Rapport spécial
08 2023

Transport intermodal de marchandises L’UE peine encore à restreindre le fret routier

À propos du rapportLe transport intermodal de marchandises, qui consiste à transporter des marchandises dans une seule unité de chargement (comme un conteneur) en combinant plusieurs modes de transport parmi la route, le rail, les voies navigables et l’air, permet d’optimiser les points forts (flexibilité, vitesse, coûts et performance environnementale) de chacun d’entre eux. Pour la période 2014-2020, l’ensemble des financements engagés par l’UE en faveur de projets visant à soutenir l’intermodalité s’est élevé à environ 1,1 milliard d’euros.

La Commission a établi des valeurs cibles à l’échelle de l’UE en vue d’accroître le recours au rail et à la navigation intérieure. Celles-ci étaient irréalistes, et les États membres n’en ont pas tenu compte pour fixer les leurs. Nous sommes arrivés à la conclusion que, globalement, le transport intermodal de marchandises ne peut toujours pas concurrencer le transport routier sur un pied d’égalité en raison d’obstacles réglementaires et infrastructurels. Nous avons formulé plusieurs recommandations dans l’optique d’augmenter l’efficacité du soutien de l’UE dans ce domaine.

Rapport spécial de la Cour des comptes européenne présenté en vertu de l’article 287, paragraphe 4, deuxième alinéa, du TFUE.

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PDF Rapport spécial – Transport intermodal de marchandises

Synthèse

I Le transport intermodal de marchandises, qui consiste à transporter des marchandises dans une seule unité de chargement (comme un conteneur) en combinant plusieurs modes de transport parmi la route, le rail, les voies navigables et l’air, permet d’optimiser les points forts (flexibilité, vitesse, coûts et performance environnementale) de chacun d’entre eux. Pour la période 2014-2020, l’ensemble des financements engagés par l’UE au moyen du Fonds européen de développement régional (FEDER), du Fonds de cohésion (FC) et du mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE) en faveur de projets visant à soutenir l’intermodalité s’est élevé à environ 1,1 milliard d’euros.

II Nous avons décidé d’entreprendre cet audit dans le but d’éclairer les décideurs politiques et les parties prenantes sur l’efficacité du soutien réglementaire et financier apporté par l’UE au transport intermodal de marchandises depuis 2014. À cette fin, nous nous sommes attachés à déterminer si les objectifs en matière d’intermodalité que s’est fixés l’UE dans le cadre de sa stratégie plus large pour l’écologisation du transport de marchandises étaient bien conçus et faisaient l’objet d’un suivi adéquat. Nous avons également évalué si le cadre juridique de l’UE offrait un soutien approprié au transport intermodal de marchandises et si son réseau d’infrastructures était adapté aux besoins d’intermodalité. Nous avons réalisé notre audit dans sept États membres et examiné un échantillon de 16 projets ayant bénéficié d’un financement de l’UE jusqu’en 2020.

III Nous sommes arrivés à la conclusion que, globalement, le soutien réglementaire et financier de l’UE au transport intermodal de marchandises n’était pas suffisamment efficace, car les conditions de concurrence applicables à ce mode de transport n’étaient toujours pas équitables au sein de l’Union en raison d’obstacles réglementaires et infrastructurels. Il en résulte que le transport intermodal de marchandises ne peut toujours pas concurrencer le transport routier sur un pied d’égalité. Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas de stratégie spécifique de l’UE en matière d’intermodalité, celle-ci relevant plutôt de stratégies plus larges d’écologisation du transport de marchandises et de transfert modal.

IV La Commission n’a pas fixé de valeurs cibles quantitatives pour la part du fret intermodal, et celles établies à l’échelle de l’UE pour 2030 et 2050 en vue d’accroître le recours au rail et à la navigation intérieure pour le transport de marchandises étaient irréalistes. Ces valeurs cibles ne reposaient pas sur des simulations fiables du pourcentage de transfert modal réalisable. Nous avons également constaté que les États membres fixaient leurs valeurs cibles d’accroissement du fret ferroviaire indépendamment de celles de l’UE et à un niveau encore plus ambitieux. Le suivi, par la Commission, de la réalisation des objectifs de l’UE a été considérablement entravé par le manque de données provenant des États membres.

V La réglementation du marché est un facteur essentiel à la viabilité des choix stratégiques. Toutefois, les dispositions de la directive sur les transports combinés – le seul texte législatif de l’UE spécifique au transport intermodal – sont obsolètes. La Commission a tenté à plusieurs reprises de réviser la directive, sans obtenir l’accord des États membres. Par ailleurs, certaines dispositions réglementaires de l’UE, en particulier celles qui régissent le transport routier, ne servent qu’en partie l’objectif consistant à rendre l’intermodalité attrayante. Enfin, la Commission a pris des mesures pour simplifier les règles en matière d’aides d’État pour les régimes visant un report modal du transport routier vers le transport ferroviaire, fluvial ou multimodal.

VI Nous avons constaté que l’un des facteurs dissuadant les opérateurs logistiques d’opter pour l’intermodalité était la difficulté d’accès aux informations sur les terminaux intermodaux et sur les capacités du réseau en temps réel. En outre, bien qu’une infrastructure appropriée soit indispensable au transport intermodal, la Commission ne dispose pas d’une vue d’ensemble des terminaux existants et de ceux non encore construits ou mis à niveau pour répondre aux besoins de l’industrie. La situation pourrait s’améliorer grâce à la proposition de révision du règlement relatif au réseau transeuropéen de transport (RTE-T) présentée en 2021 par la Commission: les États membres seraient tenus d’évaluer les besoins en infrastructures de terminaux et la Commission pourrait adopter des actes d’exécution pour fixer les délais et les conditions de mise en œuvre de tronçons du réseau. Enfin, les retards pris au niveau national dans la mise en conformité des infrastructures linéaires (comme les voies ferrées ou les voies navigables intérieures) avec les exigences techniques du réseau RTE-T nuisent à la compétitivité du transport intermodal.

VII La mise en œuvre de plusieurs projets intermodaux financés par l’UE figurant dans notre échantillon a été retardée. Pour certains d’entre eux, ces retards étaient dus en particulier à la complexité de la structure de propriété des terminaux, propre à ce type de projets. De plus, le financement de l’UE accordé à des projets d’infrastructures intermodales par l’intermédiaire du mécanisme pour l’interconnexion en Europe, du Fonds européen de développement régional et du Fonds de cohésion au cours de la période 2014-2020 n’était pas lié à l’obtention de résultats spécifiques en matière de transfert modal. Enfin, nous avons constaté que le suivi de ces projets était axé sur les réalisations plutôt que sur les résultats et les impacts.

VIII Nous recommandons à la Commission:

  1. de fixer des valeurs cibles relatives à la part modale le long des corridors du réseau central et de rendre compte de leur réalisation;
  2. de préparer des modifications réglementaires en vue d’améliorer la compétitivité du transport intermodal;
  3. de jeter les bases d’une évaluation coordonnée, par les États membres, des besoins en terminaux intermodaux;
  4. de procéder à des analyses coûts-avantages des projets financés par l’UE et d’évaluer leur potentiel de transfert modal.

Introduction

Le transport intermodal optimise les points forts des différents modes de transport

01 Le transport intermodal de marchandises consiste à transporter des marchandises dans une seule unité de chargement (comme un conteneur, une caisse mobile ou une semi-remorque), sans qu’il y ait manutention des marchandises elles-mêmes, en combinant plusieurs modes de transport1 parmi la route, le rail, les voies navigables et l’air. Il s’agit donc d’un type particulier de transport multimodal. Ses caractéristiques font que les coûts de manutention du transport intermodal de marchandises sont inférieurs à ceux du transport multimodal.

02 La figure 1 illustre un trajet intermodal, la même unité de chargement étant déplacée du premier port d’entrée dans l’UE vers la destination finale des marchandises.

Figure 1 – Exemple d’une chaîne logistique de transport intermodal de marchandises

Source: Cour des comptes européenne.

03 Le transport routier est le mode de transport de marchandises le plus flexible, celles-ci étant acheminées de porte à porte. Pour de nombreux types de marchandises, il s’agit aussi souvent du moyen de transport le plus rapide et le moins cher, même sur de longues distances. En l’absence de mesures de soutien, les coûts du transport intermodal de marchandises sont en moyenne 56 % plus élevés que ceux du transport exclusivement routier2 (voir figure 2).

Figure 2 – Comparaison des coûts du transport intermodal et du transport exclusivement routier de marchandises

Remarque: Le calcul du coût du transport intermodal est basé sur un trajet rail/route moyen à long.

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de données de la Commission.

04 Le transport routier est plus rapide et plus flexible que d’autres modes de transport, tels que le rail ou la navigation intérieure, lesquels nécessitent également une infrastructure spécifique, qui ne peut être reproduite à chaque lieu d’expédition. Ces modes offrent par contre une meilleure sécurité et une performance environnementale accrue, et peuvent réduire la congestion routière. L’intermodalité consiste à tirer parti des points forts des différents modes de transport.

05 La figure 3 montre l’évolution, de 2010 à 2020, de la part relative de chaque mode de transport pour le fret intérieur (c’est-à-dire hors fret aérien et maritime). En 2010, le rail et la navigation intérieure représentaient environ 25 % de l’ensemble des modes combinés; cette part était encore plus faible en 2020, puisqu’elle s’élevait à moins de 23 %.

Figure 3 – Répartition modale du transport intérieur de marchandises dans l’UE (% du nombre total de tonnes-kilomètres)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de données d’Eurostat (code des données en ligne: tran_hv_frmod).

La décarbonation des transports passe notamment par un renforcement de l’intermodalité

06 Les émissions de gaz à effet de serre sont considérées comme une cause majeure du changement climatique. Actuellement, le secteur des transports représente un peu moins du quart des émissions de gaz à effet de serre en Europe, dont près des trois quarts (72 % en 2019) sont générés par le transport routier. Les camions et les poids lourds transportant du fret sur les routes sont responsables d’environ un quart des émissions provenant du transport routier3. La figure 4 illustre la performance environnementale des différents modes de transport en 2018 sur la base de leurs émissions de gaz à effet de serre (CO2) en grammes par tonne-kilomètre.

Figure 4 – Émissions de CO2 par mode de transport de marchandises

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de données de 2018 de l’Agence européenne pour l’environnement.

07 Un report modal du transport routier et une utilisation accrue du transport intermodal peuvent contribuer fortement à rendre le transport de marchandises en Europe plus respectueux de l’environnement. Dans un livre blanc de 2011 intitulé «Feuille de route pour un espace européen unique des transports»4, la Commission a défini pour la première fois une valeur cible pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre dues au secteur des transports, à savoir 60 % d’ici à 2050 par rapport aux chiffres de 1990. Cependant, à l’inverse des émissions de CO2 provenant d’autres secteurs économiques, celles provenant de ce secteur n’ont pas diminué mais ont au contraire augmenté de 24 % entre 1990 et 20195. Le transport effectué au moyen de véhicules utilitaires lourds a gagné en efficience au cours de cette période (tant du point de vue des véhicules que de la logistique), mais l’augmentation de la demande de transport de marchandises a partiellement annulé ces gains6.

08 En 2019, dans son dernier document stratégique sur les défis liés au climat et à l’environnement intitulé «Le pacte vert pour l’Europe»7, la Commission a appelé à une réduction encore plus importante des émissions de gaz à effet de serre provenant des transports, à savoir 90 % d’ici à 2050, afin que l’UE devienne une économie neutre pour le climat pour cette échéance, conformément aux dispositions de l’accord de Paris sur le changement climatique.

09 La Commission a ensuite publié, en 2020, sa stratégie de mobilité durable et intelligente8, qui appelle à un transfert modal substantiel en faveur du transport ferroviaire, fluvial ou maritime à courte distance. Par «transport maritime à courte distance», on entend l’acheminement de marchandises par mer entre des ports situés en Europe géographique ou entre ces ports et des ports situés dans des pays non européens ayant une façade sur une mer fermée limitrophe de l’Europe.

Pertinence du cadre réglementaire de l’UE pour le transport intermodal de marchandises et responsabilités en matière de mise en œuvre des politiques

10 Au début des années 90, les États membres ont décidé d’élaborer une politique en matière d’infrastructures de transport à l’échelle de l’UE. La Commission, et plus particulièrement sa direction générale de la mobilité et des transports (DG MOVE), est responsable de la conception, de la mise en œuvre et de l’application de cette politique. Le principal acte juridique régissant le réseau européen de transport routier, ferroviaire, fluvial, maritime et aérien de passagers et de marchandises est le règlement relatif au réseau transeuropéen de transport (RTE-T)9, dont la version actuellement en vigueur a été adoptée en 2013 (voir encadré 1).

Encadré 1

Le réseau transeuropéen de transport

Le règlement sur le réseau transeuropéen de transport (RTE-T) définit un «réseau central» d’infrastructures de transport, organisé en neuf corridors de réseau central, et deux priorités horizontales (le système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS) et les «autoroutes de la mer»), dont la mise en œuvre doit être achevée pour 2030. Il prévoit en outre le développement, d’ici à 2050, d’un «réseau global» qui vise à garantir l’accessibilité et la connectivité de toutes les régions de l’UE, y compris les régions périphériques, insulaires et ultrapériphériques.

Les cartes du réseau RTE-T figurant dans le règlement RTE-T de 2013 présentent les infrastructures linéaires (c’est-à-dire le rail, la route et les voies navigables intérieures), les ports et les emplacements où les nœuds et les terminaux sont ou devraient être situés (par exemple, lorsqu’il peut y avoir un transfert du rail vers la route ou vers un port intérieur). En outre, le règlement RTE-T contient une liste de paramètres techniques que les infrastructures de transport du réseau central devront respecter à l’horizon 2030.

Conformément aux dispositions du règlement RTE-T, la Commission a désigné un coordonnateur européen pour chacun des neuf corridors de réseau, ainsi que pour les deux priorités horizontales. Ces coordonnateurs établissent et actualisent les plans de travail des corridors, qui comprennent une analyse des investissements nécessaires (liste des projets), et font état chaque année des progrès réalisés dans un rapport.

En 2021, la Commission a présenté une proposition de révision10 du règlement RTE-T, puis une nouvelle proposition11 en 2022, après le début de la guerre d’agression menée par la Russie contre l’Ukraine. Certains des changements proposés sont susceptibles de renforcer le soutien au transport intermodal.

