sur un niveau d'erreur estimatif pertinent et fiable. Ce dernier sert également de base pour prendre les mesures correctrices qui s'imposent.
II Dans le domaine de la cohésion, les informations relatives à la régularité reposent sur les travaux des autorités d'audit des États membres et sur la vérification et l'évaluation ultérieures de ces travaux et de leurs résultats par la Commission. Le résultat de ces contrôles est présenté dans les rapports annuels d'activités des directions générales compétentes et dans le rapport annuel de la Commission sur la gestion et la performance, sous la forme d'un indicateur de performance clé mesurant le niveau d'erreur estimatif pour les dépenses des programmes sous-jacents.
III Nous avons signalé précédemment dans nos rapports annuels que les faiblesses que nous décelions dans les travaux des autorités d'audit limitaient la fiabilité de ces travaux. Le principal objectif de notre audit était donc d'apprécier si les processus d'audit de la Commission compensent cette lacune et lui permettent de publier une estimation pertinente et fiable du niveau d'erreur pour les dépenses de cohésion dans les rapports annuels d'activités et dans le rapport annuel sur la gestion et la performance.
IV À cette fin, nous avons examiné les processus et procédures utilisés par la Commission pour l'approbation des comptes et pour son évaluation de la régularité des dépenses sous-jacentes aux comptes annuels, évaluation sur laquelle elle se fonde pour valider et confirmer les taux d'erreur résiduels communiqués chaque année par les autorités d'audit. Nous avons également examiné la manière dont la Commission établit et présente les informations sur la régularité dans les rapports annuels d'activités et dans le rapport annuel sur la gestion et la performance.
V Les directions générales présentent les indicateurs de performance clés comme étant leur meilleure estimation du niveau d'erreur, mais nous concluons globalement que cette estimation n'est pas définitive et qu'elle correspond à un taux d'erreur minimal au niveau de ces directions générales et, partant, dans le rapport annuel sur la gestion et la performance.
VI Comme le prévoit le cadre réglementaire applicable, la Commission approuve les comptes annuels des États membres sans prendre en considération la régularité des dépenses concernées. Par conséquent, la retenue de 10 % sur les paiements, introduite dans le but de protéger le budget de l'UE, est libérée même lorsque les autorités d'audit des États membres ont confirmé un taux d'erreur résiduel supérieur au seuil de signification de 2 % et que les contrôles de régularité de la Commission ne sont pas encore terminés.
VII Dans le cadre de ses contrôles documentaires, la Commission vérifie la cohérence des informations sur la régularité figurant dans les dossiers constitués aux fins de l'assurance. Cependant, le fait que les contrôles documentaires ne soient pas conçus pour déceler les dépenses inéligibles non détectées précédemment limite leur valeur ajoutée.
VIII Ces contrôles documentaires s'inscrivent dans l'approche fondée sur les risques définie par la Commission pour sélectionner les autorités d'audit qui feront l'objet de ses audits de conformité. Toutefois, la Commission n'a pas toujours sélectionné les autorités d'audit dont le score de risque est le plus élevé et elle n'a pas suffisamment documenté la justification de sa sélection.
IX Les audits de conformité, dans le cadre desquels la Commission examine l'éligibilité des opérations, revêtent une importance primordiale pour son évaluation des travaux des autorités d'audit et de leurs résultats. Bien que les audits de conformité que nous avons examinés lui aient permis de relever un certain nombre d'erreurs non détectées, la Commission a souvent révisé ses résultats d'audit finaux lors d'une phase de suivi avec les États membres. La fréquence élevée des erreurs non détectées relevées par la Commission dans les cas que nous avons examinés a également retenu notre attention. Elle indique, au même titre que le caractère souvent limité de l'échantillon d'opérations de la Commission, que d'autres types d'erreurs subsistent probablement dans les opérations sélectionnées par l'autorité d'audit qui n'ont pas été examinées par la Commission. Cela signifie que le taux d'erreur total résiduel est un taux minimal au niveau des programmes.
X La Commission rend compte des résultats de ses travaux dans les rapports annuels d'activités sous la forme d'un indicateur de performance clé. Bien que cet indicateur constitue la meilleure estimation, par la Commission, du niveau d'erreur, nous considérons que les indicateurs de performance clés publiés par les directions générales correspondent à un minimum. Cela tient à la couverture limitée des programmes opérationnels et des opérations assurée dans le cadre des audits de conformité, ainsi qu'aux lacunes inhérentes aux contrôles documentaires de la Commission et à d'autres problèmes liés à ses travaux d'audit. Nous considérons également que les valeurs des indicateurs de performance clés publiés ne sont pas définitives, ce qui confère à ces derniers un caractère provisoire.
XI En vue d'améliorer la qualité des informations à communiquer sur la régularité dans le domaine de la cohésion lors de la prochaine période de programmation, nous recommandons à la Commission:
- de proposer une révision de la législation afin que le cadre juridique offre une protection adéquate en ce qui concerne la libération des retenues sur paiement;
- d'améliorer ses travaux d'audit et la documentation les concernant, ainsi que son processus de contrôle;
- de renforcer les principaux éléments d'information sur la régularité présentés dans les rapports annuels d'activités.
Nous recommandons également au collège des commissaires, propriétaire du rapport annuel sur la gestion et la performance, de donner aux services centraux des instructions concernant l'établissement de ce rapport.
Introduction
La cohésion, un grand domaine de dépenses de l'UE avec deux cycles de contrôle
01 La politique de cohésion, qui vise essentiellement à réduire l'écart entre les niveaux de développement des différents États membres et régions de l'UE, représente une partie considérable du budget européen. Elle est mise en œuvre au moyen de programmes opérationnels (PO) pluriannuels que les États membres soumettent généralement au début de chaque période de programmation. La figure 1 montre l'importance des montants consacrés aux dépenses de cohésion au cours des cinq dernières années de la période de programmation 2014‑2020.
Figure 1 – Part des dépenses de cohésion dans le budget de l'UE
Source: Cour des comptes européenne.
02 En ce qui concerne la période de programmation 2021‑2027, la rubrique 2 du cadre financier pluriannuel (CFP), composée de deux sous-rubriques distinctes, la 2a «Cohésion économique, sociale et territoriale» et la 2b «Résilience et valeurs», représente 35 % du budget de l'Union et est désormais le domaine d'action le plus important en valeur. Le budget de la sous-rubrique 2a, l'équivalent de la sous-rubrique «Cohésion» du CFP 2014‑2020, s'élève à 372,6 milliards d'euros pour la période 2021‑2027.
03 Dans notre rapport annuel, nous considérons les dépenses de cohésion comme étant à haut risque, car les règles sont complexes et une grande partie de ces dépenses servent à rembourser les coûts déclarés par les bénéficiaires eux-mêmes[1]. Lors des travaux réalisés aux fins de notre déclaration d'assurance, nous relevons constamment un niveau d'erreur significatif pour la politique de cohésion. Pour cette raison, et du fait que les montants en jeu sont considérables, il est nécessaire de disposer d'un système de contrôle et d'assurance robuste, à même de garantir la régularité des dépenses de cohésion et de fournir une estimation pertinente et fiable du niveau d'erreur réel dans ce domaine.
04 Le cadre de contrôle et d'assurance qui sert à produire ces informations sur la régularité dans le domaine de la cohésion a été révisé pour la période de programmation 2014‑2020. Il prévoit ainsi une approbation annuelle, par la Commission, des dépenses de cohésion présentées par les États membres, en sus des travaux de clôture réalisés à la fin de la période de programmation. Il prévoit également l'établissement d'un indicateur annuel du risque résiduel, appelé «taux d'erreur total résiduel» (TETR). Le TETR fournit une estimation des dépenses irrégulières subsistant dans les comptes annuels après qu'il a été tenu compte de l'effet de l'ensemble des procédures de contrôle, des recouvrements et des corrections appliqués par les États membres.
05 Le cadre de contrôle et d'assurance s'articule autour de deux cycles de contrôle, un cycle national au niveau des États membres, puis un cycle au niveau de la Commission. Ce dispositif est le reflet de la gestion conjointe, par la Commission et les autorités des États membres, de la mise en œuvre et du financement de la politique de cohésion. C'est ce que l'on appelle la «gestion partagée».
Le cycle de contrôle national
06 Le premier élément du cadre de contrôle et d'assurance est le cycle de contrôle national, présenté dans la figure 2.
Figure 2 – Le cycle annuel de contrôle au niveau des États membres
Source: Cour des comptes européenne.
07 Dans le cycle de contrôle national, la première ligne de défense du budget de l'UE est formée par les autorités de certification et de gestion des États membres. Les autorités de certification se chargent des demandes de paiement des États membres et de l'établissement des comptes, tandis que les autorités de gestion sont responsables de la sélection des opérations financées au titre des programmes ainsi que des vérifications de gestion, dont le but est de garantir que seules les dépenses régulières sont remboursées aux bénéficiaires. Le nombre d'erreurs détectées dans le cadre des travaux d'audit de la Commission et des nôtres montre que les contrôles en place n'atténuent pas encore suffisamment le risque d'erreur élevé inhérent à ce domaine. Nous avons signalé dans notre rapport annuel que cela concernait en particulier les autorités de gestion dont les vérifications sont inefficaces pour prévenir ou détecter les irrégularités dans les dépenses déclarées par les bénéficiaires[2].
08 Les autorités d'audit des États membres constituent la deuxième ligne de défense. Elles procèdent à des audits annuels des comptes des programmes et d'échantillons représentatifs d'opérations pour lesquelles les dépenses ont été déclarées à la Commission. Elles sont également chargées d'examiner le bon fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle. Dans leurs rapports annuels de contrôle, elles rendent compte à la Commission du niveau d'erreur détecté dans les dépenses déclarées (le «taux d'erreur total»). Lorsque leurs travaux font apparaître un taux d'erreur total supérieur à 2 %, elles recommandent les corrections à apporter pour ramener le taux d'erreur total résiduel (TETR) sous ce seuil. Les autorités d'audit rendent compte à la Commission de la mise en œuvre de ces corrections.
09 Le rapport annuel de contrôle fait partie du dossier constitué aux fins de l'assurance. Ce dossier consiste en un ensemble de documents pouvant couvrir un ou plusieurs PO. Il est soumis tous les ans par chaque État membre à la Commission et porte sur les Fonds structurels et d'investissement européens (Fonds ESI). Il comprend les comptes et une synthèse annuels, une déclaration de la direction, l'opinion de l'autorité d'audit, ainsi que le rapport annuel de contrôle. Les autorités d'audit émettent une opinion sur l'exhaustivité, l'exactitude et la véracité des comptes, la légalité et la régularité des dépenses qui y figurent et le bon fonctionnement du système de gestion et de contrôle. Les dossiers constitués aux fins de l'assurance doivent être adressés chaque année à la Commission au plus tard le 15 février pour l'exercice comptable précédent.
