Rapport spécial
11 2017

Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine: un début chargé d’espoir malgré quelques insuffisances

En ce qui concerne le rapport: Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine, premier fonds de ce type géré par la Commission européenne, a été créé en 2014 pour soutenir l’un des pays les moins développés du monde. Notre examen a porté sur la justification de la mise en place du fonds, sur sa gestion et sur la réalisation de ses objectifs à ce jour. Malgré certaines insuffisances, nous estimons, en conclusion, que le choix de mettre en place le fonds était adapté aux circonstances. Sa gestion n’est pas encore optimale dans trois domaines: la coordination entre les parties prenantes; la transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures; les mécanismes de suivi et d’évaluation. Les résultats qu’il a permis d’obtenir jusqu’à présent sont cependant globalement positifs. Nos recommandations devraient contribuer à améliorer la conception et la gestion de ce fonds fiduciaire en particulier et des fonds fiduciaires de l’UE en général.

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PDF General Report

Synthèse

I

Un fonds fiduciaire est un fonds créé pour répondre à un objectif de développement spécifique à l’aide des contributions financières d’un ou de plusieurs donateurs. Les fonds de ce type sont souvent mis en place en réaction à des crises telles que les catastrophes naturelles ou les conflits. Depuis 2013, la Commission européenne a la possibilité de créer des «fonds fiduciaires de l’Union pour les actions extérieures», en faveur d’actions d’urgence, de post-urgence ou thématiques.

II

Lancé en juillet 2014, le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine est le premier fonds de ce type géré par la Commission européenne. Ses donateurs, à savoir l’Union européenne, la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie et la Suisse, l’ont doté d’un montant total de 146 millions d’euros pour aider le pays à sortir de la crise et pour soutenir sa reconstruction.

III

La République centrafricaine (RCA) est en proie à la mauvaise gouvernance, à une grande pauvreté et à des conflits depuis plusieurs décennies. Il s’agit d’un des pays les moins développés et les plus pauvres du monde. La RCA occupait la dernière place du classement 2016 de l’indice de développement humain du PNUD.

IV

Le présent audit a porté sur la première expérience de la Commission européenne en matière de gestion de l’un de ses propres fonds fiduciaires. Nous avons examiné si sa création était justifiée, s’il était bien géré et s’il avait atteint ses objectifs jusqu’à présent.

V

Nous sommes parvenus à la conclusion que malgré l’absence d’analyse exhaustive des besoins et d’évaluation formellement structurée du choix de l’instrument de financement, tant la décision de mettre en place le fonds fiduciaire Bêkou que la manière dont il a été conçu étaient adaptées aux circonstances.

VI

La gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’a pas encore donné toute la mesure de ses possibilités, et ce à trois égards: le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes; la transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures pourraient être améliorés; les mécanismes de suivi et d’évaluation n’ont pas encore été pleinement développés.

VII

Les résultats obtenus à ce jour grâce au fonds fiduciaire Bêkou sont globalement positifs. Il a permis de mobiliser des aides, même s’il a attiré peu de donateurs supplémentaires, et les projets financés ont produit les réalisations escomptées. Le fonds assure une visibilité accrue à l’UE.

VIII

Nous formulons un certain nombre de recommandations visant à aider la Commission à améliorer la conception et la gestion du fonds fiduciaire Bêkou dans le futur, ainsi que des fonds fiduciaires de l’UE en général. Nous recommandons à la Commission:

  • d’élaborer de nouvelles orientations sur le choix des instruments de financement et sur les analyses des besoins visant à définir le champ d’intervention des fonds fiduciaires;
  • d’améliorer la coordination entre les donateurs, les procédures de sélection et la mesure de la performance, ainsi que d’optimiser les coûts administratifs.

Introduction

Les fonds fiduciaires de l’UE: un nouvel instrument de l’aide au développement

01

Un fonds fiduciaire est un fonds créé pour servir un objectif spécifique de développement, à l’aide des contributions financières d’un ou de plusieurs donateurs. Il est généralement administré par une organisation internationale telle que la Banque mondiale ou les Nations unies. Populaires depuis les années 90, les fonds fiduciaires sont de plus en plus utilisés en tant qu’instruments de financement de la coopération internationale. Les fonds de ce type sont souvent mis en place en réaction à des crises telles que les catastrophes naturelles ou les conflits.

02

Depuis 2013, des «fonds fiduciaires de l’Union pour les actions extérieures» peuvent être créés pour financer des actions d’urgence, de post-urgence ou thématiques, dans le cadre d’un accord conclu entre la Commission européenne et d’autres donateurs1. Un conseil présidé par la Commission est créé pour chaque fonds fiduciaire afin de permettre la représentation tant des donateurs que des États membres non contributeurs, et de décider de la manière dont les fonds doivent être utilisés.

03

Le fonds fiduciaire Bêkou2 de l’UE pour la République centrafricaine a été lancé en juillet 2014 pour aider le pays à sortir de la crise et soutenir sa reconstruction. Il s’agit du premier des quatre fonds gérés par la Commission européenne à ce jour3. Le fonds comptait initialement quatre donateurs, à savoir l’Union européenne (UE), la France, l’Allemagne et les Pays-Bas, rejoints par l’Italie et la Suisse en 2015. Fin 2016, les annonces de contributions en faveur du fonds fiduciaire Bêkou s’élevaient au total à 146 millions d’euros, dont environ trois quarts doivent provenir du budget de l’UE et du Fonds européen de développement, et 86 millions d’euros lui avaient effectivement été versés.

04

Son principal objectif, tel qu’il est défini dans l’acte constitutif, est «d’appuyer la résilience des populations vulnérables, la sortie de crise et la reconstruction de la République centrafricaine dans toutes ses dimensions, de manière cohérente et ciblée, articulant les actions de court, de moyen et de plus long terme et de permettre aux pays voisins de surmonter les conséquences de la crise»4.

La République centrafricaine, un pays en crise

05

La RCA, qui est l’un des pays les moins développés et les plus pauvres du monde, occupait la dernière place du classement 2016 de l’indice de développement humain du PNUD, et ce malgré l’importance de ses gisements miniers (réserves d’uranium, pétrole brut, or, diamants et cobalt) et de ses autres ressources (bois et hydroélectricité). Ce pays compte 4,5 millions d’habitants et s’étend sur un territoire de 623 000 km2 (soit environ la superficie combinée de la Belgique et de la France). Depuis son indépendance en 1960, la RCA est en proie à des conflits, à la mauvaise gouvernance et à une grande pauvreté et souffre d’inégalités ainsi que d’un manque d’investissements du secteur privé. La majorité de la population vit actuellement dans la précarité et plus de la moitié a besoin d’une aide humanitaire. Quelque 450 000 personnes sont déplacées dans leur propre pays et environ autant se sont exilées vers les pays voisins.

06

Un gouvernement transitoire a été mis en place de 2014 à début 2016, après qu’un cycle de violence a entraîné la chute du gouvernement précédent. Un nouveau président et un nouveau gouvernement sont entrés en fonction en mars 2016 à la suite d’élections démocratiques. En octobre 2016, le gouvernement centrafricain et les donateurs ont publié un plan national de relèvement du pays et de consolidation de la paix.

07

Jusqu’en 2014, la RCA était considérée comme un «orphelin de l’aide»5, en raison de l’aide limitée dont elle bénéficiait de la part de la communauté internationale des donateurs. Depuis, l’aide en faveur du pays s’est considérablement accrue. Cependant, la population a toujours impérieusement besoin d’aide humanitaire en raison de la persistance des conflits6.

08

L’UE est un partenaire de la RCA depuis plus de trente ans et reste l’un de ses principaux partenaires en matière de développement. Entre 2013 et 2016, l’UE a versé plus de 500 millions d’euros pour venir en aide au pays7. L’Union a adopté une «approche globale»8, s’articulant autour de l’aide fournie par l’intermédiaire du fonds fiduciaire Bêkou, de l’aide au développement traditionnelle, de trois missions et opérations militaires au titre de la politique de sécurité et de défense commune, des moyens civils de réponse aux crises et de l’aide humanitaire.

09

Les Nations unies et la France sont également fortement engagées en RCA. La liste des sept fonds fiduciaires des Nations unies actifs en RCA figure à l’annexe II. Toute une série d’autres partenaires, comme la Banque africaine de développement, la Banque mondiale et d’autres pays de l’UE, fournissent également une aide au pays.

Étendue et approche de l’audit

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Le présent audit de la performance a consisté à examiner comment la Commission européenne avait géré pour la première fois l’un de ses propres fonds fiduciaires en tant qu’instrument de financement de l’aide. Nous avons cherché à déterminer si la création du fonds était justifiée, s’il était bien géré et si ses objectifs ont été atteints jusqu’à présent.

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L’audit a été centré sur la période qui va de la création du fonds en 2014 à fin 2016. Nous avons passé en revue l’ensemble des onze projets et des 31 contrats correspondants financés par le fonds (voir annexe I). Nous avons analysé divers documents relatifs à l’établissement du fonds et à la conception des projets, ainsi que les procédures de sélection des organismes chargés de la mise en œuvre, le suivi des projets et leur évaluation (rapports intermédiaires et rapports d’évaluation externe). Nous avons également effectué des visites sur place en RCA et aux sièges de trois des donateurs du fonds, ce qui nous a permis de nous entretenir avec différentes parties prenantes et de visiter trois projets.

Observations

Bien que reposant sur une analyse limitée, tant la décision de mettre en place le fonds fiduciaire Bêkou que la conception retenue pour celui-ci étaient adaptées aux circonstances

12

Dans la présente partie, nous donnons un bref aperçu du contexte qui prévalait dans le pays au moment où le fonds fiduciaire Bêkou a été créé, avant d’analyser la conception du fonds sous deux angles: le choix d’un fonds fiduciaire comme instrument de financement et le champ d’intervention du fonds fiduciaire Bêkou.

Le fonds fiduciaire Bêkou a constitué une réponse rapide dans un contexte national difficile

13

En 2014, la situation de la République centrafricaine se caractérisait par une crise politique et de sécurité majeure qui s’était intensifiée en 2012, causant une crise humanitaire et une récession économique qui ont toutes deux atteint des niveaux sans précédent. En décembre 2013, les Nations unies ont qualifié d’urgence de niveau 39 la crise qui frappait le pays. La situation était marquée par un «contiguum»10 de problèmes humanitaires et de développement, ainsi que par la fragilité des autorités publiques, incapables de répondre aux besoins de la population.

Enfant marchant à côté d’un avion abandonné dans l’ancien camp de M’Poko pour personnes déplacées à l’intérieur du pays, à proximité de l’aéroport de Bangui.

© Croix-Rouge française.

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Dans ce contexte, l’octroi de l’aide de l’UE a été considérablement freiné. À l’époque, en l’absence d’un gouvernement démocratiquement élu, la Commission ne pouvait en effet pas adopter de programme indicatif national (PIN)11 pour l’aide fournie dans le cadre de l’enveloppe nationale de la RCA au titre du 11e Fonds européen de développement (FED).

15

La création du fonds fiduciaire Bêkou pour la RCA a donc permis de répondre rapidement à la nécessité d’un instrument de coordination qui permette de lier l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement. Les raisons justifiant le choix d’un tel instrument d’aide ont été débattues tant au niveau politique qu’au niveau technique au sein de la Commission européenne, ainsi qu’avec toute une série de donateurs et avec le gouvernement transitoire de la RCA au cours du premier semestre 2014. Ces discussions ont débouché sur un consensus, notamment sur la nécessité de recourir à des moyens différents d’octroi de l’aide, d’intégrer les approches humanitaire et de développement et d’aller plus loin que la simple coordination de l’aide en mettant en commun les ressources. Cette analyse partagée est à la base de la création du fonds fiduciaire Bêkou.

16

Celui-ci a été institué dans des délais très courts, l’acte constitutif ayant été signé par la Commission, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas en juillet 2014, alors que les premières discussions avaient démarré au début de la même année.

La Commission n’a élaboré aucune analyse formellement structurée du choix de l’instrument de financement

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Le règlement financier subordonne la création d’un fonds fiduciaire au respect d’un certain nombre de conditions: i) l’intervention de l’Union doit apporter une valeur ajoutée, ce qui signifie que les objectifs du fonds fiduciaire peuvent être mieux atteints au niveau de l’Union qu’au niveau national; ii) le fonds doit apporter une visibilité politique et des bénéfices évidents en matière de gestion, iii) les fonds fiduciaires ne devraient pas être créés s’ils font purement et simplement double emploi avec des sources de financement existantes ou des instruments semblables sans qu’il y ait additionnalité.

18

Les engagements pris par l’UE lors des forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide (voir encadré 1) et les orientations de la DG Coopération internationale et développement (DEVCO) sur les fonds fiduciaires de l’UE indiquent que ces derniers ne doivent pas devenir un instrument de mise en œuvre standard.

Encadré 1

Les forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide prônent l’autodiscipline en matière de création de nouveaux canaux d’aide

L’effort constant de modernisation de l’acheminement de l’aide a été marqué par quatre évènements: les forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide organisés à Rome (2003), Paris (2005), Accra (2008) et Busan (2011). Ces évènements, auxquels plus de 100 pays ont participé, ont conduit à la formulation de principes en matière d’efficacité de l’aide.

