Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine: un début chargé d’espoir malgré quelques insuffisances
En ce qui concerne le rapport: Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine, premier fonds de ce type géré par la Commission européenne, a été créé en 2014 pour soutenir l’un des pays les moins développés du monde. Notre examen a porté sur la justification de la mise en place du fonds, sur sa gestion et sur la réalisation de ses objectifs à ce jour. Malgré certaines insuffisances, nous estimons, en conclusion, que le choix de mettre en place le fonds était adapté aux circonstances. Sa gestion n’est pas encore optimale dans trois domaines: la coordination entre les parties prenantes; la transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures; les mécanismes de suivi et d’évaluation. Les résultats qu’il a permis d’obtenir jusqu’à présent sont cependant globalement positifs. Nos recommandations devraient contribuer à améliorer la conception et la gestion de ce fonds fiduciaire en particulier et des fonds fiduciaires de l’UE en général.
Synthèse
IUn fonds fiduciaire est un fonds créé pour répondre à un objectif de développement spécifique à l’aide des contributions financières d’un ou de plusieurs donateurs. Les fonds de ce type sont souvent mis en place en réaction à des crises telles que les catastrophes naturelles ou les conflits. Depuis 2013, la Commission européenne a la possibilité de créer des «fonds fiduciaires de l’Union pour les actions extérieures», en faveur d’actions d’urgence, de post-urgence ou thématiques.
IILancé en juillet 2014, le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine est le premier fonds de ce type géré par la Commission européenne. Ses donateurs, à savoir l’Union européenne, la France, l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie et la Suisse, l’ont doté d’un montant total de 146 millions d’euros pour aider le pays à sortir de la crise et pour soutenir sa reconstruction.
IIILa République centrafricaine (RCA) est en proie à la mauvaise gouvernance, à une grande pauvreté et à des conflits depuis plusieurs décennies. Il s’agit d’un des pays les moins développés et les plus pauvres du monde. La RCA occupait la dernière place du classement 2016 de l’indice de développement humain du PNUD.
IVLe présent audit a porté sur la première expérience de la Commission européenne en matière de gestion de l’un de ses propres fonds fiduciaires. Nous avons examiné si sa création était justifiée, s’il était bien géré et s’il avait atteint ses objectifs jusqu’à présent.
VNous sommes parvenus à la conclusion que malgré l’absence d’analyse exhaustive des besoins et d’évaluation formellement structurée du choix de l’instrument de financement, tant la décision de mettre en place le fonds fiduciaire Bêkou que la manière dont il a été conçu étaient adaptées aux circonstances.
VILa gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’a pas encore donné toute la mesure de ses possibilités, et ce à trois égards: le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes; la transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures pourraient être améliorés; les mécanismes de suivi et d’évaluation n’ont pas encore été pleinement développés.
VIILes résultats obtenus à ce jour grâce au fonds fiduciaire Bêkou sont globalement positifs. Il a permis de mobiliser des aides, même s’il a attiré peu de donateurs supplémentaires, et les projets financés ont produit les réalisations escomptées. Le fonds assure une visibilité accrue à l’UE.
VIIINous formulons un certain nombre de recommandations visant à aider la Commission à améliorer la conception et la gestion du fonds fiduciaire Bêkou dans le futur, ainsi que des fonds fiduciaires de l’UE en général. Nous recommandons à la Commission:
- d’élaborer de nouvelles orientations sur le choix des instruments de financement et sur les analyses des besoins visant à définir le champ d’intervention des fonds fiduciaires;
- d’améliorer la coordination entre les donateurs, les procédures de sélection et la mesure de la performance, ainsi que d’optimiser les coûts administratifs.
Introduction
Les fonds fiduciaires de l’UE: un nouvel instrument de l’aide au développement
01Un fonds fiduciaire est un fonds créé pour servir un objectif spécifique de développement, à l’aide des contributions financières d’un ou de plusieurs donateurs. Il est généralement administré par une organisation internationale telle que la Banque mondiale ou les Nations unies. Populaires depuis les années 90, les fonds fiduciaires sont de plus en plus utilisés en tant qu’instruments de financement de la coopération internationale. Les fonds de ce type sont souvent mis en place en réaction à des crises telles que les catastrophes naturelles ou les conflits.
02Depuis 2013, des «fonds fiduciaires de l’Union pour les actions extérieures» peuvent être créés pour financer des actions d’urgence, de post-urgence ou thématiques, dans le cadre d’un accord conclu entre la Commission européenne et d’autres donateurs1. Un conseil présidé par la Commission est créé pour chaque fonds fiduciaire afin de permettre la représentation tant des donateurs que des États membres non contributeurs, et de décider de la manière dont les fonds doivent être utilisés.
03Le fonds fiduciaire Bêkou2 de l’UE pour la République centrafricaine a été lancé en juillet 2014 pour aider le pays à sortir de la crise et soutenir sa reconstruction. Il s’agit du premier des quatre fonds gérés par la Commission européenne à ce jour3. Le fonds comptait initialement quatre donateurs, à savoir l’Union européenne (UE), la France, l’Allemagne et les Pays-Bas, rejoints par l’Italie et la Suisse en 2015. Fin 2016, les annonces de contributions en faveur du fonds fiduciaire Bêkou s’élevaient au total à 146 millions d’euros, dont environ trois quarts doivent provenir du budget de l’UE et du Fonds européen de développement, et 86 millions d’euros lui avaient effectivement été versés.
04Son principal objectif, tel qu’il est défini dans l’acte constitutif, est «d’appuyer la résilience des populations vulnérables, la sortie de crise et la reconstruction de la République centrafricaine dans toutes ses dimensions, de manière cohérente et ciblée, articulant les actions de court, de moyen et de plus long terme et de permettre aux pays voisins de surmonter les conséquences de la crise»4.
La République centrafricaine, un pays en crise
05La RCA, qui est l’un des pays les moins développés et les plus pauvres du monde, occupait la dernière place du classement 2016 de l’indice de développement humain du PNUD, et ce malgré l’importance de ses gisements miniers (réserves d’uranium, pétrole brut, or, diamants et cobalt) et de ses autres ressources (bois et hydroélectricité). Ce pays compte 4,5 millions d’habitants et s’étend sur un territoire de 623 000 km2 (soit environ la superficie combinée de la Belgique et de la France). Depuis son indépendance en 1960, la RCA est en proie à des conflits, à la mauvaise gouvernance et à une grande pauvreté et souffre d’inégalités ainsi que d’un manque d’investissements du secteur privé. La majorité de la population vit actuellement dans la précarité et plus de la moitié a besoin d’une aide humanitaire. Quelque 450 000 personnes sont déplacées dans leur propre pays et environ autant se sont exilées vers les pays voisins.
06Un gouvernement transitoire a été mis en place de 2014 à début 2016, après qu’un cycle de violence a entraîné la chute du gouvernement précédent. Un nouveau président et un nouveau gouvernement sont entrés en fonction en mars 2016 à la suite d’élections démocratiques. En octobre 2016, le gouvernement centrafricain et les donateurs ont publié un plan national de relèvement du pays et de consolidation de la paix.
07Jusqu’en 2014, la RCA était considérée comme un «orphelin de l’aide»5, en raison de l’aide limitée dont elle bénéficiait de la part de la communauté internationale des donateurs. Depuis, l’aide en faveur du pays s’est considérablement accrue. Cependant, la population a toujours impérieusement besoin d’aide humanitaire en raison de la persistance des conflits6.
08L’UE est un partenaire de la RCA depuis plus de trente ans et reste l’un de ses principaux partenaires en matière de développement. Entre 2013 et 2016, l’UE a versé plus de 500 millions d’euros pour venir en aide au pays7. L’Union a adopté une «approche globale»8, s’articulant autour de l’aide fournie par l’intermédiaire du fonds fiduciaire Bêkou, de l’aide au développement traditionnelle, de trois missions et opérations militaires au titre de la politique de sécurité et de défense commune, des moyens civils de réponse aux crises et de l’aide humanitaire.
09Les Nations unies et la France sont également fortement engagées en RCA. La liste des sept fonds fiduciaires des Nations unies actifs en RCA figure à l’annexe II. Toute une série d’autres partenaires, comme la Banque africaine de développement, la Banque mondiale et d’autres pays de l’UE, fournissent également une aide au pays.
Étendue et approche de l’audit
10Le présent audit de la performance a consisté à examiner comment la Commission européenne avait géré pour la première fois l’un de ses propres fonds fiduciaires en tant qu’instrument de financement de l’aide. Nous avons cherché à déterminer si la création du fonds était justifiée, s’il était bien géré et si ses objectifs ont été atteints jusqu’à présent.