Le cycle de contrôle au niveau de la Commission
10 La Commission reste responsable en dernier ressort de la protection des intérêts financiers de l'UE. Chaque année, une fois le cycle de contrôle national achevé, elle lance son propre cycle de contrôle des comptes annuels et procède à une évaluation des dossiers constitués aux fins de l'assurance qui lui ont été transmis cette année-là. La figure 3 illustre les principales étapes de ce cycle, dont le point d'orgue est la communication des TETR dans les rapports annuels d'activités (RAA) de la Commission.
Approbation des comptes
11 La Commission effectue des contrôles administratifs concernant l'exhaustivité et l'exactitude des comptes. Si son évaluation se traduit par l'approbation des comptes de l'État membre, elle peut alors verser à celui-ci le solde annuel des dépenses qui lui est dû, y compris les 10 % retenus sur les paiements intermédiaires pour protéger le budget de l'UE[3].
Évaluation de la légalité et de la régularité
12 Selon sa stratégie d'audit, la Commission cherche à obtenir une assurance raisonnable que le TETR est inférieur à 2 % pour chacun des PO. À cet effet, elle commence par évaluer, au moyen d'un contrôle documentaire, les informations sur la régularité fournies dans les rapports annuels de contrôle des autorités d'audit. Elle se sert également des informations tirées des contrôles documentaires, de travaux d'audit précédents et de son évaluation des rapports d'audit des systèmes établis par les autorités d'audit, pour évaluer les risques afin de sélectionner les autorités d'audit et les PO à soumettre à un audit de conformité sur place.
13 Les audits de conformité sont axés avant tout sur la réexécution des contrôles des opérations au niveau des autorités d'audit. C'est essentiellement sur eux que la Commission fonde sa propre assurance. Ils permettent d'évaluer la fiabilité des travaux effectués par l'autorité d'audit pour établir l'opinion d'audit et le TETR. Le cas échéant, la Commission ajuste le TETR et demande des corrections financières supplémentaires, c'est-à-dire des mesures consistant à protéger le budget de l'UE des dépenses irrégulières en procédant au retrait de ces dépenses ou au recouvrement des montants concernés.
14 La Commission calcule une moyenne pondérée des TETR ajustés, qui lui sert d'indicateur de performance clé (l'IPC n° 5). L'IPC n° 5 est le principal indicateur de régularité communiqué dans les RAA. Enfin, dans son rapport annuel sur la gestion et la performance, la Commission consolide les IPC des DG (directions générales) Emploi, affaires sociales et inclusion (EMPL) et Politique régionale et urbaine (REGIO) afin de produire son estimation du niveau d'erreur dans les dépenses de cohésion (le «risque au moment du paiement»).
Nos travaux antérieurs montrent que nous ne pouvons pas toujours nous fier aux taux d'erreur communiqués par les autorités d'audit
15 Les quatre années où nous avons examiné les dépenses de la période 2014‑2020, nous avons détecté des erreurs supplémentaires dans des opérations précédemment contrôlées par les autorités d'audit. Pour la moitié des dossiers aux fins de l'assurance examinés, représentant également la moitié des dépenses contrôlées, nous n'avons donc pas pu adhérer aux conclusions des autorités d'audit selon lesquelles les TETR étaient inférieurs à 2 %. Nous en avons conclu que nous ne pouvons pas toujours nous fier aux taux d'erreur communiqués par les autorités d'audit. La figure 4 présente nos résultats au fil des ans[4].
Figure 4 – Dossiers aux fins de l'assurance pour lesquels les résultats de nos audits ont fait passer les taux résiduels au-dessus des 2 %
Source: Cour des comptes européenne.
16 Les taux d'erreur communiqués dans les RAA des DG REGIO et EMPL et agrégés dans le rapport annuel sur la gestion et la performance ne peuvent donc être fiables que si le cycle de contrôle de la Commission permet de compenser les lacunes des travaux des autorités d'audit. Voilà ce dont traite le présent rapport. Les résultats de notre audit pourraient représenter une aide précieuse pour la Commission dans la conception de ses travaux d'audit de la période de programmation 2021‑2027.
Étendue et approche de l'audit
17 Notre audit a porté sur le cadre de contrôle et d'assurance 2014‑2020, qui visait à permettre à la Commission de communiquer un risque d'erreur résiduel annuel pour chaque exercice comptable. Nous avons examiné si la Commission:
- effectuait des travaux d'audit suffisants et appropriés pour déterminer un risque d'erreur résiduel annuel fiable et pertinent pour chaque dossier aux fins de l'assurance (le TETR);
- communiquait un risque d'erreur résiduel annuel fiable dans les RAA de chaque DG (l'IPC n° 5);
- présentait, dans le rapport annuel sur la gestion et la performance, un niveau d'erreur annuel fiable pour la politique de cohésion (le risque au moment du paiement).
18 Nous avons étudié les processus et procédures d'approbation des comptes, l'évaluation de la régularité des dépenses sous-jacentes aux comptes annuels figurant dans les dossiers aux fins de l'assurance et la manière dont la Commission établit et présente les informations sur la régularité communiquées dans les RAA et dans le rapport annuel sur la gestion et la performance.
19 Pour ce faire, nous avons analysé les travaux de la Commission relatifs au calcul du TETR pour les deux principales directions générales responsables de la politique de cohésion, à savoir les DG REGIO et EMPL, ainsi que le taux agrégé communiqué dans le rapport annuel sur la gestion et la performance:
- pour dix dossiers aux fins de l'assurance (cinq par DG), nous avons analysé les contrôles documentaires réalisés pour les exercices comptables 2015/2016, 2016/2017 et 2017/2018;
- nous avons sélectionné dix audits de conformité (à nouveau cinq par DG) menés à bien par la Commission pour les exercices comptables 2016/2017 et 2017/2018;
- pour chacun des audits de conformité sélectionnés, nous avons examiné en détail le dossier d'audit de l'une des opérations contrôlées par la Commission;
- nous avons examiné les corrections financières résultant de 26 audits de conformité effectués en 2018.
20 Nous avons exclu du champ de notre audit les travaux réalisés par la Commission pour l'exercice comptable 2018/2019, étant donné que le cycle de contrôle n'avait pas été achevé pour cet exercice au moment de notre audit. Nous nous sommes donc concentrés en priorité sur les travaux de la Commission concernant les exercices comptables 2016/2017 et 2017/2018.
Observations
Les nouvelles dispositions légales remédient à certaines lacunes de l'approbation des comptes, mais des risques subsistent au moment de la libération de la retenue sur paiement
21 Notre examen d'un échantillon de dix dossiers constitués aux fins de l'assurance a confirmé que la Commission, en application des dispositions légales, réalise des travaux ciblés concernant les comptes des États membres. Elle les approuve dès lors que l'autorité d'audit a émis une opinion d'audit sans réserve sur leur exhaustivité, leur exactitude et leur véracité, sauf si elle dispose d'éléments spécifiques prouvant que cette opinion d'audit n'est pas fiable. Le niveau d'erreur n'est pas un facteur déterminant pour l'approbation. En conséquence, la Commission libère les 10 % initialement retenus sur les paiements, même si elle dispose d'éléments attestant que les dépenses inscrites dans les comptes présentent un niveau d'erreur significatif, à savoir un TETR supérieur à 2 %. Les dispositions légales qui régissent la procédure d'approbation ne satisfont donc pas à l'objectif général qui est de protéger le budget de l'UE jusqu'à ce que l'évaluation de la régularité soit achevée. L'encadré 1 donne un exemple illustrant cette lacune.
Approbation de comptes présentant un niveau d'erreur significatif
Une autorité d'audit nationale a émis une opinion d'audit avec réserve sur le dossier aux fins de l'assurance pour 2017‑2018 et a confirmé un TETR de 8,54 %. La Commission a demandé à l'autorité d'audit de changer son opinion d'audit sur les comptes en opinion sans réserve, en faisant valoir que le taux d'erreur résiduel élevé n'avait pas d'incidence sur les comptes, mais uniquement sur la légalité et la régularité des dépenses et sur les systèmes de gestion et de contrôle. L'autorité d'audit a donc modifié l'opinion avec réserve qu'elle avait émise. Elle a levé la réserve en ce qui concerne les comptes, mais en a maintenu une sur la légalité et la régularité des dépenses et sur le fonctionnement des systèmes de gestion et de contrôle. Conformément à la réglementation, cela s'est traduit par l'approbation des comptes et la libération de la retenue de 10 % avant que les corrections nécessaires pour ramener le TETR en dessous de 2 % n'aient été appliquées.
22 Le nouveau cadre légal pour la période de programmation 2021‑2027 remédie en partie aux lacunes de la procédure d'approbation des comptes. La retenue sera abaissée à 5 %, et la Commission ne pourra pas approuver les comptes si le TETR communiqué par les autorités d'audit est supérieur à 2 %. Cependant, la Commission continuera à évaluer la fiabilité du TETR communiqué, et donc la régularité des dépenses concernées, après l'approbation des comptes. Nous avons soulevé la même problématique dans notre avis n° 6/2018, où nous avons souligné que le processus d'approbation des comptes par la Commission ne prend pas en considération les corrections financières qu'elle est susceptible d'effectuer ultérieurement, ni la nécessité de corriger les taux d'erreurs, puisqu'elle effectue des contrôles supplémentaires sur les dépenses y afférentes après l'approbation des comptes[5].
Les lacunes inhérentes aux contrôles documentaires de la Commission réduisent leur utilité pour la confirmation du TETR
Les contrôles documentaires de la Commission ne sont pas conçus pour déceler des dépenses inéligibles non détectées précédemment
23 Lors des contrôles documentaires destinés à évaluer la régularité, la Commission analyse, à l'aide de listes de vérification normalisées, les informations fournies dans chacun des dossiers aux fins de l'assurance. Contrairement à la procédure d'approbation des comptes, ces contrôles documentaires sont censés porter sur la légalité et la régularité des opérations sous-jacentes et visent à confirmer la fiabilité des TETR communiqués par les autorités d'audit.
24 Pour ce faire, la Commission ne se limite pas à évaluer les dossiers constitués aux fins de l'assurance, mais tient également compte d'autres informations d'audit. En général, ces dernières se rapportent non seulement aux travaux de l'autorité d'audit, mais aussi à d'autres éléments des systèmes de gestion et de contrôle lorsqu'elles proviennent des audits préventifs des systèmes réalisés par la Commission à un stade précoce, ou d'autres audits thématiques.
