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France

Boîte à outils de suivi - France

1. L’apprentissage au service de la durabilité

La France promeut l’apprentissage au service de la durabilité à tous les niveaux d’éducation. Depuis 2004, la France élabore progressivement un cadre réglementaire global pour les écoles (MENJ, n.d.). Sa dernière stratégie, qui date de 2023, expose diverses mesures qui seront prises d’ici à 2030, y compris un cadre de compétences largement inspiré du cadre GreenComp de l’UE (MENJ, 2023a, 2023b). Les établissements d’enseignement supérieur devront également mettre en place une stratégie en matière de développement durable. Un cadre de référence les aide à instaurer et à (auto)évaluer leurs stratégies (MESR, 2021). La France encourage également l’acquisition des compétences requises pour les emplois futurs, afin d’anticiper les effets de la transition écologique sur l’enseignement et la formation professionnels (EFP) initiaux et continus. Il s’agit de l’objet d’un appel lancé en 2022 dans le cadre du plan «France 2030» (Cedefop, 2023) et une priorité du programme de travail 2023-2024 du Réseau Emplois Compétences (France Stratégie, 2024).

La France a adopté une approche interdisciplinaire de l’apprentissage au service de la durabilité. L’«éducation au développement durable» est intégrée dans les programmes scolaires, depuis l’éducation et l’accueil des jeunes enfants (EAJE) jusqu’aux écoles secondaires supérieures dans diverses disciplines, telles que l’histoire, la géographie et les sciences (MENJ, 2023c). Depuis septembre 2024, il est également intégré dans l’enseignement des technologies et l’éducation civique (MENJ, 2023a). Selon l’étude internationale sur l’éducation civique et la citoyenneté de 2022, les élèves français ont une assez bonne connaissance du développement durable (note de 496,4 points), légèrement inférieure à la moyenne des autres États membres de l’UE participants (EU-17: 506,7 points). Les filles et les élèves dont les parents on fait des études supérieures ont obtenu des notes supérieures (respectivement + 13,6 et + 68 points)(1).

Les premières mesures ont été prises pour tenir compte des exigences de la transition écologique dans l’EFP et l’enseignement supérieur. Le ministère de l’éducation révise actuellement les normes nationales relatives aux certifications EFP dans les secteurs clés (gouvernement, 2023a). Une quarantaine de nouveaux parcours de formation répondant aux besoins régionaux ont déjà remplacé ceux qui n’offraient pas suffisamment de possibilités professionnelles ou de poursuite d’études (MENJ, 2024; Joseph, 2024). L’objectif est de former tous les étudiants du premier cycle à la transition écologique, mais ce type de formation est encore très peu répandu et doit être mis en place de manière généralisée (Cour des comptes, 2023a). Le ministère de l’enseignement supérieur préconise l’enseignement de connaissances et de compétences sur la base du cadre GreenComp de l’UE dans un format hybride et collaboratif d’au moins 30 heures assorties d’au moins trois crédits ECTS (MESR, 2023).

Malgré un large éventail de ressources pédagogiques, les enseignants manquent de soutien concernant l’apprentissage au service de la durabilité. Selon le cadre général des compétences des enseignants, tous les enseignants doivent contribuer à ce domaine transversal (MENJ, 2013). Il n’existe pas encore de formation initiale complète, mais les enseignants peuvent bénéficier d’activités de perfectionnement professionnel continu (Eurydice, 2024). Les enseignants disposent de ressources pédagogiques provenant des ministères et des centres scientifiques nationaux. Cependant, ils ne s’approprient pas pleinement ces ressources et ne bénéficient pas d’un soutien adapté pour mettre en œuvre une approche pédagogique commune et interdisciplinaire (Barthes, A., 2017).