11L’audit a été centré sur la période qui va de la création du fonds en 2014 à fin 2016. Nous avons passé en revue l’ensemble des onze projets et des 31 contrats correspondants financés par le fonds (voir annexe I). Nous avons analysé divers documents relatifs à l’établissement du fonds et à la conception des projets, ainsi que les procédures de sélection des organismes chargés de la mise en œuvre, le suivi des projets et leur évaluation (rapports intermédiaires et rapports d’évaluation externe). Nous avons également effectué des visites sur place en RCA et aux sièges de trois des donateurs du fonds, ce qui nous a permis de nous entretenir avec différentes parties prenantes et de visiter trois projets.
Observations
Bien que reposant sur une analyse limitée, tant la décision de mettre en place le fonds fiduciaire Bêkou que la conception retenue pour celui-ci étaient adaptées aux circonstances
12Dans la présente partie, nous donnons un bref aperçu du contexte qui prévalait dans le pays au moment où le fonds fiduciaire Bêkou a été créé, avant d’analyser la conception du fonds sous deux angles: le choix d’un fonds fiduciaire comme instrument de financement et le champ d’intervention du fonds fiduciaire Bêkou.
Le fonds fiduciaire Bêkou a constitué une réponse rapide dans un contexte national difficile
13En 2014, la situation de la République centrafricaine se caractérisait par une crise politique et de sécurité majeure qui s’était intensifiée en 2012, causant une crise humanitaire et une récession économique qui ont toutes deux atteint des niveaux sans précédent. En décembre 2013, les Nations unies ont qualifié d’urgence de niveau 39 la crise qui frappait le pays. La situation était marquée par un «contiguum»10 de problèmes humanitaires et de développement, ainsi que par la fragilité des autorités publiques, incapables de répondre aux besoins de la population.
Dans ce contexte, l’octroi de l’aide de l’UE a été considérablement freiné. À l’époque, en l’absence d’un gouvernement démocratiquement élu, la Commission ne pouvait en effet pas adopter de programme indicatif national (PIN)11 pour l’aide fournie dans le cadre de l’enveloppe nationale de la RCA au titre du 11e Fonds européen de développement (FED).
15La création du fonds fiduciaire Bêkou pour la RCA a donc permis de répondre rapidement à la nécessité d’un instrument de coordination qui permette de lier l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement. Les raisons justifiant le choix d’un tel instrument d’aide ont été débattues tant au niveau politique qu’au niveau technique au sein de la Commission européenne, ainsi qu’avec toute une série de donateurs et avec le gouvernement transitoire de la RCA au cours du premier semestre 2014. Ces discussions ont débouché sur un consensus, notamment sur la nécessité de recourir à des moyens différents d’octroi de l’aide, d’intégrer les approches humanitaire et de développement et d’aller plus loin que la simple coordination de l’aide en mettant en commun les ressources. Cette analyse partagée est à la base de la création du fonds fiduciaire Bêkou.
16Celui-ci a été institué dans des délais très courts, l’acte constitutif ayant été signé par la Commission, la France, l’Allemagne et les Pays-Bas en juillet 2014, alors que les premières discussions avaient démarré au début de la même année.
La Commission n’a élaboré aucune analyse formellement structurée du choix de l’instrument de financement
17Le règlement financier subordonne la création d’un fonds fiduciaire au respect d’un certain nombre de conditions: i) l’intervention de l’Union doit apporter une valeur ajoutée, ce qui signifie que les objectifs du fonds fiduciaire peuvent être mieux atteints au niveau de l’Union qu’au niveau national; ii) le fonds doit apporter une visibilité politique et des bénéfices évidents en matière de gestion, iii) les fonds fiduciaires ne devraient pas être créés s’ils font purement et simplement double emploi avec des sources de financement existantes ou des instruments semblables sans qu’il y ait additionnalité.
18Les engagements pris par l’UE lors des forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide (voir encadré 1) et les orientations de la DG Coopération internationale et développement (DEVCO) sur les fonds fiduciaires de l’UE indiquent que ces derniers ne doivent pas devenir un instrument de mise en œuvre standard.
Encadré 1
Les forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide prônent l’autodiscipline en matière de création de nouveaux canaux d’aide
L’effort constant de modernisation de l’acheminement de l’aide a été marqué par quatre évènements: les forums de haut niveau sur l’efficacité de l’aide organisés à Rome (2003), Paris (2005), Accra (2008) et Busan (2011). Ces évènements, auxquels plus de 100 pays ont participé, ont conduit à la formulation de principes en matière d’efficacité de l’aide.
À la suite du forum d’Accra de 2008, les donateurs ont pris l’engagement de veiller «à ce que les canaux existants d’acheminement de l’aide soient effectivement utilisés et, renforcés si nécessaire, avant de créer de nouveaux circuits distincts risquant d’aggraver la fragmentation de l’aide et de compliquer la coordination au niveau des pays»12. À l’occasion d’une table ronde, les bailleurs de fonds ont été invités à réfléchir à deux fois avant de créer de nouveaux fonds, en faisant clairement primer le principe de valeur ajoutée13. À l’occasion du forum de Busan de 2011, l’UE a réitéré l’engagement pris à Accra de faire preuve d’autodiscipline pour éviter que les fonds ne prolifèrent davantage14.
Les Nations unies et la Banque mondiale ont toutes deux établi des procédures pour justifier le choix d’un fonds fiduciaire comme instrument de financement de l’aide. Le Bureau du Fonds d’affectation multi-partenaires des Nations unies, qui assiste l’ONU dans la gestion des mécanismes de financement partagé, a par exemple publié des manuels d’orientation sur l’établissement des fonds fiduciaires. Il y est recommandé de réaliser préalablement une étude de faisabilité et d’analyser les fonctions et la valeur ajoutée de ce type de fonds15.
20Dans les lignes directrices disponibles, la Commission s’est jusqu’ici limitée à rappeler les dispositions du règlement financier. Elle n’a pas encore déterminé la manière d’appliquer ces dernières pour pouvoir effectuer rapidement une évaluation structurée des avantages comparatifs des fonds fiduciaires par rapport à d’autres instruments. La Commission a organisé une série de discussions (voir point 15), mais aucune analyse formellement structurée, fondée sur les conditions fixées dans le règlement financier, n’a précédé la mise en place du fonds fiduciaire Bêkou.
Aucune analyse exhaustive des besoins ne montre quelles lacunes le fonds fiduciaire Bêkou est censé combler
21Les analyses des besoins constituent une étape importante de la définition du champ d’application de l’aide au développement, car elles facilitent la détermination des besoins et la définition des priorités en matière d’aide. Elles contribuent également à s’assurer que les nouveaux instruments de financement ne font pas double emploi avec des instruments existants et elles peuvent servir de base pour concevoir l’aide de telle sorte que les tâches puissent être partagées avec les autres donateurs.
22Même si divers documents internes de la Commission élaborés avant la création du fonds fiduciaire Bêkou attestaient que la RCA avait besoin d’une assistance financière, l’analyse des besoins était incomplète. En effet, les éléments suivants en étaient absents: une évaluation des besoins généraux de la RCA, un bilan des besoins auxquels répondaient les instruments d’aide existants et, par suite, une analyse des lacunes à combler en matière de fourniture de l’aide, une évaluation des ressources financières nécessaires et une hiérarchisation des mesures d’aide.
23Le principal objectif du fonds fiduciaire Bêkou, tel qu’il est défini dans son acte constitutif, est «d’appuyer la résilience des populations vulnérables, la sortie de crise et la reconstruction de la République centrafricaine dans toutes ses dimensions, de manière cohérente et ciblée, articulant les actions de court, de moyen et de plus long terme et de permettre aux pays voisins de surmonter les conséquences de la crise»16. Il est donc formulé en termes généraux. Une analyse exhaustive des besoins aurait pu servir de base à la formulation d’objectifs plus détaillés (voir également point 50). En outre, elle aurait pu indiquer plus clairement comment et pourquoi les activités du fonds étaient pertinentes au regard de l’objectif poursuivi et quelles lacunes spécifiques le fonds venait combler.
24Au niveau stratégique, la Commission s’est assurée que le fonds fiduciaire Bêkou ne faisait pas double emploi avec des canaux de financement existants. De 2014 à 2016, l’enveloppe nationale allouée à la RCA au titre du FED a servi à financer un nombre limité d’activités, concentrées sur des domaines autres que ceux couverts par le fonds fiduciaire Bêkou, comme l’éducation ou les politiques nationales de santé17. Sept fonds fiduciaires des Nations unies au moins sont actifs en RCA, mais six d’entre eux ont un champ d’application thématique clairement différent de celui du fonds fiduciaire Bêkou. Le fonds fiduciaire multi-partenaires Ezingo, qui cible également la stabilisation et le redressement du pays, constitue la seule exception. Cependant, il diffère sensiblement du fonds fiduciaire Bêkou sur le plan du volume de l’aide et/ou du niveau d’activité, du type de projets financés et des bénéficiaires visés18.