11 Outre le règlement RTE-T, qui porte sur des aspects relatifs aux infrastructures, d’autres actes juridiques régissant le marché des transports sont particulièrement pertinents pour le transport intermodal de marchandises:

  • la directive sur les transports combinés12 de 1992 est le seul acte législatif de l’UE spécifique au transport intermodal de marchandises. Les transports combinés constituent un type de transport intermodal caractérisé par des restrictions concernant certaines unités de transport et la distance maximale des segments routiers. La directive couvre tous les flux de transport intermodal transfrontaliers, sauf ceux qui comportent le passage d’une frontière avec un pays tiers. Les flux purement nationaux ne relèvent pas encore de son champ d’application. La directive prévoit des incitations réglementaires et financières telles que des exonérations de taxes sur les véhicules pour les opérations de transports combinés;
  • d’autres actes juridiques, en particulier ceux qui concernent le transport routier, peuvent avoir une incidence sur la compétitivité du transport intermodal. Par exemple, la directive Eurovignette13 réglemente les redevances qui peuvent être imposées aux véhicules routiers afin de tenir compte des coûts externes du transport routier.

12 Les États membres restent responsables de la transposition des directives de l’UE relatives aux transports (comme la directive Eurovignette ou celle sur les transports combinés) et de la mise en œuvre des règlements de l’UE. Il leur revient de décider de leur politique nationale des transports, qui peut être définie dans les plans nationaux en la matière. Ils déterminent ainsi quels projets d’infrastructures (concernant par exemple des terminaux intermodaux ou des voies ferrées) doivent être mis en œuvre en priorité. Ces projets sont principalement financés par les budgets nationaux/régionaux.

Financement par l’UE de projets d’infrastructures intermodales

13 Au cours de la période 2014-2020, les deux principales sources de financement de l’UE en faveur des projets d’infrastructures de transport nationaux et régionaux ont été les suivantes:

  • le Fonds européen de développement régional (FEDER) et le Fonds de cohésion (FC), dont la gestion est partagée entre la Commission et les États membres. La Commission, par l’entremise de sa direction générale de la politique régionale et urbaine (DG REGIO), approuve les programmes pluriannuels conçus par les États membres, y compris les priorités de financement, et assure le suivi de leur mise en œuvre. La sélection et la mise en œuvre de projets spécifiques cofinancés par le FEDER et le FC relèvent quant à elles des autorités de gestion nationales ou régionales;
  • le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (MIE), qui est géré directement par la Commission (DG MOVE). Celle-ci a délégué la responsabilité de l’octroi des subventions et du suivi de leur mise en œuvre à l’Agence exécutive européenne pour le climat, les infrastructures et l’environnement (CINEA).

14 Au cours de la période 2014-2020, les promoteurs de projets et les autorités n’étaient pas tenus d’utiliser un code de déclaration spécifique pour les projets soutenant le transport intermodal de marchandises, mais de tels codes existaient pour les différents modes de transport et pour la catégorie plus large du transport multimodal. Par conséquent, nous avons dû estimer le montant du financement fourni par l’UE au titre du FEDER/du FC et du MIE au cours de la période considérée. Au 1er juillet 2021, le montant engagé en faveur de ces projets s’élevait à 1 118 millions d’euros (514 millions d’euros du MIE, 175 millions d’euros du FEDER et 429 millions d’euros du FC).

15 Ces trois instruments resteront disponibles pour la période 2021-2027. De plus, de 2021 à 2026, la facilité pour la reprise et la résilience14 apporte un soutien financier supplémentaire afin d’atténuer l’impact social et économique de la pandémie de COVID-19. La facilité dispose d’un budget de 724 milliards d’euros (prix courants), qui peut être utilisé par les États membres pour financer des réformes et des projets d’infrastructures, y compris dans le domaine des transports. La répartition exacte du financement et les valeurs cibles à atteindre pour le versement de la contribution de l’UE sont détaillées dans les plans nationaux pour la reprise et la résilience. L’annexe I contient une vue d’ensemble des projets figurant dans les plans d’un certain nombre d’États membres dont nous avons établi qu’ils soutenaient l’intermodalité.

Étendue et approche de l’audit

16 Dans le présent rapport, nous évaluons l’efficacité du soutien réglementaire et financier apporté par l’UE au transport intermodal de marchandises depuis 2014. À cette fin, nous avons cherché à déterminer:

  • si les objectifs en matière de transport intermodal, fixés dans le cadre de l’écologisation du transport de marchandises, étaient bien conçus et faisaient l’objet d’un suivi adéquat;
  • si le cadre juridique de l’UE soutenait le transport intermodal de marchandises de manière appropriée et lui permettait de gagner en compétitivité;
  • si le réseau d’infrastructures de l’UE était adapté aux besoins d’intermodalité.

17 Nous avons examiné des éléments probants tirés de diverses sources.

  • Nous avons ainsi analysé les stratégies de l’UE en matière de transports, le cadre législatif et les documents stratégiques pertinents, ainsi que des rapports sur le transport intermodal de marchandises publiés par d’autres institutions supérieures de contrôle, des organismes de recherche, des associations industrielles et des universitaires.
  • Nous avons en outre analysé les stratégies nationales en matière de transports ainsi que les documents législatifs et stratégiques de six États membres (l’Allemagne, l’Espagne, la France, l’Italie, les Pays-Bas et la Pologne).
  • Nous nous sommes entretenus avec des agents des directions générales concernées de la Commission et de la CINEA, ainsi qu’avec des représentants d’organismes nationaux.
  • Nous avons rencontré des associations industrielles d’expéditeurs et d’opérateurs logistiques aux niveaux européen et national, ainsi que des agents du Forum international des transports de l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE).
  • Pour une sélection de sept États membres (les six mentionnés ci-dessus, plus la Croatie), nous avons analysé un échantillon de 16 projets ayant bénéficié d’un financement au titre du budget de l’UE au cours de la période 2014-2020 (voir annexe II). Pour certains de ces projets, nous avons effectué une visite sur place; pour d’autres, nous avons réalisé un examen documentaire.

18 La figure 5 donne une vue d’ensemble des pays et de l’échantillon de projets soutenant le transport intermodal de marchandises sur lesquels a porté notre audit.

Figure 5 – États membres et projets intermodaux sélectionnés aux fins de l’audit

Source: Cour des comptes européenne.

19 Nous avons sélectionné les États membres en fonction de l’importance des fonds du FEDER/du FC et du MIE alloués aux projets d’infrastructures intermodales au niveau national et du volume des flux de fret transfrontaliers. Les pays retenus englobent trois des principaux flux commerciaux, qui recouvrent certains tronçons des corridors RTE-T: le corridor Rhin-Alpes (allant de la Belgique et des Pays-Bas à l’Italie), le corridor Mer du Nord-Baltique (entre la Pologne et l’Allemagne) et les corridors Atlantique et Méditerranée (qui relient l’Allemagne à l’Espagne via la France).

20 Notre échantillon de projets couvre plusieurs combinaisons de modes de transport et types de soutien à l’intermodalité (comme les plateformes logistiques ou les connexions du dernier kilomètre) ainsi que différentes étapes de mise en œuvre (certains projets étant en cours, d’autres clôturés). Globalement, le montant des fonds engagés par l’UE en faveur de ces projets s’élève à 403 millions d’euros et couvre 36 % de la population concernée (voir point 14).

21 Notre audit porte sur la période écoulée depuis l’adoption par la Commission de la feuille de route pour un espace européen unique des transports, en 2011 (voir point 07), et plus particulièrement sur les investissements soutenus par l’UE au cours de la période 2014-2020.

22 Le présent rapport complète notre série de rapports traitant de certains aspects liés au transport intermodal. Notre premier rapport sur ce thème, publié en 2013, était axé sur la catégorie plus large du transport multimodal dans l’UE15. Tous nos rapports ayant trait au transport intermodal sont énumérés à l’annexe III.

23 Le présent rapport est destiné à éclairer les discussions sur les futures propositions d’actes législatifs visant à accroître la compétitivité du transport intermodal et à garantir les investissements nécessaires pour l’adapter aux défis à venir. Nous avons décidé de mener cet audit étant donné que, comme le prévoit le pacte vert pour l’Europe, la réalisation de l’objectif de l’UE consistant à réduire les émissions de gaz à effet de serre passe avant tout par la décarbonation des transports. Le transport intermodal de marchandises constitue un élément clé de cette entreprise.

Observations

Dans le cadre de l’écologisation du transport de marchandises, les objectifs en matière d’intermodalité n’ont pas été fixés de manière efficace et n’ont pas fait l’objet d’un suivi spécifique

24 Une stratégie de l’UE visant à réaliser le transfert modal pour le transport de marchandises devrait reposer sur des hypothèses solides et définir des objectifs ambitieux mais réalistes pour les différents niveaux de gouvernance concernés. Le suivi est nécessaire pour permettre aux décideurs et aux parties prenantes de vérifier si la mise en œuvre des politiques suit son cours et d’obtenir des informations sur la base desquelles déterminer si les objectifs ont été atteints16.

25 Nous avons par conséquent examiné si la Commission avait:

  • défini dans ses stratégies des valeurs cibles réalistes en matière d’intermodalité et de transfert modal pour les marchandises;
  • veillé à ce que les États membres respectent ces valeurs cibles;
  • vérifié dans quelle mesure le transport intermodal de marchandises avait contribué à la réalisation de ses objectifs de transfert modal.

Les valeurs cibles fixées par la Commission en matière d’intermodalité sont insuffisantes, et celles relatives à l’écologisation du transport de marchandises, établies en 2011 et en 2020, irréalistes

26 Pour parvenir à une politique des transports plus durable, il est essentiel d’accroître, dans le cadre des opérations correspondantes, l’utilisation de modes de transport qui génèrent moins d’émissions de CO2, à savoir le transport ferroviaire ou par voie d’eau. Cela implique à la fois un important transfert de volumes de transport entre modes et un recours accru au transport intermodal. Un tel changement devra reposer sur une combinaison de mesures réglementaires, de financements et d’actions opérationnelles tant au niveau national qu’à celui de l’UE. Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas de stratégie spécifique de l’UE en matière d’intermodalité, celle-ci relevant plutôt de stratégies plus larges d’écologisation du transport de marchandises et de transfert modal.

27 Ces stratégies – la feuille de route pour un espace européen unique des transports adoptée en 2011 et la stratégie de mobilité durable et intelligente de 2020 – définissent des valeurs cibles quantitatives en ce qui concerne le recours accru au rail et aux voies navigables intérieures, qui sont toutefois exprimées différemment (voir figure 6):

  • en 2011, la valeur cible concernait la part du fret routier circulant sur des distances supérieures à 300 km à faire passer vers d’autres modes de transport;
  • en 2020, il s’agissait d’augmenter le trafic ferroviaire et par voies navigables intérieures (transport maritime à courte distance compris).

Figure 6 – Valeurs cibles de l’UE en matière de transport durable de marchandises définies en 2011 et en 2020

Source: Cour des comptes européenne.

28 Aucun des deux documents ne fixe de valeurs cibles spécifiques de l’UE en ce qui concerne la part du transport intermodal de marchandises. Or, pour atteindre les valeurs cibles mentionnées à la figure 6, une grande partie des volumes supplémentaires acheminés par rail et par voie d’eau devrait être intermodale étant donné que le transport routier prévaut toujours en ce qui concerne le trajet initial ou terminal de la plupart des marchandises.

29 Notre analyse a montré que les valeurs cibles de la Commission ne reposaient pas sur des simulations fiables de la part de transfert modal pouvant raisonnablement être réalisée compte tenu des contraintes à long terme pesant sur les infrastructures ferroviaires et de navigation intérieure ainsi que des obstacles réglementaires à la compétitivité du transport intermodal de marchandises. À titre d’exemple:

  • l’analyse d’impact accompagnant le livre blanc de 2011 a été effectuée en partant du principe que des trains pouvant atteindre une longueur de 1 500 mètres seraient autorisés sur le réseau (alors que la longueur actuelle prévue par le règlement RTE-T est de 740 mètres);
  • l’analyse d’impact sous-jacente à la stratégie de 2020 faisait état d’un déficit d’investissement de 100 milliards d’euros par an pour la période 2021-2030, qui devrait être comblé pour que les projections correspondantes deviennent réalité. Toutefois, la Commission n’a pas précisé comment elle veillerait à ce que les États membres mettent à disposition les fonds nécessaires en temps utile.

30 En outre, les estimations de la Commission concernant les volumes de trafic ferroviaire et par voie d’eau nécessaires pour atteindre les objectifs étaient trop optimistes. Ainsi, dans le livre blanc de 2011, la Commission estimait que le trafic de fret ferroviaire augmenterait de 60 % entre 2005 et 2030 et de 87 % entre 2005 et 2050. Il est peu probable que ces prévisions se concrétisent en l’absence de nouvelles politiques, étant donné que le trafic de fret ferroviaire n’a augmenté que de 8 % au cours de la dernière décennie (de 2010 à 2019)17.

31 Comparativement aux estimations de la croissance du trafic de fret ferroviaire présentées dans le livre blanc de 2011, les objectifs de volume définis dans la stratégie de 2020 étaient plus faibles pour 2030 et plus élevés pour 2050. Étant donné la hausse limitée de la part du ferroviaire entre 2010 et 2019, les taux de croissance annuels nécessaires pour atteindre les objectifs de la stratégie de 2020 sont aujourd’hui encore plus ambitieux qu’en 2011 (voir figure 7).

Figure 7 – Volumes de fret ferroviaire: objectifs et réalité (en tonnes-kilomètres, volumes 2005 = 100)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des estimations de la Commission et des données provenant de l’ouvrage EU Statistical Pocketbook.

32 Des considérations similaires s’appliquent aux objectifs fixés pour la navigation intérieure. Dans la stratégie de mobilité durable et intelligente de 2020, l’objectif de volume pour 2030 a été revu à la baisse par rapport au livre blanc de 2011, tandis que celui pour 2050 est resté inchangé. Par conséquent, la croissance annuelle nécessaire pour atteindre l’objectif à l’horizon 2050 est encore plus importante qu’elle ne l’était en 2011 (voir figure 8).

Figure 8 – Volumes de fret fluvial: objectifs et réalité (en tonnes-kilomètres, volumes 2005 = 100)

Source: Cour des comptes européenne, sur la base des estimations de la Commission et des données provenant de l’ouvrage EU Statistical Pocketbook.