À la suite du forum d’Accra de 2008, les donateurs ont pris l’engagement de veiller «à ce que les canaux existants d’acheminement de l’aide soient effectivement utilisés et, renforcés si nécessaire, avant de créer de nouveaux circuits distincts risquant d’aggraver la fragmentation de l’aide et de compliquer la coordination au niveau des pays»12. À l’occasion d’une table ronde, les bailleurs de fonds ont été invités à réfléchir à deux fois avant de créer de nouveaux fonds, en faisant clairement primer le principe de valeur ajoutée13. À l’occasion du forum de Busan de 2011, l’UE a réitéré l’engagement pris à Accra de faire preuve d’autodiscipline pour éviter que les fonds ne prolifèrent davantage14.

19

Les Nations unies et la Banque mondiale ont toutes deux établi des procédures pour justifier le choix d’un fonds fiduciaire comme instrument de financement de l’aide. Le Bureau du Fonds d’affectation multi-partenaires des Nations unies, qui assiste l’ONU dans la gestion des mécanismes de financement partagé, a par exemple publié des manuels d’orientation sur l’établissement des fonds fiduciaires. Il y est recommandé de réaliser préalablement une étude de faisabilité et d’analyser les fonctions et la valeur ajoutée de ce type de fonds15.

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Dans les lignes directrices disponibles, la Commission s’est jusqu’ici limitée à rappeler les dispositions du règlement financier. Elle n’a pas encore déterminé la manière d’appliquer ces dernières pour pouvoir effectuer rapidement une évaluation structurée des avantages comparatifs des fonds fiduciaires par rapport à d’autres instruments. La Commission a organisé une série de discussions (voir point 15), mais aucune analyse formellement structurée, fondée sur les conditions fixées dans le règlement financier, n’a précédé la mise en place du fonds fiduciaire Bêkou.

Aucune analyse exhaustive des besoins ne montre quelles lacunes le fonds fiduciaire Bêkou est censé combler

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Les analyses des besoins constituent une étape importante de la définition du champ d’application de l’aide au développement, car elles facilitent la détermination des besoins et la définition des priorités en matière d’aide. Elles contribuent également à s’assurer que les nouveaux instruments de financement ne font pas double emploi avec des instruments existants et elles peuvent servir de base pour concevoir l’aide de telle sorte que les tâches puissent être partagées avec les autres donateurs.

22

Même si divers documents internes de la Commission élaborés avant la création du fonds fiduciaire Bêkou attestaient que la RCA avait besoin d’une assistance financière, l’analyse des besoins était incomplète. En effet, les éléments suivants en étaient absents: une évaluation des besoins généraux de la RCA, un bilan des besoins auxquels répondaient les instruments d’aide existants et, par suite, une analyse des lacunes à combler en matière de fourniture de l’aide, une évaluation des ressources financières nécessaires et une hiérarchisation des mesures d’aide.

23

Le principal objectif du fonds fiduciaire Bêkou, tel qu’il est défini dans son acte constitutif, est «d’appuyer la résilience des populations vulnérables, la sortie de crise et la reconstruction de la République centrafricaine dans toutes ses dimensions, de manière cohérente et ciblée, articulant les actions de court, de moyen et de plus long terme et de permettre aux pays voisins de surmonter les conséquences de la crise»16. Il est donc formulé en termes généraux. Une analyse exhaustive des besoins aurait pu servir de base à la formulation d’objectifs plus détaillés (voir également point 50). En outre, elle aurait pu indiquer plus clairement comment et pourquoi les activités du fonds étaient pertinentes au regard de l’objectif poursuivi et quelles lacunes spécifiques le fonds venait combler.

24

Au niveau stratégique, la Commission s’est assurée que le fonds fiduciaire Bêkou ne faisait pas double emploi avec des canaux de financement existants. De 2014 à 2016, l’enveloppe nationale allouée à la RCA au titre du FED a servi à financer un nombre limité d’activités, concentrées sur des domaines autres que ceux couverts par le fonds fiduciaire Bêkou, comme l’éducation ou les politiques nationales de santé17. Sept fonds fiduciaires des Nations unies au moins sont actifs en RCA, mais six d’entre eux ont un champ d’application thématique clairement différent de celui du fonds fiduciaire Bêkou. Le fonds fiduciaire multi-partenaires Ezingo, qui cible également la stabilisation et le redressement du pays, constitue la seule exception. Cependant, il diffère sensiblement du fonds fiduciaire Bêkou sur le plan du volume de l’aide et/ou du niveau d’activité, du type de projets financés et des bénéficiaires visés18.

25

Au niveau des projets, le fonds fiduciaire Bêkou répondait à des besoins similaires à ceux couverts par de précédentes aides de l’UE. En effet, certains projets assurent la continuité avec des projets précédemment financés par d’autres instruments d’aide de l’UE (voir encadré 2), tout en introduisant une approche différente et de nouvelles activités de renforcement de la résilience. Certains des autres projets sont innovants et se démarquent des types de projets auparavant financés en RCA. Il s’agit par exemple du projet de relance économique, qui prévoit l’octroi de microcrédits aux petites entreprises locales.

Encadré 2

Exemples de projets du fonds fiduciaire Bêkou répondant à des besoins similaires à ceux couverts par des projets également financés sur l’aide de l’UE

Certains projets du fonds fiduciaire Bêkou ont repris des activités bénéficiant du soutien d’autres instruments d’aide de l’UE. En voici quelques exemples:

  1. des projets du fonds fiduciaire Bêkou menés avec des ONG du secteur de la santé ont succédé à deux projets réalisés par la DG ECHO avec les mêmes ONG. Les deux ONG en cause ont soutenu 25 centres de soins locaux pour les aider à fournir des services de santé primaires de meilleure qualité. l’une d’entre elles a également bénéficié d’aides de la DG ECHO, de l’Unicef et du Fonds humanitaire des Nations unies octroyées pour des activités dans le secteur de la santé;
  2. en 2014, l’instrument de l’UE contribuant à la stabilité et à la paix a financé des «travaux à haute intensité de main-d’œuvre» dans les troisième et cinquième arrondissements de Bangui, qui présentaient des similitudes avec le projet de réhabilitation urbaine du fonds fiduciaire Bêkou. L’idée était de recruter des gens sur place pour mener des activités de réhabilitation urbaine de base, dans le but de rétablir les infrastructures tout en générant des revenus pour les groupes les plus vulnérables;
  3. un projet sur la sécurité alimentaire lancé en 2014 au titre du 10e FED a finalement été annulé. Il devait aider financièrement l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture à mettre en œuvre des programmes de renforcement de la résilience («caisses de résilience»), à promouvoir le dialogue intercommunautaire sur les voies de transhumance et à améliorer la sécurité alimentaire dans les environs de Bangui. Il avait donc des objectifs similaires à ceux du projet de sécurité alimentaire du fonds fiduciaire Bêkou. Cinq contrats conclus depuis 2014 avec cette organisation et avec des ONG au titre de l’instrument de financement de la coopération au développement de l’UE concernaient des activités similaires (soutien aux éleveurs, dialogue intercommunautaire et résilience alimentaire);
  4. un projet du fonds fiduciaire Bêkou visait à protéger les écosystèmes faunistiques du nord-est et du sud-est de la RCA. Il succédait à un projet relevant du 10e FED qui avait permis de mener des activités similaires dans le nord-est du pays.
26

La communauté des donateurs et les pays en développement considèrent que le partenariat entre donateurs est important dans les contextes de fragilité et de crises19. Avant la publication du plan national de relèvement et de consolidation de la paix en octobre 2016, il n’existait aucun cadre stratégique commun aux bailleurs de fonds de la RCA. Les initiatives en cours fondées sur ce plan national de relèvement pourraient conduire à une définition plus claire de la répartition du travail dans le courant de 2017 (voir encadré 3).

Encadré 3

Le plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021: une base pour la future répartition des tâches

Une nouvelle stratégie nationale pour la RCA, dénommée «plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021», a été élaborée par le gouvernement centrafricain avec le soutien de l’UE, des Nations unies et du groupe de la Banque mondiale en octobre 2016. Ce plan s’articule autour de trois piliers prioritaires: i) restaurer la paix, la sécurité et la réconciliation; ii) renouveler le contrat social entre l’État et la population; iii) promouvoir le relèvement économique et la relance des secteurs productifs20. Il est décliné en onze objectifs stratégiques et les besoins sont estimés à quelque 3,2 milliards de dollars des États-Unis21.

27

Le fonds fiduciaire Bêkou permettra, le cas échéant, de financer des actions au titre des trois piliers du plan national de relèvement et de consolidation de la paix. Comme nous l’avons déjà précisé au point 14, à l’époque de la création du fonds, l’aide du FED se heurtait au problème de l’absence de programme indicatif national (PIN) pour la RCA. La DG DEVCO élabore actuellement un programme indicatif national dans le cadre du 11e FED. Celui-ci porte sur montant total de 382 millions d’euros, dont 208 millions d’euros de nouveaux fonds. Il pourrait également prévoir des interventions au titre de chacun des trois piliers. Une partie des fonds du programme indicatif national sera transférée au fonds fiduciaire Bêkou. Au total, 31 bailleurs de fonds de la RCA entendent financer au moins un des piliers du plan national de relèvement et de consolidation de la paix. En mars 2017, la répartition des tâches entre le fonds fiduciaire Bêkou, les autres instruments de l’UE et les autres donateurs en vue de la mise en œuvre de ce plan n’avait pas encore été définie en détail.

La gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’est pas encore optimale

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Nous avons examiné la gestion du fonds fiduciaire Bêkou sous trois angles: la coordination avec les autres donateurs et les autorités de la RCA; la transparence et la rapidité des procédures ainsi que le rapport coût-efficacité de la fourniture de l’aide; les mécanismes de suivi et d’évaluation.

Le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes

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L’expérience a montré que, dans les situations d’urgence et au sortir de celles-ci, la faiblesse des administrations locales et l’augmentation soudaine du nombre des donateurs peuvent entraîner une désorganisation et un morcellement de l’action de la communauté internationale, qui sont un obstacle à une contribution efficace et durable à la reconstruction d’un pays. Les fonds fiduciaires de l’UE ont été spécialement prévus pour de telles situations. Un fonds fiduciaire peut constituer une solution appropriée, puisqu’il est censé agir collectivement au nom de l’UE et des autres bailleurs de fonds22.

30

Vu le grand nombre de donateurs et d’opérateurs en RCA, la coordination est particulièrement importante. Les fonds fiduciaires peuvent aussi constituer des plateformes utiles pour améliorer la coordination avec les projets financés indépendamment du fonds. Cela vaut principalement pour la coordination entre donateurs du fonds, mais aussi, éventuellement, pour la coordination sur une plus grande échelle avec les autres donateurs. Le fonds fiduciaire Bêkou devait constituer un mécanisme de coordination permettant à la communauté internationale de contribuer efficacement et de manière coordonnée à la stabilisation de la RCA23. En l’occurrence, l’idée était d’aller au delà de la coordination entre les États membres pour mettre en place une véritable organisation conjointe24 prévoyant, par exemple, la mise en commun aussi bien des ressources que des capacités d’analyse, de définition et de mise en œuvre des projets, des missions conjointes, ainsi que la création d’une unité spécifique chargée de coordonner l’action des donateurs et d’assurer la liaison avec les partenaires, ou encore de groupes de travail thématiques conjoints.

31

Rares sont les éléments probants attestant que le fonds fiduciaire Bêkou a contribué à consolider les activités des donateurs en RCA selon les modalités décrites au point 29, que ce soit immédiatement après sa création ou au cours de la période d’intervention (voir encadré 4). Le niveau d’activité des donateurs en dehors du fonds est resté stable depuis 2014, ou a même augmenté dans certains cas (voir également points 55 à 61 en ce qui concerne la participation d’autres donateurs). Le gestionnaire du fonds considère la fragmentation des instruments d’aide et la multiplicité des acteurs dans ce domaine en RCA comme un défi majeur.

Encadré 4

Certains donateurs ont intensifié leur activité en dehors du fonds depuis 2014

L’Allemagne renforce sa coopération bilatérale avec la RCA. En 2016, le Ministère fédéral de la coopération économique et du développement a sélectionné la RCA parmi ses partenaires bilatéraux. La banque de développement allemande Kreditanstalt für Wiederaufbau s’est récemment engagée dans un projet d’une valeur de 422 millions d’euros dans le secteur de la santé.

En octobre 2016, l’Italie a ouvert son propre bureau de coopération au développement à Bangui.

L’établissement d’un programme indicatif national permettra à la DG DEVCO de réactiver l’aide du FED.

À l’instar des bailleurs du fonds fiduciaire Bêkou, la Banque mondiale envisage également de créer son propre fonds fiduciaire en faveur de la RCA.

32

Les mécanismes de coordination relatifs à l’aide au développement en RCA n’étaient pas opérationnels à la fin de 2016. Comme leur nom l’indique, les «clusters» (groupes sectoriels) humanitaires, dirigés par les Nations unies et des ONG internationales, sont consacrés à l’aide humanitaire. En 2014, le gouvernement transitoire centrafricain a créé des structures appropriées pour coordonner l’aide au développement, mais elles n’ont jamais été mises en service. Les autorités nationales et la communauté des donateurs établissent actuellement un cadre institutionnel pour la mise en œuvre de l’aide au développement au titre du plan national de relèvement et de consolidation de la paix adopté en octobre 201625. Ce cadre comprendra un mécanisme de coordination de l’aide dans lequel le fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies et l’éventuel futur fonds fiduciaire de la Banque mondiale joueront un rôle décisionnel, tandis que le fonds fiduciaire Bêkou n’aura qu’un rôle consultatif.