25Au niveau des projets, le fonds fiduciaire Bêkou répondait à des besoins similaires à ceux couverts par de précédentes aides de l’UE. En effet, certains projets assurent la continuité avec des projets précédemment financés par d’autres instruments d’aide de l’UE (voir encadré 2), tout en introduisant une approche différente et de nouvelles activités de renforcement de la résilience. Certains des autres projets sont innovants et se démarquent des types de projets auparavant financés en RCA. Il s’agit par exemple du projet de relance économique, qui prévoit l’octroi de microcrédits aux petites entreprises locales.
Encadré 2
Exemples de projets du fonds fiduciaire Bêkou répondant à des besoins similaires à ceux couverts par des projets également financés sur l’aide de l’UE
Certains projets du fonds fiduciaire Bêkou ont repris des activités bénéficiant du soutien d’autres instruments d’aide de l’UE. En voici quelques exemples:
- des projets du fonds fiduciaire Bêkou menés avec des ONG du secteur de la santé ont succédé à deux projets réalisés par la DG ECHO avec les mêmes ONG. Les deux ONG en cause ont soutenu 25 centres de soins locaux pour les aider à fournir des services de santé primaires de meilleure qualité. l’une d’entre elles a également bénéficié d’aides de la DG ECHO, de l’Unicef et du Fonds humanitaire des Nations unies octroyées pour des activités dans le secteur de la santé;
- en 2014, l’instrument de l’UE contribuant à la stabilité et à la paix a financé des «travaux à haute intensité de main-d’œuvre» dans les troisième et cinquième arrondissements de Bangui, qui présentaient des similitudes avec le projet de réhabilitation urbaine du fonds fiduciaire Bêkou. L’idée était de recruter des gens sur place pour mener des activités de réhabilitation urbaine de base, dans le but de rétablir les infrastructures tout en générant des revenus pour les groupes les plus vulnérables;
- un projet sur la sécurité alimentaire lancé en 2014 au titre du 10e FED a finalement été annulé. Il devait aider financièrement l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture à mettre en œuvre des programmes de renforcement de la résilience («caisses de résilience»), à promouvoir le dialogue intercommunautaire sur les voies de transhumance et à améliorer la sécurité alimentaire dans les environs de Bangui. Il avait donc des objectifs similaires à ceux du projet de sécurité alimentaire du fonds fiduciaire Bêkou. Cinq contrats conclus depuis 2014 avec cette organisation et avec des ONG au titre de l’instrument de financement de la coopération au développement de l’UE concernaient des activités similaires (soutien aux éleveurs, dialogue intercommunautaire et résilience alimentaire);
- un projet du fonds fiduciaire Bêkou visait à protéger les écosystèmes faunistiques du nord-est et du sud-est de la RCA. Il succédait à un projet relevant du 10e FED qui avait permis de mener des activités similaires dans le nord-est du pays.
La communauté des donateurs et les pays en développement considèrent que le partenariat entre donateurs est important dans les contextes de fragilité et de crises19. Avant la publication du plan national de relèvement et de consolidation de la paix en octobre 2016, il n’existait aucun cadre stratégique commun aux bailleurs de fonds de la RCA. Les initiatives en cours fondées sur ce plan national de relèvement pourraient conduire à une définition plus claire de la répartition du travail dans le courant de 2017 (voir encadré 3).
Encadré 3
Le plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021: une base pour la future répartition des tâches
Une nouvelle stratégie nationale pour la RCA, dénommée «plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021», a été élaborée par le gouvernement centrafricain avec le soutien de l’UE, des Nations unies et du groupe de la Banque mondiale en octobre 2016. Ce plan s’articule autour de trois piliers prioritaires: i) restaurer la paix, la sécurité et la réconciliation; ii) renouveler le contrat social entre l’État et la population; iii) promouvoir le relèvement économique et la relance des secteurs productifs20. Il est décliné en onze objectifs stratégiques et les besoins sont estimés à quelque 3,2 milliards de dollars des États-Unis21.
Le fonds fiduciaire Bêkou permettra, le cas échéant, de financer des actions au titre des trois piliers du plan national de relèvement et de consolidation de la paix. Comme nous l’avons déjà précisé au point 14, à l’époque de la création du fonds, l’aide du FED se heurtait au problème de l’absence de programme indicatif national (PIN) pour la RCA. La DG DEVCO élabore actuellement un programme indicatif national dans le cadre du 11e FED. Celui-ci porte sur montant total de 382 millions d’euros, dont 208 millions d’euros de nouveaux fonds. Il pourrait également prévoir des interventions au titre de chacun des trois piliers. Une partie des fonds du programme indicatif national sera transférée au fonds fiduciaire Bêkou. Au total, 31 bailleurs de fonds de la RCA entendent financer au moins un des piliers du plan national de relèvement et de consolidation de la paix. En mars 2017, la répartition des tâches entre le fonds fiduciaire Bêkou, les autres instruments de l’UE et les autres donateurs en vue de la mise en œuvre de ce plan n’avait pas encore été définie en détail.
La gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’est pas encore optimale
28Nous avons examiné la gestion du fonds fiduciaire Bêkou sous trois angles: la coordination avec les autres donateurs et les autorités de la RCA; la transparence et la rapidité des procédures ainsi que le rapport coût-efficacité de la fourniture de l’aide; les mécanismes de suivi et d’évaluation.
Le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes
29L’expérience a montré que, dans les situations d’urgence et au sortir de celles-ci, la faiblesse des administrations locales et l’augmentation soudaine du nombre des donateurs peuvent entraîner une désorganisation et un morcellement de l’action de la communauté internationale, qui sont un obstacle à une contribution efficace et durable à la reconstruction d’un pays. Les fonds fiduciaires de l’UE ont été spécialement prévus pour de telles situations. Un fonds fiduciaire peut constituer une solution appropriée, puisqu’il est censé agir collectivement au nom de l’UE et des autres bailleurs de fonds22.
30Vu le grand nombre de donateurs et d’opérateurs en RCA, la coordination est particulièrement importante. Les fonds fiduciaires peuvent aussi constituer des plateformes utiles pour améliorer la coordination avec les projets financés indépendamment du fonds. Cela vaut principalement pour la coordination entre donateurs du fonds, mais aussi, éventuellement, pour la coordination sur une plus grande échelle avec les autres donateurs. Le fonds fiduciaire Bêkou devait constituer un mécanisme de coordination permettant à la communauté internationale de contribuer efficacement et de manière coordonnée à la stabilisation de la RCA23. En l’occurrence, l’idée était d’aller au delà de la coordination entre les États membres pour mettre en place une véritable organisation conjointe24 prévoyant, par exemple, la mise en commun aussi bien des ressources que des capacités d’analyse, de définition et de mise en œuvre des projets, des missions conjointes, ainsi que la création d’une unité spécifique chargée de coordonner l’action des donateurs et d’assurer la liaison avec les partenaires, ou encore de groupes de travail thématiques conjoints.
31Rares sont les éléments probants attestant que le fonds fiduciaire Bêkou a contribué à consolider les activités des donateurs en RCA selon les modalités décrites au point 29, que ce soit immédiatement après sa création ou au cours de la période d’intervention (voir encadré 4). Le niveau d’activité des donateurs en dehors du fonds est resté stable depuis 2014, ou a même augmenté dans certains cas (voir également points 55 à 61 en ce qui concerne la participation d’autres donateurs). Le gestionnaire du fonds considère la fragmentation des instruments d’aide et la multiplicité des acteurs dans ce domaine en RCA comme un défi majeur.
Encadré 4
Certains donateurs ont intensifié leur activité en dehors du fonds depuis 2014
L’Allemagne renforce sa coopération bilatérale avec la RCA. En 2016, le Ministère fédéral de la coopération économique et du développement a sélectionné la RCA parmi ses partenaires bilatéraux. La banque de développement allemande Kreditanstalt für Wiederaufbau s’est récemment engagée dans un projet d’une valeur de 422 millions d’euros dans le secteur de la santé.
En octobre 2016, l’Italie a ouvert son propre bureau de coopération au développement à Bangui.
L’établissement d’un programme indicatif national permettra à la DG DEVCO de réactiver l’aide du FED.
À l’instar des bailleurs du fonds fiduciaire Bêkou, la Banque mondiale envisage également de créer son propre fonds fiduciaire en faveur de la RCA.