Les mécanismes de suivi privilégient les systèmes de labellisation. L’évaluation externe et interne des écoles repose sur des critères non obligatoires, des projets de partenariat et un système de labellisation (Eurydice, 2024). Le label E3D («école ou établissement en démarche globale de développement durable») récompense les écoles qui adoptent une approche axée sur le développement durable: en 2023, 12 500 écoles ont reçu ce label(2), et l’objectif est d’atteindre 20 000 écoles d’ici à 2025 et toutes les écoles d’ici à 2030 (MENJ, 2023a). Dans l’enseignement supérieur, le label DD&RS («développement durable et responsabilité sociétale») aide les établissements à élaborer une approche du développement durable et de la responsabilité sociétale ainsi qu’à autoévaluer les actions qu’elles ont entreprises. Si 41 établissements d’enseignement supérieur avaient reçu ce label à la fin de 2023, l’objectif de 25 % d’établissements labellisés d’ici à 2024 (et 66 % d’ici à 2027) n’a pas encore été atteint, ce qui justifierait la mise en place d’une réforme visant à simplifier le processus (Cour des comptes, 2023a).

Encadré 1: éco-délégués de classe

Depuis 2020, des éco-délégués sont élus chaque année parmi les élèves d’une même classe dans l’enseignement secondaire. Il est question d’étendre ce dispositif aux deux dernières années de l’école primaire. Les éco-délégués contribuent à sensibiliser les élèves à l’environnement et au développement durable. Ils aident les élèves à agir au sein de l’école mais aussi en dehors de celle-ci, grâce à des actions écologiques et à la participation à des activités éducatives. Ils sont soutenus par le personnel enseignant et administratif ainsi que par des partenaires extérieurs (associations, communautés locales, experts, etc.). Créé en 2021 par le ministère de l’éducation, le dispositif prévoit un prix national qui vise à mettre en valeur les meilleures actions des éco-délégués chaque année.

https://eduscol.education.fr/1121/les-eco-delegues

2. Éducation et accueil des jeunes enfants

Si la France affiche l’un des taux de participation aux systèmes d’éducation et d’accueil de la petite enfance (EAJE) les plus élevés de l’UE, le manque de capacités et de personnel persiste. En 2023, 57,2 % des enfants de moins de trois ans ont fréquenté des structures d’accueil formelles, ce qui est nettement supérieur à la moyenne de l’UE (37,5 %)(3) et à l’objectif national de Barcelone (53,1 %). En 2021, le nombre de places proposées par les assistantes maternelles représentait 53 % de l’offre globale des structures d’accueil formelles d’enfants de moins de trois ans, tandis que les places dans les établissements d’accueil du jeune enfant représentaient 38 % (CNAF-ONAPE, 2023). Le nombre d’assistantes maternelles n’a cessé de diminuer depuis 2013: il en manque actuellement 10 000 et 120 000 partiront à la retraite d’ici 2030. En 2023, le gouvernement a promis 5,5 milliards d’EUR pour 100 000 places supplémentaires dans les crèches d’ici à 2027, avec un objectif de 200 000 places d’ici à 2030, et a annoncé de nouvelles mesures visant à rendre les professions de la petite enfance plus attrayantes (ministère des solidarités, 2023).

Les disparités régionales et financières réduisent l’accès aux structures d’EAJE et le choix de celles-ci pour les enfants de moins de trois ans. La question du coût demeure problématique et entraîne des inégalités: En effet, 44 % des bénéficiaires d’allocations familiales ayant des enfants de moins de trois ans et 77 % des familles vivant sous le seuil de pauvreté ne fréquentent aucune structure d’accueil d’enfants (CNAF-ONAPE 2023). Les familles à revenus modestes ont plus de mal à s’offrir les services d’une assistante maternelle: un couple percevant l’équivalent d’un salaire minimum consacre 12,9 % de ses revenus à une garde à temps plein, contre 5,2 % pour un couple percevant l’équivalent de 6 salaires minimaux. Cette différence n’est pas entièrement compensée par les prestations sociales et les crédits d’impôt accordés aux familles disposant de faibles revenus (idem). Dans le cadre de leur convention 2023-2027, le gouvernement et la Caisse nationale des allocations familiales (CNAF) sont convenus de développer et de diversifier les solutions d’accueil de la petite enfance sur l’ensemble du territoire français, tout en la rendant plus abordable et en l’adaptant aux besoins des enfants et des parents (CAF, 2023).