33

Le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose pas de procédures bien définies pour assurer la coordination systématique de ses projets avec les autres projets des donateurs du fonds. Les seuls mécanismes de coordination qui ont été créés pour le fonds sont en fait les entités chargées de sa gouvernance elles-mêmes (son conseil d’administration et son comité de gestion). Même si l’un de ses rôles consiste à adopter les projets, le comité n’a pas facilité les discussions sur la coordination avec les autres projets financés par les États membres donateurs du fonds fiduciaire Bêkou. Les documents de programmation ne tiennent pas systématiquement compte de l’ensemble des projets menés dans le même domaine.

34

Même en l’absence de mécanismes formels, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a assuré, à titre de bonne pratique, un certain degré de coordination des projets au cas par cas (voir encadré 5). Le fonds fiduciaire Bêkou pourrait toutefois faire en sorte que la coordination des activités soit plus systématiquement assurée, non seulement en interne entre ses donateurs, mais aussi, éventuellement, sur le plan externe, avec le reste de la communauté internationale.

Encadré 5

Trois exemples de bonnes pratiques en matière de coordination des projets entre donateurs

Des synergies ont été établies entre le projet de relance économique mis en œuvre par le fonds fiduciaire Bêkou et deux projets financés par l’agence de développement d’un État membre de l’UE. S’il n’y a guère eu de coordination au stade de la conception du projet, elle a été assurée après le lancement de ce dernier en 2016. Plusieurs réunions ont été organisées entre l’agence de développement, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui et les organismes chargés de la mise en œuvre, afin d’examiner comment créer des synergies entre les trois projets.

En octobre 2016, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a réuni les bailleurs de fonds et les autorités de la RCA dans le cadre d’un atelier consacré à la sécurité alimentaire. À la suite de cet atelier, et sur la base des résultats des discussions auxquelles il a donné lieu, l’équipe du fonds fiduciaire Bêkou a lancé un appel à manifestation d’intérêt.

Le projet dans le secteur de la santé a permis de financer une assistance technique pour l’organisation de réunions mensuelles de coordination entre les six ONG opérant dans les établissements de santé de tout le pays. Bien que cela n’ait pas été prévu au départ, cette coordination s’est parfois étendue à des opérateurs autres que ceux du fonds fiduciaire Bêkou, ce qui a permis de surveiller les cas potentiels de double emploi. Elle a également donné l’occasion aux ONG d’harmoniser leurs méthodes de travail.

Le projet de sécurité alimentaire a pour objectif le développement durable de la sécurité alimentaire et nutritionnelle.

© Croix-Rouge française.

35

Certains éléments probants attestent que le fonds fiduciaire Bêkou agit en coordination avec les autorités de la RCA (voir exemple dans l’encadré 5). Le gouvernement centrafricain envisage de jouer un plus grand rôle dans la gestion du fonds à l’avenir, en contribuant plus systématiquement à la conception, à la mise en œuvre et au suivi de ses projets.

La transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures pourraient être améliorés

36

Le règlement financier dispose que le fonds fiduciaire doit être mis en œuvre conformément au principe de transparence26. L’acte constitutif prévoit l’utilisation de procédures flexibles pour assurer la réactivité du fonds fiduciaire Bêkou et pour que l’aide puisse s’organiser rapidement. Le règlement financier dispose également qu’un maximum de 5 % des montants placés dans le fonds fiduciaire peut être prélevé pour couvrir les frais de gestion de celui-ci. Nous avons évalué la transparence et la rapidité des procédures de sélection et le rapport coût-efficacité du fonds fiduciaire Bêkou par rapport à d’autres canaux d’acheminement de l’aide.

Transparence des procédures de sélection
37

Les procédures appliquées par le fonds fiduciaire Bêkou pour sélectionner les organismes chargés de la mise en œuvre des projets n’ont pas été formalisées dans les orientations sur les fonds fiduciaires de l’UE. À quelques exceptions près, les procédures suivies étaient fondées sur celles prescrites dans le guide pratique des procédures contractuelles dans le cadre des actions extérieures de l’Union européenne (ci-après «guide pratique des procédures contractuelles»)27.

38

Sauf pour un nombre limité de contrats de services, le fonds fiduciaire Bêkou a eu recours à trois méthodes différentes pour sélectionner les organismes chargés de la mise en œuvre des projets: quatre accords de coopération déléguée, dix attributions directes et douze attributions à l’issue d’un appel restreint à manifestation d’intérêt28. La définition de chacune de ces procédures et leurs avantages et inconvénients respectifs sont présentés au tableau 1.

Tableau 1

Définition, avantages et inconvénients des procédures de sélection appliquées par le fonds fiduciaire Bêkou pour l’octroi de subventions

Type Accord de coopération déléguée Attribution directe Attribution à la suite d’un appel restreint du fonds fiduciaire Bêkou à manifestation d’intérêt
Définition La commission confie la gestion des fonds à un organisme délégataire d’un État membre (ou à un donateur provenant d’un pays tiers). Sélection d’un organisme sans mise en concurrence. Un certain nombre d’organisations présélectionnées sont invitées à élaborer une proposition.
Avantages
  • Procédure rapide
  • Possibilité de disposer d’un niveau élevé d’expertise
  • Procédure rapide
  • Possibilité de disposer d’un niveau élevé d’expertise
  • Plus transparente que les deux autres procédures
  • Cible des experts réputés dans le domaine concerné
Inconvénients
  • Manque de transparence en l’absence de publicité
  • Strate de procédures administratives supplémentaire
  • Éventuels conflits d’intérêts
  • Manque de transparence en l’absence de publicité
  • Restreint l’accès au financement pour les nouvelles organisations
  • Restreint l’accès au financement pour les nouvelles organisations

Source: «Marchés publics et subventions dans le cadre des actions extérieures de l’Union Européenne – Un guide pratique».

39

Les procédures de sélection que le fonds fiduciaire Bêkou doit en fait appliquer et le degré de souplesse autorisé par rapport au guide pratique des procédures contractuelles n’ayant pas été définis, la manière dont les organismes chargés de la mise en œuvre ont été sélectionnés n’a pas été totalement transparente.

40

Le recours à la coopération déléguée est mentionné à l’article 10 de l’acte constitutif, qui dispose que celle-ci «sera privilégiée chaque fois qu’elle apportera une réponse appropriée en termes de coût, d’efficacité et de visibilité européenne aux actions financées par le fonds». Cependant, même si les organisations sélectionnées étaient expertes dans les domaines en question, aucune justification du fait d’avoir recours à elles n’a été donnée, notamment au moment où cette décision a été approuvée. Par ailleurs, des conflits d’intérêts peuvent survenir dès lors que certaines d’entre elles siègent au comité de gestion du fonds, au sein duquel les projets et, en l’espèce, les organismes chargés de la mise en œuvre sont sélectionnés29.

41

Cinq attributions directes concernaient la poursuite de travaux antérieurs. Les autres ont été décidées après examen des organisations déjà présentes en RCA et de leurs capacités respectives. Cette démarche est compréhensible compte tenu des conditions difficiles prévalant sur le terrain au moment où ces attributions ont eu lieu. Toutefois, nous avons notamment relevé un cas dans lequel une procédure plus concurrentielle aurait pu être appliquée dès lors que plusieurs organisations étaient capables d’effectuer les travaux30.

42

Pour chacun des appels restreints à manifestation d’intérêt, une procédure de sélection adaptée a été appliquée, reprenant certains éléments du guide pratique des procédures contractuelles, mais offrant une plus grande souplesse à différentes étapes. Il est dès lors difficile de déterminer comment les organismes chargés de la mise en œuvre ont été sélectionnés.

Rapidité des procédures de sélection
43

La flexibilité rendue possible par certaines dispositions applicables au fonds fiduciaire Bêkou pourrait permettre de gagner du temps par rapport aux approches plus traditionnelles de la Commission. La structure et le processus décisionnel retenus, ainsi que la constitution relativement récente du fonds, limitent l’intérêt de toute comparaison avec les procédures en vigueur pour les autres aides de l’UE. Nous avons néanmoins relevé certains cas où la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre aurait pu être plus rapide.

44

Au cours de la procédure de sélection, le fonds fiduciaire Bêkou aurait, par exemple, pu gagner davantage de temps lors de l’examen du contenu des projets avec les organisations. Pour l’ensemble des trois types de procédure utilisés, les discussions auraient pu être moins longues et moins nombreuses. Pour 14 attributions sur 26, l’examen du contenu des projets a duré plus de 100 jours. Le délai moyen était de 148 jours, le délai le plus long, de 503 jours31, et le plus court, de 18 jours32. En moyenne, les discussions faisant suite aux appels restreints à manifestation d’intérêt ont duré 50 jours, tandis que celles concernant les accords de coopération déléguée et les attributions directes ont pris respectivement 197 et 245 jours. Si les discussions avaient été conduites de manière différente, ces accords auraient pu être finalisés plus tôt. Certaines questions ont par exemple été traitées à plusieurs reprises par différents agents de la Commission, ce qui a généré un grand volume d’échanges entre parties concernées. Une meilleure coordination entre les agents de la Commission en amont de ces échanges aurait peut-être permis de raccourcir les discussions.

45

Dans cinq cas, à la suite de discussions approfondies, il a en fait été nécessaire d’approuver rétroactivement les dépenses33. Cela a eu une incidence négative sur les premières étapes de la mise en œuvre des projets concernés, l’absence d’accord dûment signé entraînant en effet une insécurité juridique pour les organismes chargés de la mise en œuvre.

Rapport coût-efficacité de la fourniture de l’aide
46

Les organisations des Nations unies, la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement prélèvent chacune leurs propres frais pour la gestion des fonds fiduciaires. Aucune de ces organisations n’applique un pourcentage inférieur aux 5 % prévus pour le fonds fiduciaire Bêkou34. Pour les autres instruments d’aide externes de l’UE relevant du FED et du budget général, des taux globaux supérieurs à 5 % sont également pratiqués.

47

Les frais de gestion du fonds fiduciaire Bêkou excluent le salaire du gestionnaire du fonds et les frais de traitement. Cela signifie qu’au total, les coûts de gestion du fonds sont plus élevés que ceux figurant dans les comptes de celui-ci. Les coûts globaux liés à la gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’ont pas été calculés. Ces problèmes ont été confirmés par un audit réalisé en interne par la Commission.

48

Comme pour l’ensemble de l’aide au développement, le coût total de la fourniture de l’aide ne se limite pas aux simples frais de gestion. Parallèlement aux frais prélevés par le fonds fiduciaire Bêkou, les organisations internationales et les ONG sous-traitantes facturent leurs propres frais administratifs, qui correspondent en général à un pourcentage (7 % maximum) de la valeur du contrat. Or elles peuvent à leur tour déléguer certaines tâches liées à la mise en œuvre du contrat à d’autres organismes, ajoutant ainsi de nouveaux frais administratifs. Les accords de coopération déléguée sont particulièrement coûteux, car ils génèrent automatiquement des frais de gestion supplémentaires (voir tableau 1 ci-dessus). Les avantages de ce type de financement doivent toujours être mis en balance par rapport à ses coûts supplémentaires.

49

L’article 3.8 de l’acte constitutif du fonds dispose que l’ensemble de son personnel sera, à terme, basé à Bangui. Actuellement, le fonds compte un seul représentant à Bangui, tandis que sept membres du personnel travaillaient depuis Bruxelles en 2016. En raison de la situation actuelle en matière de sécurité, le nombre d’expatriés basés à la délégation de l’UE est limité. Il est cependant appelé à augmenter lorsque la situation sur place s’améliorera. Aucun calcul n’a encore été effectué pour déterminer si le transfert du personnel en RCA pourra se faire dans le respect du plafond des 5 % (voir point 36)35.

Les mécanismes de suivi et d’évaluation n’ont pas encore été pleinement développés

50

Les mécanismes de suivi et d’évaluation sont importants pour mesurer la performance du fonds et adopter les éventuelles mesures correctrices nécessaires. Comme le fonds fiduciaire Bêkou est le premier fonds fiduciaire de l’UE géré par la Commission européenne, il peut apporter des enseignements précieux en vue du recours à ce type d’instrument de financement à l’avenir.

51

Parce qu’il n’a pas décliné son objectif général en un enchaînement complet de résultats à atteindre, en précisant les résultats escomptés (réalisations, effets et impact) et en définissant les indicateurs correspondants, le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose d’aucun cadre lui permettant de mesurer sa propre performance36. Par exemple, même si l’acte constitutif du fonds et d’autres documents donnent une indication de ce que l’on peut en attendre (renforcer la résilience, améliorer la coordination, fournir l’aide plus rapidement, mobiliser une masse critique de financement, conférer une visibilité politique, etc.), ces attentes n’ont pas été traduites en objectifs SMART37.