Les mécanismes de coordination relatifs à l’aide au développement en RCA n’étaient pas opérationnels à la fin de 2016. Comme leur nom l’indique, les «clusters» (groupes sectoriels) humanitaires, dirigés par les Nations unies et des ONG internationales, sont consacrés à l’aide humanitaire. En 2014, le gouvernement transitoire centrafricain a créé des structures appropriées pour coordonner l’aide au développement, mais elles n’ont jamais été mises en service. Les autorités nationales et la communauté des donateurs établissent actuellement un cadre institutionnel pour la mise en œuvre de l’aide au développement au titre du plan national de relèvement et de consolidation de la paix adopté en octobre 201625. Ce cadre comprendra un mécanisme de coordination de l’aide dans lequel le fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies et l’éventuel futur fonds fiduciaire de la Banque mondiale joueront un rôle décisionnel, tandis que le fonds fiduciaire Bêkou n’aura qu’un rôle consultatif.
33Le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose pas de procédures bien définies pour assurer la coordination systématique de ses projets avec les autres projets des donateurs du fonds. Les seuls mécanismes de coordination qui ont été créés pour le fonds sont en fait les entités chargées de sa gouvernance elles-mêmes (son conseil d’administration et son comité de gestion). Même si l’un de ses rôles consiste à adopter les projets, le comité n’a pas facilité les discussions sur la coordination avec les autres projets financés par les États membres donateurs du fonds fiduciaire Bêkou. Les documents de programmation ne tiennent pas systématiquement compte de l’ensemble des projets menés dans le même domaine.
34Même en l’absence de mécanismes formels, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a assuré, à titre de bonne pratique, un certain degré de coordination des projets au cas par cas (voir encadré 5). Le fonds fiduciaire Bêkou pourrait toutefois faire en sorte que la coordination des activités soit plus systématiquement assurée, non seulement en interne entre ses donateurs, mais aussi, éventuellement, sur le plan externe, avec le reste de la communauté internationale.
Encadré 5
Trois exemples de bonnes pratiques en matière de coordination des projets entre donateurs
Des synergies ont été établies entre le projet de relance économique mis en œuvre par le fonds fiduciaire Bêkou et deux projets financés par l’agence de développement d’un État membre de l’UE. S’il n’y a guère eu de coordination au stade de la conception du projet, elle a été assurée après le lancement de ce dernier en 2016. Plusieurs réunions ont été organisées entre l’agence de développement, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui et les organismes chargés de la mise en œuvre, afin d’examiner comment créer des synergies entre les trois projets.
En octobre 2016, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a réuni les bailleurs de fonds et les autorités de la RCA dans le cadre d’un atelier consacré à la sécurité alimentaire. À la suite de cet atelier, et sur la base des résultats des discussions auxquelles il a donné lieu, l’équipe du fonds fiduciaire Bêkou a lancé un appel à manifestation d’intérêt.
Le projet dans le secteur de la santé a permis de financer une assistance technique pour l’organisation de réunions mensuelles de coordination entre les six ONG opérant dans les établissements de santé de tout le pays. Bien que cela n’ait pas été prévu au départ, cette coordination s’est parfois étendue à des opérateurs autres que ceux du fonds fiduciaire Bêkou, ce qui a permis de surveiller les cas potentiels de double emploi. Elle a également donné l’occasion aux ONG d’harmoniser leurs méthodes de travail.
Certains éléments probants attestent que le fonds fiduciaire Bêkou agit en coordination avec les autorités de la RCA (voir exemple dans l’encadré 5). Le gouvernement centrafricain envisage de jouer un plus grand rôle dans la gestion du fonds à l’avenir, en contribuant plus systématiquement à la conception, à la mise en œuvre et au suivi de ses projets.
La transparence, la rapidité et le rapport coût-efficacité des procédures pourraient être améliorés
36Le règlement financier dispose que le fonds fiduciaire doit être mis en œuvre conformément au principe de transparence26. L’acte constitutif prévoit l’utilisation de procédures flexibles pour assurer la réactivité du fonds fiduciaire Bêkou et pour que l’aide puisse s’organiser rapidement. Le règlement financier dispose également qu’un maximum de 5 % des montants placés dans le fonds fiduciaire peut être prélevé pour couvrir les frais de gestion de celui-ci. Nous avons évalué la transparence et la rapidité des procédures de sélection et le rapport coût-efficacité du fonds fiduciaire Bêkou par rapport à d’autres canaux d’acheminement de l’aide.
Transparence des procédures de sélection
37Les procédures appliquées par le fonds fiduciaire Bêkou pour sélectionner les organismes chargés de la mise en œuvre des projets n’ont pas été formalisées dans les orientations sur les fonds fiduciaires de l’UE. À quelques exceptions près, les procédures suivies étaient fondées sur celles prescrites dans le guide pratique des procédures contractuelles dans le cadre des actions extérieures de l’Union européenne (ci-après «guide pratique des procédures contractuelles»)27.
38Sauf pour un nombre limité de contrats de services, le fonds fiduciaire Bêkou a eu recours à trois méthodes différentes pour sélectionner les organismes chargés de la mise en œuvre des projets: quatre accords de coopération déléguée, dix attributions directes et douze attributions à l’issue d’un appel restreint à manifestation d’intérêt28. La définition de chacune de ces procédures et leurs avantages et inconvénients respectifs sont présentés au tableau 1.
Type | Accord de coopération déléguée | Attribution directe | Attribution à la suite d’un appel restreint du fonds fiduciaire Bêkou à manifestation d’intérêt |
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Définition | La commission confie la gestion des fonds à un organisme délégataire d’un État membre (ou à un donateur provenant d’un pays tiers). | Sélection d’un organisme sans mise en concurrence. | Un certain nombre d’organisations présélectionnées sont invitées à élaborer une proposition. |
Avantages |
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Inconvénients |
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Source: «Marchés publics et subventions dans le cadre des actions extérieures de l’Union Européenne – Un guide pratique».
39Les procédures de sélection que le fonds fiduciaire Bêkou doit en fait appliquer et le degré de souplesse autorisé par rapport au guide pratique des procédures contractuelles n’ayant pas été définis, la manière dont les organismes chargés de la mise en œuvre ont été sélectionnés n’a pas été totalement transparente.
40Le recours à la coopération déléguée est mentionné à l’article 10 de l’acte constitutif, qui dispose que celle-ci «sera privilégiée chaque fois qu’elle apportera une réponse appropriée en termes de coût, d’efficacité et de visibilité européenne aux actions financées par le fonds». Cependant, même si les organisations sélectionnées étaient expertes dans les domaines en question, aucune justification du fait d’avoir recours à elles n’a été donnée, notamment au moment où cette décision a été approuvée. Par ailleurs, des conflits d’intérêts peuvent survenir dès lors que certaines d’entre elles siègent au comité de gestion du fonds, au sein duquel les projets et, en l’espèce, les organismes chargés de la mise en œuvre sont sélectionnés29.
41Cinq attributions directes concernaient la poursuite de travaux antérieurs. Les autres ont été décidées après examen des organisations déjà présentes en RCA et de leurs capacités respectives. Cette démarche est compréhensible compte tenu des conditions difficiles prévalant sur le terrain au moment où ces attributions ont eu lieu. Toutefois, nous avons notamment relevé un cas dans lequel une procédure plus concurrentielle aurait pu être appliquée dès lors que plusieurs organisations étaient capables d’effectuer les travaux30.
42Pour chacun des appels restreints à manifestation d’intérêt, une procédure de sélection adaptée a été appliquée, reprenant certains éléments du guide pratique des procédures contractuelles, mais offrant une plus grande souplesse à différentes étapes. Il est dès lors difficile de déterminer comment les organismes chargés de la mise en œuvre ont été sélectionnés.
Rapidité des procédures de sélection
43La flexibilité rendue possible par certaines dispositions applicables au fonds fiduciaire Bêkou pourrait permettre de gagner du temps par rapport aux approches plus traditionnelles de la Commission. La structure et le processus décisionnel retenus, ainsi que la constitution relativement récente du fonds, limitent l’intérêt de toute comparaison avec les procédures en vigueur pour les autres aides de l’UE. Nous avons néanmoins relevé certains cas où la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre aurait pu être plus rapide.
44Au cours de la procédure de sélection, le fonds fiduciaire Bêkou aurait, par exemple, pu gagner davantage de temps lors de l’examen du contenu des projets avec les organisations. Pour l’ensemble des trois types de procédure utilisés, les discussions auraient pu être moins longues et moins nombreuses. Pour 14 attributions sur 26, l’examen du contenu des projets a duré plus de 100 jours. Le délai moyen était de 148 jours, le délai le plus long, de 503 jours31, et le plus court, de 18 jours32. En moyenne, les discussions faisant suite aux appels restreints à manifestation d’intérêt ont duré 50 jours, tandis que celles concernant les accords de coopération déléguée et les attributions directes ont pris respectivement 197 et 245 jours. Si les discussions avaient été conduites de manière différente, ces accords auraient pu être finalisés plus tôt. Certaines questions ont par exemple été traitées à plusieurs reprises par différents agents de la Commission, ce qui a généré un grand volume d’échanges entre parties concernées. Une meilleure coordination entre les agents de la Commission en amont de ces échanges aurait peut-être permis de raccourcir les discussions.