25 Lors du contrôle documentaire, la vérification des informations sur la régularité porte sur les informations fournies dans le rapport annuel de contrôle, dans l'opinion d'audit et dans les autres documents du dossier aux fins de l'assurance. En complément aux contrôles documentaires, la Commission peut également effectuer des missions d'information auprès des autorités d'audit avant ou après réception du dossier constitué aux fins de l'assurance. Cependant, avant la révision de 2020, la méthodologie de la Commission relative aux contrôles documentaires et aux missions d'information ne prévoyait pas l'évaluation ou la vérification de la régularité d'opérations ou de dépenses prises isolément. Notre examen de dix dossiers constitués aux fins de l'assurance a montré que la Commission évaluait chacun d'eux de manière structurée, mais que l'incidence de ces évaluations sur ses conclusions quant à la régularité était limitée, comme nous l'exposons aux points suivants.
26 Nous avons observé que la Commission, s'appuyant sur ses contrôles documentaires, avait modifié certains des TETR que les autorités d'audit lui avaient communiqués. Nous avons analysé un échantillon de dix cas de ce type concernant l'exercice comptable 2017/2018, dans lesquels une modification substantielle avait eu lieu. Nous avons constaté que dans tous les cas, la modification s'expliquait par une erreur de calcul de l'autorité d'audit ou par des constatations résultant d'autres audits, par exemple de précédents audits de conformité de la Commission, d'audits préventifs des systèmes qu'elle réalise à un stade précoce ou de nos propres travaux. Pour pouvoir relever des erreurs en sus de celles déjà détectées par l'autorité d'audit dans le cadre de ses audits des opérations, la Commission devrait effectuer des travaux supplémentaires au niveau des opérations, ce qui est révélateur d'une lacune inhérente à ses contrôles documentaires.
27 En outre, la Commission évalue chaque rapport d'audit des systèmes nationaux et tient compte des informations dans la conclusion qu'elle formule à la suite des contrôles documentaires concernant la légalité et la régularité des dépenses certifiées dans les dossiers aux fins de l'assurance. Néanmoins, la documentation, par la Commission, des travaux effectués pour examiner les rapports d'audit des systèmes nationaux n'était pas assez détaillée. Les listes de vérification de la Commission comportent trois questions auxquelles les auditeurs répondent souvent par «oui» ou par «non» sans fournir de commentaires explicatifs. En l'absence d'informations plus détaillées, nous n'avons pas été en mesure de comprendre quels travaux avaient été réalisés ni de confirmer qu'ils étaient suffisants.
Tant les audits de conformité de la Commission que les nôtres ont permis de relever des erreurs significatives qui n'auraient pas pu être détectées par les contrôles documentaires
28 Notre analyse a fait apparaître qu'à la suite de ses audits de conformité concernant les exercices comptables 2016/2017 et 2017/2018, réalisés entre 2018 et 2020, la Commission avait ajusté un grand nombre de TETR. Dans deux cinquièmes (42 %) des cas environ, la Commission a constaté des erreurs qui ont contribué à faire passer le TETR au-dessus des 2 %, comme le montre la figure 5. Dans près d'un cinquième (17 %) de ces cas, le TETR dépassait les 5 %. Les erreurs supplémentaires qui ont entraîné l'ajustement du TETR n'avaient pas été détectées par les contrôles documentaires effectués précédemment.
Figure 5 – Nombre de PO pour lesquels la Commission a modifié le TETR à l'issue d'un audit de conformité
Source: Cour des comptes européenne.
29 De surcroît, nos propres travaux d'audit relatifs aux déclarations d'assurance de 2017[6], 2018[7] et 2019[8] ont montré que dans 23 des 47 dossiers constitués aux fins de l'assurance (49 %), le TETR avait été largement sous-estimé par l'autorité d'audit. Dans ces 23 cas, le TETR communiqué aurait dû être supérieur au seuil de signification de 2 %.
30 Si la Commission procède bien à une évaluation structurée des informations fournies dans les dossiers constitués aux fins de l'assurance, et en particulier dans les rapports annuels de contrôle, notre analyse a montré que certaines dépenses irrégulières n'étaient pas détectées lors des contrôles documentaires, et donc pas corrigées. Les contrôles documentaires de la Commission ne sont pas conçus pour permettre de déceler les dépenses inéligibles non détectées précédemment, ce qui limite leur valeur ajoutée pour ce qui est de confirmer la régularité des opérations sous-jacentes et la validité des TETR communiqués par les autorités d'audit.
La Commission n'a pas toujours sélectionné, aux fins des audits de conformité, les autorités d'audit présentant le plus haut risque, comme le prévoit son approche fondée sur les risques
31 Dans sa stratégie d'audit, la Commission prévoit de suivre une approche fondée sur les risques. À cette fin, elle procède à une évaluation annuelle des risques afin de sélectionner les autorités d'audit les plus exposées à des risques, qui feront l'objet de ses audits de conformité. Les deux DG appliquent les mêmes critères et la même approche pour leur évaluation annuelle des risques, qui tient également compte des informations tirées du contrôle documentaire des dossiers constitués aux fins de l'assurance. À l'issue de l'évaluation des risques, les autorités d'audit sont classées en fonction de leur niveau de risque et se voient attribuer un score en la matière.
32 La Commission réalise en outre une évaluation des facteurs de risque spécifiques pour chaque PO. Après avoir évalué le niveau de risque associé aux PO qui relèvent de la responsabilité des autorités d'audit dont elle a déjà déterminé le niveau de risque, la Commission sélectionne les autorités d'audit et les PO qui feront l'objet de ses audits de conformité.
33 Lors de notre examen des évaluations des risques effectuées par les deux DG en 2018 et 2019, nous avons constaté que la Commission ne suivait pas toujours la procédure établie. Par exemple, elle a attribué 20 points à un risque donné qui, selon la procédure, n'aurait dû en valoir que cinq. Dans certains cas, elle n'a pas attribué 0 point (pour «oui») ou 10 points (pour «non»), mais bien 5 points, alors que cette possibilité n'était pas prévue dans ses procédures. Ces incohérences ont eu une incidence sur le score de risque global des différentes autorités d'audit et, par conséquent, sur leur classement par la Commission lors de l'élaboration de son plan d'audit. Elles sont également révélatrices de faiblesses inhérentes au processus.
34 Pour apprécier la fiabilité de l'évaluation des risques réalisée par la Commission, nous avons analysé si les résultats figurant dans les rapports finaux d'audit de conformité de 2017, 2018 et 2019 corroboraient son évaluation initiale des risques. En d'autres termes, nous avons cherché à déterminer si les autorités d'audit avaient été considérées à juste titre comme présentant un haut risque ou un risque faible. Nous avons estimé qu'une autorité d'audit était à haut risque lorsque son score était supérieur au score de risque moyen de la Commission et, partant, qu'elle était à faible risque lorsque son score était inférieur à cette moyenne. Nous avons constaté que la Commission avait révisé le TETR pour 11 des 13 autorités d'audit à faible risque. Dans deux cas, cette révision a eu pour effet de faire passer le TETR au-dessus du seuil de 2 %. Dans les neuf autres cas, elle n'a pas entraîné de modification de la conclusion selon laquelle le TETR était inférieur à ce seuil. Cela montre que deux de ces autorités d'audit n'étaient pas vraiment à faible risque. Pour les autorités d'audit à haut risque, la révision de la Commission a plus souvent fait passer le taux d'erreur au-dessus des 2 % (dans 20 cas sur 39).
35 À l'issue de nos propres travaux aux fins de la déclaration d'assurance, nous avons considéré que le TETR devrait être supérieur à 2 % pour trois des huit autorités d'audit à faible risque couvertes par nos vérifications de détail. Sur le plan de l'incidence, la figure 6 montre qu'en moyenne, les TETR communiqués par les autorités d'audit à faible risque nécessitent un ajustement plus élevé que ceux communiqués par les autorités d'audit à haut risque. Cela signifie que l'évaluation, par la Commission, de ce qui constitue une autorité à faible risque dépend des informations disponibles à un moment donné et présente donc des lacunes intrinsèques.
Figure 6 – Incidence moyenne de nos travaux sur les taux d'erreur résiduels communiqués par les autorités d'audit (AA) à haut et à faible risque
Source: Cour des comptes européenne.
36 Nous avons également examiné le plan d'audit 2019 de la Commission afin de déterminer si les autorités d'audit considérées comme présentant le plus haut risque avaient été sélectionnées. Nous avons constaté que 8 des 12 autorités d'audit sélectionnées par la DG EMPL affichaient un score de risque inférieur à la moyenne générale de 32 %. Or, la Commission n'a pas documenté la justification de cet écart par rapport au résultat de son évaluation des risques. Par conséquent, nous n'avons pas été en mesure de vérifier si la Commission avait toujours suivi son approche fondée sur les risques et sélectionné les autorités d'audit présentant le plus haut risque aux fins des audits de conformité. Le tableau 1 montre les scores de risque pour une sélection d'autorités d'audit, par DG.
Tableau 1 – Vue d'ensemble des scores de risque des autorités d'audit sélectionnées
| 2019 – évaluation des risques | REGIO | EMPL |
|---|---|---|
| Nombre d'autorités d'audit évaluées | 83 | 101 |
| Score de risque moyen des autorités d'audit évaluées | 38 % | 30 % |
| 2019 – plan d'audit | ||
| Audits de conformité réalisés | 14 | 12 |
| Autorités d'audit sélectionnées aux fins des audits de conformité | 11 | 12 |
| Score de risque moyen des autorités d'audit sélectionnées | 53 % | 26 % |
| Autorités d'audit sélectionnées dont le score de risque est supérieur à la moyenne | 10 | 4 |
Source: Cour des comptes européenne.
Bien que ses audits de conformité lui permettent de détecter des dépenses irrégulières, la Commission révise souvent ses résultats d'audit finaux lors de la phase de suivi avec les États membres
Les audits de conformité ont mis au jour des dépenses irrégulières, mais nous avons retrouvé deux erreurs non détectées dans notre échantillon
37 En procédant à ses audits de conformité, la Commission cherche à obtenir une assurance raisonnable que les travaux des autorités d'audit sont fiables. À cette fin, lors de chaque audit de conformité, elle réexamine généralement huit à dix opérations précédemment examinées par l'autorité d'audit.
38 Nous avons analysé un échantillon de dix audits de conformité couvrant un total de 73 opérations. Dans son rapport final d'audit de conformité, la Commission a fait état de constatations ayant une incidence financière pour 28 de ces 73 opérations. Cela signifie qu'elle a détecté des dépenses inéligibles susceptibles d'influer sur le TETR. Dans notre échantillon de dix opérations sélectionnées de manière aléatoire, nous avons encore relevé des erreurs qui n'avaient pas été détectées par la Commission dans deux opérations.
39 Dans un cas, nous avons constaté que les frais généraux ont été remboursés sur la base d'un taux forfaitaire (option de coûts simplifiés). Alors que selon la réglementation, les options de coûts simplifiés doivent être approuvées et accordées à l'avance, le taux forfaitaire n'a été approuvé ici qu'au moment de l'exécution de l'opération. De plus, ni l'autorité d'audit ni les auditeurs de la Commission n'ont remarqué que les coûts n'avaient pas été déclarés conformément à la méthodologie définie dans la convention de subvention. À cet égard, nous avons noté que la Commission avait fait référence à une disposition légale erronée dans ses documents de travail. Nous en concluons que les coûts déclarés n'étaient pas conformes à la base juridique applicable et qu'ils étaient dès lors inéligibles. En raison de l'impact de cette erreur, le TETR communiqué par la Commission dans son rapport final d'audit de conformité était sous-estimé.