Les efforts de réforme se poursuivent pour améliorer la qualité de l’EAJE des enfants de moins de trois ans. En 2023, l’Assemblée nationale a recommandé des investissements urgents et massifs pour améliorer les conditions de formation et de travail des professionnels de la petite enfance ainsi que les méthodes et modèles de financement de l’EAJE (Assemblée nationale, 2023). Il a été recommandé, dans une récente enquête parlementaire, de porter le nombre de membres du personnel à un adulte pour quatre enfants d’ici à 2030(4), d’introduire une carte professionnelle obligatoire et de faire de la municipalité le point de contact unique pour l’accès aux structures d’EAJE (Assemblée nationale, 2024). La recommandation et l’enquête ont permis de mettre en évidence les risques liés à la privatisation du secteur en matière de qualité, notamment en ce qui concerne la création de micro-crèches. L’Inspection générale des affaires sociales a récemment souligné les risques liés aux dérogations du cadre réglementaire et financier dont bénéficient les micro-crèches en matière de qualité, d’accès équitable et de transparence. L’Inspection recommande un alignement partiel sur le cadre applicable aux autres structures d’EAJE, ainsi qu’une révision de leur modèle de financement, afin de réduire le reste à charge des ménages à faible revenu (IGAS, 2024).

La priorité est d’offrir à chaque enfant les mêmes chances de réussite dans l’enseignement préscolaire. Tous les enfants de plus de trois ans (100 %) fréquentent l’école maternelle (contre une moyenne de 93,1 % dans l’UE en 2022(5)), étant donné que la scolarité obligatoire commence dès l’âge de trois ans. Pour lutter contre les inégalités en matière d’éducation, la scolarisation précoce à partir de l’âge de deux ans a été rendue possible en 2013 et plus de 71 000 enfants ont été inscrits en 2023(6). Depuis 2023-2024, la scolarisation précoce a été étendue aux zones urbaines défavorisées, telles que les «Quartiers 2030», et à l’ensemble de la ville de Marseille (MENJ, 2023). Depuis 2023, les classes ne peuvent compter plus de 24 élèves au cours de la dernière année (grande section) de l’école maternelle.

3. Enseignement scolaire

Le décrochage scolaire reste relativement faible, avec des disparités principalement liées à l’origine et au sexe des élèves, ainsi qu’à la localisation de l’école. Le taux de décrochage scolaire est resté stable en 2023 par rapport à l’année précédente, et inférieur à l’objectif de l’UE de 9 % d’ici à 2030 (7,6 % contre une moyenne de l’UE de 9,5 %)(7). Toutefois, l’écart entre les garçons et les filles s’est creusé en faveur des filles (5,6 % contre 9,5 % pour les garçons). Les élèves nés en dehors de l’UE sont plus susceptibles (12,7 %) de quitter prématurément l’éducation et la formation que les élèves nés dans le pays (7,2 %)(8). Le taux de décrochage scolaire est presque deux fois plus élevé dans les régions ultrapériphériques de France (13,2 %)(9).

Un recul inquiétant des compétences de base éloigne la France, comme la plupart des pays de l’UE, de l’objectif fixé à l’échelle de l’UE pour 2030, qui prévoit moins de 15 % d’élèves ayant une maîtrise insuffisante. Il ressort de l’étude 2022 du programme international de l’OCDE pour le suivi des acquis des élèves (PISA) qu’environ un quart des jeunes de 15 ans ont obtenu des résultats insuffisants en mathématiques (28,8 %), en lecture (26,9 %) et en sciences (23,8 %), ce qui correspond à la moyenne de l’UE (OCDE, 2023a). Le taux sous-performance scolaire a considérablement augmenté en mathématiques (+ 6,4 pp contre une moyenne de l’UE de 7,4 pp) et en lecture (+ 8 pp contre 8,2 pp) depuis 2018; ainsi qu’en sciences (+ 5.1 pp contre 7,4 pp) depuis 2012 (Commission européenne, 2024a). Les garçons sont plus susceptibles que les filles d’obtenir des résultats insuffisants en lecture et en sciences, respectivement de + 7,7 pp et + 3,8 pp (contre + 9,0 pp et + 2,7 pp en moyenne dans l’UE)(10). Dans le même temps, si la proportion d’élèves les plus performants reste proche de la moyenne de l’UE dans les trois matières, une tendance négative nette peut être observée en mathématiques et en lecture, ces deux matières ayant chuté de plus de 5 pp depuis 2012 (contre moins de 4 pp en moyenne dans l’UE). Toutefois, la proportion d’élèves les plus performants en sciences reste stable en France ( 0,2 pp depuis 2012 contre 1,1 pp en moyenne dans l’UE). Néanmoins, les garçons obtiennent de meilleurs résultats que les filles en mathématiques, tandis que les filles obtiennent de meilleurs résultats que les garçons en lecture, conformément aux tendances de l’UE. Les tests nationaux confirment cette disparité entre les sexes en français et en mathématiques dès la deuxième année de l’enseignement primaire (CE1) (DEPP, 2024a).