45Dans cinq cas, à la suite de discussions approfondies, il a en fait été nécessaire d’approuver rétroactivement les dépenses33. Cela a eu une incidence négative sur les premières étapes de la mise en œuvre des projets concernés, l’absence d’accord dûment signé entraînant en effet une insécurité juridique pour les organismes chargés de la mise en œuvre.
Rapport coût-efficacité de la fourniture de l’aide
46Les organisations des Nations unies, la Banque mondiale et de la Banque africaine de développement prélèvent chacune leurs propres frais pour la gestion des fonds fiduciaires. Aucune de ces organisations n’applique un pourcentage inférieur aux 5 % prévus pour le fonds fiduciaire Bêkou34. Pour les autres instruments d’aide externes de l’UE relevant du FED et du budget général, des taux globaux supérieurs à 5 % sont également pratiqués.
47Les frais de gestion du fonds fiduciaire Bêkou excluent le salaire du gestionnaire du fonds et les frais de traitement. Cela signifie qu’au total, les coûts de gestion du fonds sont plus élevés que ceux figurant dans les comptes de celui-ci. Les coûts globaux liés à la gestion du fonds fiduciaire Bêkou n’ont pas été calculés. Ces problèmes ont été confirmés par un audit réalisé en interne par la Commission.
48Comme pour l’ensemble de l’aide au développement, le coût total de la fourniture de l’aide ne se limite pas aux simples frais de gestion. Parallèlement aux frais prélevés par le fonds fiduciaire Bêkou, les organisations internationales et les ONG sous-traitantes facturent leurs propres frais administratifs, qui correspondent en général à un pourcentage (7 % maximum) de la valeur du contrat. Or elles peuvent à leur tour déléguer certaines tâches liées à la mise en œuvre du contrat à d’autres organismes, ajoutant ainsi de nouveaux frais administratifs. Les accords de coopération déléguée sont particulièrement coûteux, car ils génèrent automatiquement des frais de gestion supplémentaires (voir tableau 1 ci-dessus). Les avantages de ce type de financement doivent toujours être mis en balance par rapport à ses coûts supplémentaires.
49L’article 3.8 de l’acte constitutif du fonds dispose que l’ensemble de son personnel sera, à terme, basé à Bangui. Actuellement, le fonds compte un seul représentant à Bangui, tandis que sept membres du personnel travaillaient depuis Bruxelles en 2016. En raison de la situation actuelle en matière de sécurité, le nombre d’expatriés basés à la délégation de l’UE est limité. Il est cependant appelé à augmenter lorsque la situation sur place s’améliorera. Aucun calcul n’a encore été effectué pour déterminer si le transfert du personnel en RCA pourra se faire dans le respect du plafond des 5 % (voir point 36)35.
Les mécanismes de suivi et d’évaluation n’ont pas encore été pleinement développés
50Les mécanismes de suivi et d’évaluation sont importants pour mesurer la performance du fonds et adopter les éventuelles mesures correctrices nécessaires. Comme le fonds fiduciaire Bêkou est le premier fonds fiduciaire de l’UE géré par la Commission européenne, il peut apporter des enseignements précieux en vue du recours à ce type d’instrument de financement à l’avenir.
51Parce qu’il n’a pas décliné son objectif général en un enchaînement complet de résultats à atteindre, en précisant les résultats escomptés (réalisations, effets et impact) et en définissant les indicateurs correspondants, le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose d’aucun cadre lui permettant de mesurer sa propre performance36. Par exemple, même si l’acte constitutif du fonds et d’autres documents donnent une indication de ce que l’on peut en attendre (renforcer la résilience, améliorer la coordination, fournir l’aide plus rapidement, mobiliser une masse critique de financement, conférer une visibilité politique, etc.), ces attentes n’ont pas été traduites en objectifs SMART37.
52Fin 2016, il n’existait aucun processus pour tirer systématiquement, de l’expérience du fonds fiduciaire Bêkou, des enseignements qui permettent à la Commission de concevoir et de gérer mieux les fonds fiduciaires. Toutefois, plusieurs actions entreprises dernièrement sont de nature à faire évoluer les choses dans le bon sens. Parmi ces actions figurent la publication de différents articles sur le fonds fiduciaire Bêkou, l’organisation de conférences, d’ateliers et de réunions, notamment avec des représentants des fonds fiduciaires de l’UE, ainsi que des présentations.
53Au niveau des projets, les objectifs, les résultats et les activités sont définis. Cependant, des indicateurs font défaut pour deux projets sur onze et, pour huit projets, ils existent, mais ils sont vagues ou ne sont pas assortis de valeurs cibles. Des problèmes similaires ont été relevés au niveau des contrats: certains objectifs ne sont que partiellement SMART et les indicateurs sont parfois peu lisibles ou dépourvus de valeurs cibles correspondantes (voir annexe III pour des informations détaillées).
Malgré des circonstances difficiles, le fonds fiduciaire Bêkou a donné à ce jour des résultats globalement positifs
54Nous avons examiné les résultats du fonds sous trois angles: celui des aides qu’il a permis de mobiliser, celui des réalisations produites par ses projets et celui de la visibilité qu’il a assuré à l’UE. Il s’agit là de quelques-uns des avantages escomptés du fonds fiduciaire Bêkou.
Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, mais a attiré peu de donateurs supplémentaires
55Le fonds fiduciaire Bêkou était censé encourager de nouveaux donateurs à apporter une aide à la RCA et mobiliser des aides supplémentaires. Initialement considérée comme un «orphelin de l’aide», la RCA a bénéficié d’une aide totale d’environ 250 millions de dollars des États-Unis par an au cours de la période qui a mené à la crise de 2012-2013 (voir figure 1). En 2014, cette aide a culminé à 610 millions de dollars des États-Unis38.
L’aide au développement nécessaire à la mise en œuvre du plan national de relèvement et de consolidation de la paix s’élève à quelque 3,2 milliards de dollars des États-Unis sur cinq ans (2017-2021). Lors de la conférence des donateurs de novembre 2016, les donateurs se sont engagés à verser plus de deux milliards de dollars des États-Unis d’aide au développement en faveur de la RCA, couvrant ainsi une part substantielle de ces besoins.
57Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, avec des annonces de contributions s’élevant à un total de 146 millions d’euros à la fin de 2016 (voir figure 2). Ce montant, qui est supérieur à celui de la dotation du fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies, lequel a permis de réunir une somme de 25 millions d’euros (voir annexe II), est comparable à celui de l’enveloppe bilatérale octroyée au titre du 11e FED, qui devrait atteindre 208 millions d’euros39.
Trois quarts des ressources du fonds proviennent du budget de l’UE et de celui du FED. Plus d’un tiers de cette contribution correspond à une aide supplémentaire pour la RCA, qui est venue s’ajouter aux engagements déjà pris en faveur du pays dans le cadre d’autres canaux de financement de l’UE.
59La France, l’Allemagne, l’Italie, les Pays-Bas et la Suisse fournissaient déjà une aide à la RCA avant la création du fonds fiduciaire Bêkou, mais les montants octroyés avant 2014 étaient comparativement faibles. À partir de 2014, l’aide a été octroyée par l’intermédiaire du fonds et d’autres canaux (voir encadré 4 pour de plus amples informations sur les activités des donateurs en RCA).
60Le Parlement européen a par deux fois invité les États membres à augmenter leurs contributions au fonds fiduciaire Bêkou. En 2016, au cours de la procédure de décharge sur l’exécution du budget des FED pour l’exercice 2014, il a appelé «à une plus grande implication des États membres afin de rendre ce fonds pleinement opérationnel»40.
61Certains États membres continuent à soutenir les fonds fiduciaires des Nations unies, comme ils le faisaient avant la création du fonds fiduciaire Bêkou (voir annexe II). Le Fonds humanitaire des Nations unies pour la RCA compte onze bailleurs de fonds, parmi lesquels figurent la Belgique, le Danemark, l’Allemagne, l’Irlande, le Luxembourg, les Pays-Bas, la Suède, la Suisse et le Royaume-Uni. La France et les Pays-Bas sont également des donateurs du fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies.
La plupart des projets ont produit les résultats escomptés, dans un contexte difficile
62La mise en œuvre de 20 des 31 contrats liés aux onze projets de l’échantillon avait atteint un stade suffisamment avancé pour nous permettre d’évaluer au moins partiellement la performance. Bien que notre évaluation ait été soumise à certaines limitations41, nous considérons que la plupart des projets ont produit les résultats escomptés.