Les valeurs cibles fixées par les États membres n’étaient pas alignées sur celles, non contraignantes, de l’UE, et étaient encore plus ambitieuses

33 Les valeurs cibles de l’UE ne pourront être atteintes que si les États membres agissent en conséquence. Nous avons donc cherché à déterminer:

  • si les valeurs cibles au niveau de l’UE ont été ventilées en valeurs cibles et objectifs contraignants au niveau des États membres;
  • si la Commission a vérifié la cohérence entre les valeurs cibles et objectifs nationaux et ceux de l’UE.

34 Les valeurs cibles de l’UE fixées dans le livre blanc de 2011 et la stratégie de 2020 ne sont pas contraignantes pour les États membres. Nous avons constaté que la Commission a arrêté ces valeurs cibles et les implications qui en résultent pour les États membres sans leur aval. De fait, il ressort des conclusions du Conseil sur les deux documents stratégiques que les États membres avaient des réserves à l’égard de ces valeurs cibles (voir encadré 2). Enfin, celles-ci n’ont pas été ventilées en valeurs cibles secondaires géographiques au niveau national ou à celui des corridors.

Encadré 2

Extraits des conclusions du Conseil sur les documents stratégiques de la Commission

En ce qui concerne le livre blanc de 2011, certains États membres ont exprimé des doutes quant au caractère approprié de certaines propositions de grande envergure18, telles que les valeurs cibles concernant le transfert du transport routier vers d’autres modes de transport.

Pour ce qui est de la stratégie de 2020, les conclusions du Conseil sont restées vagues sur l’ampleur des efforts exigés au niveau national, indiquant que «les efforts visant à atteindre les objectifs en matière de réduction des émissions devraient être déployés collectivement selon le meilleur rapport coût/efficacité possible, par l’ensemble des États membres, en tenant compte de considérations d’équité et de solidarité, ainsi que des situations de départ différentes et des contextes nationaux spécifiques des États membres»19.

35 Notre analyse a montré que les six États membres couverts par notre audit ont défini des valeurs cibles nationales pour accroître le recours au transport ferroviaire. Pour trois d’entre eux, les stratégies nationales et valeurs cibles de transfert modal pertinentes ont été publiées avant la stratégie de l’UE de 2020, tandis que pour les trois autres, elles l’ont été peu après. Lorsque les valeurs cibles de l’UE et des États membres étaient comparables (pour quatre des États membres retenus dans l’échantillon, à savoir l’Allemagne, l’Espagne, la France et l’Italie), nous avons constaté que les valeurs cibles nationales concernant le taux de croissance annuel nécessaire étaient encore plus ambitieuses que celles de la Commission (voir figure 9). De plus, deux des États membres audités (l’Allemagne et les Pays-Bas), pour lesquels les voies navigables intérieures revêtent la plus haute importance, ont également fixé des objectifs en la matière. Enfin, aucun des États membres, à l’exception de la Pologne, n’avait défini de valeurs cibles en ce qui concerne la part du transport intermodal.

Figure 9 – Taux de croissance annuels: comparaison des objectifs en matière de fret ferroviaire au niveau national et à celui de l’UE

Remarque: * Le taux de croissance requis pour l’ensemble du marché du fret ferroviaire ne peut être établi en raison de la manière dont la stratégie est formulée.

Source: Cour des comptes européenne, sur la base d’une analyse des stratégies de l’UE et des États membres.

36 Nous avons constaté que dans les six cas examinés, les États membres avaient défini leurs valeurs cibles de transfert modal sur la base de leurs propres analyses et considérations politiques. Les stratégies nationales renvoyaient aux documents stratégiques de l’UE, mais leurs valeurs cibles n’étaient pas alignées sur celles de l’Union. Dans certains cas, les valeurs cibles nationales avaient été définies sur des bases différentes (par exemple, la France a fixé une valeur cible pour l’augmentation du trafic de marchandises, tandis que l’Espagne en a établi une concernant la part du rail dans le transport de marchandises). Partant, la Commission ne peut évaluer, au stade de la mise en œuvre, si les efforts concertés des États membres sont suffisants pour atteindre les valeurs cibles globales de l’UE en matière de transfert modal.

37 Enfin, nous avons également vérifié dans quelle mesure la Commission a analysé les documents stratégiques nationaux en ce qui concerne les aspects liés au transfert modal et à l’intermodalité, et nous avons formulé des observations à cet égard. Notre examen documentaire a porté sur les plans nationaux en matière de transports, les plans nationaux en matière d’énergie et de climat, les plans nationaux pour la reprise et la résilience et les accords de partenariat 2014-2020 pour les fonds de la politique de cohésion (voir annexe IV). Dans certains cas, la Commission a fourni des commentaires concernant des questions liées à l’intermodalité, mais nous n’avons trouvé aucun élément attestant la réalisation systématique de contrôles visant à garantir la cohérence des stratégies et valeurs cibles nationales de transfert modal avec celles établies au niveau de l’UE.

38 Parmi les États membres de notre échantillon, nous retenons l’exemple des Pays-Bas qui, pour atteindre leur objectif de transfert modal visant à augmenter la part des flux intermodaux, l’ont assorti de valeurs cibles spécifiques et mesurables, et ont défini la contribution des principaux corridors nationaux de fret. Cette stratégie est également liée au financement de projets d’infrastructures intermodales (voir encadré 3).

Encadré 3

Concrétisation des objectifs de transfert modal: l’approche néerlandaise

En juin 2019, le ministère néerlandais des infrastructures et de la gestion de l’eau a publié la stratégie de mobilité 2040.

Celle-ci s’accompagnait de plusieurs autres documents stratégiques, dont l’agenda pour le transport de marchandises, qui contient un plan d’action visant à subdiviser les valeurs cibles de transfert modal de la stratégie de mobilité en objectifs mesurables. Ce plan est centré sur les deux principaux corridors nationaux de fret, à l’est (du port de Rotterdam via la région d’Arnhem-Nimègue vers l’Allemagne) et au sud-est (du port de Rotterdam via la région de Venlo vers l’Allemagne), et définit des objectifs pour les volumes de fret ferroviaire et le transfert modal.

Au début de 2020, les opérateurs économiques, les universitaires et les autorités ont encore subdivisé ces objectifs en une valeur cible opérationnelle consistant à reporter 2 000 unités équivalent vingt pieds (EVP) par jour de la route vers la navigation intérieure sur les deux corridors.

En outre, le ministère a mis en place un régime incitatif pour soutenir le transfert modal durable, en finançant des projets qui doivent atteindre des valeurs cibles individuelles d’EVP.

Le suivi de la Commission est entravé par le manque de données sur le transport intermodal en provenance des États membres

39 La Commission suit l’évolution réelle de la part modale globale du transport de marchandises au moyen de statistiques sur les volumes de fret produites par Eurostat (voir encadré 4).

Encadré 4

Indicateurs Eurostat pour le transport intermodal

Sur la base de données recueillies pour chaque mode de transport (voir Statistical Pocketbook20), Eurostat établit cinq indicateurs21 pour le transport intermodal. Ces indicateurs sont centrés sur ce que l’on appelle le taux d’unitarisation, c’est-à-dire la quantité de fret, par mode de transport, circulant en unités de transport intermodal. Eurostat mesure également le potentiel de transfert modal sur la base de la part de conteneurs transportés par route sur des distances supérieures à 300 kilomètres.

Toutefois, les indicateurs ne permettent pas de suivre de manière systématique les flux de trafic intermodal et de mettre en parallèle les différents modes de transport, étant donné que les données collectées ne sont pas homogènes (par exemple, les flux sont mesurés en tonnes-kilomètres pour le transport ferroviaire, mais en tonnes pour le transport maritime).

40 En vertu de la directive sur les transports combinés, la Commission, assistée par les États membres, est tenue de faire rapport au Conseil tous les deux ans, notamment sur le développement économique des transports combinés et sur la définition, le cas échéant, de nouvelles actions de promotion22. Malgré cette exigence, seuls deux rapports de ce type ont été publiés, respectivement en 1997 et en 2002. Cela tient au fait que les États membres n’ont pas fourni les données pertinentes à la Commission.

41 Pour pallier le manque de données provenant des États membres, la Commission a pris plusieurs initiatives visant à renforcer les exigences en matière de collecte. Cependant, ces initiatives n’ont pas été soutenues par les États membres en raison du coût et de la charge administrative qui en découlaient, et n’ont finalement pas été mises en œuvre. Parallèlement, la Commission a engagé des consultants externes pour réaliser une étude de marché complète23. Cette étude, publiée en 2015 et actualisée en 2017, a mis en évidence la très mauvaise qualité et le manque de précision des données sur les marchandises transportées au moyen de services de transport combiné, ce qui empêche à l’heure actuelle toute analyse approfondie de l’activité existante, ou des possibilités de renforcer et d’étendre cette activité.

L’insuffisance ou la contre-productivité des règles de l’UE nuisent à l’attractivité du transport intermodal

42 Les cadres juridiques de l’UE et des États membres peuvent comprendre des dispositions qui encouragent ou entravent le transport intermodal. En 2020, la Commission a reconnu que «our soutenir l’écologisation des opérations de fret en Europe, le cadre existant pour le transport intermodal doit être remanié en profondeur et transformé en un instrument efficace»24. Nous avons dès lors examiné:

  • si le cadre réglementaire de l’UE en matière de transports soutenait le transport intermodal de marchandises de manière appropriée et lui permettait de gagner en compétitivité;
  • si les projets financés par des fonds nationaux ou de l’UE exploitent toutes les possibilités offertes par le cadre de l’Union en matière d’aides d’État.

Certaines dispositions juridiques de l’UE sont obsolètes, tandis que d’autres n’incitent guère à recourir à l’intermodalité

43 La directive sur les transports combinés actuellement en vigueur date de 1992 (voir point 11). La Commission a estimé qu’une révision était nécessaire dès 1998 et a présenté cette année-là une nouvelle proposition législative, qui n’a pas été approuvée par les colégislateurs. Elle a présenté près de 20 ans plus tard, en 2017, une deuxième proposition de révision qu’elle a retirée en 2020, étant donné que les modifications proposées par les colégislateurs contrecarraient en partie l’objectif initial et qu’aucun accord n’était intervenu. Au printemps 2022, la Commission a procédé à une consultation publique dans le but de présenter une nouvelle proposition de révision en 2023.

44 Les parties prenantes et les autorités nationales que nous avons interrogées ont confirmé que la version actuelle de la directive est dépassée et ne favorise pas efficacement le transport intermodal dans l’UE. Les principaux problèmes mis en évidence, que la Commission a déjà essayé d’aborder dans sa proposition antérieure, étaient les suivants:

  • le seuil minimal de 100 km pour le segment non routier, qui exclut du champ d’application de la directive les services qui relient des ports à l’arrière-pays immédiat;
  • l’obligation de disposer d’un document papier estampillé par les administrations ferroviaires ou portuaires tout au long du trajet, au lieu de recourir à un flux de travail numérisé.

45 Les parties prenantes ont fait observer que la transposition très inégale des dispositions par les États membres compliquait l’organisation des trajets transfrontaliers pour les opérateurs logistiques. À titre d’exemple, les trajets routiers entre les lieux de chargement des marchandises et la gare ferroviaire appropriée la plus proche sont couverts par la directive. Toutefois, selon une étude de la Commission25, seuls six États membres ont défini des critères permettant de déterminer la gare ferroviaire appropriée la plus proche, critères qui, de surcroît, différaient d’un État membre à l’autre.

46 Les limites de la directive, mais aussi la performance des différents modes de transport constituant la chaîne intermodale, influent sur la compétitivité de ce type de transport par rapport aux solutions de transport «exclusivement routier». L’annexe V présente les principaux obstacles réglementaires à la fluidité des trajets ferroviaires, fluviaux et maritimes à courte distance, sur lesquels la Commission a également fait rapport26.

47 Le rail est le mode de transport qui préoccupait le plus les parties prenantes, les problèmes liés à la gestion des capacités et à l’interopérabilité étant susceptibles de perdurer si aucune nouvelle mesure législative n’est prise au niveau de l’UE (notamment en ce qui concerne la planification des sillons pour le fret ferroviaire ou les règles de priorité des trains de voyageurs sur les trains de marchandises). Ces problèmes ont une incidence négative sur les performances en matière de vitesse, de ponctualité et de fiabilité des trains de marchandises sur tout le territoire de l’Union, ce qui peut inciter les opérateurs économiques à choisir d’autres modes de transport pour leur fret. La figure 10 dresse l’état de la performance du fret ferroviaire dans les six États membres sélectionnés.

Figure 10 – Performance du fret ferroviaire dans les États membres visités

Remarque: L’Allemagne (pour le fret international) et les Pays-Bas (pour le fret intérieur et international) ne communiquent pas de données sur la vitesse. L’Espagne, quant à elle, ne fait pas rapport sur la ponctualité ni sur la fiabilité du fret international.

Source: Cour des comptes européenne, sur la base de données de 2018 provenant du rapport de suivi 2020 de la Commission sur le marché ferroviaire.

48 En plus des points soulevés ci-dessus, nous avons recensé trois actes juridiques, spécifiques au transport routier, qui prévoient des exemptions ou des dispositions permettant une certaine flexibilité qui réduisent les incitations à l’intermodalité: la directive Eurovignette, la directive sur les poids et dimensions ainsi qu’un règlement adopté dans le cadre du premier train de mesures sur la mobilité.

49 Premièrement, en vertu de la directive Eurovignette, les poids lourds devraient s’acquitter de péages fondés sur la distance, conformément au principe du «pollueur-payeur». Or, les États membres peuvent toujours décider, dans des cas dûment justifiés, de ne pas instaurer de péages fondés sur la distance sur certains tronçons de l’infrastructure routière, mais d’appliquer plutôt un système de vignettes limitées dans le temps (par exemple, valables un mois) ou de ne percevoir aucun péage. Ceci est à mettre en regard avec le transport ferroviaire, pour lequel chaque service est soumis à des redevances d’accès aux voies pour l’ensemble du trajet.

50 Deuxièmement, la directive sur les poids et dimensions27 de 1996 fixe les poids et dimensions maximaux de certaines catégories de véhicules routiers (y compris les véhicules destinés au transport de marchandises et les remorques pesant plus de 3,5 tonnes). Elle comporte une mesure incitative pour les opérations de transports combinés en autorisant une longueur et un poids plus importants pour les véhicules qui effectuent la partie routière de ces trajets. Cela a pour effet de générer de plus vastes économies d’échelle et explique le poids plus élevé des unités de chargement intermodales.