52

Fin 2016, il n’existait aucun processus pour tirer systématiquement, de l’expérience du fonds fiduciaire Bêkou, des enseignements qui permettent à la Commission de concevoir et de gérer mieux les fonds fiduciaires. Toutefois, plusieurs actions entreprises dernièrement sont de nature à faire évoluer les choses dans le bon sens. Parmi ces actions figurent la publication de différents articles sur le fonds fiduciaire Bêkou, l’organisation de conférences, d’ateliers et de réunions, notamment avec des représentants des fonds fiduciaires de l’UE, ainsi que des présentations.

53

Au niveau des projets, les objectifs, les résultats et les activités sont définis. Cependant, des indicateurs font défaut pour deux projets sur onze et, pour huit projets, ils existent, mais ils sont vagues ou ne sont pas assortis de valeurs cibles. Des problèmes similaires ont été relevés au niveau des contrats: certains objectifs ne sont que partiellement SMART et les indicateurs sont parfois peu lisibles ou dépourvus de valeurs cibles correspondantes (voir annexe III pour des informations détaillées).

Malgré des circonstances difficiles, le fonds fiduciaire Bêkou a donné à ce jour des résultats globalement positifs

54

Nous avons examiné les résultats du fonds sous trois angles: celui des aides qu’il a permis de mobiliser, celui des réalisations produites par ses projets et celui de la visibilité qu’il a assuré à l’UE. Il s’agit là de quelques-uns des avantages escomptés du fonds fiduciaire Bêkou.

Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, mais a attiré peu de donateurs supplémentaires

55

Le fonds fiduciaire Bêkou était censé encourager de nouveaux donateurs à apporter une aide à la RCA et mobiliser des aides supplémentaires. Initialement considérée comme un «orphelin de l’aide», la RCA a bénéficié d’une aide totale d’environ 250 millions de dollars des États-Unis par an au cours de la période qui a mené à la crise de 2012-2013 (voir figure 1). En 2014, cette aide a culminé à 610 millions de dollars des États-Unis38.

Figure 1

Montant total de l’aide octroyée à la RCA de 2006 à 2015, en millions de dollars des États-Unis

Source: Données de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE), versements d’aide (APD) vers les pays et régions [CAD2a] pour la période 2006-2015, disponibles à l’adresse www.oecd.org/fr/cad/stats/sdienligne.htm.

56

L’aide au développement nécessaire à la mise en œuvre du plan national de relèvement et de consolidation de la paix s’élève à quelque 3,2 milliards de dollars des États-Unis sur cinq ans (2017-2021). Lors de la conférence des donateurs de novembre 2016, les donateurs se sont engagés à verser plus de deux milliards de dollars des États-Unis d’aide au développement en faveur de la RCA, couvrant ainsi une part substantielle de ces besoins.

57

Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, avec des annonces de contributions s’élevant à un total de 146 millions d’euros à la fin de 2016 (voir figure 2). Ce montant, qui est supérieur à celui de la dotation du fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies, lequel a permis de réunir une somme de 25 millions d’euros (voir annexe II), est comparable à celui de l’enveloppe bilatérale octroyée au titre du 11e FED, qui devrait atteindre 208 millions d’euros39.

Figure 2

Annonces de contributions en faveur du fonds fiduciaire Bêkou

FR-CH01-PH25-1

Source: Données communiquées par la Commission européenne.

58

Trois quarts des ressources du fonds proviennent du budget de l’UE et de celui du FED. Plus d’un tiers de cette contribution correspond à une aide supplémentaire pour la RCA, qui est venue s’ajouter aux engagements déjà pris en faveur du pays dans le cadre d’autres canaux de financement de l’UE.

59

La France, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et la Suisse fournissaient déjà une aide à la RCA avant la création du fonds fiduciaire Bêkou, mais les montants octroyés avant 2014 étaient comparativement faibles. À partir de 2014, l’aide a été octroyée par l’intermédiaire du fonds et d’autres canaux (voir encadré 4 pour de plus amples informations sur les activités des donateurs en RCA).

60

Le Parlement européen a par deux fois invité les États membres à augmenter leurs contributions au fonds fiduciaire Bêkou. En 2016, au cours de la procédure de décharge sur l’exécution du budget des FED pour l’exercice 2014, il a appelé «à une plus grande implication des États membres afin de rendre ce fonds pleinement opérationnel»40.

61

Certains États membres continuent à soutenir les fonds fiduciaires des Nations unies, comme ils le faisaient avant la création du fonds fiduciaire Bêkou (voir annexe II). Le Fonds humanitaire des Nations unies pour la RCA compte onze bailleurs de fonds, parmi lesquels figurent la Belgique, le Danemark, l’Allemagne, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède, la Suisse et le Royaume-Uni. La France et les Pays-Bas sont également des donateurs du fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies.

La plupart des projets ont produit les résultats escomptés, dans un contexte difficile

62

La mise en œuvre de 20 des 31 contrats liés aux onze projets de l’échantillon avait atteint un stade suffisamment avancé pour nous permettre d’évaluer au moins partiellement la performance. Bien que notre évaluation ait été soumise à certaines limitations41, nous considérons que la plupart des projets ont produit les résultats escomptés.

63

Trois contrats (deux concernant des études et un contrat d’assistance technique) ont produit toutes les réalisations escomptées. Pour onze contrats, la plupart des réalisations prévues se sont concrétisées (voir exemple dans l’encadré 6). Pour six contrats toujours en cours, les réalisations prévues n’avaient pas encore été produites à la fin de 2016 et le risque existe qu’elles ne le soient toujours pas au terme des projets (voir point 65 pour des informations détaillées). Une évaluation plus détaillée de chacun des contrats est présentée à l’annexe III.

Encadré 6

Exemple de réalisations: le projet en matière de santé

Six ONG ont reçu une aide du fonds fiduciaire Bêkou afin d’aider 80 établissements de santé à travers le pays à fournir des services de santé primaires de meilleure qualité à la population locale.

Cette aide a permis d’assurer environ deux millions de consultations médicales. Les ONG ont dépassé les valeurs cibles fixées pour plusieurs indicateurs, tels que le nombre de consultations, le nombre d’accouchements assistés et le nombre de femmes ayant bénéficié d’une visite médicale. Dans les établissements concernés, les soins de santé, les médicaments et les tests de laboratoire ont été délivrés gratuitement aux enfants, aux femmes enceintes et allaitantes ainsi qu’aux patients en situation d’urgence vitale.

Les activités prévues au niveau des établissements de santé, notamment en matière de rénovation, de formation du personnel, de fourniture de médicaments et de matériel de laboratoire de base, de coordination des districts sanitaires et de surveillance, ont été réalisées dans les délais ou avec un retard minime. Ainsi, à Bria, six des huit établissements de santé ont été rénovés, tandis qu’à Vakaga, sept établissements ont été rénovés et équipés.

Des soins sont prodigués dans différents dispensaires à travers le pays grâce au projet dans le secteur de la santé.

© Croix-Rouge française.

64

Toute une série de facteurs, tant endogènes qu’exogènes, expliquent que les objectifs n’aient pas été atteints dans certains cas, le plus décisif étant les conditions de sécurité difficiles dans lesquelles les projets ont été mis en œuvre (voir annexe III).

65

Si beaucoup de réalisations tangibles ont été obtenues, les résultats ayant des effets plus fondamentaux à long terme mettent habituellement plus de temps à se concrétiser. Ainsi, dans le cadre du projet sur la sécurité alimentaire, les campagnes de vaccination du bétail ont été couronnées de succès, tandis que la prévention des conflits et la redéfinition des voies de transhumance pourraient devoir se poursuivre au cours d’une éventuelle deuxième phase. Pour ce qui est du projet en matière de santé, la première phase de fourniture de services de santé par les six ONG a été couronnée de succès et une étude sur la réforme de la centrale nationale d’achat des médicaments a été réalisée comme prévu; cependant, les actions visant à réformer les services publics de santé nécessitent davantage de temps.

Les paillotes sont des huttes de paille traditionnelles utilisées comme espaces centraux de rencontre dans les collectivités.

© Croix-Rouge française.

Le fonds assure une visibilité accrue à l’Union

66

Le fonds fiduciaire Bêkou devait permettre à l’UE de gagner en visibilité, à la fois au travers des actions entreprises dans le cadre des projets et de la visibilité politique qu’il lui assure à son propre niveau.

67

Les partenaires des projets ont mené de nombreuses activités sur le terrain. Ils ont notamment élaboré des matériels d’information, réalisé des documentaires, publié des articles universitaires et organisé des ateliers nationaux sur les résultats des activités, des cérémonies, des sessions de formation, des émissions de radio, des visites de journalistes, etc., conformément à leurs plans de renforcement de la visibilité de l’UE.

68

Plus de 30 activités visant à donner une certaine visibilité au fonds dans son ensemble ont été menées, pour un montant de quelque 191 000 euros. Le rapport annuel d’activité du fonds fiduciaire Bêkou comporte un chapitre consacré aux activités de cette nature et présente les principaux objectifs en matière de communication, de même que des événements grand public, des projets, le site web «capacity4dev»42 et du matériel de communication.

69

Plusieurs conférences apportant une visibilité à l’UE ont été organisées (voir exemples dans l’encadré 7). Des délégations de plus de 80 pays du monde entier ont assisté à une conférence organisée en novembre 2016 à Bruxelles, à laquelle ont également participé des représentants de haut niveau des Nations unies, de la Banque mondiale et d’autres organismes. Cette conférence a permis de recueillir des annonces de contributions pour un montant de deux milliards d’euros.

Encadré 7

Le fonds fiduciaire Bêkou a organisé plusieurs évènements

L’équipe du fonds fiduciaire Bêkou a organisé une série d’ateliers et de conférences et publié des documents et des communiqués de presse, qui ont bénéficié d’une large couverture médiatique aussi bien à Bangui qu’à Bruxelles.

L’atelier «Résilience et relèvement, chemin vers le développement» qui s’est tenu à Bangui en juin 2016 a par exemple attiré plus de 200 participants représentant les autorités nationales, des organisations de la société civile, des bailleurs de fonds, des agences des Nations unies, des ONG internationales, ainsi que des médias, et offert une vue d’ensemble de la situation en RCA, des défis qu’elle pose et des besoins de la population. Au terme de cet atelier, douze recommandations ont été adressées au gouvernement centrafricain, aux partenaires des projets et aux bailleurs de fonds actifs dans le pays.

Un autre exemple est la conférence internationale de haut niveau sur la RCA, organisée à Bruxelles en mai 2015 et à laquelle plus de 300 personnes ont participé, dont le Président de la RCA, des ministres, des membres du Parlement européen ainsi que des représentants des Nations unies et d’ONG. À cette occasion, des engagements financiers supplémentaires ont été pris en faveur du pays et deux nouveaux donateurs ont rejoint le fonds fiduciaire Bêkou.

Conclusions et recommandations

70

Le fonds fiduciaire Bêkou a été créé dans un contexte national difficile, caractérisé par des problèmes considérables sur les plans humanitaire et du développement ainsi que par la fragilité d’autorités publiques incapables de répondre aux besoins de la population. Même si nous estimons que la conception et la gestion du fonds pourraient être améliorées selon les modalités proposées ci-après pour lui permettre d’exploiter tout son potentiel, nous reconnaissons que sa mise en place était appropriée et qu’elle a permis d’obtenir plusieurs résultats positifs.

La mise en place du fonds fiduciaire Bêkou

71

Le fonds fiduciaire Bêkou a été institué dans des délais très courts. Le règlement financier soumet la création d’un fonds fiduciaire à certaines conditions, que la Commission n’a toutefois pas encore traduites en cadre analytique lui permettant d’évaluer de manière formelle et structurée les avantages comparatifs de ce type de fonds par rapport aux autres instruments de financement (voir points 13 à 20).

72

Le champ d’intervention du fonds fiduciaire Bêkou n’a pas été défini sur la base d’une analyse exhaustive des besoins. Une telle analyse aurait pu indiquer plus clairement comment et pourquoi les activités du fonds étaient pertinentes pour l’objectif poursuivi et quelles lacunes spécifiques le fonds venait combler (voir points 21 à 27).

Recommandation n° 1 – Élaborer de nouvelles orientations sur le choix des instruments de financement et sur les analyses des besoins visant à définir les champs d’intervention des fonds fiduciaires

La Commission devrait améliorer ses lignes directrices relatives aux fonds fiduciaires de l’UE:

  • en élaborant un cadre analytique comprenant des principes directeurs pour la conduite d’une évaluation concise et structurée des avantages comparatifs des fonds fiduciaires par rapport aux autres instruments de financement;
  • en instaurant des méthodes à appliquer lors des analyses des besoins visant à démontrer que le champ d’intervention de tout fonds fiduciaire envisagé est approprié et à préciser quelles lacunes il est destiné à combler.

En élaborant ces orientations, il importe de veiller à ne pas allonger inutilement le processus de création des fonds fiduciaires et à ne pas en limiter la flexibilité.

Délai de mise en œuvre: octobre 2018

La gestion du fonds fiduciaire Bêkou

73

Le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes, non seulement en interne entre ses bailleurs de fonds, mais aussi sur le plan externe, avec la communauté internationale. Même en l’absence de mécanismes formels, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a assuré, à titre de bonne pratique, une certaine coordination des projets au cas par cas (voir points 29 à 35).