Le milieu socio-économique reste un puissant indicateur des résultats scolaires en ce qui concerne les compétences de base. La tendance négative des résultats PISA dans tous les quartiles de la distribution socio-économique est la plus marquée parmi les élèves défavorisés. Environ la moitié d’entre eux n’atteint pas le niveau de compétence minimal en mathématiques (49,4 %), ce qui représente une forte augmentation (+ 10,3 pp) par rapport à 2018. Cela montre que le fossé socio-économique, légèrement supérieur à la moyenne de l’UE, se creuse (voir graphique 1) (Commission européenne, 2024a). La sous-performance profonde, qui correspond à une sous-performance en mathématiques, en lecture et en sciences, est également en hausse. Elle concernait près d’un tiers des élèves défavorisés de 15 ans en 2022 (31,7 % contre 23,8 % en 2018), ce qui était supérieur à la moyenne de l’UE (28,8 % en 2022 et 23,3 % en 2018)(11). Les élèves nés à l’étranger et les élèves nés dans le pays dont les parents sont nés à l’étranger sont presque deux fois plus susceptibles (respectivement 50 % et 43 %) d’obtenir des résultats insuffisants que leurs camarades nés dans le pays et non issus de l’immigration (24,3 %). Toutefois, après prise en compte du sexe et du profil socio-économique de l’élève ainsi que les caractéristiques de l’école, l’écart de résultats lié à l’origine immigrée devient statistiquement insignifiant(12).

Graphique 1: évolution de l’écart socio-économique parmi les élèves obtenant des résultats insuffisants en mathématiques, PISA 2018-2022 (en %) (classés selon l’ampleur de l’écart en 2022)

Les réformes sont axées sur le renforcement des compétences de base et la réduction des inégalités. Depuis 2017, de nombreuses réformes ont porté sur l’enseignement des compétences de base dans l’école maternelle et primaire, notamment l’augmentation du temps d’enseignement et la diversification des méthodes d’enseignement. De nouvelles mesures pour l’enseignement du français et des mathématiques permettant la mise en place de «groupes de besoins» flexibles en première et deuxième années de l’enseignement secondaire, ainsi que des heures supplémentaires de soutien proposées aux élèves pour améliorer leurs compétences de base, sont prévues pour septembre 2024. Cette réforme réintroduit également la possibilité de redoubler une année scolaire (MENJ, 2023d). Étant donné qu’un plus grand degré d’autonomie pédagogique permet généralement de meilleurs résultats, alors que l’orientation précoce des élèves par niveau de maîtrise et le redoublement peuvent exacerber les inégalités (OCDE, 2023b), le suivi et l’évaluation de ces mesures seront essentiels. La France poursuit également ses efforts pour réduire les inégalités socio-économiques, en ciblant principalement les zones d’éducation prioritaires. Il est prévu qu’à partir de septembre 2024, les écoles du premier cycle de l’enseignement secondaire de ces zones soient ouvertes de 8 heures à 18 heures et proposent une aide aux devoirs ainsi que des activités artistiques et sportives (MENJ, 2023). De nouveaux programmes sont en cours d’élaboration afin de mieux définir les connaissances et compétences que les élèves sont censés acquérir à chaque niveau.