40 Dans le second cas, une opération concernait l'acquisition de deux vaisseaux destinés à l'organisation de croisières fluviales de plusieurs jours. Les autorités de l'État membre et la Commission ont classé ces activités dans la rubrique «activités récréatives et de loisirs», et l'aide a été exemptée de la notification concernant les aides d'État. Comme le bénéficiaire a indiqué dans la demande que les navires devaient être en partie exploités par des entités appartenant au même groupe que lui, l'aide était susceptible de soutenir les activités dans le secteur des croisières. Selon les lignes directrices de la Commission, ce secteur d'activité relève explicitement des transports, un secteur qui n'est pas exempté de l'obligation de notification des aides d'État. L'État membre et les auditeurs de la Commission n'ayant analysé ni la structure du groupe ni les accords d'exploitation, nous concluons qu'il se peut que les critères d'éligibilité nécessaires à l'approbation de l'opération n'aient pas été remplis et que cette dépense n'aurait donc pas dû être déclarée éligible.
41 Outre les problèmes mis en évidence ci-dessus, nous avons observé que pour l'un des dix audits de conformité que nous avons examinés, la DG REGIO et la DG EMPL n'étaient pas parvenues à la même conclusion en ce qui concerne les TETR définitifs (voir encadré 2). En l'occurrence, l'autorité d'audit avait communiqué un taux d'erreur commun couvrant les fonds des deux DG. Nous avons également relevé un problème similaire pour l'un des contrôles documentaires de notre échantillon. À cet égard, nous prenons acte de la mise en place en juillet 2021 de la direction conjointe d'audit de la cohésion (DAC), compétente pour toutes les activités d'audit liées aux dépenses de cohésion. La DAC a pour mission d'exercer des fonctions d'assurance et d'audit pour le compte des deux directeurs généraux et de remplir toutes les fonctions d'audit relevant de leur responsabilité. La fusion de deux directions d'audit auparavant distinctes, celles des DG REGIO et EMPL, devrait contribuer à garantir la cohérence des travaux d'audit et des évaluations de la Commission.
Audit de conformité – Échantillon commun de quatre PO couvrant des projets du FEDER et du FSE
Pour l'exercice comptable 2016/2017, une autorité d'audit a fondé son opinion concernant la légalité et la régularité sur un échantillon commun d'opérations provenant de PO du FEDER et du FSE. Ayant prélevé un échantillon commun aux deux Fonds, l'autorité d'audit a également déterminé un taux d'erreur commun.
À l'issue de l'audit de l'échantillon commun d'opérations, elle a fait état d'un TETR commun de 0,0 %. Les DG REGIO et EMPL ont toutes deux décidé de procéder à un audit de conformité.
Après avoir réalisé son audit de conformité sur la base de huit opérations tirées de PO du FEDER, la DG REGIO a ajusté le TETR commun à 6,9 %. Contrairement à la DG REGIO, qui s'est appuyée sur le taux d'erreur commun, la DG EMPL a communiqué un taux d'erreur de 0,3 % concernant uniquement les PO du FSE. Cela signifierait que le TETR pour les PO du seul FEDER s'élève à 21,3 % et que celui au niveau de la Commission est nettement sous-estimé.
En l'occurrence, la taille de l'échantillon était suffisante pour permettre à chacune des deux DG de tirer une conclusion sur le Fonds dont elle avait la responsabilité. Elles auraient cependant dû se coordonner et suivre une même approche, en communiquant soit chacune un TETR pour leur Fonds respectif, soit toutes les deux le taux commun, de manière à éviter une sous-estimation du risque au niveau de la Commission.
42 Nous avons examiné la documentation de la Commission sur les travaux qu'elle avait effectués pour les 73 opérations couvertes par ses audits de conformité. Les normes internationales d'audit exigent qu'une documentation adéquate soit disponible, en particulier lorsque d'autres auditeurs sont susceptibles de s'appuyer sur les travaux d'audit et les constatations.
43 Chaque DG a élaboré des listes de vérification spécifiques pour son examen des opérations sélectionnées. Nous avons constaté que plus d'un tiers (37 %) des listes de vérification n'avaient pas été complétées, une ou plusieurs questions d'audit étant restée(s) sans réponse. Les réponses, lorsqu'elles étaient fournies, se limitaient souvent à «oui» ou «non», sans aucune information supplémentaire qui permettrait à un examinateur indépendant d'évaluer l'adéquation des travaux sous-jacents à la réponse. La documentation relative aux dépenses contrôlées par la Commission présentait également des insuffisances, aucune information n'étant disponible pour près d'un cinquième (18 %) des dossiers d'audit examinés en ce qui concerne le nombre et la valeur des postes de dépenses testés. La figure 7 donne une synthèse des insuffisances relevées dans la documentation d'audit de la Commission.
Figure 7 – Insuffisances dans la documentation d'audit de la Commission
Source: Cour des comptes européenne.
La Commission révise souvent ses résultats d'audit finaux lors de la phase de suivi avec les États membres
44 Lorsque la Commission a terminé ses travaux, elle élabore un projet de rapport d'audit dans lequel figurent les constatations de ses audits de conformité. Conformément aux dispositions du RPDC[9] (règlement portant dispositions communes) et aux normes internationales d'audit, les États membres ont la possibilité de formuler des observations sur l'évaluation initiale de la Commission et de la contester. Après avoir analysé les réponses de l'État membre, la Commission établit, conformément à ses règles internes, un rapport d'audit final qui doit comprendre ses conclusions définitives et indiquer, le cas échéant, les corrections requises. La Commission dispose de trois mois à compter de son audit sur place pour établir son projet de rapport, et de trois mois supplémentaires à compter de la réception d'une réponse exhaustive des autorités nationales pour fournir le rapport final.
45 Après avoir établi le rapport d'audit final, la Commission entame la phase de suivi au cours de laquelle elle vérifie si les autorités des États membres ont accepté et appliqué les corrections résultant de ses constatations ou si elle doit lancer elle-même une procédure de correction financière[10]. En général, la Commission encourage les autorités des États membres à mettre en œuvre les corrections et, au besoin, elle engage de nouvelles discussions.
46 Pour deux des dix rapports d'audit de conformité que nous avons examinés, les États membres ont accepté les résultats d'audit et ont mis en œuvre les corrections. Pour les huit autres, nous avons observé que la Commission et les États membres avaient continué à échanger des informations et des points de vue. Dans trois cas, la Commission a revu l'évaluation qu'elle avait effectuée dans son rapport final: dans l'un d'eux, elle a retiré une constatation, et dans les deux autres, elle a réévalué l'incidence financière des erreurs (voir encadré 3). Pour les cinq autres rapports, les échanges étaient toujours en cours au moment de notre audit, dans un cas 24 mois après la parution du rapport d'audit final, sans que la Commission ait pris de décision définitive. Par conséquent, les conclusions présentées dans les rapports d'audit finaux que nous avons examinés n'étaient, en pratique, pas définitives et restaient susceptibles d'être modifiées par la suite. Nous observons à ce propos que la Commission ne confirme pas formellement un taux d'erreur définitif.
Les taux d'erreur dits «finaux» ne le sont pas réellement
La DG EMPL a réalisé, pour un PO, un audit de conformité dans le cadre duquel elle a réexaminé huit opérations examinées précédemment par l'autorité d'audit. Dans son rapport final, la Commission a conclu que six opérations comportaient des erreurs supplémentaires, dont une erreur de 100 % car l'opération ne satisfaisait pas aux critères d'éligibilité du PO. Elle a recalculé le TETR, le faisant passer de 1,8 % à 5,5 %. La DG EMPL a également informé l'État membre des corrections qu'il devait appliquer pour ramener le TETR en dessous des 2 %.
L'État membre a toutefois manifesté son désaccord avec l'évaluation de la Commission. Ensuite, dans une lettre de suivi, la DG EMPL a accepté l'argument de l'État membre selon lequel il ne s'agissait pas d'une erreur «aléatoire» (susceptible de se retrouver dans le reste de la population), mais bien d'une erreur «systémique» (qui ne pouvait se produire que dans des circonstances particulières), ce qui s'est traduit par un TETR de 2,0 %.
À notre avis, le reclassement de cette erreur en erreur systémique ne se justifiait pas au regard de la définition fournie dans les orientations de la Commission[11]. Les autorités de l'État membre ont confirmé à la Commission que cette erreur n'avait d'incidence sur aucune des opérations non contrôlées de la population. En conséquence, le TETR figurant dans le rapport d'audit final n'était pas définitif, et il a continué à être sous-estimé.
La Commission n'a pas encore appliqué de corrections financières nettes
47 Notre examen des 26 audits de conformité effectués en 2018 (l'exercice le plus complet dont nous disposions au début de notre audit) a montré que la mise en œuvre des corrections était un processus qui pouvait prendre plusieurs années en raison du droit qu'ont les États membres de contester la demande de corrections financières de la Commission[12]. Selon les rapports finaux de la Commission, 19 de ces audits de conformité ont débouché sur une demande de corrections financières. Dans neuf cas, les autorités des États membres avaient intégralement appliqué les corrections au 31 décembre 2020. Cela leur a permis de remplacer ces dépenses irrégulières par d'autres dépenses sur les périodes comptables ultérieures. Dans les dix autres cas, les discussions avec les États membres, ainsi que les travaux supplémentaires devant être effectués par les autorités d'audit, étaient toujours en cours. Deux de ces dix audits de conformité représentent à eux seuls plus de 50 % des corrections à effectuer.
48 Fin 2020, les autorités des États membres n'avaient corrigé qu'un tiers du montant à corriger. Ce faible taux de mise en œuvre reflète la longueur de la procédure.
49 Le cadre juridique pour la période 2014‑2020 prévoit que la Commission applique des corrections financières nettes en cas d'insuffisances graves non décelées par l'État membre[13], dans les conditions énoncées à l'article 145, paragraphe 7, du RPDC. Une correction financière nette implique une réduction définitive des fonds alloués à l'État membre concerné. En novembre 2021, la Commission n'avait pas encore appliqué de correction financière nette.
50 Afin d'établir un indicateur de régularité au niveau du domaine d'action, chacune des DG (REGIO et EMPL) calcule d'abord un TETR moyen pondéré pour les PO relevant de sa gestion et publie ce taux en tant qu'IPC dans son RAA. Aussi bien les résultats des contrôles documentaires que ceux des audits de conformité sont pris en compte dans ces calculs.