51 Toutefois, la directive permet également aux États membres d’augmenter le poids maximal autorisé dans certaines opérations de transport nationales, qu’il s’agisse ou non d’un service intermodal. Au moment de l’audit, 11 États membres avaient recours à cette possibilité: ils avaient étendu le relèvement du poids autorisé pour le transport intermodal à d’autres trajets exclusivement routiers, de sorte que l’impact positif de la directive sur l’intermodalité était quasiment neutralisé.

52 En outre, nous constatons que les parties prenantes ont demandé que la directive soit modifiée pour permettre le transport routier d’unités de chargement intermodales plus longues et plus lourdes, afin d’accroître les économies d’échelle. Si une telle autorisation est accordée pour le transport routier, il s’avérera probablement impossible de transporter ces unités dans le cadre d’un trajet intermodal compte tenu des limitations existantes du réseau ferroviaire (déjà confronté à des difficultés liées à la mise en œuvre du gabarit P400; voir point 81).

53 Troisièmement, le règlement (UE) 2020/105528, adopté dans le cadre du premier train de mesures sur la mobilité, a introduit des dispositions relatives aux services de cabotage (c’est-à-dire le transport de marchandises par route, dans un État membre, par un transporteur établi dans un autre État membre). En vertu d’une disposition de la directive sur les transports combinés, les opérations de transports combinés ne sont pas soumises aux limitations applicables au cabotage. En conséquence, les transporteurs sont autorisés à organiser le segment routier d’une opération de transport combiné avec leurs propres camions ou par l’intermédiaire d’une contrepartie connue, même si ce segment se situe dans un autre État membre.

54 Selon une évaluation ex post de la Commission29, les parties prenantes ont estimé que cette disposition était la plus avantageuse de toutes les mesures incitatives prévues par la directive. Cependant, afin d’éviter que les transporteurs ne maintiennent une présence continue dans l’État membre d’accueil pour opérer au delà du cadre du transport combiné, faisant ainsi une utilisation abusive des dispositions de la directive, le nouveau règlement permet également aux États membres d’appliquer des restrictions au cabotage aux segments routiers d’une opération de transport combiné, à condition que ces segments ne traversent pas une frontière. Au moment de l’audit, le Danemark, la Finlande et la Suède avaient déjà notifié à la Commission leur intention d’avoir recours à la dérogation.

La Commission a pris des mesures pour simplifier les règles relatives aux aides d’État, mais les projets financés par l’UE n’exploitent pas toutes les possibilités offertes

55 Les subventions ponctuelles accordées à des projets individuels ainsi que les régimes de subvention sont soumis au cadre de l’UE en matière d’aides d’État s’ils remplissent les conditions de la notion d’aide telle que définie dans le traité30. En 2016, nous avions rendu compte du respect des règles relatives aux aides d’État dans la politique de cohésion31.

56 Deux principaux types d’aides sont pertinents pour les projets intermodaux:

  • les aides aux investissements dans les infrastructures, qui visent à créer des infrastructures tout en évitant les distorsions de concurrence;
  • les aides destinées à encourager le transfert modal, qui peuvent inclure à la fois des aides aux investissements dans les infrastructures et des aides au fonctionnement.

57 Lorsque ces subventions sont soumises au cadre de l’UE en matière d’aides d’État, les États membres doivent les notifier à la Commission, qui doit ensuite déterminer s’il s’agit une aide et, dans l’affirmative, si celle-ci est compatible avec le marché intérieur. La notification n’est pas obligatoire dans les cas où les aides aux investissements dans les infrastructures font l’objet d’une exemption dite «par catégorie».

58 De fait, en vertu du dernier règlement général d’exemption par catégorie32, lorsque certaines conditions s’appliquent, les investissements i) dans la construction, le remplacement ou la modernisation d’infrastructures portuaires maritimes ou intérieures et ii) dans les infrastructures d’accès aux ports sont autorisés et exemptés de l’obligation de notification. Au moment de l’audit, il n’existait aucune clause similaire pour les terminaux intermodaux situés en dehors des ports, mais ces subventions peuvent également faire l’objet d’une exemption si elles sont considérées comme des aides en faveur des infrastructures locales.

59 Afin d’éviter de fausser les conditions de concurrence entre les exploitants d’infrastructures, les règles en matière d’aides d’État exigent soit que l’infrastructure subventionnée soit mise à la disposition des utilisateurs aux conditions du marché soit, si l’intention est d’appliquer des redevances d’utilisation réduites, que la Commission évalue et approuve le régime d’aides censé encourager le transfert modal. Nous avons relevé un exemple de bonne pratique en Allemagne où, dans le cadre d’un régime d’aide financé par le budget national, les autorités fédérales accordent des subventions directes aux entreprises privées pour la construction ou l’extension de terminaux de transport combiné, dans le but explicite de réduire le coût du transbordement pour les utilisateurs finals (voir encadré 5).

Encadré 5

Le régime allemand de financement des installations de transbordement

Depuis 2002, l’Allemagne applique un régime permettant aux bénéficiaires de projets de recevoir une subvention pouvant atteindre 80 % des coûts éligibles encourus pour la construction d’un terminal.

Ce régime permet aux propriétaires de terminaux de réduire les frais d’utilisation des infrastructures. Pour limiter au maximum toute distorsion de concurrence, les autorités allemandes s’assurent du respect de certaines exigences au stade de la sélection des projets. Elles contrôlent notamment les réductions de coûts afin de s’assurer qu’elles ne dépassent pas un montant déterminé par unité de chargement. Le seuil maximal correspond à la réduction des coûts estimée nécessaire pour placer le transport combiné sur un pied d’égalité avec le transport routier.

En outre, les autorités exigent des exploitants de terminaux qu’ils fournissent des informations annuelles sur plusieurs indicateurs tels que la quantité d’unités de chargement, une prévision du trafic attendu et l’évolution des redevances de chargement. Ces informations sont analysées afin de déceler d’éventuelles distorsions du marché et prises en compte lors de l’évaluation des nouvelles demandes.

60 En ce qui concerne les projets de notre échantillon relevant du FEDER/du FC et cofinançant des infrastructures de terminaux, nous avons constaté que les autorités nationales n’examinaient pas, lors de l’évaluation des demandes, si les redevances pour services terminaux envisagées seraient suffisamment faibles pour favoriser le transfert modal ou si une subvention plus importante serait nécessaire pour couvrir les investissements en capital. Pour que les avantages de la subvention puissent être répercutés sur les utilisateurs sous forme d’une baisse des redevances, la subvention devrait être accordée dans le cadre d’un régime visant à encourager le transfert modal, approuvé par la Commission. Ainsi, si les projets visaient à améliorer les infrastructures, la possibilité de réduire les redevances en vertu d’un régime d’aides d’État notifié n’a pas été envisagée lors de leur conception.

61 En ce qui concerne les projets de notre échantillon relevant du MIE (c’est-à-dire pour lesquels les subventions ne sont pas soumises au cadre en matière d’aides d’État et, partant, aucune notification n’est requise pour fixer des redevances à un niveau qui favorise le transfert modal), nous n’avons trouvé aucune exigence imposant aux promoteurs de projets d’inclure dans leur demande une évaluation de l’impact de la subvention sur le niveau des redevances et sur le transfert modal susceptible d’être généré par le projet.

62 En plus des subventions ad hoc accordées aux infrastructures de terminaux intermodaux, les États membres ont également mis en place des régimes nationaux visant à encourager le transfert modal et à compenser les coûts intrinsèquement plus élevés du transbordement. Il en existe différents types. Soumis à l’approbation de la Commission, ils peuvent permettre:

  • de subventionner les coûts d’exploitation, notamment en abaissant la tarification du transport ferroviaire pour les trains de transport combiné (nous avons constaté l’existence de tels régimes en Allemagne et aux Pays-Bas, notamment);
  • d’octroyer des subventions pour accroître les opérations de transfert modal (voir l’encadré 6 pour un tel exemple en Italie).

Encadré 6

Le régime italien «Marebonus»

La version actuelle du régime Marebonus, lancé en 2017, fournit un soutien financier aux compagnies maritimes pour le démarrage de nouveaux services (il est doté d’une enveloppe annuelle comprise entre 19,5 et 25 millions d’euros pour la période 2021-2026). Pour être éligibles, les demandeurs doivent présenter un plan triennal, soutenu par des opérateurs économiques engagés, relatif à la mise en place de nouveaux services de fret multimodal ou à l’amélioration des services existants.

La subvention prévoit un montant maximum de 10 centimes d’euros par unité transportée (conteneur, semi-remorque ou véhicule), multiplié par le nombre de kilomètres de trajet routier évités en optant pour le transport maritime. Les compagnies maritimes sont tenues de transférer au moins 70 % de la subvention aux clients qui ont expédié 150 unités ou plus par an, et 80 % à ceux qui en ont expédié 4 000 ou plus.

Le ministère responsable a estimé que le régime avait permis de décharger les routes italiennes de 113 000 unités en 2019, soit jusqu’à 1 % du trafic de marchandises circulant sur celles-ci (mesuré en tonnes-kilomètres).

63 En décembre 2022, le Conseil a adopté un règlement33 afin de simplifier les règles relatives aux aides d’État destinées à encourager le transfert modal. Il permettra à la Commission d’adopter des règlements en vertu desquels les aides d’État en faveur du transport ferroviaire, fluvial et multimodal ne seront subordonnées ni à une notification préalable à cette dernière, ni à son appréciation ex ante, conformément à l’article pertinent du traité34.

Le réseau d’infrastructures de l’UE n’est pas encore adapté aux besoins d’intermodalité, mais la révision du règlement RTE-T est l’occasion d’améliorer la situation

64 Pour que les opérateurs économiques optent pour des solutions alternatives au transport exclusivement routier, des infrastructures physiques interopérables doivent être en place. Les terminaux de transbordement, qu’il s’agisse de plateformes intérieures ou de ports maritimes en mesure de traiter des unités de chargement de fret, c’est-à-dire de les transférer d’un mode de transport à un autre, en sont une composante essentielle.

65 La compétitivité d’un trajet intermodal dépend non seulement de l’emplacement et de l’accessibilité des terminaux, mais également de l’efficience des modes de transport concernés pris individuellement. De plus, les entreprises de transport devraient être en mesure de dégager rapidement des solutions de remplacement en cas d’impossibilité de recourir à un mode de transport (lorsqu’une voie navigable intérieure a un niveau d’eau trop bas, par exemple), afin de garantir la fiabilité du trajet intermodal et d’éviter un transfert modal inversé vers la route, un mode de transport intrinsèquement plus flexible.

66 Nous avons examiné:

  • si les opérateurs logistiques disposaient d’informations facilement accessibles sur les terminaux intermodaux existants et sur les capacités du réseau, leur permettant de planifier un trajet efficient;
  • si la Commission avait une vue d’ensemble des besoins en infrastructures de terminaux;
  • si des progrès suffisants ont été accomplis dans l’amélioration des infrastructures linéaires pour stimuler le transport intermodal;
  • si les projets financés par l’UE ont été utilisés pour renforcer le transfert modal.

La difficulté d’accès aux informations sur les terminaux intermodaux existants empêche les opérateurs de proposer à leurs clients le meilleur trajet intermodal possible

67 Nous avons constaté qu’il n’était pas facile d’accéder, pour une grande partie du réseau, à des informations électroniques concernant, par exemple, l’emplacement des terminaux et les services disponibles, ainsi que la capacité des terminaux en temps réel. Cela dissuade les opérateurs logistiques d’opter pour l’intermodalité, car ils doivent consacrer davantage de temps et de moyens à la collecte des informations nécessaires à l’élaboration de nouveaux trajets intermodaux pour leur fret.

68 En 2015, la Commission a mis en place un groupe d’experts, le Forum sur le numérique dans les transports et la logistique, pour s’attaquer à ce problème. Ce groupe a été chargé d’élaborer des recommandations techniques sur la manière de structurer les flux d’informations, tant entre les entreprises et les administrations publiques qu’interentreprises, et devait publier ses recommandations avant la fin de 2022. Cependant, dans l’intervalle, pour faire progresser la transformation numérique de la chaîne logistique, les États membres ont commencé à développer leurs propres solutions nationales, qui présentent des différences au niveau des structures de gouvernance et des informations collectées. Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas d’une vue d’ensemble complète des actions menées par les États membres en ce qui concerne les plateformes numériques nationales.

69 La Commission a également tenté de remédier au manque d’informations accessibles sur les terminaux dans le domaine du transport ferroviaire: elle a lancé en 2015, en complément d’autres outils, un site internet permettant aux exploitants de terminaux de publier des informations actualisées sur leurs installations, comme l’exige la législation de l’UE applicable35. Toutefois, les opérateurs n’ont communiqué que des données limitées. De fait, ils n’ont aucune obligation de fournir des données sur ce site dédié, même s’ils sont bénéficiaires d’un financement de l’UE. En 2020, la Commission a transféré la propriété du site internet à l’industrie (une association de gestionnaires d’infrastructure ferroviaire et d’organismes de répartition), tout en continuant à soutenir financièrement le développement du portail.

70 À ce jour, le site internet recense l’emplacement de plus de 10 000 installations de fret ferroviaire dans l’UE, dans l’Espace économique européen et ailleurs (y compris en Turquie et au Royaume-Uni). Cependant, pour la plupart des installations, seuls sont indiqués le nom et les coordonnées du propriétaire ainsi qu’un lien vers le site internet du terminal. Ainsi, aucune information n’est fournie sur la technologie de chargement des terminaux et les caractéristiques de l’infrastructure (telles que le plan des voies), les conditions d’accès, les capacités numériques ou les redevances d’utilisation des services. De même, aucune information en temps réel sur la capacité disponible dans les terminaux n’est donnée. Compte tenu de ce qui précède, nous estimons que le site internet présente actuellement une utilité limitée.

71 Au niveau national, nous avons constaté l’existence, dans deux des six États membres dans lesquels nous nous sommes rendus (l’Allemagne et les Pays-Bas), d’une carte numérique destinée aux opérateurs logistiques détaillant l’emplacement des terminaux intermodaux sur leur territoire.

La Commission ne dispose pas d’une vue d’ensemble des besoins en terminaux

72 Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas d’une vue d’ensemble des terminaux existants et de ceux non encore construits ou mis à niveau pour répondre à la demande du marché, c’est-à-dire dans l’optique de fournir aux opérateurs logistiques l’infrastructure appropriée pour leur permettre d’offrir des solutions de transport intermodal à leurs clients.