Le climat scolaire est devenu une priorité nationale, avec en première ligne la lutte contre le harcèlement. Le bien-être des élèves a une incidence sur leurs résultats: une exposition au harcèlement plusieurs fois par mois [ce qui concerne plus d’un élève sur cinq (22,1 %) et encore plus dans les écoles défavorisées], est corrélée à une baisse de 13 points en mathématiques (Commission européenne, 2024a). Malgré un climat scolaire globalement positif, les élèves peuvent être exposés à la violence, et principalement à des attaques verbales (DEPP, 2024b). En 2022-2023, 30 % des lycéens déclaraient avoir été victimes d’au moins une violence de façon répétée durant l’année scolaire; 2,2 % des élèves signalaient cinq atteintes répétées ou plus ce qui peut s’apparenter à du harcèlement. Ce chiffre a augmenté par rapport à 2018 (DEPP, 2024c). En 2023, le gouvernement a lancé un plan interministériel de lutte contre le harcèlement, intégrant une campagne de sensibilisation nationale, l’extension obligatoire du programme «pHARE» de lutte contre le harcèlement à toutes les écoles et une enquête d’autoévaluation pour les écoles (MENJ, 2023b). En 2024, les nouvelles mesures comprennent des mécanismes de réponse immédiate et permettent de se concentrer sur les écoles primaires les plus exposées (MENJ, 2024a). D’autres mesures visant à améliorer le climat scolaire devraient être déployées en septembre 2024: le lancement de cours d’empathie(13) dans toutes les écoles primaires (MENJ, 2024e), l’expérimentation du port de l’uniforme scolaire dans 100 écoles volontaires (MENJ, 2024b) et la mise en place d’un Conseil des jeunes de la laïcité (MENJ, 2024c). Le bien-être mental et physique est davantage mis en avant grâce à l’amélioration de l’habileté numérique à l’aide du certificat «PIX» et à l’activité physique quotidienne dans les écoles primaires (Commission européenne, 2024b).

Malgré les efforts déployés, la profession d’enseignant n’attire toujours pas suffisamment. Les concours de recrutement ne répondent toujours pas aux besoins: malgré une légère amélioration par rapport à l’année précédente, 3 000 postes n’ont pas été pourvus à la suite des concours de 2024 (MENJd, 2024). À titre de compensation, le ministère de l’éducation a demandé l’autorisation d’embaucher des enseignants temporaires et des enseignants récemment retraités (Belloubet, 2024). Dans une enquête, les enseignants ont déclaré que, bien qu’ils estiment que leur travail a une finalité et est utile à la société, ils manquent de soutien et de reconnaissance. Ils sont soumis à des contraintes plus lourdes dans leurs conditions de travail en ce qui concerne l’intensité de travail et les exigences émotionnelles par rapport à d’autres cadres (DEPP, 2024d). La dégradation du climat scolaire affecte leur bien-être et leur motivation. C’est pourquoi il est nécessaire de mettre en place une formation initiale et continue spécifique, de renforcer la participation des parents et d’instaurer une meilleure protection des enseignants (Médiatrice de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, 2024). En ce qui concerne la formation continue, un projet financé par l’instrument d’appui technique de l’UE a permis de soutenir les nouvelles écoles académiques de la formation continue, qui doivent gagner en visibilité, principalement en élaborant une véritable culture professionnelle de l’apprentissage tout au long de la vie (OCDE, 2024).

4. Enseignement et formation professionnels

Le taux d’inscription dans le second cycle de l’enseignement et de la formation professionnels (EFP) augmente et le nombre de contrats d’apprentissage signés est grandissant. Le taux d’inscription a légèrement augmenté (1,8 %) en 2023-2024 par rapport à 2022-2023, pour atteindre 633 000 étudiants (à l’exclusion des apprentis). En outre, pour la première fois en trois ans, le nombre d’étudiants abandonnant une formation professionnelle a diminué (DEPP, 2023). Deux tiers des jeunes diplômés de l’EFP ont suivi une formation par le travail (68,3 % en 2023 par rapport à l’UE: 64,5 %). Toutefois, dans les niveaux d’enseignement intermédiaires(14), seuls 40,6 % des élèves ont suivi des programmes d’orientation professionnelle en 2022, contre 52,4 % dans l’UE. Le nombre de nouveaux contrats d’apprentissage a continué d’augmenter pour dépasser le million en février 2024 (+ 4,7 % par rapport à février 2023) (DARES, 2024).