74

En l’absence d’informations précises sur les procédures applicables par le fonds fiduciaire Bêkou, la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre n’est pas pleinement transparente. Les accords de coopération déléguée comportent un risque de conflits d’intérêts. Des gains de temps supplémentaires auraient pu être réalisés lors de l’examen des projets (voir points 36 à 44).

75

Globalement, les 5 % de frais de gestion prélevés par le fonds fiduciaire Bêkou sont comparables à ceux pratiqués par les autres acteurs de l’aide au développement, mais les frais de gestion n’ont pas encore été calculés dans leur intégralité. Par ailleurs, comme pour l’ensemble de l’aide au développement, le coût total de la fourniture de l’aide ne se limite pas simplement aux frais de gestion du fonds (voir points 46 à 49). Nous estimons qu’il importe de savoir quel est le coût total d’un fonds fiduciaire en tant qu’instrument de financement, afin que la Commission puisse, à l’avenir, évaluer si cet instrument présente un bon rapport coût-efficacité par comparaison avec les autres canaux d’acheminement de l’aide de l’UE.

76

Le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose d’aucun cadre de référence pour mesurer sa propre performance, ses objectifs spécifiques et les indicateurs correspondants n’ayant pas encore été définis. Cela complique le suivi du fonds et l’évaluation de ses résultats. La Commission ne dispose pas encore d’un processus permettant systématiquement de tirer, de l’expérience du fonds fiduciaire Bêkou, des enseignements qui pourraient l’aider à mieux concevoir et à mieux gérer les fonds fiduciaires (voir points 50 à 53).

Recommandation n° 2 – Améliorer la coordination au niveau des donateurs, les procédures de sélection et la mesure de la performance et optimiser les coûts administratifs

La Commission devrait:

  • assurer plus systématiquement la coordination des opérations concernant, d’une part, l’aide octroyée par le fonds fiduciaire Bêkou et, d’autre part, les aides bilatérales fournies par ses bailleurs de fonds;
  • veiller à ce que toute dérogation aux règles et aux procédures de la Commission pour la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre soit clairement signalée, le cas échéant, et à ce que des dispositions sur la manière d’éviter les conflits d’intérêts soit introduites, et étudier les différents moyens d’accélérer les procédures de sélection, notamment au moment de l’examen du contenu des projets;
  • calculer intégralement les coûts de gestion du fonds fiduciaire Bêkou et trouver les moyens de maximiser le montant de l’aide versée aux bénéficiaires finals;
  • définir des objectifs SMART pour le fonds fiduciaire Bêkou, et les indicateurs correspondants, afin de pouvoir contrôler et démontrer les avantages qu’il apporte, et prévoir un dispositif de retour d’expérience dans ses lignes directrices sur les fonds fiduciaires de l’UE.

Délai de mise en œuvre: octobre 2018

Les résultats du fonds fiduciaire Bêkou

77

Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, avec des annonces de contributions s’élevant à un total de 146 millions d’euros à ce jour. Cependant, les crédits proviennent en majorité du budget de l’UE et du Fonds européen de développement. Les autres bailleurs avaient tous octroyé des aides à la RCA avant la création du fonds, mais, avant 2014, les montants en question étaient comparativement faibles (voir points 55 à 61).

78

Au niveau des projets, malgré un contexte souvent difficile sur le plan de la sécurité, 14 contrats sur 20 ont permis d’obtenir la plupart ou la totalité des réalisations escomptées (voir points 62 à 65).

79

Le fonds assure une visibilité accrue à l’Union. Les partenaires des projets ont mené des actions sur le terrain pour assurer une certaine visibilité à l’UE, avec, globalement, plus de 30 activités menées à bien pour le fonds dans son ensemble (voir points 66 à 69).

Le présent rapport a été adopté par la Chambre III, présidée par M. Karel PINXTEN, Membre de la Cour des comptes, à Luxembourg en sa réunion du 20 juin 2017.

Par la Cour des comptes

Klaus-Heiner LEHNE
Président

Annexes

Annexe I

Liste des projets et des contrats

Annexe II

Liste des fonds fiduciaires des Nations unies opérant en RCA

Sources: http://mptf.undp.org et www.unocha.org/cerf au 16 mars 2017.

Annexe III

Réalisations des projets: indication de l’état d’avancement au moyen d’un code couleur

Légende: Vert – réalisations pleinement obtenues, jaune – réalisations obtenues pour la plupart; orange – réalisations non (encore) obtenues pour la plupart; rouge – réalisations non obtenues; gris – pas d’évaluation, la mise en œuvre n’étant pas suffisamment avancée.

Détails: contrat n° 2: durée prolongée de 1,5 mois; contrat n° 3: durée prolongée de 1 mois; contrat n° 5: contribution de l’UE portée de 1,7 à 2,2 millions d’euros; contrat n° 8: contribution de l’UE portée de 47 000 à 53 000 euros et durée prolongée de 5 mois; contrat n° 18: durée prolongée de 8 mois.

Réponses de la Commission

Synthèse

II

Une crise d’une ampleur sans précédent a éclaté en République centrafricaine (RCA) en 2013-2014, entraînant des violences intercommunautaires présentant d’après les analystes les caractéristiques d’un «pré-génocide», ainsi qu’un affaiblissement des fonctions étatiques élémentaires. Outre une action humanitaire, il était également urgent d’apporter un ferme soutien à la résilience du pays.

III

La République centrafricaine est en proie à des crises récurrentes. Enclavée et négligée par la communauté internationale («orpheline de l’aide»), elle doit, pour vaincre la pauvreté, faire face à des défis structurels.

IV

Le fonds fiduciaire Bêkou (FFB) est le tout premier fonds fiduciaire créé par l’UE. Ses performances et réalisations sont dès lors le résultat d’améliorations, d’innovations et d’apprentissages permanents. Le FFB s’appuie sur les enseignements tirés auprès d’acteurs similaires, sur la base d’études existantes et d’évaluations de la résilience et de la coopération au développement dans des situations de fragilité.

V

L’analyse réalisée en amont de la création du FFB a dressé l’inventaire de plusieurs études et analyses effectuées par les partenaires les plus engagés en RCA et dans les situations précaires.

VI

Le FFB a ouvert une nouvelle voie de coordination des actions menées par l’UE et ses États membres, qui n’a pas encore été pleinement mise à profit à ce stade.

De l’avis de la Commission, si l’on tient compte de la totalité du cycle de projet, la vitesse globale du fonds Bêkou est supérieure à celles des autres instruments de l’UE utilisés en situation de crise. La Commission accepte toutefois d’étudier les moyens envisageables pour accélérer davantage les procédures de sélection au-delà de ce que permettent actuellement les règles internes, tout en trouvant le bon équilibre entre rapidité et transparence.

Les mécanismes de suivi et d’évaluation sont élaborés au niveau des projets et seront progressivement mis en place au niveau du fonds.

VIII

En ce qui concerne le deuxième point, le FFB donne à ses membres l’occasion d’améliorer leur coordination. S’agissant de la coordination générale entre les donateurs, la situation a évolué de manière positive: le processus de résilience et de consolidation de la paix en Centrafrique (RCPCA), lancé en novembre 2016 au lendemain de la conférence des donateurs à Bruxelles, a désormais commencé et la coordination de tous les donateurs est assurée par le gouvernement de la RCA, soutenu par un «secrétariat permanent».

Pour ce qui est des procédures de sélection et de la mesure de la performance, le FFB a progressivement introduit des améliorations, des innovations et tirés des enseignements, et continue de le faire.

En ce qui concerne les coûts administratifs, à la suite d’une recommandation de son service d’audit interne, la Commission a déjà élaboré un plan d’action visant à traiter cet aspect et met actuellement en œuvre les actions prévues.

Introduction

01

En tant que principal donateur dans les domaines de l’aide humanitaire et du développement, l’UE n’a depuis longtemps d’autre choix que de financer des fonds fiduciaires administrés par la Banque mondiale ou les Nations unies pour répondre aux crises naturelles ou imputables à l’homme. Si ces fonds fiduciaires apportent une valeur ajoutée, l’UE a créé, en s’appuyant sur le traité de Lisbonne, l’«approche globale» et la «stratégie globale pour la politique étrangère et de sécurité de l’UE», ses propres outils afin de jouer un rôle actif dans les situations de ce type, notamment en RCA, où l’UE est activement engagée en mobilisant tous ses instruments disponibles.

04

Les partenaires fondateurs du FFB ont convenu, sur la base de leur analyse des besoins et du profil de vulnérabilité du pays, que la résilience était le domaine le moins financé et le plus pertinent dans le cadre d’une approche basée sur les liens entre l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement (LRRD) afin d’aider la République centrafricaine à passer d’une situation d’après-crise à une situation de stabilité.

07

La République centrafricaine est orpheline de l’aide depuis de nombreuses années. L’intensification de l’APD destinée à la RCA entre 2015 et 2016 s’explique principalement par la forte augmentation des besoins suite à la crise et au développement ultérieur de l’intervention humanitaire. Les besoins du pays sur le plan de l’aide programmable à long terme sont sous-financés. Le FFB sert de catalyseur à un engagement à court, moyen ou long terme des donateurs dans ce domaine.

Observations

13

L’UE, qui est depuis longtemps l’un des partenaires majeurs de la RCA dans le domaine du développement, n’a jamais interrompu ses opérations bilatérales, même au pire de la crise. Son office humanitaire est resté ouvert pendant la crise et de nouvelles ressources ont été affectées en vue de répondre aux besoins urgents. Dans le même temps, l’UE a lancé une intervention militaire (EUFOR) pour stabiliser le pays. Afin d’aider la RCA à passer d’une situation d’après-crise à une situation de stabilité, il était urgent de mettre en place des activités basées sur la résilience, d’où la création d’un outil spécifique destiné à identifier et à mettre en œuvre de tels projets en vue d’aider la population et de renforcer les capacités des pouvoirs publics.

14

Le FFB fonctionne sur la base d’une gestion centralisée, en raison de la nécessité d’obtenir des résultats rapides alors que le gouvernement de transition n’était pas en mesure d’assumer toutes les responsabilités et toutes les opérations inhérentes à une gestion décentralisée.

15

L’UE et ses États membres ont immédiatement trouvé un consensus i) sur le principe d’intervenir en RCA afin de renforcer la résilience et 2) sur la nécessité de s’écarter des pratiques standard, en raison de la nature spécifique de la crise et de la fragilité de la situation.

Encadré 1

Le programme d’action à l’appui de l’efficacité de l’aide a démontré sa valeur ajoutée dans des situations «classiques»; il est capital pour l’UE. Toutefois, ce programme d’action n’empêche pas les donateurs de répondre aux besoins urgents d’un pays ayant connu une situation de «pré-génocide», avec un cinquième de sa population contrainte au déplacement forcé/à la migration, lorsque les canaux d’acheminement de l’aide existants ne permettent pas d’obtenir les résultats escomptés ou d’assurer des LRRD en République centrafricaine.

L’UE a mûrement réfléchi avant de lancer le FFB: la commissaire de l’époque Kristalina Georgieva s’est rendue à de nombreuses reprises en RCA en 2013 et 2014 et une série d’ateliers ont été organisés sur les meilleurs moyens d’aborder le problème de la résilience/des LRRD dans le pays, l’aide humanitaire n’étant ni suffisante, ni vouée à apporter des résultats à long terme.

19

La Commission a dûment évalué, en collaboration avec les principaux partenaires engagés, la valeur ajoutée d’un fonds fiduciaire ainsi que la pertinence d’une approche basée sur la résilience/les LRRD en RCA.

Lors de la réalisation de l’analyse nécessaire en amont de la création du FFB, la Commission n’a pas été en mesure de lancer une évaluation/un processus de longue haleine qui aurait remis en question la capacité de l’UE d’agir avec crédibilité, fiabilité et efficacité dans les situations d’urgence.

La Commission voudrait souligner les différences entre l’utilisation et les objectifs des fonds fiduciaires de la Banque mondiale et des Nations unies et l’objectif du législateur lorsqu’il a introduit les fonds fiduciaires de l’UE dans le règlement financier (RF).

Le fonds Bêkou de l’UE est un «fonds fiduciaire d’urgence», qui doit être promptement créé et mis en œuvre.

La gestion de fonds fiduciaires est l’une des principales activités de la Banque mondiale. Celle-ci gère des centaines de fonds fiduciaires, alors que pour la Commission, il ne s’agit pas d’un instrument de mise en œuvre habituel.

Les fonds fiduciaires de l’UE n’étant qu’à un stade de développement précoce, il n’est peut-être pas tout à fait pertinent, à ce moment précis, d’établir un parallèle avec les fonds fiduciaires des Nations unies et de la Banque mondiale.

20

Le règlement financier n’exige pas la réalisation d’une analyse structurée et documentée. Son article 187, paragraphe 3, indique uniquement que les fonds fiduciaires doivent remplir un certain nombre de conditions, mais ne demande pas de formaliser d’une quelconque manière la façon dont ces conditions sont vérifiées.

La Commission suit et respecte les dispositions de son propre cadre juridique, à savoir le RF. Les conditions établies dans le RF sont transposées par les orientations sur les fonds fiduciaires de l’UE publiées dans le manuel DEVCO. Ces orientations ont été élaborées avant la création du premier fonds fiduciaire de l’UE. Elles sont censées être régulièrement actualisées en fonction des enseignements tirés du fonctionnement des fonds fiduciaires actuellement existants.