73 Le règlement RTE-T de 2013 n’exige d’analyse ni i) du caractère approprié des terminaux intermodaux existants au regard des flux actuels et potentiels de trafic de marchandises ni ii) des besoins de nouveaux terminaux. En 2020, l’Union internationale des chemins de fer (UIC) a réalisé une analyse de l’emplacement des terminaux existants, qui a montré des différences de densité importantes au niveau de l’UE (voir figure 11).

Figure 11 – Densité des terminaux intermodaux par pays

Source: Cour des comptes européenne, sur la base du rapport de l’Union internationale des chemins de fer intitulé 2020 Report on Combined Transport in Europe.

74 Le règlement RTE-T de 2013 n’impose pas non plus de recueillir des informations sur la transformation numérique des infrastructures de terminaux. Plus le degré de conversion au numérique est élevé, plus les opérateurs logistiques sont à même de partager efficacement les informations tout au long de la chaîne logistique et d’éviter les retards dus à l’insuffisance de la capacité des terminaux ou à l’indisponibilité des services de transbordement. Le manque d’informations empêche la Commission de procéder à une évaluation approfondie de la capacité de l’infrastructure à gérer efficacement les flux intermodaux de fret. Parmi les corridors traversant les États membres dans lesquels nous nous sommes rendus, il n’y a que pour le corridor Scandinavie-Méditerranée que les systèmes numériques dans les terminaux sont recensés.

75 La Commission a pris des mesures pour remédier à la situation en incluant des dispositions pertinentes concernant à la fois l’emplacement et la transformation numérique des terminaux dans sa proposition de révision du règlement RTE-T de 2021, qui est toujours en cours de procédure législative. Les États membres devront mener une étude de marché en matière de transport, qu’ils devront communiquer à la Commission, recenser les principaux flux de trafic et les terminaux intermodaux existants, et évaluer les besoins de nouveaux terminaux. L’étude devra être accompagnée d’un plan d’action pour le développement d’un réseau de terminaux de fret multimodaux.

76 La Commission a également inclus une nouvelle disposition pour la période 2021-2027 dans le règlement portant dispositions communes36, qui régit notamment le FEDER et le FC. Alors qu’au cours de la période 2014-2020, seule l’obligation plus générale de présenter des plans de transport37 était imposée, en vertu du nouveau règlement, les États membres dont les programmes prévoient des investissements dans les transports sont tenus de présenter une carte multimodale des infrastructures existantes et prévues indiquant également l’emplacement des terminaux. Dans la mesure où la Commission a décidé de ne fournir aucune orientation à cet égard aux États membres, les plans présentés par ces derniers varient considérablement, ce qui rend toute analyse horizontale au niveau de l’UE difficile et laborieuse.

Les retards des États membres dans la mise en conformité des infrastructures linéaires avec les exigences techniques nuisent à la compétitivité de l’intermodalité

77 Alors que les besoins en matière d’infrastructures linéaires et d’exigences techniques (écartement des voies, gabarit de chargement, vitesse de ligne, etc.) sont évalués et les listes de projets établies au niveau de l’UE (voir encadré 1), c’est aux États membres qu’il appartient de décider si ces projets seront mis en œuvre, et quand.

78 La Commission a inclus dans sa proposition de révision du règlement RTE-T de 2021 de nouvelles dispositions visant à renforcer son rôle dans le développement des corridors de réseau. En particulier, pour chaque plan de travail des corridors, elle peut adopter des actes d’exécution contraignants pour les États membres concernés. Cela devrait permettre de fixer des délais et des conditions spécifiques pour le développement des corridors. La proposition donne également à la Commission la possibilité d’adopter des actes d’exécution pour la mise en œuvre de tronçons particuliers des corridors, notamment pour celle de tronçons transfrontaliers complexes ou d’exigences spécifiques en matière d’infrastructures de transport.

79 Bien que des progrès aient été accomplis au cours des dernières années en ce qui concerne le développement des infrastructures et le respect des paramètres techniques, des problèmes d’interopérabilité et des goulets d’étranglement subsistent. Le dernier rapport bisannuel de la Commission38 sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du RTE-T (couvrant les années 2018 et 2019) a montré que, si le taux de respect de la majorité des paramètres techniques faisant l’objet d’un suivi (10 sur 14) était supérieur à 75 %, les performances étaient nettement moins bonnes pour deux paramètres particulièrement importants pour l’intermodalité. Ceux-ci concernent la possibilité d’exploiter des trains de marchandises:

  • d’une longueur totale supérieure à 740 mètres, afin de tirer parti des économies d’échelle;
  • au gabarit P400, afin de permettre le transport des conteneurs de grandes dimensions. Bien qu’il n’existe aucune exigence relative à un gabarit de chargement ferroviaire supérieur à P400 (une norme de mesure utilisée pour les semi-remorques chargées sur un wagon-poche), cet indicateur fait néanmoins l’objet d’un suivi.

80 Selon les parties prenantes que nous avons consultées, dans une optique de concurrence du transport routier, l’exploitation de trains de 740 mètres de long constituerait l’un des moyens d’améliorer le transfert modal présentant le meilleur rapport coût-efficacité. Cela a également été souligné dans la déclaration ministérielle de Rotterdam de 201039. Cependant, des trains d’une longueur de 740 mètres ne sont théoriquement exploitables que sur 53 % de ces corridors, taux qui de surcroît, comme l’a indiqué la Commission, a probablement été surestimé40. À titre d’exemple, certains tronçons ferroviaires peuvent être considérés comme compatibles, sur le plan technique, avec un train d’une longueur de 740 mètres, même si les trains de cette longueur ne peuvent y être exploités en permanence. En outre, un grand nombre de terminaux ne disposent pas encore de voies de transbordement pour les trains de 740 mètres de long, ce qui donne lieu à des manœuvres fastidieuses.

81 Un autre élément positif de la proposition de révision du règlement RTE-T de la Commission est l’introduction d’une exigence d’utilisation du gabarit ferroviaire P400 par les lignes de fret afin de permettre le transport des conteneurs de grandes dimensions. Bien que cette fonctionnalité favorise fortement l’intermodalité, elle n’est actuellement utilisable que sur 40 % des corridors du réseau central. Sur les six États membres dans lesquels nous nous sommes rendus, le respect de la norme P400 était particulièrement faible en Espagne (6 %), en France (25 %), en Pologne (36 %) et en Italie (43 %)41. La mise en œuvre intégrale de la proposition nécessitera donc d’importants investissements et des exercices de priorisation de la part des États membres.

82 Enfin, nous notons que plusieurs goulets d’étranglement peuvent être présents sur le même axe et concerner tous les modes de transport. De plus, même les tronçons conformes peuvent devenir des goulets d’étranglement en raison de circonstances extérieures imprévues (niveaux d’eau extrêmes, accidents, etc.). L’encadré 7 fournit quelques exemples pour le corridor Rhin-Alpes.

Encadré 7

Exemples de facteurs limitant les trajets intermodaux le long du corridor Rhin-Alpes

Le corridor Rhin-Alpes relie les ports de la mer du Nord en Belgique et aux Pays-Bas au port méditerranéen de Gênes, en traversant la Suisse. Il s’agit du corridor pour lequel la part de transport non routier est la plus importante de l’UE: environ 50 % des volumes annuels de fret le long du corridor (soit 138 milliards de tonnes-kilomètres) sont transportés par bateau, tandis que la part du rail s’élève à 16 %. Le transport routier représente les 34 % restants42. Cette situation est notamment due au fait que la réglementation suisse limite le trafic routier de marchandises.

Le transport de conteneurs représente 9 % du fret total transporté sur le Rhin entre Bâle et la frontière germano-néerlandaise. De 2009 à 2017, ce volume a augmenté de 27 % (passant de 13,3 millions à 16,9 millions de tonnes)43. Pour augmenter la capacité fluviale, un projet, classé prioritaire, visant à porter la profondeur du chenal navigable de 1,90 m à 2,10 m a été inclus dans le plan de transport allemand44. Ce projet en est actuellement au stade de la planification initiale, et aucune date n’a encore été fixée pour son achèvement.

En outre, comme cela a encore été le cas en 2022, les sécheresses et les faibles niveaux d’eau qui en résultent peuvent avoir une incidence considérable sur la navigabilité de différentes sections fluviales. En 2018, une grave sécheresse avait entraîné une baisse du trafic de conteneurs de 13 %.

Une option pourrait consister à reporter davantage de fret de la route vers le rail le long du corridor, ou à recourir au transport ferroviaire comme solution de remplacement en cas de sécheresse. Cependant, le réseau ferroviaire le long du Rhin en Allemagne et en France ne dispose actuellement pas de la capacité suffisante à cet effet. En outre, en 2018, des travaux prévus de mise à niveau du réseau côté allemand ont causé l’effondrement d’un tunnel, créant un goulet d’étranglement supplémentaire. Des travaux visant à accroître la capacité sont en cours sur le même tronçon, et devraient être achevés en 204145.

Les projets financés par l’UE ne comportaient pas systématiquement d’estimation des résultats en matière de transfert modal, qui ne font par ailleurs pas l’objet d’un suivi à long terme

83 Au cours de la période 2014-2020, le FEDER/le FC et le MIE ont apporté un soutien à l’intermodalité, principalement en finançant des projets d’infrastructures, tels que des terminaux de transbordement (voir photo 1) ou des infrastructures de transport linéaires (voies ferrées, connexions routières du dernier kilomètre, etc.). Afin de garantir que les projets financés par l’UE contribuent de manière efficace et durable à un transfert modal du trafic routier de marchandises, il convient de les planifier et d’en surveiller les effets à long terme. En conséquence, nous avons évalué la planification et le suivi des projets de notre échantillon.

Photo 1 – Construction de grues de chargement dans un terminal intermodal cofinancé par l’UE en Pologne

Source: Cour des comptes européenne.

84 Une fois que les demandeurs ont soumis leurs propositions de projet, la CINEA (pour le MIE) ou l’autorité de gestion compétente (pour le FEDER/le FC) organise une procédure de sélection pour déterminer quels projets retenir en vue d’un financement. Pour les projets relevant du MIE, les demandeurs sont tenus de décrire les incidences positives et négatives attendues sur le transfert modal. L’examen de notre échantillon de projets soutenant l’intermodalité a révélé que seulement 9 des 15 demandes comportaient une section sur les résultats escomptés en matière de transfert modal à l’issue de la mise en œuvre du projet (par exemple, une estimation du nombre de tonnes transférées de la route au rail grâce au projet). Bien que le transfert modal constitue l’une des principales retombées positives attendues des projets intermodaux, il n’était pas obligatoire d’en inclure une estimation quantifiée dans les demandes, et aucune des conventions de subvention ne mentionnait la valeur cible correspondante parmi les objectifs à atteindre.

85 Comme nous l’avons indiqué dans le passé, la mise en œuvre de projets de transport connaît souvent des retards46. Pour les 16 projets de notre échantillon, nous avons observé que le retard était considérable dans un certain nombre de cas:

  • au moment de l’audit, suivant leurs plans initiaux, dix projets auraient dû être achevés. Seulement six d’entre eux l’étaient. Pour quatre, les résultats escomptés ont été atteints, tandis que deux ont été finalisés avec une portée réduite, ce qui peut entraîner un déséquilibre entre les services terminaux construits dans le cadre des projets et la demande correspondante (voir tableau 1);
  • par ailleurs, 14 projets ont connu des retards atteignant 21 mois en moyenne. Ces retards étaient dus à différents facteurs, notamment la longueur des procédures de planification et l’impact de la pandémie de COVID-19. Étant donné que dix projets (dont neuf ont été retardés) n’étaient pas finalisés à la fin de notre audit, nous n’avons pas pu évaluer la mesure dans laquelle leurs objectifs avaient été atteints.

Tableau 1 – Retards de mise en œuvre des six projets achevés de notre échantillon

Objectif du projet Achevé comme prévu? Retard (en mois)
Nouveau terminal intermodal dans le port de Rijeka (Croatie): construction d’une voie ferrée et reconstruction d’une gare de triage Oui

Les coûts ont été inférieurs à ceux estimés au moment de la passation des marchés car des économies ont été réalisées.
12
Mise à niveau de l’infrastructure du port de Rijeka (Croatie): extension du mur de quai, reconstruction de la partie fret de la gare ferroviaire et construction d’une gare de triage Oui 21
Construction d’un terminal rail-route à Badajoz (Espagne) et d’une zone logistique environnante Non, réduction de la portée

Le terminal rail-route a été construit avec la capacité opérationnelle planifiée, tandis que la zone de la plateforme logistique a été réduite de 58 % par rapport aux prévisions. La demande pour le terminal risque donc d’être insuffisante. Pour parer à ce risque, le bénéficiaire a lancé un nouveau projet, cofinancé par le FEDER, afin d’achever la zone de la plateforme logistique. Ce projet devrait être finalisé d’ici septembre 2023.
24
Amélioration des connexions routières et ferroviaires existantes dans l’avant-port de Gdańsk (Pologne) Oui 5
Achat de wagons porte-conteneurs pour la réalisation de connexions intermodales à Poznań (Pologne) Oui -
Mise à niveau des postes de mouillage et des installations de manutention et de stockage des véhicules routiers dans les ports de Rostock (Allemagne) et de Hanko (Finlande) – autoroute de la mer Baltique Non, réduction de la portée

Il n’a pas été possible d’acquérir le nouvel espace destiné à la manutention et au stockage dans le port de Rostock. Les postes de mouillage ont toutefois été mis à niveau comme initialement prévu, ce qui a permis d’augmenter la capacité. Il pourrait en résulter un nouveau goulet d’étranglement si l’installation de manutention et de stockage existante s’avère insuffisante.
9

Source: Cour des comptes européenne.

86 Par rapport aux projets portant sur un mode de transport unique, les projets intermodaux nécessitent davantage de coordination, car les propriétaires des infrastructures à connecter peuvent être aussi bien des entités publiques que privées, ayant chacun leurs priorités et processus de planification propres. Ces difficultés ont engendré des retards de mise en œuvre, comme le montrent les exemples de l’encadré 8.

Encadré 8

Exemples de problèmes de coordination

  1. Le port de Trieste est le port italien vers lequel et hors duquel la proportion de conteneurs transportés par chemin de fer est la plus élevée (52 % en 2020). L’UE (via le MIE) a financé la mise à niveau de l’infrastructure ferroviaire dans la zone de manœuvre portuaire (voir photo 2) et le déploiement de solutions informatiques liées au fret. La propriété de l’infrastructure est partagée entre l’autorité portuaire et le gestionnaire national de l’infrastructure ferroviaire. Au cours de la mise en œuvre du projet, ceux-ci ont décidé de s’associer et de modifier sa conception dans le but d’accroître l’efficacité des opérations. Cela explique en partie les retards constatés.