51 Bien que les DG présentent les IPC comme étant leur meilleure estimation du TETR, nous avons relevé un certain nombre de problèmes méthodologiques qui font que les IPC publiés par les DG ne représentent qu'un niveau d'erreur estimatif minimal. Nous observons également que les valeurs des IPC publiés ne sont pas définitives, étant donné que les TETR sous-jacents au niveau des PO peuvent toujours être révisés à l'issue de travaux d'audit en cours ou à venir. Nous exposons ces problèmes de méthodologie aux points ci-après.
Les lacunes de la méthodologie de la Commission ne permettent généralement d'établir qu'un taux d'erreur minimal au niveau des PO
52 Les audits de conformité de la Commission s'appuient sur un échantillon de PO déjà audités par l'autorité d'audit. Conformément à sa méthodologie, la Commission examine généralement huit à dix opérations pour chacun de ses audits de conformité. Elle sélectionne normalement ces opérations sur la base d'une appréciation tenant compte d'un certain nombre de facteurs de risque tels que la présence éventuelle d'une aide d'État, le recours aux marchés publics et le type de bénéficiaire. Au moment de sélectionner une opération, elle prend également en considération la taille de celle-ci et les différents axes prioritaires.
53 Nous avons évalué l'échantillon sélectionné par la Commission et avons constaté que la documentation était insuffisante pour nous permettre de relier des risques particuliers aux opérations sélectionnées. Nous observons en outre qu'il est possible que la taille de l'échantillon ne permette pas toujours de couvrir tous les types d'opérations de l'échantillon des autorités d'audit et les risques y afférents, compte tenu de la diversité des priorités des PO et des opérations qui bénéficient d'un financement au titre de la politique de cohésion. Tel est notamment le cas lorsqu'un rapport annuel de contrôle porte sur plusieurs PO.
54 Pour les dix audits de conformité que nous avons examinés, nous avons analysé la fréquence des erreurs (la proportion d'opérations contenant des erreurs non détectées par les autorités d'audit) ainsi que l'augmentation du TETR en points de pourcentage (voir tableau 2).
Tableau 2 — Vue d'ensemble des erreurs non détectées précédemment, relevées dans le cadre des dix audits de conformité examinés
| Référence de l'audit | Taille des échantillons des AA1 | Taille des échantillons de la COM1 | Couverture (proportion d'opérations réexaminées2) | Nombre d'opérations avec erreurs2 | Fréquence des erreurs supplémentaires | Augmentation du TETR en points de % |
|---|---|---|---|---|---|---|
| Total pour les deux DG | ||||||
| Total pour les 10 audits de conformité examinés | 487 | 73 | 15 % | 28 | 38 % | 1,94 % |
| DG REGIO | ||||||
| 1er audit | 99 | 8 | 8 % | 3 | 38 % | 0,36 % |
| 2e audit | 34 | 8 | 24 % | 1 | 13 % | 6,82 % |
| 3e audit | 6 | 4 | 67 % | 1 | 25 % | 0,86 % |
| 4e audit | 146 | 8 | 5 % | 6 | 75 % | 2,25 % |
| 5e audit | 30 | 8 | 27 % | 3 | 38 % | 4,20 % |
| DG EMPL | ||||||
| 6e audit | 40 | 8 | 20 % | 4 | 50 % | 0,29 % |
| 7e audit | 30 | 8 | 27 % | 1 | 13 % | 0,05 % |
| 8e audit | 30 | 5 | 17 % | 1 | 20 % | 0,00 % |
| 9e audit | 30 | 8 | 27 % | 4 | 50 % | 2,22 % |
| 10e audit | 42 | 8 | 19 % | 4 | 50 % | 2,38 % |
1 AA = autorité(s) d'audit; COM = Commission.
2 Les pourcentages concernent l'échantillon de la Commission.
Source: Cour des comptes européenne.
55 En règle générale, le nombre d'opérations sélectionnées par la Commission était conforme à sa méthodologie, ce qui lui permettait de couvrir une partie des opérations contrôlées par l'autorité d'audit. Pour les dix audits de conformité que nous avons examinés, les DG ont couvert 15 % des opérations contrôlées par les autorités d'audit, ce qui correspondait à 24 % des dépenses figurant dans l'échantillon d'audit de ces dernières. Dans 38 % des opérations qu'elles ont contrôlées, elles ont encore relevé des erreurs, souvent de plusieurs types, non détectées lors des contrôles déjà réalisés par les autorités d'audit. La Commission a ensuite vérifié si des erreurs de même nature que celles qu'elle avait détectées se retrouvaient dans d'autres opérations contrôlées par les autorités d'audit. Cinq des dix audits de conformité que nous avons examinés ont mis en évidence quelques erreurs récurrentes, dont la Commission a déterminé l'incidence. Dans neuf de ces dix audits de conformité, elle a considéré d'autres erreurs comme étant non récurrentes. En pareils cas, la Commission n'étoffe pas son échantillon pour réduire le risque que subsistent des erreurs d'autres types non détectées auparavant.
56 À notre avis, la fréquence élevée des erreurs non détectées relevées par la Commission dans son échantillon, souvent limité, d'opérations indique que les opérations sélectionnées par l'autorité d'audit qui n'ont pas été examinées par la Commission présentent probablement aussi d'autres types d'erreurs. Cela signifie que dans de tels cas, le TETR est en réalité un taux minimal au niveau des PO.
57 L'encadré 4 montre pourquoi l'approche de la Commission ne permet d'établir qu'un taux d'erreur minimal.
Audits de conformité — certaines erreurs n'ont été ni détectées ni corrigées
La DG REGIO a effectué un audit de conformité couvrant plusieurs PO pour l'exercice comptable 2016‑2017. Au cours de l'audit, elle a recontrôlé 8 des 99 opérations contrôlées par l'autorité d'audit. Pour trois des huit opérations, elle a encore relevé des erreurs que l'autorité d'audit n'avait pas détectées. Ces erreurs supplémentaires ayant une incidence sur le TETR, elle l'a ajusté, le faisant passer de 1,18 % à 1,54 %. Alors que son échantillon comportait trois erreurs non détectées auparavant, la Commission a estimé avoir une assurance raisonnable qu'il ne restait pas d'erreurs non détectées dans les 91 opérations qu'elle n'avait pas examinées. Pour ces opérations, la DG REGIO s'est appuyée sur les travaux de l'autorité d'audit.
Lors de notre audit aux fins de la déclaration d'assurance 2018, nous avons contrôlé 9 des 91 opérations non couvertes par la Commission et avons relevé des erreurs quantifiables dans six d'entre elles. Ces six opérations où des erreurs quantifiées ont été constatées comportaient différents types d'erreurs. La Commission avait connaissance des erreurs relatives aux aides d'État que nous avons relevées, mais elle n'avait pas détecté les autres types d'erreurs dans son échantillon. Sur la base de nos travaux, nous avons estimé que le TETR s'élevait à 7,10 % au moins, alors que l'audit de conformité de la Commission avait débouché sur un taux de 1,54 %. Étant donné la fréquence élevée des erreurs ayant une incidence financière, il est probable que des erreurs non détectées auparavant soient également présentes dans les opérations qui n'ont été contrôlées ni par la Commission ni par nous-mêmes.
La méthodologie de la Commission ne lui permet d'estimer qu'un taux d'erreur minimal au niveau des DG
58 Nous avons constaté que les contrôles documentaires ne sont pas conçus pour déceler les dépenses inéligibles non détectées auparavant, ce qui limite leur valeur ajoutée pour ce qui est de confirmer la validité des taux d'erreur communiqués. Ils ne remplacent pas les audits de conformité (voir point 30). Malgré cela, les DG se fient aux contrôles documentaires dans le cadre de leur méthode de détermination du taux d'erreur au niveau de leur propre direction et à celui des Fonds (IPC n° 5). Cependant, pour estimer le taux d'erreur agrégé (IPC n° 5), elles n'évaluent pas l'implication, pour les PO non audités, des erreurs constatées lors de leurs audits de conformité (contrôles documentaires).
59 Selon nous, il n'est pas justifié de supposer que les PO non audités sont exempts d'erreurs supplémentaires. Certes, la Commission détecte un grand nombre d'erreurs non signalées dans l'échantillon d'opérations/de PO contrôlé par les autorités d'audit, mais les faiblesses d'ordre méthodologique de son approche font que les taux d'erreur qu'elle communique au niveau des DG en tant qu'IPC ne sauraient représenter que des valeurs minimales. Le niveau d'erreur réel est donc probablement plus élevé.
60 Outre cet IPC, les deux DG communiquent également depuis 2018 un taux d'erreur maximal estimatif, conçu pour tenir compte de l'incidence potentielle des travaux d'audit en cours sur les informations relatives à la régularité présentées dans les RAA. Afin de déterminer ce taux maximal, elles appliquent des taux forfaitaires aux PO pour lesquels les résultats des travaux d'audit réalisés ne sont pas encore connus.
61 Depuis 2019, les deux DG expliquent également dans leur RAA que les taux maximums tiennent compte de toutes les erreurs qui pourraient se présenter, en dehors de l'échantillon d'opérations, dans des PO audités par la Commission ou par la Cour. Dans notre rapport annuel 2019, nous avons estimé que ce taux était plus approprié, dans la mesure où il tient compte de l'incidence potentielle des travaux d'audit en cours[14]. Alors que la DG REGIO applique l'approche décrite dans le RAA, la DG EMPL ne tient pas pleinement compte d'éventuelles erreurs autres que celles détectées. L'approche de la Commission telle qu'appliquée par la DG REGIO a été définie en réaction à notre constatation[15] selon laquelle les travaux d'audit se poursuivent après la communication des taux dans les RAA. Elle ne permet toutefois pas de résoudre d'autres problèmes de méthodologie tels que l'incapacité des contrôles documentaires à mettre en évidence toutes les dépenses inéligibles, la couverture limitée des PO par les audits de conformité de la Commission et le risque que des erreurs ne soient pas détectées lors de son réexamen des opérations.
Les taux d'erreur annuels au niveau des Fonds ou des DG ne sont pas définitifs
62 Dans notre rapport annuel 2018, nous avons souligné que la plupart des dispositions relatives à la clôture des programmes relevant de la période 2014‑2020 reportent l'évaluation finale de l'éligibilité des coûts déclarés pour certaines opérations à un stade ultérieur, le plus souvent à la clôture des programmes[16]. Cela concerne toute une série d'opérations relevant de nombreux PO, et en particulier les investissements réalisés par les instruments financiers, l'apurement des avances sur les aides d'État, l'évaluation finale des opérations génératrices de recettes et le traitement réservé aux projets non opérationnels. Même si la Commission ne tient plus compte des avances versées aux instruments financiers pour calculer les IPC qu'elle communique dans ses RAA, l'évaluation tardive des autres questions d'éligibilité peut avoir une incidence sur les taux d'erreur communiqués pour les années en question. Cela corrobore également notre conclusion selon laquelle les taux présentés dans les RAA ne reflètent pas nécessairement l'évaluation finale des DG. Si des erreurs sont mises au jour a posteriori dans des opérations de ce type, le taux d'erreur pour les PO concernés devra être recalculé et revu à la hausse.