63Trois contrats (deux concernant des études et un contrat d’assistance technique) ont produit toutes les réalisations escomptées. Pour onze contrats, la plupart des réalisations prévues se sont concrétisées (voir exemple dans l’encadré 6). Pour six contrats toujours en cours, les réalisations prévues n’avaient pas encore été produites à la fin de 2016 et le risque existe qu’elles ne le soient toujours pas au terme des projets (voir point 65 pour des informations détaillées). Une évaluation plus détaillée de chacun des contrats est présentée à l’annexe III.
Encadré 6
Exemple de réalisations: le projet en matière de santé
Six ONG ont reçu une aide du fonds fiduciaire Bêkou afin d’aider 80 établissements de santé à travers le pays à fournir des services de santé primaires de meilleure qualité à la population locale.
Cette aide a permis d’assurer environ deux millions de consultations médicales. Les ONG ont dépassé les valeurs cibles fixées pour plusieurs indicateurs, tels que le nombre de consultations, le nombre d’accouchements assistés et le nombre de femmes ayant bénéficié d’une visite médicale. Dans les établissements concernés, les soins de santé, les médicaments et les tests de laboratoire ont été délivrés gratuitement aux enfants, aux femmes enceintes et allaitantes ainsi qu’aux patients en situation d’urgence vitale.
Les activités prévues au niveau des établissements de santé, notamment en matière de rénovation, de formation du personnel, de fourniture de médicaments et de matériel de laboratoire de base, de coordination des districts sanitaires et de surveillance, ont été réalisées dans les délais ou avec un retard minime. Ainsi, à Bria, six des huit établissements de santé ont été rénovés, tandis qu’à Vakaga, sept établissements ont été rénovés et équipés.
Toute une série de facteurs, tant endogènes qu’exogènes, expliquent que les objectifs n’aient pas été atteints dans certains cas, le plus décisif étant les conditions de sécurité difficiles dans lesquelles les projets ont été mis en œuvre (voir annexe III).
65Si beaucoup de réalisations tangibles ont été obtenues, les résultats ayant des effets plus fondamentaux à long terme mettent habituellement plus de temps à se concrétiser. Ainsi, dans le cadre du projet sur la sécurité alimentaire, les campagnes de vaccination du bétail ont été couronnées de succès, tandis que la prévention des conflits et la redéfinition des voies de transhumance pourraient devoir se poursuivre au cours d’une éventuelle deuxième phase. Pour ce qui est du projet en matière de santé, la première phase de fourniture de services de santé par les six ONG a été couronnée de succès et une étude sur la réforme de la centrale nationale d’achat des médicaments a été réalisée comme prévu; cependant, les actions visant à réformer les services publics de santé nécessitent davantage de temps.
Le fonds assure une visibilité accrue à l’Union
66Le fonds fiduciaire Bêkou devait permettre à l’UE de gagner en visibilité, à la fois au travers des actions entreprises dans le cadre des projets et de la visibilité politique qu’il lui assure à son propre niveau.
67Les partenaires des projets ont mené de nombreuses activités sur le terrain. Ils ont notamment élaboré des matériels d’information, réalisé des documentaires, publié des articles universitaires et organisé des ateliers nationaux sur les résultats des activités, des cérémonies, des sessions de formation, des émissions de radio, des visites de journalistes, etc., conformément à leurs plans de renforcement de la visibilité de l’UE.
68Plus de 30 activités visant à donner une certaine visibilité au fonds dans son ensemble ont été menées, pour un montant de quelque 191 000 euros. Le rapport annuel d’activité du fonds fiduciaire Bêkou comporte un chapitre consacré aux activités de cette nature et présente les principaux objectifs en matière de communication, de même que des événements grand public, des projets, le site web «capacity4dev»42 et du matériel de communication.
69Plusieurs conférences apportant une visibilité à l’UE ont été organisées (voir exemples dans l’encadré 7). Des délégations de plus de 80 pays du monde entier ont assisté à une conférence organisée en novembre 2016 à Bruxelles, à laquelle ont également participé des représentants de haut niveau des Nations unies, de la Banque mondiale et d’autres organismes. Cette conférence a permis de recueillir des annonces de contributions pour un montant de deux milliards d’euros.
Encadré 7
Le fonds fiduciaire Bêkou a organisé plusieurs évènements
L’équipe du fonds fiduciaire Bêkou a organisé une série d’ateliers et de conférences et publié des documents et des communiqués de presse, qui ont bénéficié d’une large couverture médiatique aussi bien à Bangui qu’à Bruxelles.
L’atelier «Résilience et relèvement, chemin vers le développement» qui s’est tenu à Bangui en juin 2016 a par exemple attiré plus de 200 participants représentant les autorités nationales, des organisations de la société civile, des bailleurs de fonds, des agences des Nations unies, des ONG internationales, ainsi que des médias, et offert une vue d’ensemble de la situation en RCA, des défis qu’elle pose et des besoins de la population. Au terme de cet atelier, douze recommandations ont été adressées au gouvernement centrafricain, aux partenaires des projets et aux bailleurs de fonds actifs dans le pays.
Un autre exemple est la conférence internationale de haut niveau sur la RCA, organisée à Bruxelles en mai 2015 et à laquelle plus de 300 personnes ont participé, dont le Président de la RCA, des ministres, des membres du Parlement européen ainsi que des représentants des Nations unies et d’ONG. À cette occasion, des engagements financiers supplémentaires ont été pris en faveur du pays et deux nouveaux donateurs ont rejoint le fonds fiduciaire Bêkou.
Conclusions et recommandations
70Le fonds fiduciaire Bêkou a été créé dans un contexte national difficile, caractérisé par des problèmes considérables sur les plans humanitaire et du développement ainsi que par la fragilité d’autorités publiques incapables de répondre aux besoins de la population. Même si nous estimons que la conception et la gestion du fonds pourraient être améliorées selon les modalités proposées ci-après pour lui permettre d’exploiter tout son potentiel, nous reconnaissons que sa mise en place était appropriée et qu’elle a permis d’obtenir plusieurs résultats positifs.
La mise en place du fonds fiduciaire Bêkou
71Le fonds fiduciaire Bêkou a été institué dans des délais très courts. Le règlement financier soumet la création d’un fonds fiduciaire à certaines conditions, que la Commission n’a toutefois pas encore traduites en cadre analytique lui permettant d’évaluer de manière formelle et structurée les avantages comparatifs de ce type de fonds par rapport aux autres instruments de financement (voir points 13 à 20).
72Le champ d’intervention du fonds fiduciaire Bêkou n’a pas été défini sur la base d’une analyse exhaustive des besoins. Une telle analyse aurait pu indiquer plus clairement comment et pourquoi les activités du fonds étaient pertinentes pour l’objectif poursuivi et quelles lacunes spécifiques le fonds venait combler (voir points 21 à 27).
Recommandation n° 1 – Élaborer de nouvelles orientations sur le choix des instruments de financement et sur les analyses des besoins visant à définir les champs d’intervention des fonds fiduciaires
La Commission devrait améliorer ses lignes directrices relatives aux fonds fiduciaires de l’UE:
- en élaborant un cadre analytique comprenant des principes directeurs pour la conduite d’une évaluation concise et structurée des avantages comparatifs des fonds fiduciaires par rapport aux autres instruments de financement;
- en instaurant des méthodes à appliquer lors des analyses des besoins visant à démontrer que le champ d’intervention de tout fonds fiduciaire envisagé est approprié et à préciser quelles lacunes il est destiné à combler.
En élaborant ces orientations, il importe de veiller à ne pas allonger inutilement le processus de création des fonds fiduciaires et à ne pas en limiter la flexibilité.
Délai de mise en œuvre: octobre 2018
La gestion du fonds fiduciaire Bêkou
73Le fonds fiduciaire Bêkou n’a guère influé sur la coordination entre les parties prenantes, non seulement en interne entre ses bailleurs de fonds, mais aussi sur le plan externe, avec la communauté internationale. Même en l’absence de mécanismes formels, le représentant du fonds fiduciaire Bêkou à Bangui a assuré, à titre de bonne pratique, une certaine coordination des projets au cas par cas (voir points 29 à 35).
74En l’absence d’informations précises sur les procédures applicables par le fonds fiduciaire Bêkou, la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre n’est pas pleinement transparente. Les accords de coopération déléguée comportent un risque de conflits d’intérêts. Des gains de temps supplémentaires auraient pu être réalisés lors de l’examen des projets (voir points 36 à 44).
75Globalement, les 5 % de frais de gestion prélevés par le fonds fiduciaire Bêkou sont comparables à ceux pratiqués par les autres acteurs de l’aide au développement, mais les frais de gestion n’ont pas encore été calculés dans leur intégralité. Par ailleurs, comme pour l’ensemble de l’aide au développement, le coût total de la fourniture de l’aide ne se limite pas simplement aux frais de gestion du fonds (voir points 46 à 49). Nous estimons qu’il importe de savoir quel est le coût total d’un fonds fiduciaire en tant qu’instrument de financement, afin que la Commission puisse, à l’avenir, évaluer si cet instrument présente un bon rapport coût-efficacité par comparaison avec les autres canaux d’acheminement de l’aide de l’UE.