    Photo 2 – Zone de manœuvre du port de Trieste

    Source: Cour des comptes européenne.

  2. L’UE (via le MIE) a financé la mise à niveau des installations de transport intermodal dans un terminal trimodal de fret du port de Rotterdam, le premier port de l’UE pour ce qui est des tonnes manutentionnées. Le terminal appartient à des actionnaires privés de différents pays. Les travaux ont été retardés de deux ans en raison i) de changements prévus dans la structure de propriété du terminal, qui sont intervenus après l’approbation du financement et n’ont pas encore été mis en œuvre, et ii) de la crise liée à la COVID-19 et de problèmes d’octroi d’autorisation. Au moment de l’audit, la décision finale d’expansion était suspendue dans l’attente de l’accord des actionnaires.

87 En ce qui concerne le MIE et le FEDER/le FC, nous avons constaté que la CINEA et les autorités de gestion assuraient un suivi des réalisations des projets, mais qu’elles ne recueillaient pratiquement aucune donnée sur les résultats et les impacts de l’infrastructure (sur le nombre de tonnes effectivement transférées de la route vers des modes de transport moins polluants, par exemple). En outre, des évaluations ex post des résultats et des impacts n’étaient pas systématiquement réalisées. Certes, la concrétisation des résultats et des impacts prend du temps, mais la réalisation insuffisante d’évaluations ex post a entravé le repérage des bonnes pratiques et des défis communs en matière de financement de projets intermodaux. Cela corrobore des constatations antérieures de la Cour47.

Conclusions et recommandations

88 Nous arrivons à la conclusion que, globalement, le soutien réglementaire et financier de l’UE au transport intermodal de marchandises n’a pas été suffisamment efficace, car les conditions de concurrence entre ce mode de transport et le transport routier ne sont toujours pas équitables au sein de l’Union. Cela s’explique par i) des faiblesses dans la définition et le suivi des valeurs cibles de l’UE en matière de transport intermodal, dans le contexte de l’écologisation du transport de marchandises; ii) des dispositions réglementaires qui ne servent pas l’objectif consistant à encourager le transport intermodal; et iii) des difficultés liées au développement des terminaux et des infrastructures linéaires. La compétitivité du transport intermodal de marchandises dans l’UE ne pourra être renforcée que si ces problèmes sont réglés rapidement.

89 Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas de stratégie spécifique de l’UE en matière d’intermodalité, celle-ci relevant plutôt de stratégies plus larges d’écologisation du transport de marchandises et de transfert modal, à savoir la feuille de route pour un espace européen unique des transports et la stratégie pour une mobilité durable et intelligente, adoptées respectivement en 2011 et 2020. Ces stratégies comportaient des valeurs cibles visant à accroître la part des modes de transport durables, mais aucune concernant le transport intermodal. Ces valeurs cibles de l’UE restent par ailleurs irréalistes. En effet, les hypothèses sous-jacentes n’étaient pas fondées sur des simulations fiables de la part de transfert modal pouvant raisonnablement être réalisée, compte tenu i) des contraintes à long terme pesant sur les infrastructures ferroviaires et de navigation intérieure ainsi que ii) des obstacles réglementaires à la compétitivité du transport intermodal (voir points 26 à 32).

90 En outre, les valeurs cibles fixées au niveau de l’UE n’ont pas été avalisées par les États membres et n’ont pas été ventilées en valeurs cibles applicables au niveau national ou à celui des corridors. Les États membres ont élaboré leurs propres stratégies de transfert modal et ont fixé leurs propres valeurs cibles indépendamment des valeurs cibles correspondantes de l’UE et à un niveau encore plus ambitieux. La Commission n’a pas systématiquement contrôlé la cohérence de ces stratégies avec les objectifs de l’UE, en raison notamment de l’éventail de valeurs cibles nationales et d’échéances fixées pour les atteindre (voir points 33 à 38).

91 Enfin, le suivi par la Commission de la contribution de l’intermodalité à la réalisation des valeurs cibles de l’UE en matière d’écologisation du transport de marchandises a été considérablement entravé par un manque de données provenant des États membres (voir points 39 à 41).

Recommandation n° 1 – Fixer des valeurs cibles relatives à la part modale le long des corridors du réseau central et rendre compte de leur réalisation

La Commission devrait:

  1. définir, en étroite coopération avec les États membres concernés, des valeurs cibles pour chaque corridor de réseau central en ce qui concerne la part modale des flux de trafic de marchandises, flux intermodaux compris;
  2. exiger des coordonnateurs européens qu’ils rendent compte de la réalisation de ces valeurs cibles et recensent les investissements nécessaires à leur respect;
  3. améliorer la collecte de données nationales sur le transport intermodal de marchandises, en collaboration avec Eurostat et les instituts nationaux de statistique, notamment en évaluant la nécessité d’inclure des exigences en matière de fourniture des données dans un acte législatif.

Quand? D’ici à fin 2024 pour les points a) et b) et d’ici à fin 2026 pour le point c).

92 La réglementation du marché est un facteur essentiel à la viabilité des choix stratégiques. Toutefois, les dispositions de la directive sur les transports combinés – le seul texte législatif de l’UE spécifique au transport intermodal – sont obsolètes. De plus, la transposition inégale, par les États membres, de certaines dispositions constituait pour les opérateurs logistiques un facteur d’incertitude. La Commission a tenté à plusieurs reprises de réviser la directive, sans obtenir l’accord des États membres (voir points 43 à 45).

93 Les exemptions ou options applicables au transport routier prévues par le cadre juridique de l’UE vont à l’encontre d’autres dispositions visant à encourager l’intermodalité. En outre, en ce qui concerne le cadre réglementaire de l’Union spécifique au transport ferroviaire, les problèmes liés à la gestion des capacités et à l’interopérabilité risquent de perdurer si aucune nouvelle mesure législative n’est prise (voir points 46 à 54).

94 La Commission a entrepris de simplifier davantage le cadre de l’UE en matière d’aides d’État, qui est applicable lorsque les subventions accordées répondent à la notion d’aide telle qu’énoncée dans le traité. En 2022, le Conseil a adopté un règlement visant à poser des jalons en vue d’exempter de cette procédure les mesures permettant un transfert modal du transport routier. Les exemptions s’appliqueraient au transport ferroviaire, fluvial et multimodal (voir points 55 à 63).

95 L’insuffisance i) des informations accessibles au public sur les terminaux intermodaux existants et les services qui y sont proposés ainsi que ii) des informations en temps réel sur les capacités du réseau est un facteur qui empêche les expéditeurs et les opérateurs logistiques d’offrir à leurs clients les meilleurs trajets intermodaux possibles. Alors que la Commission travaille à l’élaboration de normes techniques communes concernant la numérisation des flux d’informations, les États membres développent déjà leurs propres plateformes logistiques, qui ne collectent toutefois pas toutes les mêmes informations. En outre, une tentative de la Commission de créer en 2015 un site internet de l’UE contenant des informations sur les terminaux ferroviaires a donné des résultats mitigés, car les exploitants de terminaux n’ont communiqué que des données limitées (voir points 67 à 71).

Recommandation n° 2 – Préparer des modifications réglementaires en vue d’améliorer la compétitivité du transport intermodal

La Commission devrait préparer une révision du cadre réglementaire:

  1. pour le transport ferroviaire, afin de supprimer les obstacles réglementaires existants de façon à le rendre compétitif par rapport au transport exclusivement routier. En particulier, des dispositions sont nécessaires en ce qui concerne la gestion des capacités, afin de mieux répondre aux besoins des services de fret, ainsi que de réglementer les normes techniques et opérationnelles actuellement définies au niveau national;
  2. pour le transport combiné, avec l’élargissement de son champ d’application au transport intermodal, et le transport exclusivement routier. Ces révisions devraient viser à réduire les écarts de mise en œuvre du cadre réglementaire par les États membres, inclure des dispositions sur la numérisation des flux d’informations et renforcer les incitations au transport intermodal par rapport au transport exclusivement routier.

Quand? D’ici à fin 2024.

96 Nous avons constaté que la Commission ne disposait pas d’une vue d’ensemble des terminaux existants et de ceux non encore construits ou mis à niveau pour répondre aux besoins de l’industrie. Nous avons également observé que la non-conformité de certains tronçons du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) avec des exigences techniques spécifiques, telles que la possibilité d’exploiter des trains de 740 mètres de long, continuait de limiter le potentiel de renforcement du transport intermodal (voir points 72 à 82).

97 La situation pourrait s’améliorer grâce à la proposition de révision du règlement RTE-T présentée en 2021 par la Commission: les États membres seraient tenus d’évaluer les besoins en infrastructures de terminaux (étude de marché) et la Commission pourrait adopter des actes d’exécution pour fixer les délais et les conditions de mise en œuvre de tronçons du réseau (voir points 72 à 82).

Recommandation n° 3 – Jeter les bases d’une évaluation coordonnée, par les États membres, des besoins en terminaux intermodaux

La Commission ne devrait pas se limiter à la proposition de révision du règlement RTE-T de 2021, mais également fournir aux États membres des orientations claires sur la manière i) de réaliser l’étude de marché et ii) d’élaborer un plan de développement des terminaux, en particulier en ce qui concerne les aspects transfrontaliers et les corridors du réseau central.

Quand? 12 mois après l’entrée en vigueur du nouveau règlement RTE-T.

98 La mise en œuvre de projets de transport connaît souvent des retards: tel était le cas pour 14 des 16 projets soutenant l’intermodalité compris dans notre échantillon. Nous avons constaté que ces retards étaient imputables non seulement à des causes telles que la longueur des procédures de planification et l’impact de la pandémie de COVID-19, mais également à la nécessité de coordonner les différents acteurs publics et privés, une caractéristique spécifique des projets intermodaux (voir points 83 à 87).

99 Les promoteurs de projets soutenant l’intermodalité qui ont bénéficié d’un financement soit de la Commission au titre du mécanisme pour l’interconnexion en Europe, soit des autorités de gestion par l’intermédiaire du Fonds européen de développement régional ou du Fonds de cohésion au cours de la période 2014-2020, n’étaient pas tenus d’estimer les résultats spécifiques en matière de transfert modal dans leurs demandes. Certains promoteurs de notre échantillon ont tout de même fourni de telles estimations, mais elles n’apparaissaient pas comme valeurs cibles dans les conventions de subvention. Le suivi des projets intermodaux financés par l’UE met l’accent sur les réalisations plutôt que sur les résultats et les impacts. Par conséquent, la concrétisation des résultats et impacts prenant du temps, il n’est pas toujours possible de repérer les bonnes pratiques et les défis en matière de financement des projets intermodaux (voir points 83 à 87).

100 Bien que l’UE accorde des subventions aux infrastructures de terminaux intermodaux afin de réduire les coûts d’investissement des propriétaires, nous avons constaté, pour les projets de notre échantillon, que les demandes de projet ne devaient pas obligatoirement comporter une évaluation du caractère approprié de la subvention au regard du niveau des redevances envisagé et du transfert modal susceptible d’être généré par le projet. Il s’agit là d’une occasion manquée de renforcer la compétitivité des services de fret intermodal (voir points 55 à 61).

Recommandation n° 4 – Évaluer le potentiel de transfert modal dans les analyses coûts-avantages des projets financés par l’UE

Afin de stimuler davantage le transfert modal par des projets financés par l’UE, la Commission devrait:

  1. exiger des bénéficiaires de projets financés par le mécanisme pour l’interconnexion en Europe (gestion directe) et axés sur le transfert modal (en particulier les infrastructures portuaires ou de terminaux) qu’ils incluent dans l’analyse coûts-avantages qu’ils doivent déjà obligatoirement joindre à la demande de subvention une estimation quantifiée de la capacité du projet à générer un transfert modal ainsi que du niveau des redevances nécessaire pour induire ce transfert;
  2. pour les projets en gestion partagée, promouvoir les concepts visés au point a) auprès des autorités de gestion, en particulier lors de la conception des programmes opérationnels, ainsi qu’auprès des comités de suivi des programmes.

Quand? D’ici à fin 2023.

Le présent rapport a été adopté par la Chambre II, présidée par Mme Annemie Turtelboom, Membre de la Cour des comptes, à Luxembourg en sa réunion du 15 février 2023.

 

Par la Cour des comptes,

Tony Murphy
Président

Annexes

Annexe I – Réformes et investissements principaux liés à l’intermodalité figurant dans les plans pour la reprise et la résilience des États membres sélectionnés aux fins de l’audit

État membre Description de la réforme (R) ou de l’investissement (I) (R)/
(I)
Budget (en millions d’euros) Échéance
France Révision de la loi d’orientation des mobilités et actualisation de la programmation financière et opérationnelle des investissements publics dans les infrastructures de transport R s.o. T4/2023
Rénovation et modernisation des voies navigables, y compris les écluses et les barrages (100 projets) I 1001 T4/2024
Rénovation de 330 km de lignes de fret au total I 40 T4/2025
Allemagne Nous n’avons pas recensé de réformes/d’investissements contribuant directement à l’intermodalité dans le plan national pour la reprise et la résilience.
Italie Simplification du processus de planification stratégique dans les ports R s.o. T4/2022
Transformation numérique du réseau de chaînes logistiques des ports et des terminaux de fret I 47 T2/2024
Construction de 663 km de lignes ferroviaires à grande vitesse opérationnelles pour les passagers/le fret I 14 750 T2/2026
Système ERTMS opérationnel sur 4 800 km du réseau ferroviaire I 2 970 T2/2026
Pays-Bas Déploiement du système européen de gestion du trafic ferroviaire (ERTMS); 130 stations émetteurs-récepteurs de base (pylônes GSM-Rail); livraison des systèmes adaptés aux utilisateurs; déploiement d’un système central de sécurité opérationnel I 149 T4/2024
Développement d’une infrastructure de données de base et taux de préparation au numérique de 30 % du secteur néerlandais de la logistique I 36 T4/2025
Espagne Adoption et publication de la stratégie indicative ferroviaire, laquelle prévoit des actions en faveur de l’intermodalité et la stimulation du trafic ferroviaire de marchandises R s.o. T4/2022
Mise à niveau de 1 400 km de lignes ferroviaires sur les corridors du réseau central RTE-T (renouvellement des voies, électrification, ERTMS, etc.) I 2 988 T2/2026
Mise à niveau de 900 km du réseau ferroviaire global afin de le rendre interopérable, principalement en ce qui concerne le RTE-T I 1 010 T2/2026
Terminaux intermodaux et infrastructure logistique I 802 T2/2026
Transports durables et numériques, y compris ERTMS I 447 T2/2026
Pologne Modification de la loi sur le transport ferroviaire visant à indemniser les gestionnaires de l’infrastructure pour les réductions des redevances d’accès R s.o. T4/2022
Extension du système de péage routier à 1 400 km supplémentaires d’autoroutes et de voies rapides afin de renforcer la compétitivité du secteur ferroviaire R s.o. T1/2023
Augmentation de la capacité de manutention des terminaux opérationnels d’au moins 5 %, sur la base d’une capacité installée de 9,1 millions d’EVP/an (référence 2020) I 175 T2/2026
Modernisation de 478 km de lignes ferroviaires, dont 200 km sur le réseau central RTE-T I 1 731 T2/2026
Déploiement de l’ERTMS: installation de 35 commandes automatiques, mise à niveau de 45 passages à niveau et installation de 180 unités embarquées I 341 T2/2026

1 Le budget de 100 millions d’euros est destiné non seulement aux 100 projets de barrages et d’écluses, mais également à des investissements dans des points de recharge ouverts au public et des voies réservées aux transports en commun.