Les réserves pâtissent du caractère incomplet des informations
63 Dans les RAA des DG, les directeurs généraux fournissent une déclaration d'assurance dans laquelle ils indiquent que les procédures de contrôle mises en place permettent d'obtenir les garanties nécessaires quant à la légalité et à la régularité des opérations sous-jacentes. Lorsqu'ils estiment que la déclaration générale n'est pas adaptée, ils peuvent l'assortir d'une réserve concernant des domaines de recettes et de dépenses déterminés. Dans le domaine de la cohésion, ils émettent des réserves au niveau des PO plutôt qu'à celui des Fonds.
64 Conformément aux instructions de la Commission, un PO fait l'objet d'une réserve concernant la période de programmation 2014‑2020 si au moins l'un des critères suivants est rempli[17]:
- le taux d'erreur total est supérieur à 10 %;
- des éléments essentiels des systèmes présentent des déficiences qui pourraient donner lieu à des taux d'irrégularité supérieurs à 10 % et qui n'ont encore fait l'objet d'aucune mesure correctrice adéquate;
- le TETR est supérieur à 2 %;
- des problèmes importants sont constatés en ce qui concerne l'exhaustivité, l'exactitude et la véracité des comptes.
Au moment de décider s'il y a lieu d'émettre une réserve, la Commission prend également en considération les insuffisances d'ordre qualitatif pouvant avoir une incidence notable sur sa réputation.
65 La Commission applique ces critères aux dépenses déclarées dans les derniers dossiers constitués aux fins de l'assurance. Ces dépenses sont couvertes par les travaux qu'elle réalise aux fins de l'approbation des comptes l'année de publication des RAA correspondants. Cependant, la Commission ne boucle son évaluation de la régularité que la ou les années suivante(s) et ne confirme les TETR des différents PO que dans les RAA de ces années.
66 Nous avons examiné les taux concernant les exercices comptables 2016/2017 et 2017/2018 tels qu'ils ont été confirmés dans les RAA des années suivantes (respectivement 2018 et 2019). Pour chacun des PO des deux DG, nous avons analysé les informations provenant des travaux d'audit de conformité ou autres réalisés après que les réserves ont été émises. Les résultats sont présentés dans la figure 8 et illustrent les limites inhérentes au système.
Figure 8 – Vue d'ensemble des PO faisant l'objet de réserves et présentant des taux d'erreur élevés et/ou des taux supérieurs au seuil de signification
Source: Cour des comptes européenne.
67 Globalement, notre analyse montre que les directeurs généraux se sont appuyés sur les taux d'erreur préliminaires des PO pour déclarer, dans les RAA, avoir obtenu une assurance raisonnable quant à la régularité des dépenses. Or, dans un grand nombre de cas, les travaux d'audit ultérieurs ont révélé que les valeurs ajustées du taux d'erreur total dépassaient 10 % et/ou que le TETR était supérieur à 2 %, ce qui témoigne des limites inhérentes à l'approche de la Commission relative aux réserves concernant les dépenses de l'année civile. Nous présentons dans l'encadré 5 un exemple illustrant ces limites.
DG EMPL – Des réserves sont émises en l'absence d'informations exhaustives
Après avoir contrôlé un dossier aux fins de l'assurance concernant l'exercice comptable 2017/2018 et couvrant les dépenses effectuées entre le 1er juillet 2017 et le 30 juin 2018, la DG EMPL a estimé à 2,00 % le TETR d'un PO régional. Étant donné que ce taux ne dépassait pas le seuil applicable, elle n'a pas émis de réserve et a fourni pour ce PO une assurance sur les dépenses de 2018 dans son RAA relatif à cet exercice.
À l'issue de l'audit de conformité effectué après la publication du RAA 2018, le TETR a été ajusté à 4,38 %, ce qui aurait justifié l'émission d'une réserve si le cycle de contrôle avait déjà été achevé.
Les informations sur la régularité dans le domaine de la cohésion présentées dans le rapport annuel sur la gestion et la performance héritent des insuffisances des RAA
Le collège des commissaires, soutenu par les services centraux, adopte le rapport annuel sur la gestion et la performance, dont il assume la responsabilité du contenu
68 Aux points suivants, nous nous intéressons plus particulièrement à la présentation, dans la section 2 du rapport annuel sur la gestion et la performance, des chiffres relatifs à la régularité, y compris dans le domaine de la cohésion. Ce rapport est la principale contribution de la Commission à la procédure annuelle de décharge et comporte deux parties:
- la section 1 – Performance et résultats, qui donne un aperçu général des résultats obtenus[18];
- la section 2 – Contrôle interne et gestion financière, qui présente la gestion du budget de l'UE par la Commission, ainsi qu'une synthèse des informations provenant des RAA, une estimation du niveau d'erreur dans les dépenses de l'UE et l'estimation, par la Commission, du montant à risque au moment du paiement pour l'ensemble des dépenses annuelles de l'UE concernées et pour les différents domaines d'action, dont celui de la cohésion[19].
69 Les informations sur le contrôle interne et la gestion financière présentées dans le rapport annuel sur la gestion et la performance proviennent des RAA des différentes directions générales de la Commission. La répartition des responsabilités concernant les informations fournies dans ce rapport correspond à celle exposée dans les modalités de gouvernance de la Commission. Les directeurs généraux sont responsables de la fiabilité des informations présentées dans leur RAA respectif, mais c'est le collège des commissaires qui adopte le rapport annuel sur la gestion et la performance et, par suite, qui se l'approprie et assume en dernier ressort la responsabilité de son élaboration et des informations qui y figurent.
70 La figure 9 illustre le processus menant au rapport annuel sur la gestion et la performance et met en évidence la répartition des responsabilités ainsi que les contributions des directeurs généraux (dans les RAA), des services centraux et du service d'audit interne.
Figure 9 – Processus d'élaboration de la section 2 du rapport annuel sur la gestion et la performance
Source: Cour des comptes européenne.
Le rapport annuel sur la gestion et la performance hérite des lacunes des informations sur la régularité figurant dans les RAA des DG REGIO et EMPL
71 Les services centraux, la DG Budget et le secrétariat général de la Commission sont responsables de l'élaboration du rapport annuel sur la gestion et la performance, qui repose sur les RAA des différentes DG. Dans le cadre de cette mission, ils examinent le contenu des RAA, fournissent un retour d'information et organisent les réunions d'examen par les pairs entre DG, mais ce sont les directeurs généraux qui, en leur qualité de responsables de la gestion quotidienne de leur DG, restent compétents pour toute modification éventuelle.
72 Les services centraux informent le conseil d'administration de la Commission de tout problème majeur rencontré lors de l'examen par les pairs. Pour les années que nous avons examinées, ils n'ont mentionné aucun problème non résolu concernant les indicateurs de performance clés présentés dans les RAA des DG REGIO et EMPL. Concrètement, cela signifie que les services centraux ont accepté les taux communiqués dans ces RAA ainsi que l'approche sous-jacente.
73 Le risque au moment du paiement pour les dépenses de cohésion, tel que communiqué dans les rapports annuels sur la gestion et la performance que nous avons examinés, pâtit donc des mêmes lacunes que les chiffres sous-jacents présentés dans les RAA des DG. Pour les raisons exposées ci-dessus (voir points 58 à 62), il ne s'agit que d'un taux minimal, non définitif et probablement sous-estimé.
74 À cet égard, nous notons que les services centraux publient des instructions/orientations relatives à l'élaboration des RAA, avec notamment des exigences standard de qualité et de comparabilité pour l'ensemble de la Commission, mais que le propriétaire du rapport annuel sur la gestion et la performance ne fournit pas d'instructions détaillées en ce qui concerne le contenu et la portée dudit rapport ou l'examen correspondant des RAA des autres DG. De telles instructions pourraient aider le collège des commissaires à garantir la pertinence et la fiabilité des informations qui figurent dans le rapport annuel sur la gestion et la performance[20].
Conclusions et recommandations
75 Dans le cadre de l'audit objet du présent rapport, nous avons examiné les travaux de la Commission relatifs aux dossiers constitués par les États membres aux fins de l'assurance, sur lesquels elle se fonde pour valider et confirmer les taux d'erreur résiduels communiqués chaque année par les autorités d'audit. Nous avons analysé la présentation et la fiabilité des informations sur la régularité fournies par la Commission dans ses rapports annuels d'activités (RAA) et dans son rapport annuel sur la gestion et la performance. Nos recommandations visent à améliorer encore le fonctionnement du système de gestion et de contrôle actuel sans y ajouter de couches supplémentaires.
76 Globalement, nous avons constaté que la Commission consacrait des efforts considérables à l'approbation des comptes annuels des États membres et à la vérification de la fiabilité des informations sur la régularité figurant dans les rapports des autorités nationales. Toutefois, nos observations nous ont amenés à conclure qu'elle ne fournissait qu'une estimation minimale et non définitive du taux d'erreur au niveau des programmes opérationnels et à celui des directions générales et, dès lors, dans son rapport annuel sur la gestion et la performance.
77 Nous avons constaté que pendant la période 2014‑2020, la Commission, en application du cadre réglementaire, avait approuvé les comptes annuels sans prendre en considération la régularité des dépenses concernées (point 21). Bien que le législateur ait introduit la retenue de 10 % sur les paiements dans le but de protéger le budget de l'UE, la Commission a dû la libérer même lorsque les autorités d'audit des États membres avaient confirmé un taux d'erreur résiduel supérieur au seuil de signification de 2 % et que ses propres contrôles de régularité n'étaient pas encore terminés. Les dispositions régissant ces modalités ont changé pour la période de programmation 2021‑2027 (point 22). La Commission ne pourra plus approuver de comptes présentant un taux d'erreur total résiduel (TETR) confirmé supérieur au seuil de signification de 2 %, mais elle continuera à libérer la retenue, abaissée à 5 %, avant d'avoir terminé ses contrôles de régularité.
Recommandation n° 1 – La Commission devrait proposer une révision de la législation afin que le cadre juridique offre une protection adéquate contre la libération indue des retenues sur paiement
Dans un souci de protection du budget de l'UE, nous recommandons à la Commission de proposer une révision du cadre légal de la période 2021‑2027 de manière à tenir compte du risque qui subsiste après la libération de la retenue de 5 %. La Commission ne devrait pouvoir procéder à cette libération qu'après avoir terminé les travaux relatifs à la régularité pour le PO et la période comptable concernés, ou au plus tard à la clôture du programme.
Quand? Lors de la prochaine révision du cadre légal pour la période de programmation 2021‑2027 et au plus tard lors de son examen à mi-parcours.