Des investissements importants au titre du plan pour la reprise et la résilience (PRR) de l’UE permettent de soutenir l’apprentissage, principalement au moyen de subventions à l’embauche. Dans le cadre du PRR, les employeurs d’apprentis ont reçu des subventions au cours de la première année de contrat (8 000 EUR pour les plus de 18 ans et 5 000 EUR pour les mineurs), ce qui a permis de financer plus de 330 000 subventions à l’embauche. Un dispositif similaire a permis de financer plus de 100 000 contrats de professionnalisation. Ce dispositif a été reconduit pour la période 2023 2027, dépassant le soutien du PRR, mais avec des montants plus faibles. Le nombre de centres de formation d’apprentis (CFA) a triplé au cours des cinq dernières années grâce à la reconnaissance des centres de formation d’entreprise et à une approche plus souple de l’ouverture de ces centres (3 440 en 2023 contre 954 en 2019). De nouveaux centres de formation ont été ouverts, en particulier dans les secteurs du sport, du médico-social et des services, ainsi que dans les territoires français d’outre-mer (Joseph, 2024). Parallèlement, entre 2019 et 2022, 61 000 jeunes se sont inscrits en prépa apprentissage, dont plus de 80 % appartenaient à des groupes peu qualifiés. Plus de la moitié d’entre eux (59 %) sont entrés en apprentissage ou dans d’autres programmes de formation (DARES, 2023).

Des réformes du système d’EFP initial sont en cours, car les diplômés sont toujours confrontés à des difficultés sur le marché du travail. En 2023, seuls 75,6 % des jeunes diplômés de l’EFP sont entrés sur le marché du travail, contre 81 % dans l’UE. Cela souligne la nécessité de poursuivre les mesures de soutien à leur intégration sur le marché du travail. Douze mesures de réforme, annoncées en septembre 2023, visent à réduire le décrochage scolaire, à améliorer les perspectives sur le marché du travail et la réussite des diplômés de l’EFP dans la poursuite de leurs études. Elles incluent des investissements dans les compétences de base des étudiants, une orientation académique et professionnelle de ces derniers et l’adaptation des programmes d’études existants aux besoins du marché du travail.

5. Enseignement supérieur

La France affiche un taux élevé de diplômés de l’enseignement supérieur. En 2023, 51,9 % des personnes âgées de 25 à 34 ans étaient titulaires d’un diplôme de l’enseignement supérieur (UE: 43,1 %), soit une augmentation de 8 pp au cours de la dernière décennie, conformément aux tendances de l’UE(15). Tant les hommes (47,8 %) que les femmes (55,8 %) atteignent l’objectif de 45 % fixé au niveau de l’UE, ce qui se traduit par l’un des écarts les plus faibles entre les hommes et les femmes en matière de diplômés de l’enseignement supérieur dans l’UE (8 pp contre 11,2 pp dans l’UE). Par rapport à 2021, la proportion de diplômés en STIM a augmenté de 4,9 pp pour atteindre 30,5 % en 2022, ce qui représente l’un des taux les plus élevés de l’UE (UE: 26,6 %)(16). La proportion de femmes parmi les diplômés en STIM est de 42,6 %, soit le deuxième taux le plus élevé de l’UE. Toutefois, les femmes qui étudient les sciences sont moins nombreuses à choisir d’intégrer des établissements d’enseignement supérieur hautement sélectifs, en partie en raison de stéréotypes sexistes persistants et d’un manque de confiance, même si elles possèdent des compétences équivalentes (DEPP, 2024).

En raison des inégalités persistantes, il est moins probable que des personnes issues de certains milieux choisissent de suivre des études supérieures, et, lorsqu’elles en suivent, il est plus difficile pour elles de réussir. En 2023, le taux de diplômés de l’enseignement supérieur était beaucoup plus élevé dans les villes (61,1 %) que dans les zones rurales (38,9 %)(17) et les régions ultrapériphériques (32,2 %)(18). Les inégalités socio-économiques ainsi que les inégalités entre les hommes et les femmes qui se manifestent dès l’école perdurent dans l’enseignement supérieur. Les étudiants défavorisés sont moins susceptibles de suivre des études ou d’opter pour des établissements d’enseignement supérieur hautement sélectifs en raison de leurs choix de matières dans l’enseignement secondaire (France Stratégie, 2023). Pour surmonter les obstacles liés à la mobilité, un système de «campus connectés» propose un apprentissage à distance avec un tutorat personnalisé: leur réussite justifie leur maintien, car ils contribuent à l’émancipation sociale par la formation et sont indispensables dans les territoires d’outre-mer (IGESR, 2023).