76Le fonds fiduciaire Bêkou ne dispose d’aucun cadre de référence pour mesurer sa propre performance, ses objectifs spécifiques et les indicateurs correspondants n’ayant pas encore été définis. Cela complique le suivi du fonds et l’évaluation de ses résultats. La Commission ne dispose pas encore d’un processus permettant systématiquement de tirer, de l’expérience du fonds fiduciaire Bêkou, des enseignements qui pourraient l’aider à mieux concevoir et à mieux gérer les fonds fiduciaires (voir points 50 à 53).
Recommandation n° 2 – Améliorer la coordination au niveau des donateurs, les procédures de sélection et la mesure de la performance et optimiser les coûts administratifs
La Commission devrait:
- assurer plus systématiquement la coordination des opérations concernant, d’une part, l’aide octroyée par le fonds fiduciaire Bêkou et, d’autre part, les aides bilatérales fournies par ses bailleurs de fonds;
- veiller à ce que toute dérogation aux règles et aux procédures de la Commission pour la sélection des organismes chargés de la mise en œuvre soit clairement signalée, le cas échéant, et à ce que des dispositions sur la manière d’éviter les conflits d’intérêts soit introduites, et étudier les différents moyens d’accélérer les procédures de sélection, notamment au moment de l’examen du contenu des projets;
- calculer intégralement les coûts de gestion du fonds fiduciaire Bêkou et trouver les moyens de maximiser le montant de l’aide versée aux bénéficiaires finals;
- définir des objectifs SMART pour le fonds fiduciaire Bêkou, et les indicateurs correspondants, afin de pouvoir contrôler et démontrer les avantages qu’il apporte, et prévoir un dispositif de retour d’expérience dans ses lignes directrices sur les fonds fiduciaires de l’UE.
Délai de mise en œuvre: octobre 2018
Les résultats du fonds fiduciaire Bêkou
77Le fonds fiduciaire Bêkou a permis de mobiliser des aides, avec des annonces de contributions s’élevant à un total de 146 millions d’euros à ce jour. Cependant, les crédits proviennent en majorité du budget de l’UE et du Fonds européen de développement. Les autres bailleurs avaient tous octroyé des aides à la RCA avant la création du fonds, mais, avant 2014, les montants en question étaient comparativement faibles (voir points 55 à 61).
78Au niveau des projets, malgré un contexte souvent difficile sur le plan de la sécurité, 14 contrats sur 20 ont permis d’obtenir la plupart ou la totalité des réalisations escomptées (voir points 62 à 65).
79Le fonds assure une visibilité accrue à l’Union. Les partenaires des projets ont mené des actions sur le terrain pour assurer une certaine visibilité à l’UE, avec, globalement, plus de 30 activités menées à bien pour le fonds dans son ensemble (voir points 66 à 69).
Le présent rapport a été adopté par la Chambre III, présidée par M. Karel PINXTEN, Membre de la Cour des comptes, à Luxembourg en sa réunion du 20 juin 2017.
Par la Cour des comptes
Klaus-Heiner LEHNE
Président
Annexes
Annexe I
Liste des projets et des contrats
Annexe II
Liste des fonds fiduciaires des Nations unies opérant en RCA
Sources: http://mptf.undp.org et www.unocha.org/cerf au 16 mars 2017.
Annexe III
Réalisations des projets: indication de l’état d’avancement au moyen d’un code couleur
Légende: Vert – réalisations pleinement obtenues, jaune – réalisations obtenues pour la plupart; orange – réalisations non (encore) obtenues pour la plupart; rouge – réalisations non obtenues; gris – pas d’évaluation, la mise en œuvre n’étant pas suffisamment avancée.
Détails: contrat n° 2: durée prolongée de 1,5 mois; contrat n° 3: durée prolongée de 1 mois; contrat n° 5: contribution de l’UE portée de 1,7 à 2,2 millions d’euros; contrat n° 8: contribution de l’UE portée de 47 000 à 53 000 euros et durée prolongée de 5 mois; contrat n° 18: durée prolongée de 8 mois.
Sigles et acronymes
DG DEVCO: Direction générale de la coopération internationale et du développement
DG ECHO: Direction générale de l’aide humanitaire et de la protection civile
FAO: Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture (Food and Agriculture Organization)
FED: Fonds européen de développement
FMI: Fonds monétaire international
Guide pratique des procédures contractuelles: Guide pratique des procédures contractuelles dans le cadre des actions extérieures de l’Union européenne
MPE: Membre du Parlement européen
Objectifs SMART: Objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et datés (specific, measurable, achievable, relevant and timed)
OCDE: Organisation de coopération et de développement économiques
ONG: Organisation non gouvernementale
ONU: Organisation des Nations unies
PNUD: Programme des Nations unies pour le développement
PIN: Programme indicatif national
RCA: République centrafricaine
Unicef: Fonds des Nations unies pour l’enfance
Notes
1 Le cadre juridique applicable en matière de création de fonds fiduciaires de l’Union en faveur des actions extérieures est régi par les dispositions de l’article 187 du règlement financier (règlement (UE, Euratom) n° 966/2012 du Parlement européen et du Conseil du 25 octobre 2012 relatif aux règles financières applicables au budget général de l’Union et abrogeant le règlement (CE, Euratom) n° 1605/2002 du Conseil (JO L 298 du 26.10.2012, p. 1)).
2 Bêkou signifie «espoir» en langue sango.
3 Les trois autres fonds sont: a) le fonds fiduciaire Madad, institué en décembre 2014 en réponse à la crise syrienne; b) le fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique, créé en 2015 pour prévenir les migrations; c) le fonds fiduciaire en faveur de la Colombie, établi en 2016 pour appuyer le processus de normalisation post-conflit.
4 Accord instituant le fonds fiduciaire de l’Union européenne pour la République centrafricaine, le «fonds fiduciaire Bêkou», article 2 – Objectifs du fonds fiduciaire.
5 Les participants à la coopération au développement décident seuls quels pays aider et dans quelle mesure. Cela peut entraîner des déséquilibres de nature à compromettre l’efficacité de l’aide en raison de sa fragmentation, mais aussi de la concentration des participants dans certains pays, dits «privilégiés», et du déficit d’activités d’aide dans d’autres, communément qualifiés d’«orphelins». (http://www.oecd.org/fr/cad/architecture/fragmentation-orphelins.htm)
6 En mars 2017, le Bureau de la coordination des affaires humanitaires des Nations unies a indiqué que 5 % seulement des 400 millions de dollars des États-Unis d’aide humanitaire dont la RCA a besoin avaient été versés, entraînant la distribution de demi-rations.
7 Commission européenne – Fiche d’information: «L’approche globale de l’Union européenne à l’égard de la République centrafricaine (2013-2016)», Bruxelles, 11 novembre 2016.
8 Le traité de Lisbonne appelle à la cohérence entre les différents domaines de l’action extérieure de l’UE et ses autres politiques. Avec l’entrée en vigueur du traité et le nouveau contexte institutionnel qu’il a créé, l’UE a, en mobilisant l’ensemble des instruments et des ressources dont elle dispose, accru ses possibilités ainsi que son ambition de rendre son action extérieure plus cohérente, efficace et stratégique («L’approche globale de l’UE à l’égard des crises et conflits extérieurs», Bruxelles, 11.12.2013, document JOIN(2013) 30 final).
9 Dans le système mondial d’aide humanitaire, cela correspond au niveau le plus élevé, réservé aux plus graves crises humanitaires de grande ampleur.
10 L’aide a d’abord été conçue comme une suite linéaire d’opérations dite «continuum»: la réhabilitation devait suivre la phase d’aide d’urgence, avant de céder la place à la coopération au développement classique. Cependant, depuis les années 90, l’expérience a montré que le fait de traiter l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement comme des processus distincts et consécutifs ne permettait pas d’appréhender la complexité de nombreuses situations de crise. En revanche, les considérer comme un «contiguum» (c’est-à-dire comme des processus concomitants et liés) revient à reconnaître que de telles situations peuvent en réalité nécessiter de recourir simultanément à différents instruments (voir la note thématique du Parlement européen «Liens entre l’aide d’urgence, la réhabilitation et le développement: vers une aide plus efficace», p. 4 et 5).
11 Les programmes indicatifs nationaux constituent une étape importante dans la programmation de l’aide de l’UE au titre des FED. Ils définissent la stratégie et les priorités de l’UE en matière d’aide et sont élaborés en étroite coopération avec le pays partenaire. L’UE a donc besoin d’un gouvernement national comme interlocuteur pour pouvoir adopter un PIN. À l’époque, la RCA était dirigée par un gouvernement transitoire qui n’avait pas été légitimé par une élection démocratique.