78 Les contrôles documentaires de la Commission portant sur l'ensemble des dossiers constitués aux fins de l'assurance présentés par les États membres ne sont pas conçus pour déceler les dépenses inéligibles non détectées auparavant (points 23 à 25). Les ajustements des taux d'erreur opérés à la suite de contrôles documentaires sont généralement dus à des problèmes décelés en ce qui concerne les exercices précédents (point 26). Notre analyse a montré que certaines dépenses irrégulières n'étaient pas détectées lors des contrôles documentaires, et donc pas corrigées (points 28 à 30). Ces contrôles n'ont donc qu'une valeur ajoutée limitée pour ce qui est de confirmer la régularité des opérations sous-jacentes et la validité des TETR communiqués par les autorités d'audit.
79 Même si la Commission prévoit dans sa stratégie d'audit une approche fondée sur les risques pour sélectionner les autorités d'audit qui feront l'objet de ses audits de conformité, nous avons constaté que cette sélection ne reflétait pas toujours les scores de risque attribués aux autorités d'audit(points 33 à 35). Nous avons en outre observé que la sélection définitive des autorités d'audit, notamment dans le cas de la direction générale de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion, ne correspondait pas vraiment aux résultats de l'évaluation des risques effectuée par la DG, et que la Commission ne documentait pas la justification de cet écart (point 36).
80 Notre évaluation des travaux d'audit de la Commission a révélé plusieurs faiblesses. Nous avons constaté des insuffisances dans la documentation d'audit, qui ont compliqué notre appréciation du caractère adéquat des travaux réalisés (points 42 et 43). Dans deux des dix opérations que nous avons examinées, nous avons encore relevé des erreurs que la Commission n'avait pas détectées et qui influent sur la régularité des dépenses concernées ainsi que sur les taux d'erreur communiqués correspondants (points 38 à 40).
81 Nous avons constaté que la Commission publie ses rapports d'audit de conformité dans les délais impartis par la réglementation (point 44). Toutefois, dans la plupart des cas que nous avons examinés, elle a continué à échanger des informations et des points de vue avec les États membres après l'envoi du rapport final, lors d'une phase de suivi au cours de laquelle elle vérifie si les autorités des États membres ont accepté et appliqué les corrections demandées. Cela signifie que les résultats et les taux d'erreur présentés dans les rapports finaux n'étaient pas toujours définitifs (points 45 et 46) Nous observons à ce propos que la Commission n'apporte pas de confirmation formelle du taux d'erreur définitif aux autorités des États membres.
82 Notre examen d'un échantillon de corrections a montré qu'elles sont appliquées à l'issue d'un long processus qui peut prendre plusieurs années, les États membres étant légalement en droit de contester la validité de la décision de la Commission (points 47 et 48). En novembre 2021, la Commission n'avait pas encore appliqué de correction financière nette (point 49).
83 Certains critères d'éligibilité ne pouvant être vérifiés qu'au moment de la clôture du programme, ce qui porte atteinte à l'évaluation annuelle réalisée par la Commission, il se peut que les taux d'erreur annuels des PO concernés ne soient pas définitifs et qu'ils doivent être recalculés et revus à la hausse. D'éventuelles dépenses irrégulières relevant de ces PO ne sont ni détectées ni corrigées avant la clôture, alors que le système de gestion et de contrôle des dépenses de cohésion est censé être conçu pour permettre une approbation annuelle des comptes. La recommandation que nous avons formulée à ce sujet dans notre rapport annuel 2018[21] reste valable (point 62).
Recommandation n° 2 – La Commission devrait améliorer ses travaux d'audit et la documentation les concernant, ainsi que son processus de contrôle
Nous recommandons à la Commission de prendre les mesures qui s'imposent afin:
- que son plan d'audit de conformité reflète son évaluation des risques. Lorsque d'autres facteurs sont pris en considération et donnent lieu à des changements, la Commission devrait clairement documenter et expliquer les raisons de ces changements;
- que ses travaux d'audit soient suffisamment documentés;
- que son processus de contrôle soit renforcé de manière à permettre de détecter et de corriger les éventuelles faiblesses de ses propres travaux;
- que les États membres reçoivent séparément une confirmation formelle du TETR définitif des PO pour chaque exercice comptable.
Quand? À partir de l'exercice comptable 2020/2021.
84 Dans le cadre de ses audits de conformité, la Commission, exerçant son jugement professionnel, sélectionne et examine généralement huit à dix des opérations de l'échantillon constitué par l'autorité d'audit à des fins de contrôle (point 52). C'est notamment sur cet examen qu'elle fonde son évaluation des travaux de l'autorité d'audit et de leurs résultats. Lors des audits de conformité que nous avons examinés, la Commission a relevé un certain nombre d'erreurs non détectées, mais, étant donné sa couverture limitée des tests auxquels les autorités d'audit soumettent les opérations, et compte tenu des résultats de nos propres travaux, il est probable que d'autres erreurs n'ont pas été repérées et corrigées (points 53 à 55). De ce fait, d'une manière générale, la méthodologie de la Commission ne lui permet d'établir qu'un taux d'erreur minimal au niveau des PO (points 56 et 57).
85 Afin d'établir un indicateur de régularité au niveau du domaine d'action, chacune des directions générales (celle de la politique régionale et urbaine et celle de la direction générale de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion) calcule d'abord un TETR moyen pondéré pour les PO relevant de sa gestion et publie ce taux en tant qu'indicateur de performance clé (IPC) dans son RAA. Aussi bien les résultats des contrôles documentaires que ceux des audits de conformité sont pris en compte dans ces calculs. Les deux DG communiquent également un taux d'erreur maximal estimatif, conçu pour tenir compte de l'incidence potentielle des travaux d'audit en cours sur les informations relatives à la régularité présentées dans les RAA. Bien que les DG présentent les IPC comme étant leur meilleure estimation du niveau d'erreur, nos travaux nous portent à considérer que les IPC publiés par les DG correspondent à un minimum. Cela tient à la couverture limitée des PO et des opérations assurée par la Commission dans ses audits de conformité, aux lacunes inhérentes à ses contrôles documentaires et aux problèmes liés à ses travaux d'audit (points 58 et 59). Nous estimons que les valeurs des IPC publiés ne sont pas définitives, étant donné que les TETR sous-jacents au niveau des PO peuvent toujours être révisés à l'issue de travaux d'audit en cours ou à venir (points 46 et 62).
86 Les réserves émises par les DG sur les différents programmes constituent elles aussi un élément d'information essentiel sur la régularité des dépenses de cohésion. Les réserves formulées par la direction générale de la politique régionale et urbaine et celle de l'emploi, des affaires sociales et de l'inclusion portent sur des dépenses qui n'ont pas encore été soumises aux contrôles de régularité de la Commission (point 65). En raison des contraintes de calendrier inhérentes au processus de contrôle, la plupart des PO pour lesquels les travaux d'audit de la Commission ont permis de relever un niveau d'erreur significatif n'avaient pas été assortis de réserves dans les RAA de l'année écoulée (points 66 et 67).
Recommandation n° 3 – La Commission devrait renforcer les principaux éléments d'information sur la régularité présentés dans les RAA
Le niveau d'erreur estimatif et les réserves constituent des informations clés sur la régularité, que la Commission devrait renforcer. Nous recommandons à la Commission:
- de remédier aux problèmes que nous avons relevés lors de l'audit objet du présent rapport et qui se traduisent par un IPC (taux d'erreur) minimal. Son approche devrait permettre de faire en sorte qu'en ce qui concerne les dépenses non contrôlées, l'IPC tienne compte, pour l'estimation du taux d'erreur agrégé, de la fréquence élevée des erreurs ayant une incidence financière qui ont été détectées lors des audits de conformité;
- de faciliter la compréhension de ce sujet technique et complexe par les lecteurs en expliquant de façon plus claire et plus visible dans les RAA que les réserves sont fondées sur des taux d'erreur non encore confirmés, et en exposant les risques que cela entraîne.
Quand? À partir de l'exercice comptable 2020/2021.
87 Le rapport annuel sur la gestion et la performance est un document clé de reddition des comptes qui comporte une synthèse des informations relatives au contrôle interne et à la gestion financière de la Commission. Le collège des commissaires est responsable en dernier ressort des informations présentées dans ce document, mais il bénéficie du soutien des services centraux pour sa production. Bien que ces derniers jouent un rôle de premier plan dans l'élaboration du rapport annuel sur la gestion et la performance, nous avons observé qu'il n'existait pas d'instructions détaillées sur le contenu et la structure dudit rapport ou sur l'examen correspondant des RAA par les autres DG (point 74).
88 Les informations communiquées sur la régularité des dépenses de cohésion résultent simplement de l'agrégation des chiffres fournis dans les RAA de la DG Politique régionale et urbaine et de la DG Emploi, affaires sociales et inclusion. Tous les problèmes que nous avons mis en évidence à propos de ces chiffres se posent donc également pour le rapport annuel sur la gestion et la performance. En conséquence, le taux d'erreur communiqué ne représente qu'une valeur minimale et constitue probablement une sous-estimation du niveau d'erreur réel dans le domaine de la cohésion (point 73).
Recommandation n° 4 – Le collège des commissaires, propriétaire du rapport annuel sur la gestion et la performance, devrait donner aux services centraux des instructions concernant l'établissement de ce rapport
Le rapport annuel sur la gestion et la performance est un document clé de reddition des comptes établi par la Commission aux fins de la procédure de décharge. Afin de garantir que son propriétaire, le collège des commissaires, y présente des informations pertinentes et fiables, et pour mieux refléter les responsabilités des différents acteurs intervenant dans sa production et son adoption, nous recommandons au collège de fournir aux services centraux des instructions précisant le contenu et la structure de ce rapport et de définir la portée de l'examen des RAA sous-jacents effectué par les services centraux.
Quand? À partir de la décharge 2021.
Le présent rapport a été adopté par la Chambre V, présidée par M. Tony Murphy, Membre de la Cour des comptes, à Luxembourg le 3 novembre 2021.
Par la Cour des comptes
Klaus-Heiner Lehne
Président
Acronymes et abréviations
AA: autorité d'audit
AMPR: rapport annuel sur la gestion et la performance du budget de l'UE
BUDG: Budget
CFP: cadre financier pluriannuel
DAC: direction conjointe d'audit de la cohésion
DG: direction générale de la Commission.
EMPL: Emploi, affaires sociales et inclusion
FEDER: Fonds européen de développement régional
Fonds ESI: Fonds structurels et d'investissement européens
FSE: Fonds social européen
IPC: indicateur de performance clé
PO: programme opérationnel
RAA: rapport annuel d'activités
REGIO: Politique régionale et urbaine
RPDC: règlement portant dispositions communes:
SAI: service d'audit interne de la Commission
SG: Secrétaire général de la Commission
TETR: taux d'erreur total résiduel
Glossaire
Audit de conformité: audit visant à confirmer qu'une activité respecte la réglementation applicable ainsi que les termes des contrats et des conventions.