Un diplômé sur cinq possède une expérience d’études à l’étranger. En 2022, 19,1 % de l’ensemble des diplômés de l’enseignement supérieur avaient bénéficié d’une expérience d’apprentissage à l’étranger, ce qui est nettement supérieur à la moyenne de l’UE (10,9 %), mais inférieur à l’objectif de 23 % fixé par l’UE pour 2030 (voir graphique 2)(19). La même année, 11,2 % des étudiants inscrits en France venaient de l’étranger(20). Malgré une politique proactive en matière d’apprentissage à l’étranger, la médiatrice de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur a constaté que les étudiants désireux d’étudier à l’étranger ou de venir étudier en France manquaient toujours d’informations claires et que les procédures n’étaient pas toujours cohérentes. Elle recommande de mieux informer les étudiants entrants et sortants ainsi que d’accroître la transparence des procédures de reconnaissance (médiatrice de l’éducation nationale et de l’enseignement supérieur, 2024).

Graphique 2: taux de mobilité sortante à des fins d’éducation et de formation des diplômés (niveaux CITE 5-8), 2022 (en %)

Les efforts visant à rendre l’enseignement supérieur plus inclusif se poursuivent. Entre 2017 et 2023, le nombre d’étudiants en situation de handicap accompagnés par les services handicap des universités a doublé pour atteindre 2 % de l’ensemble des étudiants. Depuis 2023, ces étudiants ont plus facilement accès aux bourses sur critères sociaux. La part du budget de l’État de 2024 consacrée à l’amélioration des conditions d’études a augmenté de 50 % par rapport à 2023 (MESR, 2024a). Afin d’encourager la transition vers des établissements inclusifs, six universités ont bénéficié en 2024 d’un financement pour mettre en avant les bonnes pratiques ainsi que pour poursuivre l’approfondissement de l’enseignement inclusif (MESR, 2024b).

6. Éducation et formation des adultes

Bien que le taux de participation des adultes à l’éducation et à la formation soit relativement élevé, la France n’a pas accompli de progrès significatifs pour atteindre son objectif de 65 % d’ici à 2030. En 2022, le taux de participation des adultes à l’éducation et à la formation en France s’élevait à 49,2 %, ce qui est supérieur à la moyenne de l’UE (39,5 %)(21). Les personnes ayant suivi des études supérieures participent beaucoup plus à l’éducation et à la formation des adultes que les personnes peu qualifiées (68,7 % contre 23,6 %). De même, les femmes participent davantage à l’éducation et à la formation des adultes que les hommes (50 % contre 48,3 % respectivement). Le niveau de compétences numériques de la population est légèrement supérieur à la moyenne de l’UE (en 2023, 59,7 % de la population possédait au moins des compétences numériques de base, UE: 55,6 %) (Commission européenne, 2024c). Des efforts supplémentaires visant à accroître continuellement le niveau de compétences numériques de la population et à former des spécialistes des TIC contribueront à une transition numérique inclusive (idem).

Ces dernières années, des investissements importants ont été réalisés pour soutenir l’accès à la formation pour tous. Entre 2018 et 2023, 13,8 milliards d’EUR ont été investis dans le cadre du plan d’investissement dans les compétences (PIC) pour favoriser l’accès des chômeurs à la formation, dont 43 % ont été alloués au soutien des groupes vulnérables. Le PIC, en synergie avec d’autres instruments, tels que le compte individuel de formation, est l’une des sources de financement contribuant au soutien de 1,6 million d’inscriptions de chômeurs en formation en 2022 (DARES, 2023). Malgré les efforts déployés, les personnes peu qualifiées restent sous-représentées parmi les bénéficiaires de formations(22), en particulier de formations débouchant sur des qualifications (formations certifiantes); en 2022, seuls 3,9 % des demandeurs d’emploi peu qualifiés ont bénéficié d’une formation certifiante. En outre, seule une formation sur quatre financée au titre du PIC était liée à des compétences et à des professions dans des secteurs prioritaires afin de répondre aux besoins actuels et futurs du marché du travail (DARES, 2023). En 2024, le PIC a été renouvelé pour quatre ans. Il s’adresse désormais davantage aux groupes vulnérables, mais avec un budget réduit (environ 640 millions d’EUR), dans le contexte plus large du plan visant à réduire les goulets d’étranglement en matière de recrutement (1,4 milliard d’EUR, en incluant le PIC). L’efficacité du financement est compromise par un faible niveau de compétences de base, alimenté par des inégalités socio-économiques persistantes dans le système éducatif (voir section 4).