La décision de créer un fonds fiduciaire s’appuie sur l’analyse de la crise et de l’intervention requise. Elle est motivée dans la décision portant création du fonds fiduciaire.

Voir également la réponse au point 19.

21

En 2014, la RCA était orpheline de l’aide et occupait l’une des dernières places du classement de l’indice de développement humain du PNUD. À la suite de diverses études et analyses, dont celles réalisées par le PNUD (en particulier les indicateurs relatifs à la santé et le manque d’accès aux services de base), et du constat selon lequel la résilience était le principal domaine sous-financé en RCA, le mandat du FFB a été articulé autour de l’amélioration des services de base, de la réconciliation (vu la situation d’après-crise) et de la création d’emplois (afin de dissuader les jeunes de rejoindre des groupes armés).

22

La Commission estime qu’une analyse adéquate a été réalisée lors de l’atelier de février 2014.

Celui-ci a par ailleurs pris pour base une analyse du conflit réalisée conjointement quelques jours auparavant par l’UE et les Nations unies.

En outre, la stratégie nationale intitulée « Programme d’urgence et de relèvement durable» (PURD), adoptée en juillet 2014 et encadrant l’ensemble des activités des donateurs sur la période 2014-2016, prévoit une évaluation claire des besoins.

En juillet 2014, dans le cadre du PURD, une grille des besoins (en fonction du secteur/thème) clairement hiérarchisés (long/moyen/court terme) a été élaborée afin de présenter les actions relevant des LRRD à financer et d’établir une répartition des tâches entre les instruments de l’UE et les autres donateurs.

Compte tenu du peu de temps disponible pour créer le fonds fiduciaire Bêkou, eu égard à la situation de crise en RCA, une analyse approfondie aurait nécessité du temps et des ressources supplémentaires. Une telle analyse a été effectuée ultérieurement, en concertation avec les Nations unies, la Banque mondiale et le gouvernement de la RCA, et a débouché sur la formulation du plan national de relèvement du pays et de consolidation de la paix 2017-2021.

23

La résilience n’est pas un nouveau thème de la coopération au développement. Elle a fait l’objet d’une définition et d’une évaluation détaillées de la CE [voir COM(2012)586 sur la résilience] afin de combler les lacunes et d’établir un lien entre l’action humanitaire et la coopération au développement. Cette communication s’appuie sur l’expérience lancée par la Commission au Sahel dans le cadre de son initiative «AGIR» ainsi que dans la Corne de l’Afrique avec son plan «SHARE».

24

La Commission prend note de l’appréciation positive de la Cour.

25

La reprise, par le FFB, de certains projets humanitaires précédemment financés par la Commission constitue une bonne pratique en matière de LRRD. Tel est le cas, par exemple, de projets dans le secteur de la santé. La logique prévalant ici est la suivante: lorsqu’il y a une amélioration du contexte et que certaines régions du pays sortent d’une situation de crise aiguë pour entrer dans une phase de stabilisation, il est judicieux de déplacer l’aide humanitaire de ces régions pour la concentrer sur les régions les plus instables, où il est le plus urgent d’intervenir et où les besoins vitaux sont les plus grands. Dans ces cas, la reprise d’initiatives par le FFB permet la continuité des services et donne l’opportunité d’intervenir de manière plus structurée, en impliquant davantage les ministères de tutelle.

Encadré 2 c)

Le FFB a le devoir de s’adapter et d’ajuster ses interventions en fonction de l’évolution de la situation instable et de travailler sur une coordination avec les autres donateurs. C’est précisément ce qui s’est passé avec les deux exemples suivants: des projets prévus par le biais d’autres instruments (budget pour la sécurité alimentaire et FED pour Ecofaune) n’ont pas pu être lancés dans leur configuration initiale. Ils ont été transférés au FFB afin d’être mis en œuvre avec des éléments/objectifs adaptés au mieux au programme de résilience.

Eu égard à la raison d’être des fonds fiduciaires de l’UE, les fonds n’étaient pas regroupés dans un fonds fiduciaire des Nations unies, ni transférés aux Nations unies (FAO), mais directement engagés dans des contrats avec les partenaires de mise en œuvre, afin de permettre à l’UE d’assurer le suivi des activités. En outre, lorsque la FAO était le seul partenaire, le FFB est parvenu à négocier 5 % de commissions d’administration au lieu de 7 %.

Encadré 2 d)

En ce qui concerne ECOFAUNE +, ce programme est plus qu’une simple suite du projet ECOFAUNE-RCA lancé en 2012. L’ancien projet ECOFAUNE était essentiellement basé sur des activités de transhumance, tandis que le nouveau projet ECOFAUNE+ couvre i) l’aménagement du territoire dans le cadre du processus de décentralisation et ii) les moyens de subsistance (formation professionnelle et micro-projets). En outre, non seulement le contexte a radicalement changé après 2012, mais le mode de mise en œuvre a également dû passer du devis-programme (DP) à la subvention.

26

La coordination des donateurs est une responsabilité qui incombe au gouvernement; dans le cas de la RCA, un cadre de coordination n’est en place que depuis peu, en raison du contexte de crise et de la situation d’après-crise.

L’évaluation des besoins pour le relèvement et la consolidation de la paix (appelée «RCPCA»), lancée à la mi-2016 et approuvée par le gouvernement de RCA, a débouché sur la création d’un secrétariat chargé de la coordination de tous les donateurs impliqués en RCA et du suivi de la conférence. Le FFB joue un rôle actif dans ce suivi, notamment lors de sa toute récente mission sur le terrain en RCA, du 16 au 23 mai 2017.

27

Le FFB se concentrera essentiellement sur le 2e pilier («contrat social entre l’État et la population») via ses activités pour la santé et la sécurité alimentaire/le développement rural, ainsi que sur le 3e pilier (création d’emplois) afin de garantir une plus grande durabilité. Le gouvernement de RCA devrait prendre la direction des opérations en ce qui concerne la répartition des tâches; toutefois, le nouveau gouvernement formé à la suite des élections de mars 2016 met doucement en place des structures adéquates ayant les capacités requises pour mener à bien cette mission, mais il lui faut du temps. L’existence même du plan national de relèvement du pays et de consolidation de la paix est la base la plus importante pour l’alignement des donateurs sur les priorités de la RCA. Celles-ci sont suivies par l’UE dans le cadre de tous ses instruments de mise en œuvre, y compris le FFB.

29

La Commission confirme que la création d’un fonds fiduciaire dans une situation d’après-crise peut constituer pour les donateurs souhaitant apporter leur aide une excellente occasion d’agir, et ce, de manière moins fragmentée et plus coordonnée. La condition préalable à une telle action est que tous les donateurs présents dans le pays (en particulier les États membres de l’UE) acceptent que le fonds fiduciaire soit le seul (ou, du moins, le principal) instrument utilisé pour l’acheminement de leur aide.

30

Le principal objectif du fonds fiduciaire, tel qu’il est défini dans le règlement financier, est établi par l’acte constitutif et formulé comme suit: «appuyer la résilience des populations vulnérables, la sortie de crise et la reconstruction de la République centrafricaine dans toutes ses dimensions, de manière cohérente et ciblée, articulant les actions de court, de moyen et de plus long terme et permettre aux pays voisins de surmonter les conséquences de la crise».

La coordination entre les donateurs est inhérente à la structure de gouvernance des fonds fiduciaires de l’UE et s’inscrit dans le cadre de leur objectif de réduction de la fragmentation de l’aide. Cet objectif est atteint grâce à l’existence même d’un fonds fiduciaire de l’UE, celui-ci donnant aux autres donateurs la possibilité de distribuer leurs fonds par l’intermédiaire de la Commission. Celle-ci ne peut imposer aux autres donateurs l’utilisation effective de cette possibilité.

31

La Commission a donné aux États membres et aux autres donateurs un moyen de mettre en commun leurs fonds, favorisant ainsi la coordination sur le terrain. Toutefois, elle n’est pas en mesure d’empêcher les États membres ou d’autres donateurs de lancer ou de maintenir des activités en RCA, ni de prendre des décisions au sujet de ces activités.

Encadré 4

Le PIN est axé sur deux secteurs non couverts par le FFB (appui budgétaire et gouvernance). Toutefois, un 3e secteur, à savoir la résilience rurale et la création d’emplois, sera mis en œuvre via le FFB à des fins spécifiques de cohérence, ainsi que pour profiter de l’expérience acquise dans le cadre des projets en cours du FFB dans le domaine de la sécurité alimentaire.

Jusqu’à présent, la Banque mondiale n’a pas encore créé son propre fonds fiduciaire. Celui qui est prévu sera, selon toute probabilité, axé sur l’infrastructure, un domaine non couvert par le FFB.

32

Le FFB possède son propre processus décisionnel et sa propre gouvernance, basés sur son acte constitutif. Il a donc été décidé de ne pas perturber cette gouvernance en rendant le cadre décisionnel coordonné obligatoire pour le FFB.

33

Pendant les réunions du comité de gestion, tous les participants sont invités à fournir des informations sur les nouveaux projets potentiels, afin de faciliter la coordination entre les membres du fonds fiduciaire. Toutefois, cette opportunité de coordination renforcée n’est pas toujours mise à profit.

Encadré 5 – Trois exemples de bonnes pratiques en matière de coordination des projets entre donateurs

En février 2016, le FFB a organisé un atelier sur la santé en vue de tirer des enseignements de la phase I et de concevoir la phase II. Cet atelier a été convoqué par le FFB et le ministère de la santé et tous les autres donateurs et partenaires de mise en œuvre y ont participé.

Ce type de coordination ad hoc en amont de l’adoption de tous ses projets constitue le mode de fonctionnement du FFB.

35

Des consultations sont actuellement en cours sur le meilleur moyen de garantir un rôle accru du gouvernement de RCA dans le FFB.

36

En effet, cet instrument a été spécifiquement conçu pour organiser plus rapidement l’aide. Il a également été permis d’utiliser des procédures de sélection flexibles. Celles-ci sont les mêmes que celles appliquées dans les autres instruments de l’UE en situation de crise. La rapidité devrait donc être la même pour tous les instruments.

37

La seule procédure n’ayant été formalisée ni dans le guide pratique des procédures contractuelles, ni dans les orientations sur les instruments de l’UE est l’appel à manifestation d’intérêt (AMI) spécifique au FFB. Toutefois, cette procédure découle directement des orientations internes de la Commission relatives aux situations de crise, qui invitent le pouvoir adjudicateur à envisager toutes les possibilités à sa disposition pour «accroître» le niveau de concurrence - par rapport aux procédures d’attribution directe/procédures négociées. Le pouvoir adjudicateur est par exemple encouragé à inviter plusieurs candidats à la procédure négociée ou à l’attribution directe.

38

La Commission voudrait souligner qu’il convient, au moment de comparer les (dés)avantages des trois procédures, de tenir compte du fait que celles-ci constituent une sélection des procédures dont l’efficacité en situation de crise est avérée.

Dès lors, leurs (dés)avantages respectifs doivent également être envisagés par rapport aux autres procédures de la DG DEVCO qui, comme le reconnaissent les orientations sur les situations de crise, n’apportent pas une flexibilité suffisante pour mettre en œuvre des actions spécifiques en situation de crise ou en cas d’instabilité structurelle durable.

39

Les procédures sont soit les procédures standard figurant dans le guide pratique des procédures contractuelles, soit, pour l’AMI spécifique au FFB, une procédure découlant des orientations sur la crise (consistant en une procédure d’attribution directe précédée par une vaste consultation, dans le but d’accroître la transparence et la concurrence).

Pour l’AMI spécifique au FFB, la transparence est garantie par la note explicative précisant les différentes étapes de la sélection.

Une fois la procédure de sélection déterminée et la forme de la ou des organisations d’exécution choisie (c’est-à-dire définie dans le guide pratique des procédures contractuelles/manuel ou dans le document de procédure lui-même), la Commission estime s’être acquittée de l’exigence de transparence du RF, tout en utilisant les dispositions de flexibilité prévues par l’acte constitutif.

40

La Commission estime qu’il existait des justifications, mais qu’elles n’ont pas été formalisées.

41

Ce cas, qui concernait le programme Genre I, doit être replacé dans son contexte.

En 2014, la délégation de l’UE a identifié deux ONG comme étant les seules ONG internationales actives dans le domaine de l’égalité hommes-femmes en RCA - notamment en ce qui concerne les activités génératrices de revenus. Toutes deux ont été contactées pour travailler en consortium. Pendant la négociation, l’une des deux ONG s’est retirée des discussions, car elle considérait que l’action d’un montant de 1,5 million d’euros était trop limitée pour un consortium.

En 2016, de nouvelles ONG internationales s’étaient engagées en RCA. Un AMI a été organisé pour GENRE II, afin de tenir compte de la participation éventuelle de nouveaux partenaires et de couvrir le nouveau «volet politique» qui n’existait pas dans GENRE I.

42

D’après la Commission, la manière dont les organismes chargés de la mise en œuvre ont été sélectionnés est évidente.

Comme indiqué au point 38, sauf pour un nombre limité de contrats de services, le FFB a eu recours à trois méthodes différentes pour sélectionner les organismes chargés de la mise en œuvre des projets. La manière dont le ou les organismes chargés de la mise en œuvre sont choisis est soit définie dans le guide pratique des procédures contractuelles/d’autres règles internes de la Commission, soit dans le document de procédure lui-même (voir le point 37).