Autorité d'audit: entité nationale indépendante responsable de l'audit des systèmes et des opérations relevant d'un programme de dépenses de l'UE.
Autorité de certification: organisme chargé par un État membre de certifier l'exactitude et la conformité des déclarations de dépenses et des demandes de paiement.
Autorité de gestion: autorité (publique ou privée) nationale, régionale ou locale, désignée par un État membre pour gérer un programme financé par l'UE.
Clôture: liquidation financière d'un programme ou d'un Fonds de l'UE, par le paiement du solde dû à un État membre ou à un autre pays bénéficiaire, ou par le recouvrement de fonds auprès de ceux-ci.
Contrôle documentaire: contrôle, sur une base documentaire, des informations fournies dans les dossiers constitués aux fins de l'assurance.
Décharge: décision prise chaque année par le Parlement européen, par laquelle il approuve définitivement la manière dont la Commission a exécuté le budget.
Dossier [constitué] aux fins de l'assurance: dossier que les autorités des États membres doivent soumettre chaque année pour le 15 février (ou, avec l'accord de la Commission, pour le 1er mars dans certains cas exceptionnels) et qui comprend: les comptes établis par l'autorité de certification, la déclaration de gestion et le résumé annuel des rapports d'audit finaux et des contrôles effectués, établis par l'autorité de gestion, ainsi que l'opinion d'audit et le rapport de contrôle annuels émis par l'autorité d'audit.
Erreur aléatoire: est considérée comme étant aléatoire toute erreur qui n'est pas jugée systémique, connue ou occasionnelle. Cette notion sert à prévoir la probabilité que les erreurs aléatoires détectées dans l'échantillon d'audit soient également présentes dans la population non contrôlée.
Erreur quantifiable: dans les informations relatives aux résultats des tests sur les opérations, catégorie utilisée par la Cour des comptes européenne lorsqu'il est possible de déterminer quelle part du montant d'une opération est concernée par une erreur.
Erreur systémique: erreur détectée dans l'échantillon d'audit, elle a une incidence sur la population non contrôlée et se produit dans des circonstances bien définies et similaires. De telles erreurs ont généralement un point commun, par exemple le type d'opération concerné, ou encore le lieu ou la période de survenance. Elles sont en général associées à des procédures de contrôle inefficaces au sein (d'une partie) des systèmes de gestion et de contrôle.
Erreur: résultat d'un calcul incorrect ou d'une irrégularité découlant du non-respect des obligations légales et contractuelles.
Fonds structurels et d'investissement européens (Fonds ESI): les cinq principaux Fonds de l'UE destinés à soutenir conjointement le développement économique dans l'ensemble de l'Union: le Fonds européen de développement régional, le Fonds social européen, le Fonds de cohésion, le Fonds européen agricole pour le développement rural et le Fonds européen pour les affaires maritimes et la pêche.
Gestion partagée: méthode d'exécution du budget de l'UE selon laquelle, contrairement à ce qui se passe dans la gestion directe, la Commission délègue les tâches d'exécution à un État membre, tout en restant responsable en dernier ressort.
Irrégularité: violation des règles de l'UE (ou des règles nationales applicables) ou d'obligations contractuelles.
Niveau d'erreur estimatif: estimation statistique du niveau d'erreur caractérisant une population, obtenue grâce à des tests réalisés sur un échantillon représentatif d'opérations.
Normes d'audit internationalement reconnues: ensemble de normes professionnelles définissant les responsabilités des auditeurs, publiées par divers organismes de normalisation.
Politique de cohésion: politique de l'UE visant à réduire les disparités économiques et sociales entre régions et entre États membres en favorisant la création d'emplois, la compétitivité des entreprises, la croissance économique, le développement durable et la coopération transfrontalière et interrégionale.
Procédure contradictoire: procédure au cours de laquelle la Commission examine les résultats de ses contrôles avec l'organe, l'organisme ou le service contrôlé afin de vérifier leur bien-fondé.
Programme opérationnel (PO): programme établissant les priorités et les objectifs spécifiques d'un État membre, ainsi que les modalités d'utilisation des fonds (cofinancements de l'UE et cofinancements publics et privés au niveau national) au cours d'une période déterminée (en général sept ans) pour financer des projets. Les PO sont financés au titre du FEDER, du FC et/ou du FSE.
Rapport annuel d'activités (RAA): rapport établi par chaque direction générale de la Commission, institution ou organisme de l'UE pour y présenter sa performance par rapport à ses objectifs, ainsi que l'utilisation faite de ses ressources financières et humaines.
Rapport annuel de contrôle: document établi par l'autorité d'audit d'un État membre et soumis à la Commission dans le cadre du dossier constitué aux fins de l'assurance annuelle par le pays concerné.
Rapport annuel sur la gestion et la performance (AMPR): rapport produit chaque année par la Commission relatif à sa gestion du budget de l'UE et aux résultats obtenus. Il synthétise les informations contenues dans les rapports annuels d'activités de ses directions générales et de ses agences exécutives.
Règlement portant dispositions communes (RPDC): règlement établissant les règles qui s'appliquent à l'ensemble des cinq Fonds structurels et d'investissement européens.
Régularité: mesure dans laquelle une opération ou une activité est conforme à la réglementation applicable et à toute obligation contractuelle.
Réserve: faiblesse signalée par un directeur général dans la déclaration d'assurance qu'il présente dans son rapport annuel d'activités.
Risque au moment du paiement: l'estimation du risque global «au moment du paiement» constitue, en valeur, la meilleure et la plus prudente estimation, par la Commission, des dépenses ordonnancées au cours de l'exercice qui ne sont pas conformes aux dispositions réglementaires et contractuelles applicables au moment où le paiement est effectué.
Taux d'erreur représentatif: estimation statistique du taux d'erreur caractérisant une population, obtenue grâce à des tests réalisés sur un échantillon représentatif d'opérations prélevé dans cette population.
Taux d'erreur total résiduel (TETR) portion d'une population qui n'est pas jugée régulière une fois qu'il a été tenu compte de l'effet de l'ensemble des procédures de contrôle, des recouvrements et des corrections appliqués.
Taux d'erreur total: Le taux d'erreur total correspond à la somme des erreurs suivantes: les erreurs aléatoires prévues (y compris celles contenues dans les strates exhaustives), les erreurs systémiques délimitées et les anomalies non corrigées.
Réponses de la Commission
Équipe d'audit
Les rapports spéciaux de la Cour présentent les résultats de ses audits relatifs aux politiques et programmes de l'Union ou à des questions de gestion concernant des domaines budgétaires spécifiques. La Cour sélectionne et conçoit ces activités d'audit de manière à maximiser leur impact en tenant compte des risques pour la performance ou la conformité, du niveau des recettes ou des dépenses concernées, des évolutions escomptées ainsi que de l'importance politique et de l'intérêt du public.
L'audit de la performance objet du présent rapport a été réalisé par la Chambre V (Financement et administration de l'Union européenne), présidée par M. Tony Murphy, Membre de la Cour. L'audit a été effectué sous la responsabilité de M. Tony Murphy, Membre de la Cour, assisté de: M. Wolfgang Stolz, chef de cabinet, et M. Brian Murphy, attaché de cabinet; M. Juan Ignacio González Bastero, manager principal; Mme Susanna Rafalzik, cheffe de mission; Mme Anna Despotopoulou, cheffe de mission adjointe; Mmes Maria Pia Brizzi, Sandra Dreimane, Laure Gatter, Martina Jurjevic, Agnieszka Kondzielska, Dana Christina Mohamed, Orsolya Szarka, Peggy Vercauteren et Dilyanka Zhelezarova, ainsi que MM. Johan Adriaan Lok, Jiří Beneš, Marcel Bode, Peter Borsos, Kevin Deceuninck, Przemyslaw Dowgialo, Andrea Ferraris, Jorge Guevara Lopez, Nikolaos Kylonis, Borja Martin Simon et Rene Reiterer, auditeurs. L'assistance linguistique a été fournie par M. James Verity.
Dernière rangée (de gauche à droite): Brian Murphy, Wolfgang Stolz, Johan Adriaan Lok, Juan Ignacio González Bastero et Nikolaos Kylonis.
Première rangée (de gauche à droite): Niamh Mahon, Susanna Rafalzik, Tony Murphy, Anna Despotopoulou et Peter Borsos.
Notes
[1] Rapport annuel 2020, point 1.21.
[2] Rapport annuel 2020, point 5.17.
[3] L'article 130 du règlement (UE) n° 1303/2013 limite le remboursement sous la forme de paiements intermédiaires à 90 %.
[4] Rapport annuel 2020, point 5.40.
[5] Avis n° 6/2018 sur la proposition de règlement du Parlement européen et du Conseil portant dispositions communes, point 122.
[6] Rapport annuel 2017, points 6.67 à 6.72.
[7] Rapport annuel 2018, points 6.73 à 6.75.
[8] Rapport annuel 2019, point 5.39.
[9] Article 75, paragraphe 2 bis, point a), du règlement (UE) n° 1303/2013.
[10] Article 85 du règlement (UE) n° 1303/2013.
[11] Les erreurs systémiques sont les erreurs décelées dans l'échantillon contrôlé qui ont une incidence sur la population non contrôlée et qui se produisent dans des circonstances bien définies et similaires (EGESIF_15-0002-04, p. 42).
[12] Article 145 du règlement (UE) n° 1303/2013.
[13] Article 145, paragraphe 7, du règlement (UE) n° 1303/2013.
[14] Rapport annuel 2019, point 5.56.
[15] Rapport annuel 2018, point 6.63.
[16] Rapport annuel 2018, points 6.68 à 6.71 et recommandation n° 6.3.
[17] Tels qu'établis à l'annexe IV des RAA 2019.
[18] Cette partie correspond au rapport que la Commission est tenue de présenter en vertu de l'article 318 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne.
[19] Article 247, paragraphe 1, point b), du règlement financier: «le rapport annuel sur la gestion et la performance, qui fournit un résumé clair et concis des résultats obtenus en matière de contrôle interne et de gestion financière visés dans les rapports annuels d'activités de chaque ordonnateur délégué et comprend des informations sur les principaux dispositifs en matière de gouvernance mis en place à la Commission ainsi que:
i) une estimation du niveau d'erreur dans les dépenses de l'Union, fondée sur une méthode cohérente, et une estimation des futures corrections;
ii) des informations sur les mesures de prévention et correctrices visant le budget, qui présente l'incidence financière des mesures prises pour protéger le budget contre les dépenses effectuées en violation du droit;
iii) des informations sur la stratégie de la Commission en matière de lutte contre la fraude».
[20] Rapport annuel 2020, point 1.36.
[21] Rapport annuel 2018, recommandation n° 6.3 – Modalités de clôture pour la période 2014‑2020.
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