En 2024, une réforme relative à l’obtention obligatoire d’une certification qualité (Qualiopi) a été introduite, sur la base des conclusions de la dernière évaluation. Le dispositif Qualiopi, introduit en 2022, vise à certifier des organismes de formation gérés par des tiers à l’aide d’un système de référence national unique, afin que ces organismes puissent obtenir des financements publics ou publics privés. La réforme vise à accroître la transparence et la qualité de l’offre de formation. La Cour des comptes nationale a estimé qu’un meilleur contrôle de la qualité contribuerait également à lutter contre la fraude (Cour des comptes, 2023b).

Encadré 2: soutien du FSE/FSE+ pour lutter contre l’illettrisme au niveau local

L’Agence nationale de lutte contre l’illettrisme (ANLCI) favorise le développement et le partage de bonnes pratiques en matière de prévention et de lutte contre l’illettrisme grâce à l’association d’acteurs locaux. Le programme «Coopérative des solutions», qui bénéficie d’un soutien pluriannuel du FSE, couvrira 70 territoires entre 2022 et 2024 et aura trois objectifs principaux: élaborer des projets collectifs pour donner accès à la formation aux compétences de base; co-concevoir et déployer des solutions et des outils sur mesure pour guider les personnes illettrées vers la formation et l’insertion ainsi que les accompagner avant et pendant ce processus; diffuser des solutions et méthodes innovantes et les généraliser dans d’autres territoires.

https://www.anlci.gouv.fr/ressources/la-cooperative-des-solutions/

Références

Notes

  • 1.Calculs de la Commission européenne (Centre commun de recherche), basés sur une extraction spéciale de données de l'étude internationale sur l'éducation civique et à la citoyenneté de 2022 menée par l'AIE (Schulz et.al.).

  • 2.Statistiques nationales INSEE (France) — suivi de l’objectif de développement durable nº 4 (éducation de qualité).

  • 3.Eurostat: ilc_caindform25.

  • 4.Contre un adulte pour six enfants à l’heure actuelle.

  • 5.Eurostat: educ_uoe_enra21.

  • 6.Eurostat: educ_uoe_enrp02.

  • 7.Eurostat: edat_lfse_14.

  • 8.Eurostat: edat_lfse_02.

  • 9.Martinique, Mayotte, Guadeloupe, Guyane française et île de la Réunion. Eurostat: edat_lfse_16 (petite taille d’échantillon).

  • 10.Eurostat: educ_outc_pisa.

  • 11.Indicateur d’équité — calculs de l’UE fondés sur les enquêtes PISA 2018 et 2022 de l’OCDE.

  • 12.OCDE, PISA, Vol. 1, tableau I.B1.7.37.

  • 13.Ces cours visent à améliorer les compétences émotionnelles et sociales des élèves, telles que la conscience de soi, la verbalisation des émotions et la régulation émotionnelle. Le ministère de l’éducation a élaboré une boîte à outils à cette fin.

  • 14.Eurostat: educ_uoe_enra16. Les niveaux d’enseignement intermédiaire correspondent au deuxième cycle de l’enseignement secondaire ainsi qu’à l’enseignement professionnel post-secondaire non supérieur.

  • 15.Eurostat: edat_lfse_03.

  • 16.Eurostat: educ_uoe_grad04.

  • 17.Eurostat: edat_lfs_9913.

  • 18.Eurostat: edat_lfse_04.

  • 19.Calculs de la Commission européenne fondés sur les données d’Eurostat de 2022 (UOE) et de l’OCDE de 2021.

  • 20.Eurostat: educ_uoe_mobs02.

  • 21.Eurostat : Enquête sur l'éducation des adultes - participation à l'éducation et à la formation, hors formation guidée en milieu de travail.

  • 22.EEA (extraction spéciale).

Références de publication

  • Numéro de catalogueNC-AN-24-010-FR-Q
  • ISBN978-92-68-19075-3
  • ISSN2466-9997
  • DOI10.2766/948513

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