Source: Cour des comptes européenne.

Annexe II – Liste des projets cofinancés par l’UE sélectionnés aux fins de l’audit

A – Liste des projets cofinancés par le MIE ayant fait l’objet d’une visite et d’un examen au cours de l’audit

État membre Intitulé et description du projet Type de soutien en faveur de l’intermodalité Date de début Date d’achèvement (prévue/réelle1) Coût total éligible prévu/réel (en euros) Taux de cofinancement de l’UE Montant prévu/réel du cofinancement engagé par l’UE (en euros)
Croatie Port of Rijeka multimodal platform development and interconnection to the Adriatic Gate container terminal Infrastructure de terminaux 16.7.2015 31.12.2019

31.12.2020
35 556 000

34 545 179
85 % 30 222 600

29 363 402
Upgrade of the Rijeka Port infrastructure – Zagreb Pier container terminal Infrastructure de terminaux 1.10.2016 31.12.2020

30.9.2022
31 587 125 85 % 26 849 056
Allemagne / Finlande Development of port capacity for integrated Baltic Motorways of the Sea link(s) (Rostock – Hanko) Amélioration de la capacité portuaire (AdM) 7.2.2017 31.12.2019

30.9.2020
21 219 901

19 569 902
22,72 %

22,53 %
4 821 370

4 408 870
France Port of Le Havre – Works for improvement of river access to Port 2000 Amélioration de la capacité portuaire 1.4.2019 30.11.2023

31.12.2024
125 000 000 20 % 24 900 000
Automated combined transport terminal in Calais enabling the modal shift of all types of semi-trailers from road to rail Construction d’un terminal rail-route pour semi-remorques 1.11.2018 31.12.2023 31 219 307 22,47 % 7 015 401
Italie Upgrade of the railway infrastructures of the Port of Trieste Mise à niveau de l’infrastructure ferroviaire dans la zone de manœuvre portuaire 10.4.2018 31.12.2023

31.12.2024
32 700 000 20 % 6 540 000
Pays-Bas Upgrade of the combined transport Rotterdam World Gateway terminal Mise à niveau du terminal de transport combiné Rotterdam World Gateway 25.10.2018 31.12.2022

31.12.2024
27 945 000 20 % 5 589 000
Pologne Improving rail access to the port of Gdańsk Amélioration de l’accès ferroviaire au port 1.9.2016 31.12.2020

31.12.2022
141 509 434

132 774 644
81,75 % 115 683 962

108 543 272
Extension and modernisation of road and railway network in the outer port Amélioration de l’accès rail/route au port 16.2.2016 31.12.2020

30.6.2021
28 765 560 85 % 24 450 726
Espagne Intermodal Logistics Platform in Southwestern Europe (Badajoz) Construction d’un terminal intermodal rail-route 14.4.2014 15.9.2020

15.9.2022
35 766 385

24 244 401
21,18 % 7 576 522

5 272 125

1 Date d’achèvement réelle telle qu’indiquée dans la convention de subvention la plus récente.

Source: Données fournies par la DG MOVE/la CINEA/les autorités de gestion. Analyse réalisée par la Cour.

B – Liste des projets cofinancés par le FEDER/le FC ayant fait l’objet d’une visite et d’un examen au cours de l’audit

État membre Intitulé et description du projet Type de soutien en faveur de l’intermodalité Date de début Date d’achèvement (prévue/réelle) Coût total éligible prévu/réel (en euros) Taux de cofinancement de l’UE Montant prévu/réel du cofinancement engagé par l’UE (en euros)
Italie Construction d’une route de contournement d’environ 6,3 km de long comprenant des tunnels, reliant le port de Salerne au réseau central RTE-T (corridor Scandinavie – Méditerranée) – phase II d’un grand projet Construction d’une route de contournement pour accéder au port de Salerne 27.12.2006 30.6.2019

31.12.2022
60 567 974 75 % 45 425 981
Pologne Modernisation d’une ligne d’accès ferroviaire au port de Gdańsk d’une longueur d’environ 11 km, comprenant notamment la mise à niveau de ponts et de passages à niveau – phase II d’un grand projet Amélioration de l’accès ferroviaire au port 27.10.2015 31.10.2017

30.9.2023
43 810 890

39 682 750
85 % 35 048 712

33 730 388
Modernisation de la route menant au port de Szczecin pour en améliorer l’accessibilité1 Amélioration de l’accès routier au port 23.7.2020 31.3.2023

30.6.2023
42 985 038 85 % 36 537 283
Achat d’équipement intermodal par l’exploitant d’un terminal privé Infrastructure de soutien pour terminaux intermodaux (rail‑route) 23.1.2017 30.9.2019 18 387 568 50 % 9 189 284
Travaux de construction pour la préparation de la zone de stockage; achat et installation de portiques, de grues mobiles et de systèmes de gestion du trafic Infrastructure de soutien pour terminaux intermodaux (rail‑route) 1.10.2019 31.12.2021

31.3.2023
13 801 021 62 % 8 533 357
Espagne Déploiement de la première phase de la zone logistique d’Antequera Construction d’un terminal intermodal et de la zone logistique environnante 1.1.2019 31.12.2022

31.12.2023
41 530 092 63 % 26 174 279

1 Le projet a été jugé important pour l’intermodalité par l’autorité de gestion. La Commission considère qu’il s’agit d’un projet exclusivement routier.

Source: Données fournies par les autorités de gestion. Analyse réalisée par la Cour.

Annexe III – Précédents rapports spéciaux et document d’analyse de la Cour ayant trait au transport intermodal

Document d’analyse n° 09/2018 «Défis à relever pour un secteur européen des transports performant (analyse panoramique)»

Rapport spécial n° 13/2017 «Un système européen de gestion du trafic ferroviaire unique: ce choix politique se concrétisera-t-il un jour?»

Rapport spécial n° 23/2016 «Le transport maritime dans l’UE: un changement de cap s’impose – des investissements en grande partie inefficaces et précaires»

Rapport spécial n° 08/2016 «Le transport ferroviaire de marchandises dans l’UE: toujours pas sur la bonne voie»

Rapport spécial n° 1/2015 «Le transport fluvial en Europe: aucune amélioration significative de la part modale et des conditions de navigabilité depuis 2001»

Rapport spécial n° 3/2013 «Les programmes Marco Polo ont-ils contribué efficacement au transfert du trafic routier vers d’autres modes de transport?»

Rapport spécial n° 8/2010 «Amélioration de la performance des transports sur les axes ferroviaires transeuropéens: les investissements de l’UE en matière d’infrastructures ferroviaires ont-ils été efficaces?»

Annexe IV – Analyse, par la Cour, de quatre procédures d’évaluation de la Commission

Type d’évaluation Base juridique Constatations
Plans nationaux en matière de transports Règlement (UE) n° 1315/2013 L’article 49 du règlement RTE-T impose aux États membres de transmettre leurs plans et programmes nationaux en matière de transports à la Commission pour information.

Toutefois, ils ne le font pas de manière systématique, étant donné que la Commission n’en fait pas activement la demande. Les États membres ne sont par ailleurs pas tenus d’élaborer des plans nationaux en matière de transport ou d’observer une méthodologie commune le cas échéant. Il n’existe donc aucune obligation d’inclure des objectifs concernant le transfert modal. Les six États membres retenus dans l’échantillon ont élaboré une stratégie de ce type. Cependant, nous n’avons relevé aucun élément attestant que la Commission ait formulé des observations spécifiques sur les objectifs de transfert modal énoncés dans ces plans et sur leur alignement sur les objectifs européens.
Plans nationaux en matière d’énergie et de climat Règlement (UE) 2018/1999 L’article 9 du règlement impose aux États membres de soumettre à la Commission un plan national intégré en matière d’énergie et de climat. Les États membres doivent tenir dûment compte des observations de la Commission ou publier les raisons pour lesquelles ils n’y donnent pas suite.

Il n’est pas obligatoire de faire figurer des mesures en matière de transfert modal dans ces plans. Parmi les États membres retenus dans l’échantillon, seule l’Italie a explicitement inclus de telles mesures. Toutefois, l’évaluation du plan par la Commission ne comportait pas d’analyse des résultats escomptés par rapport aux objectifs de l’UE.

La Commission a pris les plans nationaux en considération lors de l’élaboration du scénario de référence qui a servi de base à l’établissement du pacte vert pour l’Europe. Or, ce scénario ne comporte pas de projections spécifiques sur le transport intermodal ou le transfert modal.
Plans pour la reprise et la résilience (voir point 15) Règlement (UE) 2021/241 L’article 18 du règlement RTE-T impose aux États membres de présenter leurs plans pour la reprise et la résilience à la Commission pour évaluation. Lorsque l’évaluation est positive, la Commission élabore une décision d’exécution qui doit être approuvée par le Conseil.

Les États membres ne sont pas tenus d’inclure des objectifs en matière de transport dans leurs plans, mais ceux-ci doivent contribuer à relever l’ensemble ou une partie non négligeable des défis recensés dans les recommandations par pays pertinentes ou dans d’autres documents pertinents (tels que les rapports par pays) adoptés dans le cadre du Semestre européen.

Parmi les États membres dans lesquels nous nous sommes rendus, deux avaient reçu des recommandations par pays relatives au transfert modal (la Pologne en 2019 et l’Espagne en 2020). La Commission a vérifié que les deux États membres avaient inclus les réformes et mesures correspondantes dans leurs plans. Nous avons toutefois observé qu’elle n’a pas formulé d’observations sur le plan allemand, qui n’incluait aucune mesure liée à l’intermodalité, alors que le rapport par pays de 2020 soulignait des faiblesses concernant la navigabilité et l’efficacité du transport sur plusieurs voies navigables intérieures. Ce rapport mettait en exergue le fait qu’un transfert modal efficace de la route vers le rail et les voies navigables intérieures ne pouvait pas être assuré étant donné la part prépondérante de la route dans le transport de marchandises.
Accords de partenariat Règlement (UE) n° 1303/2013 portant dispositions communes Les accords de partenariat constituent la base de l’orientation stratégique des programmes gérés par les États membres dans le cadre de la politique de cohésion. L’article 14 du règlement portant dispositions communes impose aux États membres de transmettre l’accord à la Commission pour approbation. Dans le cadre de cette procédure d’approbation, cette dernière a vérifié l’existence d’un plan national en matière de transports comportant des sections sur les différents modes de transport.

Au cours des négociations avec les États membres pour la période 2014-2020, la Commission a invité tous les États membres retenus dans l’échantillon pour lesquels les investissements dans les transports pouvaient être soutenus principalement par l’intermédiaire du FC (à savoir l’Espagne, la Croatie, l’Italie et la Pologne) à accorder la priorité aux investissements dans le transport durable, y compris l’intermodalité. Nous notons cependant, dans le cas de la Pologne, qu’en dépit de ses observations répétées, la Commission n’a exercé qu’une influence limitée. Les autorités polonaises ont augmenté le financement alloué au rail dans le cadre du programme opérationnel «Infrastructures et environnement», mais il ne représentait encore que la moitié des fonds consacrés aux routes.

Source: Cour des comptes européenne.

Annexe V – Types d’obstacles opérationnels par mode de transport

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Mode de transport Obstacle Description et impact
Rail Absence de normes d’interopérabilité pour les unités de chargement intermodales Les gestionnaires d’infrastructures ferroviaires sont en droit de considérer certains types d’unités de chargement intermodales comme des «transports exceptionnels», ce qui nécessite la mise en place de procédures d’autorisation ad hoc pour utiliser certains tronçons du réseau ferroviaire.
Rail Aucune capacité minimale garantie pour le fret lors de l’attribution et de la gestion des sillons ferroviaires Les gestionnaires d’infrastructures accordent généralement une priorité moindre aux demandes de sillons destinés aux services de fret ferroviaire qu’à celles de sillons destinés aux services de transport de voyageurs. Partant, les capacités pour les services de fret risquent d’être limitées pendant certains créneaux horaires.
Rail Manque de flexibilité dans la réservation des sillons Les sillons ferroviaires peuvent être réservés longtemps à l’avance (environ un an) ou, en cas de nécessité, à brève échéance en soumettant une demande ad hoc. Selon un rapport de la Commission1, la majorité des demandes ad hoc concernent le trafic de marchandises (72 % en 2018). La demande de fret étant très volatile, pour ne pas risquer de se voir attribuer des sillons ad hoc de mauvaise qualité, les entreprises ferroviaires finissent par réserver des sillons à l’avance, pour ensuite les annuler si elles n’en ont pas besoin. L’attribution des sillons n’est donc pas optimale. Les parties prenantes considèrent ce manque de flexibilité dans la planification des services de transport ferroviaire comme un net désavantage par rapport à d’autres modes de transport tels que la route.
Rail Coordination insuffisante de l’attribution des sillons transfrontaliers Malgré l’existence de mécanismes de coordination entre les gestionnaires d’infrastructures, ceux-ci restent responsables de l’attribution d’un sillon donné au sein de leur réseau. Si un train a besoin d’emprunter un sillon ad hoc pour un trajet ferroviaire transfrontalier, par exemple à la suite de perturbations du trafic, il risque de se voir attribuer une série de sillons dont l’enchaînement n’est pas fluide. Les parties prenantes ont souligné que cette situation était récurrente, ce qui obligeait les trains de marchandises à s’arrêter (parfois même pendant des jours) en attendant le prochain sillon disponible pour poursuivre leur trajet. Cela nuit à la fiabilité des services de fret, avec, comme corollaire, que les clients choisissent d’autres solutions pour le transport de leurs marchandises.
Rail Pénalisation disproportionnée des services de fret en raison des calendriers de maintenance Afin de causer le moins de perturbations possible, la grande majorité des opérations de maintenance sur le réseau ferroviaire sont programmées la nuit, alors que la plupart des services ferroviaires de fret sont assurés à ce moment-là, la capacité du réseau étant plus élevée du fait que les trains de voyageurs sont moins fréquents. En conséquence, le fret ferroviaire est beaucoup plus impacté que le transport de passagers par les travaux de maintenance prévus sur le réseau.
Rail Existence de dispositions imposant l’arrêt des trains aux frontières Des dispositions opérationnelles imposent aux trains de s’arrêter aux frontières et de s’adapter à la législation, différente, de l’État membre sur le territoire duquel ils sont sur le point d’entrer. À titre d’exemple, citons la directive 2007/59/CE2 relative à la certification des conducteurs de train, qui impose à ces derniers de posséder des compétences linguistiques de niveau B1 pour chaque pays dans lequel ils conduisent un train. Pour satisfaire à cette exigence, il est fréquent que le conducteur soit remplacé à la frontière, ce qui peut entraîner des annulations de services si le train doit emprunter un itinéraire alternatif dans un État membre autre que celui prévu. Des retards (pouvant aller jusqu’à 25 heures, selon une étude de cas3 de l’Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer sur le corridor de fret ferroviaire n° 7) sont également imputables à d’autres règles nationales, telles que celles relatives aux essais de frein ou à la composition des trains.