La Commission a donc respecté l’exigence de transparence du RF, tout en faisant usage des dispositions de l’acte constitutif relatives à la flexibilité.

43

Les dispositions relatives à la flexibilité ont permis de gagner du temps par rapport aux approches plus traditionnelles. La rapidité des procédures de sélection de Bêkou ne peut qu’être similaire à celles des autres mécanismes de prestation d’aide de l’UE en situation de crise, puisque toutes découlent des mêmes règles. Pour plus de rapidité, les fonds fiduciaires de l’UE devraient pouvoir mettre en œuvre des procédures de crise de la manière la plus simplifiée possible, tout en maintenant un équilibre entre vitesse et transparence.

44

La Commission estime que le nombre de jours de discussion ne prouve pas que les discussions auraient pu être plus courtes. Par exemple, les 503 jours concernent le redressement économique, qui est le projet le plus innovant et le plus complexe du FFB, ainsi que celui qui a le moins besoin d’une mise en œuvre rapide.

Le fait que des sujets aient apparemment été discutés plusieurs fois doit être replacé dans son contexte. Dans les premières phases du FFB, la rotation du personnel était relativement élevée. Il est donc possible que certaines questions aient été traitées à plusieurs reprises.

45

La rétroactivité des projets relatifs à la santé avait été anticipée, convenue avec les partenaires de mise en œuvre et encadrée. Elle a été conservée afin que les discussions puissent être axées sur les grands résultats, et non sur le calendrier. Les résultats présentés aux points 78 et 79 semblent valider cette décision.

L’option de la rétroactivité doit être mise en balance avec les autres options disponibles, à savoir, aucune action. La Commission a estimé qu’il valait mieux éviter un trou dans les activités en ayant recours à la rétroactivité au lieu d’interrompre l’action.

Il en va de même pour le dernier cas de rétroactivité: la rétroactivité avait été anticipée, convenue avec les partenaires de mise en œuvre et dûment encadrée.

46

La Commission confirme que ce pourcentage est faible par rapport aux frais de gestion des autres organisations/instruments. Il est dès lors capital de le préserver, car il s’agit d’un minimum nécessaire pour assurer les tâches et les obligations du fonds fiduciaire, surtout compte tenu du fait que la gestion d’un fonds fiduciaire est plus qu’une simple gestion de projet.

47

C’est également une pratique standard dans le cadre du fonds fiduciaire des Nations unies: les frais de personnel et les frais administratifs sont des coûts directs qui s’ajoutent aux 7-8 % de frais de gestion.

Les dépenses engagées sont inscrites dans les comptes annuels du FFB. Ces comptes annuels sont préparés conformément aux normes comptables internationales pour le secteur public (IPSAS) et ont fait l’objet d’un avis sans réserve de leurs auditeurs externes depuis la création du fonds fiduciaire.

Les recommandations du service d’audit interne de la Commission, sur lesquelles sont basées les observations de la Cour des comptes, sont en cours d’application.

48

La gestion directe a également un coût, puisque les tâches doivent être gérées par le personnel du fonds fiduciaire, qui doit donc être suffisamment fourni. Le budget d’un fonds fiduciaire concernant les frais de personnel dépendent de deux grands facteurs: 1) les contributions totales et 2) le pourcentage de frais administratifs. Ce pourcentage a été fixé dans l’acte constitutif à 5 % pour l’ensemble des contributions, compte tenu de la dimension modeste du fonds fiduciaire Bêkou et de son éventuel transfert en RCA (les coûts de personnel dans les délégations étant plus élevés qu’à Bruxelles).

En ce qui concerne le coût de la coopération déléguée, cette observation n’est pas propre au FFB, mais s’applique de manière générale aux modes de gestion de la coopération au développement. S’agissant du tableau 1 mentionné au point 48, voir nos observations au point 38.

49

Afin de déterminer si un transfert complet du personnel vers la RCA est possible, il est nécessaire de connaître les éléments suivants:

  1. le moment auquel la situation en matière de sécurité permet un tel transfert;
  2. le niveau des contributions à cette date, afin de pouvoir calculer le montant des frais de gestion disponibles;
  3. le pourcentage de frais de gestion autorisé sur les contributions (le plafond administratif doit encore être convenu avec la DG BUDG).

Cette question sera abordée de nouveau, dès que le premier élément au moins sera connu.

51

La Commission considère que le FFB a introduit des mécanismes de suivi au niveau des projets. La DG DEVCO a déjà convenu avec le SAI de mettre en place un cadre de performance global pour les fonds fiduciaires, en tenant compte du fait qu’il s’agit d’un processus progressif. La DG DEVCO évaluera cet aspect important une fois que plus d’expérience aura été engrangée.

52

Depuis l’audit, la DG DEVCO a lancé deux nouvelles initiatives:

  • la création d’un comité directeur des fonds fiduciaires, présidé par le directeur général de la DG DEVCO et auquel participent les directeurs et les gestionnaires de tous les fonds fiduciaires, afin de traiter de sujets d’intérêt commun et de partager les enseignements tirés à tous égards (gouvernance, processus décisionnel, etc.) Ce comité directeur des fonds fiduciaires s’est déjà réuni à deux reprises depuis sa création en mars 2017;
  • l’inventaire de l’expérience déjà acquise et la révision des orientations et modèles de DEVCO.

En outre, des réunions régulières des équipes chargées des questions relatives aux finances et aux contrats dans les différents fonds fiduciaires ont débuté en 2015, avant d’être interrompues dans le courant de l’année 2016, en raison du départ du personnel des finances des autres fonds fiduciaires. Ces réunions ont repris en avril 2017.

53

Aucune valeur cible n’a été définie pour les indicateurs en l’absence d’une valeur de référence (fiable). Cela n’a toutefois pas empêché le FFB de tenir compte des recommandations en matière de suivi lors de la conception de projets tels que Santé II et de la négociation de contrats individuels.

55

Ce pic de financement en 2014 est dû au financement de l’aide humanitaire. En comparaison, le financement du développement a été modeste en 2014.

56

Le document de la RCPCA prévoit deux blocs d’échéances, à trois et cinq ans, avec des besoins de financement correspondants chiffrés respectivement à 1,6 milliard d’USD et 3,2 milliards d’USD. Les engagements pris lors de la conférence de Bruxelles, d’un montant d’environ 2,3 milliards d’USD, font donc plus que couvrir les besoins de la RCPCA pendant ses trois premières années d’existence.

58

La «mise en commun des ressources» est l’un des avantages d’un fonds fiduciaire, y compris pour les fonds de l’UE provenant de différentes sources.

59

La Commission estime qu’une partie de la contribution de l’Allemagne à la RCA est nouvelle et additionnelle dans le domaine de la coopération au développement. La contribution de la France a également augmenté, tant dans le cadre du FFB qu’en dehors de celui-ci.

61

Dans les travaux préliminaires à la création de nouveaux fonds fiduciaires, il est prévu que ceux-ci ne doivent pas empêcher les donateurs de soutenir des actions en dehors du fonds fiduciaire de l’UE.

65

L’ordonnancement des activités d’un même programme est également une caractéristique propre au FFB. Il permet de traiter à des rythmes différents plusieurs aspects relatifs à un même secteur/domaine.

En ce qui concerne la santé, le FFB et la délégation de l’UE à Bangui ont noué un dialogue avec le ministère de la santé au sujet du système d’achat de médicaments, et non sur le système de santé dans sa totalité. Les discussions sont en cours, mais aucune solution n’a été trouvée à ce stade.

Encadré 7

Ce type d’atelier constitue l’occasion de mieux coordonner les activités de type LRRD.

Conclusions et recommandations

72

La Commission a évalué, en collaboration avec les principaux partenaires engagés, la valeur ajoutée d’un fonds fiduciaire ainsi que la pertinence d’une approche basée sur la résilience/les LRRD en République centrafricaine.

Lors de la réalisation de l’analyse nécessaire en amont de la création du FFB, la Commission n’a pas été en mesure de lancer une évaluation/un processus de longue haleine qui aurait remis en question la capacité de l’UE d’agir avec crédibilité, fiabilité et efficacité dans les situations d’urgence.

En effet, la Commission suit et respecte les dispositions de son propre cadre juridique, à savoir le RF.

Recommandation nº 1 – Élaborer de nouvelles orientations sur le choix des instruments de financement et sur les analyses des besoins visant à définir les champs d’intervention des fonds fiduciaires

La Commission accepte cette recommandation, qui sera mise en œuvre comme suit:

la Commission a élaboré des orientations relatives aux fonds fiduciaires incluant une section consacrée aux conditions à remplir pour créer un fonds fiduciaire.

La Commission est prête à réexaminer la portée de ces orientations afin d’y inclure une description plus détaillée des critères établis dans le RF pour l’évaluation des conditions à remplir pour créer un fonds fiduciaire de l’UE.

À cet égard, la Commission considère que dans le cadre de cette évaluation, la question des avantages comparatifs des autres instruments de financement sera abordée.

La Commission estime que les orientations ne peuvent être excessivement prescriptives, notamment en ce qui concerne les fonds fiduciaires d’urgence.

73

Le FFB a mis en place des exercices de coordination ad hoc associant tous les acteurs concernés, secteur par secteur (santé, sécurité alimentaire, etc.) Toutefois, la décision de chaque donateur de maintenir ses programmes bilatéraux relève de ses choix souverains.

74

La Commission est d’un autre avis.

Les procédures sont soit les procédures standard figurant dans le guide pratique des procédures contractuelles, soit, pour l’AMI spécifique au FFB, une procédure découlant des orientations sur la crise (consistant en une procédure d’attribution directe précédée par une vaste consultation, dans le but exprès d’accroître la transparence et la concurrence).

Pour l’AMI spécifique au FFB, la transparence est garantie par la note explicative relative à chaque projet, précisant les différentes étapes de la sélection.

La Commission considère qu’en ayant défini la procédure de sélection à utiliser et en ayant spécifié dans le document de procédure lui-même, lorsque le guide pratique des procédures contractuelles/le manuel ne le faisait pas, la manière dont le ou les organismes chargés de la mise en œuvre seront choisis, elle satisfait à l’exigence de transparence du RF, tout en faisant usage des dispositions de flexibilité de l’acte constitutif.

En ce qui concerne la rapidité de mise en œuvre, la Commission estime que le nombre de jours de discussion ne prouve pas que les discussions auraient pu être plus courtes (voir le point 44).

75

L’estimation du coût total, incluant notamment les frais de gestion des organismes tiers chargés de la mise en œuvre, n’est pas une pratique standard des grands donateurs tels que les Nations unies ou la Banque mondiale. Cette estimation ne pourrait être comparée avec les coûts des autres instruments et donateurs (Nations unies ou Banque mondiale) et ne correspondrait pas aux dépenses inscrites dans les comptes annuels du fonds fiduciaire, qui suivent les normes comptables internationales pour le secteur public (voir la réponse au point 37).

76

S’il n’existe pas de cadre global spécifique pour la mesure des performances du FFB, la majorité des projets ont produit tous les résultats escomptés ou la plupart d’entre eux (voir le point 78).

Par ailleurs, au lieu de créer un cadre de performance propre au FFB, la Commission préférerait utiliser le cadre de performance standard de la DG DEVCO.

Recommandation nº 2 – Améliorer la coordination au niveau des donateurs, les procédures de sélection et la mesure de la performance et optimiser les coûts administratifs

La Commission accepte cette recommandation, mais souligne que d’autres acteurs ont un rôle à jouer dans son suivi.

S’agissant du premier point, le FFB coordonne déjà ses activités avec les autres donateurs et acteurs concernés. La Commission est néanmoins d’accord sur le fait que la coordination pourrait être mieux formalisée et que tous les participants au FFB devraient mettre à profit les possibilités de coordination.

Concernant le deuxième point, la Commission a appliqué ses règles et procédures standard, ainsi que les règles internes permettant aux gestionnaires de fonds fiduciaires de l’UE de déroger à ces règles standard dans certaines conditions (les règles internes relatives aux situations de crise et les orientations relatives aux fonds fiduciaires). Par exemple, les orientations relatives aux situations de crise reconnaissent les contraintes et les limites rencontrées pour conclure des contrats relatifs à des projets et mettre en œuvre ces derniers en situation de crise et autorisent l’utilisation de «procédures flexibles» lorsqu’une situation de crise a été déclarée dans le pays.

En ce qui concerne le troisième point, la Commission accepte d’étudier les moyens envisageables pour accélérer davantage les procédures de sélection au-delà de ce que permettent actuellement les règles internes, tout en trouvant le bon équilibre entre rapidité et transparence.

À la suite d’une recommandation similaire de son service d’audit interne, la Commission a déjà élaboré un plan d’action visant à appliquer cette recommandation et met actuellement en œuvre les actions prévues.

Pour ce qui est des limitations dues à la sécurité et aux enseignements tirés des situations de crise et pris en compte dans les orientations sur les situations de crise, la Commission considère que le FFB maximise déjà le montant de l’aide versée aux bénéficiaires finals. Le FFB s’efforce dès que possible de réduire ses coûts de mise en œuvre, comme cela a été le cas pour le contrat avec la FAO, où il a négocié 5 % de frais de gestion au lieu de 7 %.