12 Point 19 du programme d’action d’Accra, troisième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2008.
13 Table ronde n° 9, Architecture de l’aide, Synthèse, troisième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2008, p. 7.
14 Position commune de l’UE en vue du quatrième forum de haut niveau sur l’efficacité de l’aide, 2011, point 28, p. 6.
15 Le manuel mentionne six fonctions possibles en précisant leur valeur ajoutée respective: cohérence (remédier aux lacunes), consolidation (réduire la fragmentation), spécialisation ou ciblage thématique, gestion des risques, renforcement des systèmes nationaux et innovation. (Bureau du Fonds d’affectation multi-partenaires: Designing pooled funds for performance, A Manual prepared by the MPTFO, 2015; voir notamment les tableaux 2, p. vii, et 3, p. 6).
16 Accord instituant le fonds fiduciaire de l’Union européenne pour la République centrafricaine, le «fonds fiduciaire Bêkou», article 2 – Objectifs du fonds fiduciaire.
17 À la différence de l’aide du fonds fiduciaire Bêkou, qui a principalement été octroyée au niveau des différents établissements de santé. Les politiques nationales de santé sont définies par le ministère de la santé.
18 Le fonds fiduciaire Ezingo des Nations unies est doté de 25 millions de dollars des États-Unis. Il apporte une aide aussi bien aux agences des Nations unies qu’aux autorités nationales, sous la forme d’un appui budgétaire.
19 Voir notamment les principes de l’OCDE pour l’engagement international dans les États fragiles et les situations précaires, adoptés par les ministres et les chefs des agences lors du forum de haut niveau du Comité d’aide au développement en 2007 et selon lesquels il importe que les acteurs internationaux s’accordent sur des mécanismes de coordination pratiques, même en l’absence de forte volonté gouvernementale.
20 République centrafricaine: plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021, établi par le gouvernement de la République centrafricaine, avec le soutien de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations unies et du groupe de la Banque mondiale, p. 26 à 41.
21 Tableau 0.1 et Annexe 2 du plan national de relèvement et de consolidation de la paix.
22 Acte constitutif du fonds, considérants 4 à 6.
23 Acte constitutif du fonds, considérants 3 et 5.
24 http://ec.europa.eu/europeaid/bekou-trust-fund-introduction_en.
25 République centrafricaine: plan national de relèvement et de consolidation de la paix 2017-2021, établi par le Gouvernement de la République centrafricaine, avec le soutien de l’Union européenne, de l’Organisation des Nations unies et du groupe de la Banque Mondiale, chapitre V, figure 5.2, p. 45.
26 Article 187 du règlement financier.
27 Ce guide pratique décrit les procédures de marchés publics applicables aux actions extérieures de l’UE financées par le budget général de l’Union et le Fonds européen de développement. Il est utilisé par les directions générales et les services de la Commission en charge des instruments de financement et de mise en œuvre des actions extérieures.
28 Au total, nous avons contrôlé les procédures de sélection relatives à 26 contrats sur 31. Trois des cinq autres contrats (nos°7, 8 et 9) concernaient des services, tandis que les deux autres (nos°12 et 14) ont été attribués dans le cadre du programme «Santé II», dont les procédures de sélection étaient toujours en cours fin 2016.
29 Des conflits d’intérêts pourraient apparaître, car la sélection des projets à financer est effectuée au départ par le comité de gestion; la mise en œuvre de ces projets peut ensuite être confiée à des organisations dont des membres du personnel siègent à ce même comité de gestion.
30 Il s’agit en l’occurrence du contrat n° 15.
31 En l’occurrence, pour le contrat n° 31.
32 En l’occurrence, pour le contrat n° 3.
33 Tel a été le cas pour les contrats nos 9, 10, 11, 13 et 30; cela sera en outre nécessaire pour les contrats nos 12 et 14.
34 Les organisations des Nations unies sont autorisées à prélever jusqu’à 7 % du montant total des contributions au fonds fiduciaire pour couvrir les coûts indirects de soutien aux programmes, auxquels s’ajoute 1 % pour les frais administratifs. La Banque mondiale facture soit des coûts forfaitaires, correspondant au minimum à 5 % des fonds fiduciaires, soit des coûts à la carte. La Banque africaine de développement prélève actuellement 5 % au minimum pour couvrir ses frais.
35 Les frais d’installation d’agents au sein d’une délégation sont plus élevés que si ces derniers travaillaient depuis Bruxelles.
36 Le fonds fiduciaire Bêkou est financé par le FED et par différents instruments du budget de l’UE (voir figure 2); pour ces derniers, il existe des cadres de suivi, d’évaluation et d’établissement de rapports (également appelés cadres «MORE»), composés d’objectifs généraux et spécifiques, d’indicateurs, de valeurs intermédiaires et de valeurs cibles. Les obligations en matière d’information prévoient notamment la présentation au Parlement européen et au Conseil d’un rapport annuel sur la mise en œuvre des instruments de l’Union pour le financement de l’action extérieure. Actuellement, le lien entre la communication de ces résultats et celle des résultats du fonds fiduciaire Bêkou est limité.
37 Conformément aux dispositions de l’article 30 du règlement financier, des objectifs spécifiques, mesurables, réalisables, pertinents et datés (SMART) doivent être fixés pour tous les secteurs d’activité couverts par le budget.
38 Il s’agissait, pour les trois quarts, d’une aide humanitaire visant à fournir une assistance immédiate en situation d’urgence. L’aide au développement a un objectif plus structuré et à plus long terme.
39 Le programme indicatif national porte sur montant total de 382 millions d’euros, dont 208 millions d’euros de nouveaux fonds.
40 Rapport du Parlement européen du 12.4.2016 concernant la décharge sur l’exécution du budget des FED pour l’exercice 2014 (document A8-0137/2016), point 38. Dans une résolution de 2015, le Parlement européen a demandé «aux États membres et aux autres donateurs d’augmenter leur contribution au […] fonds fiduciaire Bêkou» (résolution 2015/2874(RSP) du Parlement européen du 8.10.2015, point 23).
41 Voir le point 53 concernant les faiblesses constatées dans la définition des objectifs et des indicateurs. L’analyse sous-tendant ce chapitre se fonde principalement sur un contrôle documentaire des éléments probants disponibles, car nous n’avons pu visiter que trois projets sur place. Nous nous sommes appuyés sur des éléments probants provenant de trois sources: des rapports d’évaluation externes, des rapports intermédiaires établis par les contractants et un tableau de suivi des indicateurs contractuels élaboré par le fonds fiduciaire Bêkou.
42 https://europa.eu/capacity4dev/.
Étape | Date |
---|---|
Adoption du plan d’enquête/début de l’audit | 4.10.2016 |
Envoi officiel du projet de rapport à la Commission (ou à toute autre entité auditée) | 5.5.2017 |
Adoption du rapport définitif après la procédure contradictoire | 20.6.2017 |
Réception des réponses officielles de la Commission (ou de toute autre entité auditée) dans toutes les langues | 12.7.2017 |
Équipe d’audit
Les rapports spéciaux de la Cour présentent les résultats de ses audits relatifs aux politiques et programmes de l’UE ou à des questions de gestion concernant des domaines budgétaires spécifiques. La Cour sélectionne et conçoit ces activités d’audit de manière à maximiser leur incidence en tenant compte des risques susceptibles d’affecter la performance ou la conformité, du niveau des recettes ou des dépenses concernées, des évolutions escomptées ainsi que de l’importance politique et de l’intérêt du public.
Le présent audit de la performance a été réalisé par la Chambre III, présidée par M. Karel Pinxten, Membre de la Cour, et compétente pour l’audit des domaines de dépenses relatifs à l’action extérieure, à la sécurité et à la justice. L’audit a été effectué sous la responsabilité de Mme Bettina Jakobsen, Membre de la Cour, assistée de: Mme Katja Mattfolk, chef de cabinet; M. Kim Storup, attaché de cabinet; Mme Beatrix Lesiewicz, manager principal; Mme Laura Gores, chef de mission. L’équipe d’audit était composée de Mme Nóirín O’Grady et M. Florin Alexandru Farcas.
Contact
COUR DES COMPTES EUROPÉENNE
12, rue Alcide De Gasperi
1615 Luxembourg
LUXEMBOURG
Le fonds fiduciaire Bêkou de l’UE pour la République centrafricaine: un début chargé d’espoir malgré quelques insuffisances
(présenté en vertu de l’article 287, paragraphe 4, deuxième alinéa, du TFUE)
De nombreuses autres informations sur l’Union européenne sont disponibles sur l’internet via le serveur Europa (http://europa.eu).
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ISBN 978-92-872-7834-0 | ISSN 1977-5695 | doi:10.2865/671953 | QJ-AB-17-011-FR-N | |
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