Cette situation est à mettre en rapport avec celle du transport routier où, au sein de l’espace Schengen, les transporteurs ne sont pas tenus de s’arrêter aux frontières, sauf en cas de contrôles extraordinaires.
Transport maritime à courte distance Obligations d’information pour les navires, même faisant escale dans des ports à l’intérieur de l’UE Les marchandises qui entrent dans des ports maritimes ou en sortent, même si tous les ports sont situés dans l’UE, sont actuellement soumises à des obligations d’information qui ne sont pas applicables au transport terrestre: notifications d’arrivée, déclaration des marchandises transportées, communications relatives à la sécurité, etc.
Voies navigables intérieures Coordination insuffisante aux écluses Même en l’absence d’horaires officiels et de règles de priorité spécifiques, on observe une tendance croissante, au passage des écluses, à donner la priorité aux navires transportant des passagers par rapport aux navires de fret.

1 Commission Staff Working Document accompanying the Seventh monitoring report on the development of the rail market, SWD(2021) 1, p. 113.

2 Directive 2007/59/CE relative à la certification des conducteurs de train.

3 Agence de l’Union européenne pour les chemins de fer, Full Impact Assessment. TSI OPE Revision, 24.10.2018.

Source: Cour des comptes européenne.

Abréviations et acronymes

CINEA: Agence exécutive européenne pour le climat, les infrastructures et l’environnement

DG MOVE: direction générale de la mobilité et des transports

DG REGIO: direction générale de la politique régionale et urbaine

ERTMS: système européen de gestion du trafic ferroviaire (European Rail Traffic Management System)

EVP: équivalent vingt pieds (unité de mesure des conteneurs)

FC: Fonds de cohésion

FEDER: Fonds européen de développement régional

MIE: mécanisme pour l’interconnexion en Europe

OCDE: Organisation de coopération et de développement économiques

RTE-T: réseau transeuropéen de transport

TFUE: traité sur le fonctionnement de l’Union européenne

Glossaire

Accord de Paris: accord international signé en 2015 pour limiter le réchauffement planétaire à moins de 2 °C, en mettant tout en œuvre pour le limiter à 1,5 °C.

Accord de partenariat: accord conclu entre la Commission et un État membre ou un/des pays tiers, dans le cadre d’un programme de dépenses de l’UE, et établissant par exemple des plans stratégiques, des priorités d’investissement, ou encore les modalités régissant les échanges commerciaux ou l’octroi d’une aide au développement.

Aide d’État: soutien direct ou indirect fourni par les pouvoirs publics à une entreprise ou à une organisation, qui lui confère un avantage par rapport à ses concurrents.

Autorité de gestion: autorité (publique ou privée) nationale, régionale ou locale désignée par un État membre pour gérer un programme financé par l’UE.

Bénéficiaire: personne physique ou morale qui reçoit une subvention ou un prêt financés sur le budget de l’UE.

European Rail Traffic Management System (système européen de gestion du trafic ferroviaire): initiative visant à introduire un ensemble unique de normes à l’échelle de l’UE pour les systèmes de contrôle et de commandement des trains de manière à garantir l’interopérabilité transfrontière.

Évaluation ex post: appréciation indépendante de l’efficacité, de l’efficience, de la cohérence, de la pertinence et de la valeur ajoutée européenne d’un projet ou d’un programme achevé.

Facilité pour la reprise et la résilience: mécanisme de soutien financier de l’UE visant à atténuer les conséquences socio-économiques de la pandémie de COVID-19 et à stimuler la reprise, tout en soutenant la transition écologique et numérique.

Fonds de cohésion: Fonds de l’UE destiné à réduire les disparités économiques et sociales au sein de l’UE en finançant des investissements dans les États membres dont le revenu national brut par habitant est inférieur à 90 % de la moyenne de l’UE.

Fonds européen de développement régional: Fonds de l’UE destiné à renforcer la cohésion économique et sociale au sein de l’Union en finançant des investissements qui réduisent les déséquilibres entre les régions.

Gestion directe: gestion d’un Fonds ou d’un programme de l’UE assurée par la seule Commission. S’oppose à la gestion partagée ou à la gestion indirecte.

Gestion partagée: méthode d’exécution du budget de l’UE selon laquelle, contrairement à ce qui se passe dans la gestion directe, la Commission délègue les tâches d’exécution à un État membre, tout en restant responsable en dernier ressort.

Mécanisme pour l’interconnexion en Europe: instrument d’aide financière pour la création d’infrastructures interconnectées et durables dans les secteurs de l’énergie, des transports ainsi que des technologies de l’information et de la communication.

Opérateur économique: toute personne physique ou morale qui fournit un produit ou un service contre paiement.

Pacte vert pour l’Europe: stratégie de croissance que l’UE a adoptée en 2019 pour parvenir à la neutralité climatique d’ici à 2050.

Principe du pollueur-payeur: principe selon lequel les personnes causant ou susceptibles de causer une pollution supportent le coût des mesures prises pour la prévenir, la combattre ou l’éliminer.

Programme opérationnel: cadre pour la mise en œuvre des projets de cohésion financés par l’UE pour une période donnée, qui tient compte des priorités et des objectifs fixés dans les accords de partenariat conclus entre la Commission et les différents États membres.

Recommandations par pays: orientations que la Commission soumet chaque année au Conseil pour approbation puis adresse aux différents États membres, dans le cadre du Semestre européen, concernant leurs politiques macroéconomiques, budgétaires et structurelles.

Règlement portant dispositions communes: règlement établissant les règles qui s’appliquent à l’ensemble des cinq Fonds structurels et d’investissement européens.

Semestre européen: cycle annuel établissant un cadre pour coordonner les politiques macroéconomiques des États membres de l’UE et suivre les avancées.

Suivi: observation et contrôle systématiques, en partie au moyen d’indicateurs, des progrès accomplis dans la réalisation d’un objectif.

Transfert modal: passage d’un mode de transport à un autre.

Transformation numérique: tendance à l’intégration et à l’utilisation de technologies numériques et d’informations numérisées afin que les processus et les tâches deviennent plus simples, plus rapides, plus efficients et/ou plus économiques.

Équipe d’audit

Les rapports spéciaux de la Cour présentent les résultats de ses audits relatifs aux politiques et programmes de l’Union ou à des questions de gestion concernant des domaines budgétaires spécifiques. La Cour sélectionne et conçoit ces activités d’audit de manière à maximiser leur impact en tenant compte des risques pour la performance ou la conformité, du niveau des recettes ou des dépenses concernées, des évolutions escomptées ainsi que de l’importance politique et de l’intérêt du public.

L’audit de la performance objet du présent rapport a été réalisé par la Chambre II (Investissements en faveur de la cohésion, de la croissance et de l’inclusion), présidée par Annemie Turtelboom, Membre de la Cour. L’audit a été effectué sous la responsabilité d’Annemie Turtelboom, Membre de la Cour, assistée de: Paul Sime, chef de cabinet; Celil Ishik, attaché de cabinet; Marion Colonerus et Niels-Erik Brokopp, managers principaux; Guido Fara, chef de mission; Manja Ernst, cheffe de mission adjointe; Tomasz Kapera, Annabelle Miller et Laurence Szwajkajzer, auditeurs.

De gauche à droite: Marion Colonerus, Paul Sime, Manja Ernst, Tomasz Kapera, Annemie Turtelboom, Guido Fara, Niels-Erik Brokopp, Celil Ishik et Laurence Szwajkajzer.

Notes

1 Eurostat, Nations unies et Forum international des transports de l’OCDE, Glossaire des statistiques de transport, 2019.

2 Commission impact assessment regarding the Combined Transport Directive proposal, document de travail des services de la Commission SWD(2017) 362.

3 Direction générale de la mobilité et des transports (Commission européenne), EU transport in figures. Statistical pocketbook 2021, 2021.

4 Livre blanc de la Commission, COM(2011) 144.

5 Agence européenne pour l’environnement, Greenhouse gas emissions from transport in Europe, 18.11.2021.

6 Agence européenne pour l’environnement, Briefing No 15/2022, Reducing greenhouse gas emissions from heavy-duty vehicles in Europe, 7.9.2022.

7 Communication de la Commission intitulée «Le pacte vert pour l’Europe», COM(2019) 640.

8 Communication de la Commission intitulée «Stratégie de mobilité durable et intelligente», COM(2020) 789.

9 Règlement (UE) n° 1315/2013.

10 Proposition de la Commission de décembre 2021, COM(2021) 812.

11 Proposition de la Commission de juillet 2022, COM(2022) 384.

12 Directive 92/106/CEE du Conseil.

13 Directive (UE) 2022/362.

14 Règlement (UE) n° 2021/241.

15 Rapport spécial n° 3/2013 «Les programmes Marco Polo ont-ils contribué efficacement au transfert du trafic routier vers d’autres modes de transport?».

16 Outil n° 43 «Modalités et indicateurs de suivi» de la boîte à outils de la Commission européenne pour une meilleure réglementation, 2021.

17 Direction générale de la mobilité et des transports (Commission européenne), EU transport in figures. Statistical pocketbook 2021, 2021.

18 Conseil de l’Union européenne, Presidency’s Synthesis of Member States’ views, document 11255/11, 2011.

19 Conseil de l’Union européenne, Conclusions du Conseil sur la stratégie de mobilité durable et intelligente de la Commission, document 8824/21, 2021.

20 Direction générale de la mobilité et des transports (Commission européenne), EU transport in figures. Statistical pocketbook 2021, 2021.

21 Eurostat,Intermodal transport - unitisation in freight transport (tran_im).

22 Article 5 de la directive 92/106/CEE du Conseil.

23 Commission européenne, Analysis of the EU Combined Transport. Final Report, janvier 2015.

24 Commission européenne, communication intitulée «Stratégie de mobilité durable et intelligente», COM(2020) 789.

25 Commission européenne, Analysis of the EU combined transport, 2015.

26 Voir, à titre d’exemple, le rapport de suivi 2021 de la Commission sur le marché ferroviaire.

27 Directive 96/53/CE du Conseil.

28 Règlement (UE) 2020/1055.

29 Commission européenne, REFIT ex-post evaluation of Combined Transport Directive 92/106/EEC, SWD(2016) 140 du 20.4.2016.

30 Article 107 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

31 Rapport spécial n° 24/2016 «Des efforts supplémentaires sont nécessaires pour mieux faire connaître et respecter les règles relatives aux aides d’État dans la politique de cohésion».

32 Articles 56 ter et 56 quater du règlement (UE) n° 651/2014 de la Commission.

33 Règlement (UE) 2022/2586 du Conseil.

34 Article 93 du traité sur le fonctionnement de l’Union européenne.

35 Directive 2012/34/UE et règlement d’exécution (UE) 2177/2017 de la Commission.

36 Condition favorisante n° 3.1, annexe IV du règlement (UE) 2021/1060.

37 Conditions ex ante nos 7.1, 7.2 et 7.3, annexe XI du règlement (UE) n° 1303/2013.

38 Commission européenne, Rapport sur l’état d’avancement de la mise en œuvre du réseau transeuropéen de transport en 2018 et 2019, COM(2021) 818 du 14.12.2021.

39 Déclaration ministérielle de Rotterdam sur les corridors de fret ferroviaire, 14.6.2010.

40 COM(2021) 818.

41 Commission européenne, Comparative evaluation of transhipment technologies for intermodal transport and their cost, 2022.

42 Commission européenne, Study on the Rhine-Alpine TEN-T Core Network Corridor 2020.

43 Commission centrale pour la navigation du Rhin (CCNR) – Observation du marché. Rapport annuel 2022.

44 Projektinformationssystem (PRINS) zum Bundesverkehrswegeplan 2030, W 25 Abladeoptimierung der Fahrinnen am Mittelrhein.

45 Deutsche Bahn, Ausbau- und Neubaustrecke Karlsruhe–Basel, octobre 2022.

46 Voir, entre autres, le rapport spécial n° 08/2016 «Le transport ferroviaire de marchandises dans l’UE: toujours pas sur la bonne voie», le rapport spécial n° 23/2016 «Le transport maritime dans l’UE: un changement de cap s’impose – des investissements en grande partie inefficaces et précaires» et le document d’analyse n° 09/2018 «Défis à relever pour un secteur européen des transports performant (analyse panoramique)».

47 Voir, entre autres, le document d’analyse n° 05/2021 «Le cadre de l’UE relatif aux grands projets d’infrastructures de transport – une comparaison internationale», le rapport spécial 10/2020 «Infrastructures de transport de l’UE: accélérer la mise en œuvre des mégaprojets pour générer l’effet de réseau dans les délais prévus» et le rapport spécial n° 19/2019 «INEA: des avantages certains, mais un MIE à améliorer».

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