La Commission estime que le FFB a mis en place des mécanismes de suivi au niveau des projets et démontré les avantages apportés notamment sur le plan de la rapidité; ces mécanismes seront progressivement mis en place au niveau du fonds.

Sigles et acronymes

DG DEVCO: Direction générale de la coopération internationale et du développement

DG ECHO: Direction générale de l’aide humanitaire et de la protection civile

FAO: Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Food and Agriculture Organization)

FED: Fonds européen de développement

FMI: Fonds monétaire international

Guide pratique des procédures contractuelles: Guide pratique des procédures contractuelles dans le cadre des actions extérieures de l’Union européenne

MPE: Membre du Parlement européen

Objectifs SMART: Objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et datés (specific, measurable, achievable, relevant and timed)

OCDE: Organisation de coopération et de développement économiques

ONG: Organisation non gouvernementale

ONU: Organisation des Nations unies

PNUD: Programme des Nations unies pour le développement

PIN: Programme indicatif national

RCA: République centrafricaine

Unicef: Fonds des Nations unies pour l’enfance

Notes

1 Le cadre juridique applicable en matière de création de fonds fiduciaires de l’Union en faveur des actions extérieures est régi par les dispositions de l’article 187 du règlement financier (règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO L 298 du 26.10.2012, p. 1)).

2 Bêkou signifie «espoir» en langue sango.

3 Les trois autres fonds sont: a) le fonds fiduciaire Madad, institué en décembre 2014 en réponse à la crise syrienne; b) le fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique, créé en 2015 pour prévenir les migrations; c) le fonds fiduciaire en faveur de la Colombie, établi en 2016 pour appuyer le processus de normalisation post-conflit.

4 Accord instituant le fonds fiduciaire de l’Union européenne pour la République centrafricaine, le «fonds fiduciaire Bêkou», article 2 – Objectifs du fonds fiduciaire.

5 Les participants à la coopération au développement décident seuls quels pays aider et dans quelle mesure. Cela peut entraîner des déséquilibres de nature à compromettre l’efficacité de l’aide en raison de sa fragmentation, mais aussi de la concentration des participants dans certains pays, dits «privilégiés», et du déficit d’activités d’aide dans d’autres, communément qualifiés d’«orphelins». (http://www.oecd.org/fr/cad/architecture/fragmentation-orphelins.htm)

6 En mars 2017, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies a indiqué que 5 % seulement des 400 millions de dollars des États-Unis d’aide humanitaire dont la RCA a besoin avaient été versés, entraînant la distribution de demi-rations.

7 Commission européenne – Fiche d’information: «L’approche globale de l’Union européenne à l’égard de la République centrafricaine (2013-2016)», Bruxelles, 11 novembre 2016.

8 Le traité de Lisbonne appelle à la cohérence entre les différents domaines de l’action extérieure de l’UE et ses autres politiques. Avec l’entrée en vigueur du traité et le nouveau contexte institutionnel qu’il a créé, l’UE a, en mobilisant l’ensemble des instruments et des ressources dont elle dispose, accru ses possibilités ainsi que son ambition de rendre son action extérieure plus cohérente, efficace et stratégique («L’approche globale de l’UE à l’égard des crises et conflits extérieurs», Bruxelles, 11.12.2013, document JOIN(2013) 30 final).

9 Dans le système mondial d’aide humanitaire, cela correspond au niveau le plus élevé, réservé aux plus graves crises humanitaires de grande ampleur.

10 L’aide a d’abord été conçue comme une suite linéaire d’opérations dite «continuum»: la réhabilitation devait suivre la phase d’aide d’urgence, avant de céder la place à la coopération au développement classique. Cependant, depuis les années 90, l’expérience a montré que le fait de traiter l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement comme des processus distincts et consécutifs ne permettait pas d’appréhender la complexité de nombreuses situations de crise. En revanche, les considérer comme un «contiguum» (c’est-à-dire comme des processus concomitants et liés) revient à reconnaître que de telles situations peuvent en réalité nécessiter de recourir simultanément à différents instruments (voir la note thématique du Parlement européen «Liens entre l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement: vers une aide plus efficace», p. 4 et 5).

11 Les programmes indicatifs nationaux constituent une étape importante dans la programmation de l’aide de l’UE au titre des FED. Ils définissent la stratégie et les priorités de l’UE en matière d’aide et sont élaborés en étroite coopération avec le pays partenaire. L’UE a donc besoin d’un gouvernement national comme interlocuteur pour pouvoir adopter un PIN. À l’époque, la RCA était dirigée par un gouvernement transitoire qui n’avait pas été légitimé par une élection démocratique.

12 Point 19 du programme d’action d’Accra, troisième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2008.

13 Table ronde n° 9, Architecture de l’aide, Synthèse, troisième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2008, p. 7.

14 Position commune de l’UE en vue du quatrième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2011, point 28, p. 6.

15 Le manuel mentionne six fonctions possibles en précisant leur valeur ajoutée respective: cohérence (remédier aux lacunes), consolidation (réduire la fragmentation), spécialisation ou ciblage thématique, gestion des risques, renforcement des systèmes nationaux et innovation. (Bureau du Fonds d’affectation multi-partenaires: Designing pooled funds for performance, A Manual prepared by the MPTFO, 2015; voir notamment les tableaux 2, p. vii, et 3, p. 6).

16 Accord instituant le fonds fiduciaire de l’Union européenne pour la République centrafricaine, le «fonds fiduciaire Bêkou», article 2 – Objectifs du fonds fiduciaire.

17 À la différence de l’aide du fonds fiduciaire Bêkou, qui a principalement été octroyée au niveau des différents établissements de santé. Les politiques nationales de santé sont définies par le ministère de la santé.

18 Le fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies est doté de 25 millions de dollars des États-Unis. Il apporte une aide aussi bien aux agences des Nations unies qu’aux autorités nationales, sous la forme d’un appui budgétaire.

19 Voir notamment les principes de l’OCDE pour l’engagement international dans les États fragiles et les situations précaires, adoptés par les ministres et les chefs des agences lors du forum de haut niveau du Comité d’aide au développement en 2007 et selon lesquels il importe que les acteurs internationaux s’accordent sur des mécanismes de coordination pratiques, même en l’absence de forte volonté gouvernementale.

20 République centrafricaine: plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021, établi par le gouvernement de la République centrafricaine, avec le soutien de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations unies et du groupe de la Banque mondiale, p. 26 à 41.

21 Tableau 0.1 et Annexe 2 du plan national de relèvement et de consolidation de la paix.

22 Acte constitutif du fonds, considérants 4 à 6.

23 Acte constitutif du fonds, considérants 3 et 5.

24 http://ec.europa.eu/europeaid/bekou-trust-fund-introduction_en.

25 République centrafricaine: plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021, établi par le Gouvernement de la République centrafricaine, avec le soutien de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations unies et du groupe de la Banque Mondiale, chapitre V, figure 5.2, p. 45.

26 Article 187 du règlement financier.

27 Ce guide pratique décrit les procédures de marchés publics applicables aux actions extérieures de l’UE financées par le budget général de l’Union et le Fonds européen de développement. Il est utilisé par les directions générales et les services de la Commission en charge des instruments de financement et de mise en œuvre des actions extérieures.

28 Au total, nous avons contrôlé les procédures de sélection relatives à 26 contrats sur 31. Trois des cinq autres contrats (nos°7, 8 et 9) concernaient des services, tandis que les deux autres (nos°12 et 14) ont été attribués dans le cadre du programme «Santé II», dont les procédures de sélection étaient toujours en cours fin 2016.

29 Des conflits d’intérêts pourraient apparaître, car la sélection des projets à financer est effectuée au départ par le comité de gestion; la mise en œuvre de ces projets peut ensuite être confiée à des organisations dont des membres du personnel siègent à ce même comité de gestion.

30 Il s’agit en l’occurrence du contrat n° 15.

31 En l’occurrence, pour le contrat n° 31.

32 En l’occurrence, pour le contrat n° 3.

33 Tel a été le cas pour les contrats nos 9, 10, 11, 13 et 30; cela sera en outre nécessaire pour les contrats nos 12 et 14.

34 Les organisations des Nations unies sont autorisées à prélever jusqu’à 7 % du montant total des contributions au fonds fiduciaire pour couvrir les coûts indirects de soutien aux programmes, auxquels s’ajoute 1 % pour les frais administratifs. La Banque mondiale facture soit des coûts forfaitaires, correspondant au minimum à 5 % des fonds fiduciaires, soit des coûts à la carte. La Banque africaine de développement prélève actuellement 5 % au minimum pour couvrir ses frais.

35 Les frais d’installation d’agents au sein d’une délégation sont plus élevés que si ces derniers travaillaient depuis Bruxelles.

36 Le fonds fiduciaire Bêkou est financé par le FED et par différents instruments du budget de l’UE (voir figure 2); pour ces derniers, il existe des cadres de suivi, d’évaluation et d’établissement de rapports (également appelés cadres «MORE»), composés d’objectifs généraux et spécifiques, d’indicateurs, de valeurs intermédiaires et de valeurs cibles. Les obligations en matière d’information prévoient notamment la présentation au Parlement européen et au Conseil d’un rapport annuel sur la mise en œuvre des instruments de l’Union pour le financement de l’action extérieure. Actuellement, le lien entre la communication de ces résultats et celle des résultats du fonds fiduciaire Bêkou est limité.

37 Conformément aux dispositions de l’article 30 du règlement financier, des objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et datés (SMART) doivent être fixés pour tous les secteurs d’activité couverts par le budget.

38 Il s’agissait, pour les trois quarts, d’une aide humanitaire visant à fournir une assistance immédiate en situation d’urgence. L’aide au développement a un objectif plus structuré et à plus long terme.

39 Le programme indicatif national porte sur montant total de 382 millions d’euros, dont 208 millions d’euros de nouveaux fonds.

40 Rapport du Parlement européen du 12.4.2016 concernant la décharge sur l’exécution du budget des FED pour l’exercice 2014 (document A8-0137/2016), point 38. Dans une résolution de 2015, le Parlement européen a demandé «aux États membres et aux autres donateurs d’augmenter leur contribution au […] fonds fiduciaire Bêkou» (résolution 2015/2874(RSP) du Parlement européen du 8.10.2015, point 23).

41 Voir le point 53 concernant les faiblesses constatées dans la définition des objectifs et des indicateurs. L’analyse sous-tendant ce chapitre se fonde principalement sur un contrôle documentaire des éléments probants disponibles, car nous n’avons pu visiter que trois projets sur place. Nous nous sommes appuyés sur des éléments probants provenant de trois sources: des rapports d’évaluation externes, des rapports intermédiaires établis par les contractants et un tableau de suivi des indicateurs contractuels élaboré par le fonds fiduciaire Bêkou.

42 https://europa.eu/capacity4dev/.

Étape Date
Adoption du plan d’enquête/début de l’audit 4.10.2016
Envoi officiel du projet de rapport à la Commission (ou à toute autre entité auditée) 5.5.2017
Adoption du rapport définitif après la procédure contradictoire 20.6.2017
Réception des réponses officielles de la Commission (ou de toute autre entité auditée) dans toutes les langues 12.7.2017

Équipe d’audit

Les rapports spéciaux de la Cour présentent les résultats de ses audits relatifs aux politiques et programmes de l’UE ou à des questions de gestion concernant des domaines budgétaires spécifiques. La Cour sélectionne et conçoit ces activités d’audit de manière à maximiser leur incidence en tenant compte des risques susceptibles d’affecter la performance ou la conformité, du niveau des recettes ou des dépenses concernées, des évolutions escomptées ainsi que de l’importance politique et de l’intérêt du public.

Le présent audit de la performance a été réalisé par la Chambre III, présidée par M. Karel Pinxten, Membre de la Cour, et compétente pour l’audit des domaines de dépenses relatifs à l’action extérieure, à la sécurité et à la justice. L’audit a été effectué sous la responsabilité de Mme Bettina Jakobsen, Membre de la Cour, assistée de: Mme Katja Mattfolk, chef de cabinet; M. Kim Storup, attaché de cabinet; Mme Beatrix Lesiewicz, manager principal; Mme Laura Gores, chef de mission. L’équipe d’audit était composée de Mme Nóirín O’Grady et M. Florin Alexandru Farcas.

De gauche à droite: Beatrix Lesiewicz, Laura Gores, Katja Mattfolk, Bettina Jakobsen, Kim Storup, Nóirín O’Grady et Florin Alexandru Farcas.

Contact

COUR DES COMPTES EUROPÉENNE
12, rue Alcide De Gasperi
1615 Luxembourg
LUXEMBOURG

Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine: un début chargé d’espoir malgré quelques insuffisances
(présenté en vertu de l’article 287, paragraphe 4, deuxième alinéa, du TFUE)

De nombreuses autres informations sur l’Union européenne sont disponibles sur l’internet via le serveur Europa (http://europa.eu).

Luxembourg: Office des publications de l’Union européenne, 2017

PDFISBN 978-92-872-7834-0ISSN 1977-5695doi:10.2865/671953QJ-AB-17-011-FR-N
HTMLISBN 978-92-872-7807-4ISSN 1977-5695doi:10.2865/337159QJ-AB-17-011-FR-Q

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